Au Cœur Du Temps

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- Cet endroit est génial, chuchota Tama tout en levant les yeux, puis se pencha pour ajouter d'une voix sérieuse, tu devrais garder cette carte... Te connaissant, tu te perdras ici.

Kyoko ne semblait pas l'entendre tandis que son regard se baladait à l'intérieur du hall principal. La salle dans laquelle ils se tenaient avait au moins trois étages, avec des escaliers qui remontaient aux autres étages en formant des spirales. D'un côté, il y avait une énorme bibliothèque, tandis que de l'autre côté, cela avait l'air d'être une aire de loisirs, et en plein milieu, un lustre gigantesque était accroché à la haute voûte.

- Je n'aimerais pas du tout le voir tomber, confirma-t-elle dans le vide en hochant la tête.

Un coin salon avec des meubles luxueux se trouvait en dessous. Il y avait déjà des étudiants debout et occupés à faire des choses, même s'il était très tôt. Elle voulait être là le plus tôt possible, et il était à présent sept heures et demi du matin. Elle s'empressa de regarder à nouveau le papier, se demandant où elle devait aller.

Elle regarda Tama par-dessus son épaule en gémissant et pointa du doigt l'escalier en colimaçon devant eux. Ils avaient quatre valises à eux deux car Kyoko allait emménager, et elles étaient très lourdes.

Le visage de Tama se décomposa.

- Tu plaisantes.

Il lâcha la poignée de la plus grosse valise sachant que cette fois-ci, les roues en dessous ne seraient d'aucune aide.

- Pour l'amour de Dieu, je n'ai que douze ans.

Elle redressa ses épaules avec détermination.

Kyoko fut surprise lorsqu'une voix masculine derrière elle lui demanda :

- Es-tu Mademoiselle Kyoko Hogo ?

- Oui, répondit-elle en se retournant instantanément.

Ses yeux s'élargirent lorsqu'elle tomba nez à nez avec un très bel homme. Il avait des yeux saisissants et d'un bleu glacé, et de longs cheveux bruns attachés en queue de cheval. Alors qu'elle le fixait avec admiration, elle sentit une brise étrange lui caresser le visage. Les pointes de ses doux cheveux au vent chatouillaient ses joues.

Il lui fit un sourire très charmeur. Puis, à la grande surprise de Kyoko, il claqua des doigts et deux hommes arrivèrent de presque nulle part, prirent ses valises et montèrent les escaliers avec elles. Les yeux de Kyoko s'élargirent tandis qu'elle les regardait, mais avant de pouvoir dire quoi que ce soit, l'autre homme avait pris sa main dans la sienne et l'amena à ses lèvres pour l'embrasser tel un prince.

- Mon nom est Kotaro, et je n'aurais pas voulu voir une personne aussi belle que toi porter quoi que ce soit d'aussi lourd. Maintenant, si tu veux bien me suivre, je vais te montrer ton dortoir.

Kotaro se tourna avec assurance en ne lâchant pas sa main et monta les escaliers.

La chaleur soudaine qui parcourait ses doigts et son bras semblait continuer à se répandre dans son corps... réveillant son sang de gardien. C'était son secret à garder. Kotaro serra légèrement la main de Kyoko, il savait qu'elle était celle qu'il avait patiemment attendue. Il l'avait senti au moment où elle avait pénétré dans la pièce.

Kyoko haussa un sourcil délicat en se disant :

- Mon Dieu, épargnez-moi les hommes chevaleresques. Dans quoi suis-je tombée ?

Elle se tourna et haussa les épaules vers Tama qui se tenait là, la bouche grande ouverte. Kyoko pencha sa tête sur le côté et haussa un sourcil.

- Fais attention Tama, tu risques de gober des mouches comme ça.

Puis, avant de pouvoir se reprendre, elle se retourna et suivit la silhouette svelte de l'homme qu'elle ne connaissait que par son prénom, Kotaro.

Elle nota dans sa tête un point pour elle sur son tableau noir imaginaire où elle inscrivait secrètement son score et celui de Tama. Elle l'entendit se vexer derrière elle tandis qu'ils montaient les escaliers et savait à présent qu'elle était en train de gagner.

Ils croisèrent un autre homme qui descendait les escaliers, et alors qu'il passa près d'elle sans même la regarder, elle sentit un éclair traverser son cœur et sa respiration se coupa. Tous les sons disparurent alors qu'ils se croisèrent presque au ralenti. Puis, tout revint à la normale alors que son cœur manqua un battement et accéléra.

Un sentiment de malaise se glissa à travers sa peau comme si elle avait manqué quelque chose... ou plutôt comme si elle avait perdu quelque chose et qu'il lui manquait terriblement. En essayant de se débarrasser de cette réaction étrange, elle ne s'était même pas retournée pour voir celui qu'elle avait croisé, sentant à cet instant que c'était mieux de ne pas savoir.

- Eh bien, au moins, il y a assez d'hommes dans le coin pour te faire baver d'admiration, chuchota Tama, ce qui fit grogner Kyoko intérieurement.

Elle se tourna en haut des marches, suivant Kotaro le long d'un grand couloir avec de nombreuses portes des deux côtés. Elle supposait que c'était les chambres du dortoir, mais il ne ralentit ou ne s'arrêta à aucun moment devant l'une d'entre elles. Au bout du couloir, il y avait écrit sur des portes « NE PAS ENTRER ». Elle fut quelque peu perplexe lorsque Kotaro et les deux hommes portant ses bagages passèrent les portes avec élégance comme s'ils étaient à leur place, uniquement pour se tourner vers un autre escalier.

Tama se rapprocha de Kyoko et la nargua :

- Je pense qu'ils t'envoient au cachot.

Kyoko lui sourit d'un air suffisant par-dessus son épaule.

- On est en train de monter, pas descendre, crétin

- Une chambre froide et vide tout en haut de la tour alors.

Tama lui donna un petit coup derrière la tête.

- Eh bien, au moins, je garderai la forme, se dit-elle en atteignant le sommet d'un autre escalier élégant.

Puis, ils se tournèrent vers un autre couloir, mais celui-ci était beau. Le sol avait même l'air d'être en marbre. Les portes étaient très éloignées. Il n'y avait que trois chambres dans ce couloir, et Kyoko s'inquiétait en se disant qu'après tout, Kotaro ne savait peut-être pas où elle devait aller.

Kotaro marcha vers la dernière porte en se disant qu'elle devait être quelqu'un de spécial car peu de personnes avaient le droit d'entrer dans ce couloir, et il savait que c'était la meilleure chambre de tout le campus. Il arriva devant la porte et attendit Kyoko et son jeune ami.

Kotaro sourit d'un air satisfait, elle était nerveuse. Il pouvait le sentir. Il regarda ses yeux émeraudes tumultueux et sentit déjà son cœur vaciller, mais pour l'instant, il ferait ce qu'on lui avait ordonné.

Il tendit sa main, la paume vers le haut.

- À présent, je vais prendre congé, mais si tu as besoin de quoi que ce soit...

Il lui remit la clé de la chambre et lui lança un regard qui la fit rougir. Il fit une révérence avec courtoisie, puis fit signe aux deux hommes de le suivre.

Kyoko et Tama se retournèrent tous les deux et les regardèrent avec un haussement de sourcils jusqu'à ce qu'ils soient hors de vue. Puis, Kyoko jeta à nouveau un coup d’œil à la porte et haleta. Juste là, sur la porte, on pouvait lire sur une plaque le nom de Kyoko Hogo écrit en lettres d'or.

Tama fit une petite tape sur l'épaule de sa sœur en ricanant.

- Tu sais... Tu risques de gober des mouches comme ça.

Kyoko leva les yeux au ciel en effaçant mentalement le point qu'elle s'était donné plus tôt. Avec la clé, elle déverrouilla la porte et l'ouvrit timidement, jetant un coup d’œil à l'intérieur.

Les yeux de Tama devinrent aussi gros que des soucoupes et il lui passa devant.

- Impossible ! Cette chambre fait presque la taille de notre maison toute entière.

Sa voix pleine d'admiration résonnait dans le silence.

- Tu pourrais ouvrir un fichu cabaret dans cette baraque.

- Alors, tu aimes mon cachot ?

Kyoko remit le point à sa place.

*****

Deux heures plus tard, après avoir remercié Tama et l'avoir renvoyé chez lui, Kyoko se trouvait dans la salle de bain, mettant ses affaires sur les étagères. Elle jeta à nouveau un coup d’œil à la baignoire qui était assez grande pour cinq personnes.

Elle imita son petit frère en gémissant :

- Impossible !

Elle pouvait sentir les poils sur sa nuque se dresser alors qu'elle se demandait encore si tout cela n'était pas une erreur.

- Ouais, chuchota-t-elle à elle-même.

Quelqu'un viendrait d'une minute à l'autre pour lui dire de remballer ses affaires. Elle savait juste qu'elle devait être dans la mauvaise chambre.

Kyoko revint en arrière et regarda autour d'elle dans la chambre à coucher. Le lit était le plus grand lit qu'elle avait jamais vu et était déjà tout fait, avec un édredon doux et tout. La pièce était belle, ses légers tons bleus et pourpres étaient en accord avec le tapis à longs poils et le lit. Il y avait des touches de rouge foncé ici et là, et une penderie assez grande pour se perdre dedans.

Elle entra dans le salon où tout était noir et or, il était équipé de tout ce dont une personne pourrait rêver. Elle avait déjà vérifié la cuisine. Elle était complètement remplie. Kyoko secoua la tête pour la énième fois.

- Impossible.

Elle mordilla sa lèvre inférieure en se demandant quoi faire. On était samedi matin et les cours ne commençaient pas avant lundi.

- Bon, je ne peux pas rester cachée ici toute la journée, marmonna-t-elle.

 

Ayant l'impression de s'introduire en douce là où elle n'était pas censée aller, Kyoko se dirigea vers la porte et faufila sa tête dans le couloir. Ne voyant personne, elle sortit et ferma la porte derrière elle, puis marcha discrètement vers les escaliers menant en bas.

Elle avait encore l'impression d'être observée et cela lui faisait froid dans le dos, mais elle continua de marcher, n'osant pas se retourner pour voir.

- Elle peut me sentir, se dit Kyou.

Peut-être que ses pouvoirs n'étaient pas enterrés aussi profondément qu'il le craignait. Il savait exactement à quel moment elle avait quitté sa chambre, et il inhalait l'odeur persistante... en la savourant.

Le souvenir de son odeur semblait rafraîchir d'autres souvenirs.

- Bientôt, prêtresse, nous dévoilerons à nouveau tes pouvoirs. Tu peux choisir de les cacher... Mais pas pour longtemps.

Il se pencha contre le mur dans le couloir, ses yeux dorés la suivant du regard jusqu'à ce qu'elle fût hors de vue.

*****

Une fois au rez-de-chaussée, Kyoko pouvait respirer un peu plus facilement. Elle remarqua qu'il était maintenant rempli de personnes de son âge. Soupirant et se débarrassant de toute l'étrangeté se trouvant à l'étage, Kyoko se tenait là, perdue dans ses pensées pendant un long moment.

Elle ne pouvait pas le supporter lorsque ses sens s'illuminaient de cette façon. Parfois, elle souhaitait ne pas pouvoir ressentir quoi que ce soit. Elle les repoussa dans les confins de son esprit tout en fixant le grand rez-de-chaussée du bâtiment.

- J'ai besoin d'un interrupteur pour ce truc, marmonna-t-elle en pensant encore aux ondes étranges qu'elle percevait juste avant.

Elle jeta un coup d’œil à la bibliothèque, puis dirigea rapidement son regard vers l'autre côté, décidant qu'elle voulait d'abord en savoir plus sur cet endroit. Elle avait l'habitude de faire de l'exercice depuis toujours, et elle voulait la garder. Ces deux dernières années, elle avait pratiqué des arts martiaux de toutes sortes, et elle adorait la liberté de mouvement que cela donnait à son corps souple.

En traversant les salles de loisirs, elle remarqua plusieurs espaces d'entraînement. Dans l'une des plus grandes salles, elle pouvait voir à travers la vitre. Elle ne pouvait pas s'empêcher de s'arrêter et de les regarder un instant. Deux personnes avaient l'air de se battre à l'épée. Elle sourcilla en entendant le cliquetis du métal contre le métal. En s'approchant de la porte de la salle, elle écouta attentivement.

- Tu n'es pas attentive, Suki.

La personne habillée en noir parlait avec une voix virile et moqueuse tandis qu'elle paraît et tapait l'autre personne sur les fesses en riant.

Kyoko ne pouvait pas voir leur visage car elles portaient un équipement de protection.

- Shinbe !

C'était une voix très contrariée mais féminine. Puis, sans crier gare, la personne se jeta en avant et lui tapa sur la tête, ou plus précisément, lui frappa la tête avec l'épée d'escrime et retira brusquement son casque de protection.

Kyoko fut surprise de voir de longs cheveux bruns se dévoiler le long du dos de la fille alors qu'elle marchait vers l'autre personne et lui donna un coup sur le torse avec son doigt, un sourcil tremblant.

- C'est difficile de se battre sérieusement avec un lourdaud tel que toi.

Shinbe retira son casque en souriant. Il leva ses mains en l'air en reculant, comme s'il se rendait. - Je suis désolé Suki, mais elles étaient là... et tu ne les protégeais pas.

Ayant une sensation de picotement le long de sa peau, il fronça les sourcils et tourna lentement son regard d'améthyste vers la fille qui se tenait dans l'embrasure de la porte.

- Hum, il semblerait qu'on ait une visiteuse.

Kyoko observait tandis que la fille nommée Suki rougissait en lançant toujours un regard furieux à son adversaire, puis tourna la tête en marchant vers Kyoko avec un grand sourire.

- Les hommes.

Elle leva les yeux au ciel avant de tendre sa main de manière amicale.

- Bonjour, je m'appelle Suki, et ce pauvre type, c'est Shinbe.

Elle pointa son pouce vers celui qui marchait derrière elle, toujours souriant.

- Suki, s'exclama le jeune homme nommé Shinbe. Tu me blesses profondément.

Il accentua sa phrase en posant ses mains sur son cœur. Suki le regarda en fronçant les sourcils.

- Shinbe... Si je pouvais te blesser, ton cerveau serait déjà en train de sortir par tes oreilles avec tous les coups que tu m'as forcée à te donner.

Shinbe remua ses sourcils.

- Tu sais que j'aime l'amour vache que tu me donnes.

- Une minute, je vais t'en donner de l'amour vache, mais je ne veux pas faire peur à la nouvelle, rétorqua Suki.

Kyoko l'aimait déjà, elle sourit en serrant sa main fermement.

- Bonjour, je m'appelle Kyoko Hogo, mais Kyoko suffira.

Elle fixa l'individu se tenant derrière Suki.

- C'est un plaisir de vous rencontrer tous les deux.

Il y avait quelque chose dans ses yeux qui attirait l'attention de Kyoko. Ses yeux d'une couleur similaire à l'améthyste étaient incroyables et vraiment époustouflants. Ses cheveux dépassaient légèrement ses épaules et étaient noirs avec des reflets bleus. Il lui faisait penser à un chanteur d'un de ces groupes de rock des années 80.

Suki sourit de toutes ses dents.

- Hé, j'ai entendu parler de toi. Ouais, je savais que tu viendrais aujourd'hui. J'allais venir te chercher sous peu et te montrer les environs.

Soudain, son visage devint tendu et elle tourna sa tête sur le côté, clouant Shinbe avec un regard de travers.

- Je ne ferais pas ça si j'étais toi.

Kyoko pencha sa tête pour regarder. Effectivement... la main du type s'était arrêtée en plein vol, touchant presque les fesses de Suki, et il souriait avec un air innocent.

Shinbe soupira et laissa retomber sa main.

- Un jour, je découvrirai comment tu fais pour savoir, même en ayant le dos tourné.

Suki grogna simplement.

- Je sais, c'est tout ! Dit-elle tout en faisant un sourire amical à Kyoko. Viens avec moi, je vais me changer rapidement.

Elle attrapa Kyoko par la main et l'emmena à l'extérieur de la pièce.

Kyoko fixa à nouveau Shinbe pour le voir faire signe de la main.

- Je vais m'amuser comme une folle avec ces deux-là, se dit-elle alors qu'elle se faisait entraîner dans le vestiaire des femmes.

Suki pouvait déjà sentir qu'elle aimait Kyoko, et pour une raison inexpliquée, elle avait l'impression de la connaître sans jamais l'avoir rencontrée.

- Kyoko, parle-moi un peu de toi pendant que je me change, dit-elle en allant derrière la paroi de séparation.

Kyoko s'assit sur un banc en se sentant parfaitement à l'aise avec Suki.

- Eh bien, je viens d'un petit village de l'autre côté de la ville. Et pour une raison qui m'échappe, sans que je m'y attende, j'ai reçu une lettre indiquant que j'avais une bourse ici.

Kyoko pouvait entendre le « ouais » de Suki, alors elle poursuivit :

- Je ne sais vraiment pas comment j'ai fait pour recevoir une bourse d'une école où je n'ai même pas postulé.

Suki pouvait sentir l'interrogation dans cette déclaration et sourit en sortant sa tête dans le coin. - Ne t'inquiète pas pour ça. Tu es arrivée de la même manière que moi.

Elle disparut à nouveau derrière la paroi en ajoutant :

- Moi non plus, je n'ai jamais postulé ici.

Kyoko fronça les sourcils.

- Mais pourquoi ? Il doit bien y avoir une raison. Tu la connais ?

Suki revint de l'autre côté, complètement changée. Elle s'assit pour mettre sa paire de tennis. - Ouais, j'ai fini par comprendre. Enfin, en partie du moins. L'homme qui possède cette école cherche des gens qui ont...

Suki marqua une pause en penchant légèrement la tête.

- ...Des capacités uniques.

Elle haussa les épaules en ajoutant :

- Tu vas devoir t'habituer à beaucoup de choses quand tu vas commencer à rencontrer ceux qui vivent ici.

Elle sourit en sachant qu'elle avait raison.

Soudain, Suki se leva et jeta une chaussure sur la porte du vestiaire, souriant d'un air triomphant lorsqu'elle entendit une légère injure derrière la porte. Elle récupéra la chaussure et se rassit pour l'enfiler.

- Alors, quelle est ta capacité unique ?

La respiration de Kyoko semblait se bloquer alors que son esprit s'agitait. Personne ici ne pouvait savoir qu'elle était une prêtresse. Elle observa Suki d'un air coupable en fronçant les sourcils et détourna rapidement le regard en répondant :

- Aucune à ma connaissance.

Suki sourcilla mais haussa les épaules en sachant que tôt ou tard, elle découvrirait la vérité. - Allez, on y va. Shinbe nous attend probablement de toute façon.

Elle ouvrit la porte, et effectivement, Shinbe se tenait là, assez proche de la porte pour avoir tout entendu. Il leur sourit innocemment tout en reculant.

Suki ferma la porte derrière elles et pointa du doigt l'écriteau sur la porte.

- Shinbe, tu ne sais pas lire ? C'est écrit « Vestiaire des Femmes ».

Elle le regarda de manière acerbe. Shinbe haussa les épaules.

- Oui, c'est pourquoi je me tenais à côté.

Il s'écarta rapidement en bondissant lorsqu'elle leva sa main vers lui.

- Suki... Je suis un homme... J'ai besoin d'affection. Quel meilleur moyen de l'obtenir que comprendre le fonctionnement de l'esprit féminin ?

- Tu peux faire des recherches à la bibliothèque, répondit Suki en serrant les dents.

Shinbe sourit.

- Ma chère Suki, chaque livre concernant l'esprit féminin dans cette bibliothèque... est vide.

Suki sourit à son tour.

- C'est parce que tous les auteurs de ces livres dans la bibliothèque sont des hommes.

Shinbe se pencha vers elle un peu plus près en haussant les sourcils.

- Exactement. Je prévois d'être le premier à en écrire un qui aura du sens pour ceux d'entre nous ayant de la testostérone.

Suki lança un regard vaincu à Kyoko puis jeta un coup d'œil à sa montre.

- Hé, t'as faim ? Allons d'abord manger à la cafétéria.

Kyoko hocha la tête. Elle avait été trop nerveuse pour manger ce matin, mais avec eux, elle se sentait comme à la maison et mourrait de faim.

Shinbe tendit la main devant lui.

- Les femmes d'abord.

Il glapit lorsque Suki lui donna à nouveau un grand coup sur la tête.

- Je n'ai pas été trop lente cette fois, n'est-ce pas... Maintenant, ouvre la marche, lui lança Suki avec un regard accusateur.

Une fois que Shinbe marchait devant elles à distance suffisante, elle se rapprocha de Kyoko avec un sourire entendu.

- Rappelle-toi de toujours le garder devant toi, sauf si tu veux être palpée.

Kyoko ne pouvait pas s'en empêcher. Elle commença à rire et ne s'arrêta pas avant d'être à l'entrée de la cafétéria intégrée qui, selon elle, ressemblait plus à un petit restaurant. Ses yeux s'élargirent en s'approchant de Suki.

- Tu sais, à chaque fois que je retourne ici, j'ai l'impression de ne pas être au bon endroit.

Shinbe les amena à une table vers le fond de la pièce. Suki et Kyoko glissèrent sur un banc tandis que Shinbe s'assit de l'autre côté en ayant l'air d'être l'homme le plus innocent du monde.

- Tu sais, il faut beaucoup de temps pour s'habituer à cet endroit.

Il sourit à Kyoko, ses yeux d'une couleur similaire à l'améthyste s'illuminèrent.

- Je suis là depuis un an et je n'y suis toujours pas habitué.

Suki donna une petite tape sur l'épaule de Kyoko.

- Il est arrivé de la même manière que toi et moi. Une invitation ouverte.

Elle haussa les épaules comme pour dire à Kyoko de l'accepter et d'en profiter. Kyoko se pencha en avant avec un air confus.

- Je ne comprends pas. Pourquoi quelqu'un ferait ça ?

Shinbe hocha la tête en sachant que quelqu'un devait lui dire la vérité.

- J'ai certaines capacités, tout comme Suki.

Il haussa les épaules en lui faisant un clin d’œil.

 

- C'est le cas de tout ceux qui ont une bourse.

Il marqua une pause en cherchant le bon mot.

- On est doués d'une manière ou d'une autre.

Il sourcilla en regardant Suki.

- Tu lui as déjà dit ?

Suki fit rapidement non de la tête puis se tourna soudainement vers Kyoko en voulant changer de sujet.

- Hé, tu veux un hamburger avec des frites ?

Kyoko hocha la tête et Suki se leva comme pour éviter la question des bourses gratuites.

- Reste ici, je reviens, et ne t'en fais pas. La nourriture est gratuite pour ceux qui ont une bourse, ils l'amènent même jusqu'à nous.

Suki alla passer commande, la laissant seule avec Shinbe.

Chapitre 3 « La rencontre avec Toya »

Shinbe se pencha en avant avec un air sérieux, ses yeux d'améthyste rayonnaient presque,

- Il y a des gens normaux ici, et il y a ceux qui ont des bourses comme Suki et moi. Il y en a d'autres qui ont une bourse, mais nous avons tous une sorte de capacité spéciale... comme un pouvoir qu'une personne normale n'a pas. Le mien, c'est la Télékinésie. Je peux faire bouger des objets avec mon esprit. Et la télépathie, ce qui veut dire que je peux parler aux autres par la pensée. »

Il prononçait ces mots sans faire un bruit, sachant qu'elle pouvait l'entendre dans son propre esprit.

Les lèvres de Kyoko s'écartèrent en ne voyant pas les lèvres de Shinbe bouger et en entendant sa voix résonner dans sa tête. Elle sentit soudainement de la chaleur partout, comme si sa voix était censée être là ou... quelque chose comme cela. Son visage se relaxa et ses yeux s'adoucirent tandis qu'elle le fixait.

Shinbe tentait de dissimuler son froncement de sourcils curieux... Lorsqu'il avait lié son esprit au sien à ce moment même... cela lui avait demandé toute sa concentration, rien que pour mettre un terme à la connexion. C'était comme si son pouvoir voulait rester avec elle. Il poursuivit, essayant de se débarrasser de cette impression :

- Je peux aussi jeter des sorts et je descends d'une longue lignée de moines.

Il s'arrêta lorsque Kyoko éclata de rire. Suki se glissa derrière Kyoko sans perdre une miette de la discussion.

- Je sais que c'est difficile à croire, mais il descend vraiment d'une lignée de moines.

Elle sourit, puis son air redevint sérieux,

- Je l'ai vu jeter des choses sans même les toucher, et il est bon dans toutes sortes d'arts martiaux.

- Peut-être que l'on devrait informer la charmante Kyoko de tous mes talents, dit Shinbe d'une manière suggestive.

Suki se tourna et lança un regard furieux à Shinbe.

- Non, je ne lui dirai pas que tu es doué pour ÇA !

Elle lui donna une tape sur la tête pour faire bonne mesure.

- Et pourtant, il agit comme un simple être humain.

Une voix sarcastique arriva de nulle part et Shinbe se redressa, se décalant pour laisser de la place à la voix.

Kyoko jeta un coup d’œil et ses yeux entrèrent en contact avec des yeux d'un doré profond. Elle n'avait jamais vu quelqu'un d'aussi beau que le propriétaire de cette voix. Il avait de longs cheveux noirs avec des reflets argentés en longues couches superposées. Sa peau dorée semblait briller d'un bel éclat et son corps était à tomber. Toutefois, ses yeux semblaient la tenir en otage même s'il ne la regardait pas directement.

Suki soupira et croisa ses bras sur sa poitrine en lançant un regard très énervé au nouveau venu. - Super, tu es tout ce qui pourrait la faire fuir.

Shinbe sourit à Suki, puis jeta un coup d’œil à Kyoko pour faire les présentations.

- Voici Toya, Toya, je te présente Kyoko. C'est son premier jour ici.

Toya se tourna pour observer Kyoko, et pour une raison inexpliquée, sa façon de la regarder comme s'il la jaugeait agaça Kyoko. Elle plissa ses yeux en le regardant, la première impression qu'elle avait eu de lui s'effondrait.

- Alors, c'est toi la prêtresse ? Soupira Toya puis tourna sa tête comme s'il la congédiait en s'asseyant.

Les yeux de Kyoko s'arrondirent et elle haleta. Personne ici ne savait qu'elle était une prêtresse. D'ailleurs, seuls les membres de sa famille proche le savaient.

- Comment diable es-tu au courant ? lui cria-t-elle dessus, tout à coup furieuse.

Toya tressaillit en sentant son sang faire un pic.

- Bon sang, ne crie pas comme une foutue maniaque. Je t'entends très bien, ronchonna-t-il contre elle.

Suki et Shinbe grimaçaient tous les deux et se reculaient sur leur chaise tandis que Kyoko et Toya se poignardaient du regard.

Les sens de Toya commencèrent à capter le pouvoir en cascade qui émanait de la colère de Kyoko, et il se crispa en se disant qu'elle avait peut-être un peu de pouvoir dans ce joli petit corps, même s'il serait maudit s'il le lui disait.

Il évalua silencieusement son apparence. Ses cheveux auburn miroitaient à la lumière autour d'un beau visage en forme de cœur. Elle avait des yeux d'un vert vibrant qui le fixaient à présent avec colère, ce qui réchauffa légèrement son sang. Il aimait les femmes avec du cran et elle en avait clairement, mais pour une raison mystérieuse, cela le mettait à vif. Ce qu'il n'aimait pas, c'était la façon dont elle le regardait... Il arrangerait cela très rapidement.

Il lui lança un regard encore plus furieux, essayant de l'intimider.

- Tu as une bourse, n'est-ce pas... et IL a dit que tu étais une PRÊTRESSE !

Toya grogna devant son visage, s'approchant un peu plus à chaque mot prononcé jusqu'à ce qu'ils soient nez à nez. Il remit ses manches amples sur ses bras et lui soupira :

- Je parie que tu ne sais même pas ce que c'est qu'un démon.

Il grommela, réalisant soudainement qu'elle devenait de plus en plus mignonne à chaque seconde, et cela l'agaçait.

Kyoko tressaillit, sa colère montant en flèche. Elle savait ce qu'étaient des démons. Elle les avait étudiés toute sa vie, et si sa famille avait raison, elle en avait même rencontré... mais elle n'arrivait pas à s'en souvenir. Malgré tout, elle n'aimait pas l'attitude hautaine et imposante de Toya, alors elle haussa simplement les sourcils comme si elle lui demandait silencieusement s'il voulait parier là-dessus.

Suki avait l'air de vouloir prendre la défense de Kyoko.

- Toya, est-ce que tu peux être civilisé rien qu'une minute ? Elle n'est là que depuis quelques heures, et avant que tu la fasses fuir, j'aimerais la convaincre de rester.

Elle avait presque l'air triste à l'idée de perdre Kyoko si vite. Toya sourcilla d'un air agacé en jetant un coup d’œil à Suki.

- Eh bien, elle n'a même pas répondu à ma question. Tu penses qu'elle peut le supporter ?

Il tourna à nouveau son regard furieux vers Kyoko.

- Je peux supporter tout ce que tu comptes m'envoyer à la figure, petit con, l'informa Kyoko, ses mots commençant à se glacer.

Suki et Shinbe se jetèrent un coup d’œil mutuellement. Ils n'avaient jamais entendu qui que ce soit, à part eux-mêmes et le propriétaire de l'université, tenir tête à Toya comme cela, peut-être à l'exception de Kotaro. Puis, ils sourirent tous les deux en coin, sachant qu'ils allaient vraiment aimer cette fille nommée Kyoko.

Un serveur vint à leur table avec un plateau-repas, et Kyoko porta son attention sur lui. L'individu fixait Kyoko un peu trop longtemps, et ses sens commencèrent à picoter, l'avertissant qu'il se passait quelque chose. Elle regarda ses yeux noirs qui ne semblaient pas aller avec le visage juvénile du jeune homme.

Quelque chose en lui attirait Kyoko... même si elle ne savait pas si elle aimait vraiment ce sentiment. Certes, il était mignon à regarder, mais quelque chose en lui la rendait légèrement inquiète. Elle cligna des yeux en cherchant à se débarrasser du sort que le jeune homme semblait émettre sans même essayer. En fin de compte, l'ambiance se brisa lorsqu'elle entendit un faible grognement derrière elle.

Toya sentit la froideur ramper dans sa peau et grogna sur l'individu, cherchant à le sortir de son état d'hébétude. Alors que les yeux du garçon se focalisèrent à nouveau sur ceux de Toya, ils avaient l'air de chatoyer du noir de jais au bleu argenté tandis qu'il se tournait et quittait la table.