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Histoire littéraire d'Italie (1

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Le même poëte prend un tour à peu près semblable, et qui n'est pas moins vif, pour se venger apparemment de mauvaises réceptions qui lui avaient été faites dans quelques provinces, et montrer sa satisfaction du bon accueil qu'il avait reçu dans d'autres. Il était monté au ciel pour parler à Saint-Michel, qui l'avait mandé; il entendit Saint-Julien qui se plaignait à Dieu d'avoir été dépouillé de son fief et de tous ses droits. Autrefois quiconque voulait avoir bon gîte lui adressait le matin sa prière; mais avec les méchants seigneurs qui vivent à présent il ne reçoit plus de prière ni le matin ni le soir. Ils refusent l'hospitalité à tout le monde, ou laissent partir à jeûn le matin ceux à qui ils donnent à coucher; il est pourtant encore assez content des Toulousains, des Carcassonnois, des Albigeois; il n'a ni à se plaindre ni à se louer de quelques autres; enfin Saint-Julien, patron de l'hospitalité, distribue la louange ou le blâme selon que le poëte a été bien ou mal reçu.

Folquet de Lunel 495, poëte très-dévot, fait, au nom du Père glorieux qui forma l'homme à son image, une satire générale des mœurs de tous les états, depuis l'empereur jusqu'aux aubergistes de village. «L'empereur, dit-il, exerce des injustices contre les rois, les rois contre les comtes; les comtes dépouillent les barons, ceux-ci leurs vassaux et leurs paysans. Les laboureurs, les bergers font à leur tour d'autres injustices. Les gens de journée ne gagnent point l'argent qu'ils exigent. Les médecins tuent au lieu de guérir, et ne s'en font pas moins payer. Les marchands, les artisans sont menteurs et voleurs, etc.».

Dans une autre satire ou sirvente satirique, Marcabres 496 s'en prend aux seigneurs, aux barons, à leurs femmes, aux Troubadours, à tout le monde, à qui il reproche une horrible corruption de mœurs. On y trouve cette image gigantesque, mais singulière. «Le monde est couvert d'un gros arbre touffu qui s'est étendu si prodigieusement qu'il embrasse tout l'Univers. Il a jeté de si profondes racines qu'il est impossible de l'abattre. Cet arbre est la méchanceté. Pour peu qu'on y touche ceux qui devraient protéger la vertu jettent les hauts cris. Comtes, rois, amiraux, princes, sont pendus à cet arbre par le lien de l'avarice, si fort qu'on ne saurait les détacher».

Le clergé était alors dans toute sa puissance, et il en abusait. Les Troubadours ne l'épargnaient pas; quelques uns même lui prodiguaient des injures violentes et grossières. «Ah! faux clergé, lui dit Bertrand Carbonel 497, traître, menteur, parjure, voleur, débauché, mécréant, tu commets chaque jour tant de désordres publics que le monde est dans le trouble et la confusion. Saint-Pierre n'eut jamais rentes, châteaux ni domaines; jamais il ne prononça d'excommunications ou d'interdits. Vous ne faites pas de même, vous qui pour l'or excommuniez sans raison, etc. Que le Saint-Esprit qui prit chair humaine écoute mes vœux, dit Guillaume Figuiera 498, et qu'il te brise le bec, Rome; je ne puis comprendre combien tu es fourbe envers nous et envers les Grecs. Rome, tu traînes avec toi les aveugles dans le précipice; tu franchis les bornes que Dieu t'a données, car tu absous les péchés à prix d'argent, et tu te charges d'un fardeau plus fort qu'il ne t'appartient… Dieu te confonde, Rome…! Rome de mauvaises mœurs et de mauvaise foi, etc.».

Pierre Cardinal, l'un des censeurs les plus âpres de mœurs de son siècle 499, n'a pas épargné les prêtres et les moines dans ses satires. «Indulgences, pardons, Dieu et le diable, ils mettent, dit-il, tout en usage. À ceux-là, ils accordent le paradis par leurs pardons; ils envoyent ceux-ci en enfer par leurs excommunications; ils portent des coups qu'on ne peut pas parer, et nul ne sait si bien forger des tromperies qu'ils ne le trompent encore mieux». Et plus loin: «Il n'est point de vautour qui évente de si loin une charogne que les gens d'église et les prédicateurs sentent un homme riche. Aussitôt ils en font leur ami; et quand il lui survient une maladie, ils lui font faire une donation qui dépouille ses parents… Vous les voyez sortir tête levée des mauvais lieux pour aller à l'autel. Rois, empereurs, ducs, comtes et chevaliers avaient coutume de gouverner les états; les clercs ont usurpé sur eux cette autorité, soit à force ouverte, soit par leur hypocrisie et leurs prédications, etc.».

Mais ce n'était pas seulement sur le clergé que la liberté des Troubadours s'exerçait; elle n'épargnait pas les objets les plus sacrés; et dans ce siècle où la religion avait tant d'empire sur les opinions et si peu sur les mœurs, où elle armait les croyants contre les incrédules, et même contre les croyants quand l'intérêt temporel de ses chefs le voulait ainsi, elle n'était guère plus respectée des poëtes dans leurs vers, que des moines dans leur conduite. C'était pour eux, même dans leurs poésies amoureuses, un sujet de figures, d'apostrophes ou de comparaisons comme les autres, et dont ils usaient tout aussi librement.

L'un compare un baiser de sa dame 500 aux plus douces joies du Paradis; l'autre abandonnerait sans façon sa part de ce lieu de délices pour les faveurs de la sienne; un troisième 501, si Dieu le laisse jouir de son amour, croira que le Paradis est privé de liesse et de joie; un autre, quand il est auprès de sa maîtresse, fait le signe de la croix, tant il est émerveillé de la voir 502; un autre encore assure que, s'il obtient le bonheur qu'il désire, il éprouvera ce que dit la Bible, qu'en bonne aventure un jour vaut bien cent, allusion très-profane à des paroles du psalmiste 503; un autre enfin se croit en amour l'égal des grands et des rois: ces vaines distinctions de rang disparaissent, dit-il, devant Dieu, qui ne juge que les cœurs; puis s'adressant à sa dame: «O parfaite image de la Divinité, que n'imitez-vous votre modèle 504»! Plusieurs, lorsqu'ils sont guéris de leur passion pour une femme mariée, ne croient pouvoir la quitter qu'en se faisant délier de leurs serments par un prêtre, et le prêtre vient très-sérieusement les dispenser de l'adultère 505; d'autres, maltraités par leur dame, font dire des messes, brûler des cierges et des lampes pour se la rendre favorable 506.

 

Dans des sujets plus graves, l'un 507, regrettant un Troubadour 508 que la mort vient d'enlever, dit que Dieu l'a pris pour son usage. Si la Vierge aime les gens courtois, ajoute-t-il, qu'elle prenne celui-là. L'autre 509, ayant perdu sa maîtresse, dit qu'il ne prie pas Dieu de la recevoir dans son Paradis; sans elle, le Paradis lui paraîtrait mal meublé de courtoisie. Raimond de Castelnau, dans une satire dirigée principalement contre les moines, dit que «si Dieu sauve, pour bien manger et avoir des femmes, les moines noirs, les moines blancs, les templiers, les hospitaliers et les chanoines auront le Paradis, et que S. Pierre et S. Paul sont bien dupes d'avoir tant souffert de tourments pour un Paradis qui coûte si peu aux autres 510». Dans une pièce dévote consacrée à la Vierge, Peyre, ou Pierre de Corbian, affirme que tous les chrétiens savent et croient ce que l'ange lui dit quand elle reçut par l'oreille Dieu qu'elle enfanta vierge 511. Il compare la merveille de son enfantement à l'action du soleil, dont la lumière traverse le verre sans le corrompre, comparaison qui a été répétée par d'autres poëtes, et même, je crois, par des docteurs. Peyre Cardinal tient un plaidoyer tout prêt pour le jour du jugement, en cas que Dieu veuille le damner 512. Il dira à Dieu que Dieu a grand tort de perdre ce qu'il peut gagner, et de ne pas remplir son Paradis autant qu'il peut; à saint Pierre, qui en est le portier, que la porte d'une cour doit être ouverte à tout le monde. Il prouvera enfin à Dieu, par de bons arguments, qu'il ne doit pas le damner pour des péchés qu'il n'eût pas commis s'il n'avait pas été au monde; mais il prie la sainte Vierge d'obtenir qu'il ne soit pas obligé d'en venir là avec son fils.

Un Troubadour qui servait dans une croisade 513, mécontent du tour que les affaires y avaient pris, s'écrie: «Seigneur Dieu, si vous m'en croyiez, vous prendriez bien garde à qui vous donneriez les empires, les royaumes, les châteaux et les tours». Un autre 514, désespéré de la mort du bon roi saint Louis, si ardent à servir Dieu, maudit les croisades et le clergé, promoteur de la guerre sainte; il maudit Dieu lui-même qui pouvait le rendre heureux; il voudrait que les chrétiens se fissent mahométans, puisque Dieu est pour les infidèles. Dans une tenson de Peguilain, il propose à Elias, son interlocuteur, cette question à résoudre. Sa dame lui a permis de passer une nuit avec elle, mais sous promesse de ne faire que ce qu'elle voudra; il se croit obligé d'être fidèle à son serment. J'aimerais mieux le rompre, répond Elias; j'en serais quitte pour aller chercher des pardons en Syrie 515; trait de lumière sur l'efficacité morale des pélerinages à la Terre-Sainte, des indulgences, des pardons et de toutes les superstitions de cette espèce. Dans une autre tenson entre Granet et Bertrand 516, deux Troubadours peu célèbres, Granet exhorte Bertrand à renoncer à l'amour et à travailler au salut de son âme en passant outre-mer, où l'antechrist est sur le point de détruire ceux qui y sont allés pour convertir les infidèles. Bertrand répond qu'il est fort aise du succès de l'antechrist; qu'il est prêt à croire en lui, dans l'espérance qu'il fléchira en sa faveur le cœur de sa maîtresse. Granet lui reproche l'indigne voie par laquelle il veut parvenir à son but. Ce bien, lui dit-il, serait payé trop cher par votre damnation. Tout est légitime pour sauver ma vie, répond Bertrand; je meurs pour la plus aimable des femmes, et ayant perdu l'esprit, si je pèche en me jetant dans les bras de l'antechrist, Dieu doit me le pardonner 517».

Cette folie des croisades d'outre-mer fut souvent l'objet de leurs chants, et la croisade barbare contre les malheureux Albigeois, dont ils voyoient sous leurs yeux les horreurs, fut celui de leurs satires. Ils ne ménagent ni les guerriers qui massacraient des populations entières par ordre d'un pontife, ni les inquisiteurs qui livraient aux bûchers ce que le fer avait épargné, ni les moines, ni le clergé leurs complices, ni les papes moteurs intéressés et politiques de ce carnage religieux. La liberté de leurs expressions passe tout ce qu'on s'est permis dans des siècles à qui l'on fait un grand reproche de n'avoir pas respecté des superstitions sanguinaires. Mais ces horreurs eurent aussi parmi eux des apologistes. Il se trouva des Troubadours qui ne rougirent point de les chanter. Folquet de Marseille fit plus 518, il ne chanta point la croisade; il la suscita, la soutint, en attisa en quelque sorte les bûchers et les fureurs. Folquet avait dans sa jeunesse aimé, rimé, mené une vie errante et adonnée au plaisir, comme les Troubadours ses confrères. Sa tête ardente avait passé subitement à d'autres extrémités. Devenu moine de Citeaux, bientôt abbé, et peu de temps après évêque de Toulouse dès qu'il vit la persécution et la proscription s'élever contre les Albigeois et contre le comte de Toulouse, il se joignit aux persécuteurs. Il servit de son influence, de ses conseils, de ses prédications violentes les croisés et leur chef, le trop fameux comte de Montfort. Après avoir vaincu par les armes du fanatisme le comte son seigneur, dans Toulouse même, capitale de ses états, il alla présenter au pape le fondateur des Dominicains et de l'Inquisition, qu'il établit solidement dans son diocèse, et qui y a régné si long-temps. Perdigon, simple Troubadour, élevé par son talent à la dignité de chevalier et à la fortune 519, le déshonora par la part qu'il prit aux intrigues et aux violences de Folquet. Il chanta même la défaite et la mort du roi d'Arragon son bienfaiteur, défenseur du comte Raimond, à la bataille de Muret 520. Vers la fin du même siècle, lorsque les bûchers étaient éteints, l'imagination d'un comte de Foix 521 les rallumait encore, et en menaçait tous ceux qui se renommeraient de l'Arragon. «Leurs cendres, disait-il, seront jetées au vent, leurs âmes envoyées en enfer».

Mais rien dans tout cela n'est aussi fort et ne peint aussi bien les fureurs de l'inquisition que ce qu'un naïf inquisiteur fit lui-même, ne croyant sans doute laisser qu'un monument des victoires de sa dialectique et des triomphes de la foi. C'est un dominicain nommé Izarn 522, l'un des suppôts les plus actifs de ce tribunal exécrable, et chez qui l'on voit avec regret la lyre d'un Troubadour dans les mains d'un brûleur d'hommes. La pièce qu'il nous a laissée est un monument précieux 523; c'est une controverse entre lui et un théologien albigeois; elle n'a pas moins de huit cents vers alexandrins. Il lui prouve d'abord très-sérieusement par des passages latins de la Bible que ce n'est point le diable, mais Dieu qui a créé l'homme; ensuite il le plaisante à sa manière sur les assemblées de ses prosélytes et sur la façon dont ils se communiquaient le saint-esprit; puis il reprend ses argumentations, et pour leur donner plus de force il ajoute en propres mots: «Si tu refuses de me croire, voilà le feu qui brûle tes compagnons tout prêt à te consumer 524». Après de nouveaux efforts de dialectique, il lui dit encore: «Ou tu seras jeté dans le feu, ou tu te rangeras de notre côté, nous qui avons la foi pure avec ses sept échelons appelés sacrements». De l'explication des dogmes il passe à la défense du mariage, et supposant que son antagoniste n'est pas sur ce point de l'avis de Dieu et de Saint-Paul: «On apprête le feu, dit-il, et la poix et les tourments où tu dois passer 525… Avant que je te donne ton congé, dit-il encore, et que je te laisse entrer dans le feu 526, je veux disputer avec toi sur la résurrection au jugement dernier. Tu n'y crois pas; cependant rien n'est plus certain». Et c'est en effet avec le ton de la certitude qu'il lui donne pour preuve ce que les incrédules présentent comme objection. «Si la tête d'un homme était outre-mer, un de ses pieds à Alexandrie, l'autre au mont Calvaire, une main en France et l'autre à Haut-Vilar 527, que le corps fût en Espagne, où on l'eût fait porter, qu'il fût brûlé et mis en cendres, et qu'on pût le jeter au vent, il faut qu'au jour du jugement tout se rassemble et reprenne la forme qu'il avait au baptême; la preuve en est dans le livre de Job, etc.». Il ne cesse de lui répéter le plus fort de ses arguments, celui du feu. «Hérétique, lui dit-il, avant que le feu te saisisse et que tu sentes la flamme, puisque notre croyance est meilleure que la tienne, je voudrais bien que tu me dises pour quelle raison tu nies notre baptême 528…» Enfin, pour péroraison, avant que le pauvre hérétique réponde, il lui montre le feu qui s'allume 529 «Ecoute, ajoute-t-il le cor va déjà par la ville, le peuple s'assemble pour voir la justice qui va se faire et comment tu vas être brûlé». Ce ne sont plus ici des forfaits imputés à l'inquisition naissante que l'on ose nier et dont on essaie de la défendre, c'est l'inquisition elle-même qui nous apparaît en personne, qui proclame, en chantant, ses triomphes, et qui prononce, avec le sourire du tigre, ses épouvantables arrêts.

 

À ne considérer les Troubadours que sous le point de vue littéraire, et plus particulièrement sous celui qui nous a conduits à parler d'eux, on voit dans leurs poésies des traces de l'imitation des poésies arabes et le modèle des premières formes qu'eut en naissant la poésie moderne. Un grand nombre de chansons et de sirventes commencent par des descriptions du printemps ou des comparaisons tirées des fleurs, de la verdure, du chant des oiseaux, du cours des ruisseaux, de la fraîcheur des fontaines. Tout cela est oriental, ainsi que l'emploi assez fréquent du rossignol dans des descriptions poétiques ou dans des messages d'amour. C'est aussi dans leurs chansons que se trouvent pour la première fois ces recherches de pensées et d'images galantes inconnues aux poëtes anciens. C'est là qu'on entend un amant dire, en parlant des yeux de sa dame: «Un doux regard qu'ils me lancèrent à la dérobée fraya le chemin à l'amour pour passer à travers mes yeux au fond de mon cœur». C'est là qu'un autre amant dit que ses yeux ont vaincu son cœur, et que son cœur l'a vaincu lui-même 530; que ses yeux en meurent, et que lui et son cœur en meurent aussi; car ses yeux le font mourir de tristesse, d'envie et de souffrance; ils meurent eux-mêmes de douleur et son cœur de désir 531 qu'un autre enfin assure que la main de sa dame, qu'il vit quand elle ôta son gant, lui enleva le cœur, et que ce gant a rompu la serrure dont il avait fermé son cœur contre l'amour 532.

Ailleurs, il s'élève une dispute entre le cœur d'un poëte et sa raison au sujet des plaintes que font les amants contre les dames, et chacun défend sa cause avec toutes les ressources de l'esprit. L'amour qui fait veiller en dormant, qui peut brûler dans l'eau, noyer dans le feu, lier sans chaîne, blesser sans faire de plaie; tout cela est littéralement dans des chansons de Troubadours 533. Quand nous retrouverons par la suite ces sortes de subtilités dans les meilleurs poëtes italiens, nous n'aurons donc pas de peine à en reconnaître la source. Elle découle originairement de la poésie des Arabes, qui en est remplie. Les Provençaux en les prenant pour modèles n'avaient ni le goût formé ni les exemples d'un meilleur style qui auraient pu les en garantir, et quand ils portèrent cette contagion en Italie, rien ne pouvait non plus y en arrêter les progrès.

CHAPITRE VI

État des Lettres en Italie au treizième siècle; commencement de la Poésie italienne; Poëtes siciliens; L'empereur Frédéric II; Pierre des Vignes; Nouveaux troubles en Italie après la mort de Frédéric; Écoles et Universités; Grammairiens; Historiens; Poésie latine; Poëtes siciliens depuis Frédéric; Poëtes italiens avant le Dante.

Nous avons vu quel fut, chez les Arabes ou Sarrazins, le sort des sciences et des lettres. Nous avons aperçu dans les communications immédiates de ces conquérants de l'Espagne avec les provinces méridionales de la France, la cause, sinon absolue, du moins occasionnelle et puissamment déterminante de l'amour des Provençaux pour la poésie, l'origine d'une partie de leurs fictions romanesques, de leurs formes poétiques et des défauts brillants de leur style; nous avons ensuite vu les Troubadours se répandre avec leur nouvel art dans les petites cours féodales de la France, de l'Espagne et de l'Italie, exciter l'admiration, chanter l'amour, inspirer la joie, devenir l'âme des plaisirs et des fêtes, et recueillir pour récompense des honneurs, des présents, la faveur des souverains, et, ce qui était souvent d'un plus grand prix à leurs yeux, les faveurs des belles. Leur fréquentation dans les cours de la Lombardie au douzième siècle est certaine; leurs succès et l'estime que l'on y fit d'eux ne le sont pas moins; le soin qu'on y prit d'apprendre le provençal pour les mieux entendre et l'empressement qu'avaient un assez grand nombre d'Italiens qui se sentaient le génie poétique, mais à qui il manquait une langue, de faire des vers provençaux et de se mettre eux-mêmes au rang des Troubadours, en sont des preuves incontestables. Sans cela, Calvi de Gênes, Giorgi de Venise, Percival Doria, dont le nom dit assez la patrie, le fameux Sordel et plusieurs autres ne grossiraient pas leur liste. Quand la langue italienne naquit et qu'elle put subir le joug de la mesure et de la rime, il n'est pas douteux encore que l'exemple des Troubadours ne servît de règle et d'objet d'émulation partout où l'on avait pu entendre ou lire leurs productions. Les deux langues furent quelque temps rivales, et parurent se disputer l'empire 534; mais l'italien resta bientôt maître du champ de bataille, et le provençal disparut avec la gloire passagère des Troubadours.

Ce ne fut cependant pas en Lombardie que se firent entendre les premiers essais de poésie en langue italienne; il est vrai du moins que ce n'est pas de ceux qui purent y paraître que se sont conservés les plus anciens fragments connus. C'est en Sicile qu'ils reçurent la naissance; c'est dans ce pays, successivement occupé par les Grecs, par les Sarrazins, par les Normands, visité par les Provençaux, et où régnait alors l'empereur d'Allemagne Frédéric II, que la lyre italienne bégaya ses premiers accords; et une circonstance qui ajoute à la gloire poétique de cet empereur, c'est qu'il fut en quelque sorte le premier à donner le tort et l'exemple. Les recueils d'anciennes poésies contiennent bien quelques morceaux qui peuvent être antérieurs de peu de temps à ce qui nous reste de Frédéric. On cite surtout une chanson d'un certain Ciullo d'Alcamo, sicilien; mais on ne sait rien de ce Ciullo, sinon qu'il vivait à la fin du douzième siècle, et sa chanson, qui est en strophes de cinq vers d'une construction bizarre, écrite dans un jargon plus sicilien qu'italien, mérite à peine d'être comptée 535. L'honneur de la priorité reste donc à Frédéric II. On sentira mieux le mérite qu'il eut à s'occuper des lettres, si l'on se rappelle les principales circonstances de sa vie et l'agitation où furent pendant son règne et l'Italie et ses autres états.

Frédéric Barberousse avait laissé pour héritier son fils Henri VI, marié avec l'héritière du royaume de Sicile, et qui devint, par l'extinction des derniers restes de la race normande, le maître de ce royaume. Lorsque Henri mourut, lorsque sa femme Constance le suivit un an après, Frédéric leur fils était encore enfant. Une combinaison singulière de circonstances avait engagé sa mère à lui donner en mourant pour tuteur Innocent III, et fit croître à l'ombre du trône pontifical le futur successeur de tant de souverains, ennemis en quelque sorte naturels des papes, et destiné à l'être lui-même plus qu'aucun d'eux. Deux noms rivaux étaient nés en Allemagne des divisions de l'Empire, et contribuaient à perpétuer ces divisions 536. Un fief ou château de Conrad le Salique, appelé Gheibeling ou Waibling, et situé dans le diocèse d'Augsbourg, avait transmis à la famille de cet empereur le nom de Gheibelings ou Gibelins. L'ancienne famille des Guelfes ou Welf, qui possédait alors la Bavière, ayant eu plusieurs démêlés avec les empereurs descendants de Conrad, ce nom de Guelfe était devenu celui d'un parti d'opposition dans l'Empire. Plusieurs empereurs de la maison Gheibeling avaient fait la guerre aux chefs de l'église; les Guelfes leurs antagonistes avaient pris la défense des papes, et dès-lors les noms de Gibelins et de Guelfes s'étaient étendus dans l'Empire et dans l'Italie, le premier aux ennemis du St. – Siège, et le second à ses partisans.

Lorsqu'après un interrègne de dix ans, Othon, chef du parti Guelfe en Allemagne, obtint l'Empire sans qu'il eût été même question de Frédéric, nommé cependant roi des Romains du vivant de son père, Othon IV, devenu Gibelin en devenant empereur, vit le pape lui opposer le jeune Frédéric, dernier rejeton du sang des Gibelins, et Guelfe par sa position, en attendant qu'il devînt Gibelin à son tour par son élévation à l'Empire. Innocent traita Othon d'usurpateur, dès qu'Othon voulut s'opposer aux usurpations du St. – Siège. Il prétexta contre lui les intérêts de son pupille, à qui il donna pour appui les rois d'Arragon et de France, afin de les donner à Othon pour ennemis. Mais il mourut avant d'avoir pu abattre l'un par l'autre. Le règne de ce pontife ambitieux est marqué par l'accroissement du pouvoir des papes, quoique ce pouvoir ne s'élevât point encore jusqu'à la souveraineté de Rome; il l'est aussi par cette fatale croisade qui ruina l'Empire grec et en prépara la destruction totale, et par cette autre croisade non moins funeste et plus horrible dont le midi de la France fut le théâtre, dont des milliers de chrétiens furent les victimes pour quelques différences d'opinion 537, et dans laquelle le fer et le feu des combats eurent pour auxiliaire le feu nouvellement allumé des bûchers de l'inquisition.

Son successeur Honorius III ne voulut, même après la mort d'Othon, couronner Frédéric empereur qu'après avoir exigé de lui le vœu d'aller à la tête d'une nouvelle croisade reconquérir la Palestine; mais Frédéric, alors âgé de vingt-six ans 538, et père d'un fils qui en avait dix 539, voyant que l'Allemagne avait besoin de sa présence, et dans quelle anarchie étaient ses états de Sicile et de Naples, se montra peu empressé d'accomplir ce vœu. On lui attribue même des vues plus grandes et plus solides. Il avait, dit-on, conçu le projet de réunir dans un seul état l'Italie entière 540, projet qui occupa dans tous les temps ceux qui s'intéressèrent véritablement à la prospérité de ce beau pays, mais auquel l'intérêt particulier des papes s'opposa toujours. Sommé plusieurs fois de tenir sa parole, et devenu même, par son second mariage 541, héritier éventuel du royaume de Jérusalem, dont les Sarrazins étaient les maîtres, il se dispose enfin à partir avec une armée 542; mais une épidémie se déclare parmi ses troupes; il en est atteint lui-même; il remet son entreprise à l'année suivante. Grégoire IX, plus impatient encore qu'Honorius de voir l'empereur quitter l'Italie, l'excommunie pour ce délai. Frédéric part 543: Grégoire l'excommunie de nouveau, et qui pis est, fait prêcher contre lui, dans ses états de Naples, une croisade. Frédéric réussit dans la sienne à Jérusalem mieux qu'on ne le voulait à Rome. Il revient enfin, après des difficultés, des désagréments sans nombre et des périls personnels où son excommunication l'avait jeté 544. Il en éprouve de nouveaux en Italie, et se voit forcé de se battre avec ses croisés contre les croisés du pape. Le pontife vaincu 545 a recours aux armes de sa profession. Il l'accuse d'hérésie dans des lettres pastorales. Il fait plus: il soulève contre lui une nouvelle ligue lombarde qu'il soutient pendant près de dix ans par ses exhortations et par ses intrigues.

Le pontife qui le remplace après la courte apparition de Célestin IV sur le trône papal 546, Innocent IV va plus loin, et dépose formellement Frédéric à Lyon en plein concile 547. Il déclare l'Empire vacant, et fait élire successivement à sa place deux prétendus empereurs. Frédéric dans ses états d'Italie tient tête en homme de courage; mais sa vie est troublée jusqu'à la fin, et si l'on en croit même quelques auteurs, elle est abrégée par un parricide 548.

Les historiens d'Italie 549, quoique prévenus contre lui à cause de ses querelles avec Rome, conviennent de ses grandes qualités, de ses talents et de l'étendue de ses connaissances. Il savait, outre la langue italienne, telle qu'elle était alors, le latin, le français, l'allemand, le grec et l'arabe. La philosophie, du moins celle de son temps, lui était familière, et il en encouragea l'étude dans toute l'étendue de ses états. Avant lui, la Sicile était privée de tout établissement littéraire; il y fonda des écoles, et appela du continent des savants et des gens de lettres; il créa l'université de Naples, qui devint presque dès sa naissance la rivale de la célèbre université de Bologne. Il redonna un nouvel éclat à l'école de Salerne, qui languissait, et pourvut par des lois utiles aux abus qui s'étaient introduits dans la médecine. Il fit traduire du grec et de l'arabe plusieurs livres intéressants pour cette science, qui n'avaient point encore été traduits: il en fit autant de quelques ouvrages d'Aristote, dont il ordonna l'étude dans ses états de Naples, et même dans les universités de Lombardie. Sa cour, dit un ancien auteur 550, était le rendez-vous des poëtes, des joueurs d'instruments, des orateurs, des hommes distingués dans tous les arts. Il établit à Palerme une académie poétique, et se fit un honneur d'y être admis avec ses deux fils, Enzo et Mainfroy, qui cultivaient aussi la poésie. Une des études favorites de Frédéric était celle de l'histoire naturelle; on retrouve une partie des connaissances qu'il y avait acquises dans un traité qu'il nous a laissé de la chasse à l'oiseau 551. Il n'y traite pas seulement des oiseaux dressés à la chasse, mais de toutes les espèces en général; des oiseaux d'eau, de ceux de terre, de ceux qu'il appelle moyens, et des oiseaux de passage. Il parle de la nourriture de ces différentes espèces, et de ce qu'elles font pour se la procurer. Il décrit les parties de leurs corps, leur plumage, le mécanisme de leurs ailes, leurs moyens de défense et d'attaque. Ce n'est que dans le second livre qu'il en vient aux oiseaux de proie, et qu'il enseigne l'art de les choisir, de les nourrir, de les former à tous les exercices qui en font des oiseaux chasseurs, et qui font servir au plaisir de l'homme, plus vorace qu'eux, l'instinct de voracité qu'ils ont reçu de la nature.

Il n'est resté de poésies de Frédéric II, qu'une ode ou chanson galante, dans le genre de celles des Provençaux, et que l'on croit un ouvrage de sa jeunesse: on y voit la langue italienne à sa naissance, encore mêlée d'idiotismes siciliens 552, et de mots fraîchement éclos du latin, qui en gardaient encore la trace 553. L'ode est composée de trois strophes, chacune de quatorze vers, l'entralacement des rimes est bien entendu et tel que les lyriques italiens le pratiquent souvent encore. Les pensées en sont communes, et les sentiments délayés dans un style lâche et verbeux, mais cela n'est pas mal pour le temps et pour un roi, qui avait tant d'autres choses à faire que des vers 554. Nous avons vu un autre Frédéric en faire de meilleurs, mais plus de cinq cents ans après; et le Frédéric de Sicile n'avait pas, comme celui de Prusse, un Voltaire pour confident et pour maître.

Il avait pourtant un secours à peu près de même espèce dans son célèbre chancelier Pierre des Vignes, homme d'un grand savoir, d'une haute capacité dans les affaires, et de plus philosophe, jurisconsulte, orateur et poëte. Né à Capoue d'une extraction commune, il étudiait à Bologne dans l'état de fortune le plus misérable. Le hasard le fit connaître de Frédéric, qui l'apprécia, l'emmena à sa cour, et l'éleva successivement aux emplois de la plus intime confiance et aux plus hautes dignités. Pierre des Vignes partagea les vicissitudes et les agitations de sa fortune. Les ambassades les plus importantes et les commissions les plus délicates exercèrent ses talens et son zèle. Dans une circonstance solennelle, devant le peuple de Padoue, et en présence de l'empereur même, il combattit en sa faveur les effets de l'injuste excommunication du pape, avec des vers d'Ovide, d'où il tira le texte de son discours 555. Cela prouve que les bons poëtes latins lui étaient familiers, et l'on s'en apercoit au style d'une de ses canzoni qui nous a été conservée 556. Elle est en cinq strophes de huit vers en décasyllabes. On y voit plusieurs comparaisons qui relèvent un peu l'uniformité des idées et des sentiments. Il se compare à un homme qui est en mer, et qui a l'espérance de faire route quand il voit le beau temps 557. Il voudrait ensuite, ce qui n'est pas d'une poésie trop noble, pouvoir se rendre auprès de sa maîtresse en cachette comme un larron, et qu'il n'y parût pas 558; s'il pouvait lui parler à loisir, il lui dirait comment il l'aime depuis long-temps, plus tendrement que Pirame n'aima Tisbé. On reconnaît ici son goût pour Ovide. Dans la dernière strophe, il s'adresse à sa chanson même, comme les Troubadours le faisaient quelquefois et comme les poëtes italiens l'ont presque toujours fait depuis.

495Crescimbeni ne parle pas de lui. Voyez Millot, t. II, p. 138.
496Nostradamus n'a donné sur ce poète qu'un tissu d'erreurs; Crescimbeni en corrige quelques-unes dans ses notes, mais non pas toutes. Voyez Millot, ub. supr., p. 250.
497Voyez Nostradamus et Crescimbeni, corrigés par Millot, ub. supr., p. 432.
498Millot, ibid., p. 448. Je rectifie sa traduction, qui n'est nullement conforme au texte; il en a fallu faire autant de plusieurs autres passages. Lo Sain EsperitzQue receup cara humanaEntenda mos precsE fraigna tos becs,Roma; no'm entrecsCom' es falsa e trafanaVas nos e va'ls Grecs.
499Millot, t. III, p. 236 et suiv.
500E mi baisa la boqu'els huels amdosDon mi sembla lo ioy de Paradis.Bernard de Ventadour.
501Arnaud de Marveil: Que si m'lais Dieus s'amor iauzir,Semblaria'm, tan la dezir,Ab lyeis Paradisus desertz.
502Arnaud Catalans.
503Dies una in atriis tuis super millia. L'auteur de ce trait est Bernard de Ventadour.
504Arnaud de Marveil.
505Entre autres, Pierre de Barjac. Millot, t. I, p. 122.
506Arnaud Daniel, dans Millot, t. II, p. 485. Dans Nostradamus, cela est plus fort, il entend mille messes par jour, priant Dieu de pouvoir acquérir la grâce de sa dame; p. 42. Dans le texte provençal, six messes selon quelques manuscrits, et mille messes selon d'autres.
507Deudes de Prades.
508Hugues Brunet; Millot, t. I, p. 315.
509Boniface Calvo, ibid., t. II, p. 366.
510Boniface Calvo, p. 77. Le texte provençal dit;Si monge nier vol Dieu que si an salPer pro maniar ni per femnas tenir,Ni monge blanc per boulas amentir,Ni per erguelh temple ni l'ospital,Ni canonge per prestar a renieu,Ben tenc per folh sanh Peyre, sanh AndrieuQue sofriro per Dieu aital turmen,S'aiquest s'en uen aissi a salvamen.
511Millot, t. III, p. 233.
512ibid., p. 268.
513Peyrols d'Auvergne; Millot, t. I, p. 322.
514Austan d'Orlach, qui n'est connu que par cette pièce; Millot, t. II, p. 430.
515Millot, t. II, p. 240.
516Ibid., p. 133.
517Millot, t. II, p. 135.
518Millot, t. I, p. 179 et suiv.
519Millot, t. I, p. 428.
520En 1213.
521Roger Bernard III; Millot, t. II, p. 472.
522Ni Nostradamus, ni Crescimbeni n'ont parlé de cet inquisiteur poëte. Voyez Millot, t. II, p. 42 et suiv.
523Ce poëme est à la Bibliothèque impériale, dans un manuscrit provençal du fond de d'Urfé; il est intitulé: Aiso fon las novas del Heretic. En voici les premiers vers: Diguas me tu heretic, parl'ap me un petit,Que tu non parlaras gaire que iat sia grazit,Si per forsa n'ot ve, segon c'avenz auzit.Segon lo mieu veiaire ben as Dieu escarnitTan fe e ton baptisme renegat e guerpitCar crezes que Diables t'a format e bastitE tan mal a obrat e tan mal a orditPot dar salvatios falsamen as mentit.Veramen fetz Dieu home et el l'a establitE'l formet de sas mas aisi com es escrit:Manus tuœ fecerunt me et plasmaverunt me.
524E s'aquest no vols creyre vec t'el foc arziratQue art tos companhos......,Si cauziras el foc o remanras ab nosC'avem la fe novela ab los sept escalosQue son ditz sacramens los cals mostra razosQue devem creyre tug a salvamen de nos.
525E tu malvat her'tic iest tant desconoissensQue nulla re qui es mostr' per tant de bos guirens,Con es de Dieu e san Paul non iest obédiens,Nit' pot entrar en cor ni passar per las densPer qu'el foc s'aparelha e la peis el turmensPer on deu espassar......
526Ans que ti don comiat nit' lais el foc intrarDe resurrectio vuelh ab tu disputar....…Si la testa de l'hom era lai otramar.L'us pos en Alissandria, l'autr'eg Monti-Calvar,La una ma en Fransa, l'autra en Autvilar,El cors fos en Espanha que si fos fag portar,Que fos ars e fos cenres c'om to poques ventarLo dia del judizi coven apparelharEn eissa quela forma que fon al bateiar.En la sant escriptura o podes a trobar:Job, etc.
527Millot, qui ne fait ici, comme à son ordinaire, que copier la traduction de Sainte-Palaye, traduction que l'on est souvent obligé de rectifier quand on la rapproche du texte, met après ce mot Haut-Vilar (lieu inconnu); et en effet il serait difficile de deviner ce que veut dire ce Aut-Vilar, opposé à la France: mais on peut très-bien se passer de le savoir.
528Heretic, be volria ans qu'el foc te prezes,Ni sentisses la flamma, fin est mieg nostre cres,Que diguas lo veiaire per cal razo desciesLo nostre baptisti li que bos essanct es.
529Si ara not confessas, lo foc es alucatz,El corn va per la vil al pobl' es amassatzPer vezer la justizia, c'adès seras crematz.
530Hugues de Saint-Cyr; Millot, t. II, p. 178.
531Millot s'en est tenu à la première phrase, et a dissimulé le reste; le manuscrit provençal porte littéralement: Gent an sauput mey huelh uenser mon corE'l cor a uensut me.…Moron miey huelh, el ieu e'l cor en mor.…Que'm fan mos huelhs qu'aissy'm uolon aucireDe pessamen, d'enuey e de cossir,E'ls huelhs de dol e mon cor de dezir.
532Aimery de Belenvei; Millot, t. II, p. 334.
533Dans une pièce de Pierre Vidal.
534Tiraboschi, t. IV, liv. III, chap. 3.
535Cette chanson, telle que la rapporte l'Allacci, Poeti Antichi, p. 408 et suiv., est composée de trente-deux strophes, qui paraissent en effet de cinq vers; mais alors il faut que les trois premiers soient de quinze syllabes. On a eu beau les comparer aux vers politiques des Grecs, ou à nos vers alexandrins, ils ne ressemblent réellement ni aux uns ni aux autres, ni à aucune espèce de vers connus. En voici la première strophe: Rosa fresca aulentissima capari in ver l'estateLe Donne te desiano pulcelle e maritateTraheme deste focora se teste a bolontatePer te non aio abento nocte e diaPensando pur di voi Madonna mia. Il est aisé de voir que chacun des trois premiers vers doit se diviser en deux, dont le premier est un vers de huit syllabes, de ceux qu'on appelle sdruccioli, et le second un vers de sept syllabes. L'usage d'écrire de suite, non seulement deux vers, mais tous les vers d'une strophe, est commun dans les anciens manuscrits italiens et provençaux; c'est donc ainsi que ces premiers vers doivent être écrits: Rosa fresca aulentissimaCapari in ver l'estateLe donne te desianoPulcelle e maritateTraheme deste focoraSe teste a bolontatePer te non aio, etc. La strophe est ainsi de huit vers; la forme en est toute provençale, entremêlée de vers de différentes mesures et de vers rimés et non rimés. Cette chanson, écrite comme elle doit l'être, est une preuve de plus de l'influence de la poésie provençale sur les premiers essais de poésie italienne. (Voy. Crescimbeni, Ist. della volgar Poes., t. III, p. 7.)
536Muratori, Antich. ital., Dissert. 41.
537On accusait les malheureux Albigeois d'avoir adopté l'hérésie des Pauliciens, qui tenait du manichéisme ou de la doctrine des deux principes. Leurs partisans nient qu'ils l'eussent adoptée; les partisans des Pauliciens nient même qu'ils professassent cette doctrine; mais ce n'est pas là la question. La question est de savoir si cette opinion des deux principes, ou toute autre de même nature, peut légitimer les exécrables barbaries qu'exercèrent sur les Albigeois des gens qui prétendaient croire en Dieu, mais bien dignes de ne croire qu'au diable.
538C'était en 1228, deux ans après la mort d'Othon.
539Henri, qu'il fit couronner roi des Romains.
540Voltaire, Essai sur les Mœurs, etc. ch. 52; Gibbon, Decline and fall, etc., c. 59.
541Après la mort de Constance d'Arragon, sa première femme, il épousa la fille de Jean de Brienne, roi titulaire de Jérusalem.
5421227.
543Août 1228.
544La position où le mit l'obstination du pape à le poursuivre comme excommunié jusque dans Jérusalem même, est si singulière, que le bon Muratori, en rapportant dans ses Annales ces faits étranges, ne peut s'empêcher de dire: Non potrà di meno di non istrignersi nelle spalle, chi legge si futte vicende. Ann. 1229.
5451230.
546Grégoire IX étant mort le 21 août 1241, Célestin IV qui lui succéda, mourut dix-sept ou dix-huit jours après; Innocent IV le remplaça, le 26 juin 1243, après un long interrègne, causé par les dissensions qui agitaient alors le sacré collège.
547Le 17 juillet 1245: ce fut après l'avoir fait accuser, par un évêque italien, et par un archevêque espagnol, d'être hérétique, épicurien et athée. (Voyez les Annales de Muratori.)
548Ces auteurs accusent Mainfroy, fils naturel de Frédéric, de l'avoir étouffé dans sa dernière maladie, Voltaire (Essai sur les Mœurs, etc., chap. 51) croit que ce fait est faux, et les historiens italiens les plus sensés pensent de même.
549Ricordano Malespini, Stor. fior. Giov. Villani, Stor. Tiraboschi, Stor. della Lett. ital., t. IV, liv. III, etc.
550Cento Novelle Antich. nov. 20.
551De Arte venandi cum avibus. Ce traité, divisé en deux livres, ne s'est point conservé en entier. Mainfroy, fils de Frédéric, en avait suppléé plusieurs parties et des chapitres entiers. C'est sur un manuscrit rempli de lacunes, qui appartenait au savant Joachim Camérarius, qu'il fut imprimé à Augsbourg (Augustœ vendelicorum) en 1569, in-8°.
552Tiraboschi, t. IV, liv. III, ch. 3; Crescimbeni, Istoria della volgar poesia, t. III.
553Comme eo venu d'ego, moi, qui était prêt à devenir io, et meo, mien, qui est le mot latin même, et qui devint peu de temps après mio.
554Voici la première strophe de sa canzone: Poiche ti piace, amoreCh'eo deggia trovareFaron de mia possanzaCh'eo vegna a compimento.Dato haggio lo meo coreIn voi, Madonna, amare;E tutta mia speranzaIn vostro piacimento.E no mi partiraggioDa voi, donna valente;Ch'eo v'amo dolcemente:E piace a voi ch'eo hoggia intendimento;Valimento mi date, donna fina;Che lo meo core adesso a voi s'inchina. La forme de cette strophe, l'entrelacement des vers et des rimes, le mot trovare, trouver, employé au deuxième vers, pour rimer, faire des vers, etc., tout annonce ici l'imitation de la poésie des troubadours.
555Leniter ex merito quidquid patiare ferendum est: Quœ venit indignè pœna, dolenda venit. (Ovide.)
556Elle parut pour la première fois dans le Recueil des Rime Antiche, donné par Corbinelli, à la suite de la Bella mano de Giuste de' Conti, Paris, 1595, in-8°. On la trouve aussi dans Crescimbeni, Istor. della volg. poes., t. I, p. 130 et ailleurs.
557Come uom che è in mare ed ha speme di gire Quando vede lo tempo, ed ello spanna, etc.
558Or potess' io venire a voi, amorosa,Come il ladron ascoso, e non paresse;Ben lo mi terria in gioja avventurosaSe l'amor tanto di ben mi facesse.Si bel parlare, donna, con voi fora;E direi come v'amai lungamente,Più che Piramo Tisbe dolcementeE v'ameraggio, in fin ch'io vivo, ancora.