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Salomé

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HÉRODIAS. Je trouve que ma fille a bien fait.

HÉRODE. Je suis sûr qu’il va arriver un malheur.

SALOMÉ [Elle se penche sur la citerne et écoute.] Il n’y a pas de bruit. Je n’entends rien. Pourquoi ne crie-t-il pas, cet homme? Ah! si quelqu’un cherchait à me tuer, je crierais, je me débattrais, je ne voudrais pas souffrir.. Frappe, frappe, Naaman. Frappe, je te dis.. Non. Je n’entends rien. Il y a un silence affreux. Ah! quelque chose est tombé par terre. J’ai entendu quelque chose tomber. C’était l’épée du bourreau. Il a peur, cet esclave! Il a laissé tomber son épée. Il n’ose pas le tuer. C’est un lâche, cet esclave! Il faut envoyer des soldats. [Elle voit le page d’Hérodias et s’adresse à lui.] Viens ici. Tu as été l’ami de celui qui est mort, n’est-ce pas? Eh bien, il n’y a pas eu assez de morts. Dites aux soldats qu’ils descendent et m’apportent ce que je demande, ce que le tétrarque m’a promis, ce qui m’appartient. [Le page recule. Elle s’adresse aux soldats.] Venez ici, soldats. Descendez dans cette citerne, et apportez-moi la tête de cet homme. [Les soldats reculent.] Tétrarque, tétrarque, commandez à vos soldats de m’apporter la tête d’Iokanaan. [Un grand bras noir, le bras du bourreau, sort de la citerne apportant sur un bouclier d’argent la tête d’Iokanaan. Salomé la saisit. Hérode se cache le visage, avec son manteau. Hérodias sourit et s’évente. Les Nazaréens s’agenouillent et commencent à prier.] Ah! tu n’as pas voulu me laisser baiser ta bouche, Iokanaan. Eh bien! je la baiserai maintenant. Je la mordrai avec mes dents comme on mord un fruit mûr. Oui, je baiserai ta bouche, Iokanaan. Je te l’ai dit, n’est-ce pas? je te l’ai dit. Eh bien! je la baiserai maintenant.. Mais pourquoi ne me regardes-tu pas, Iokanaan? Tes yeux qui étaient si terribles, qui étaient si pleins de colère et de mépris, ils sont fermés maintenant. Pourquoi sont-ils fermés? Ouvre tes yeux! Soulève tes paupières, Iokanaan. Pourquoi ne me regardes-tu pas? As-tu peur de moi, Iokanaan, que tu ne veux pas me regarder?.. Et ta langue qui était comme un serpent rouge dardant des poisons, elle ne remue plus, elle ne dit rien maintenant, Iokanaan, cette vipère rouge qui a vomi son venin sur moi. C’est étrange, n’est-ce pas? Comment se fait-il que la vipère rouge ne remue plus?.. Tu n’as pas voulu de moi, Iokanaan. Tu m’as rejetée. Tu m’as dit des choses infâmes. Tu m’as traitée comme une courtisane, comme une prostituée, moi, Salomé, fille d’Hérodias, Princesse de Judée! Eh bien, Iokanaan, moi je vis encore, mais toi tu es mort et ta tête m’appartient. Je puis en faire ce que je veux. Je puis la jeter aux chiens et aux oiseaux de l’air. Ce que laisseront les chiens, les oiseaux de l’air le mangeront.. Ah! Iokanaan, Iokanaan, tu as été le seul homme que j’ai aimé. Tous les autres hommes m’inspirent du dégoût. Mais, toi, tu étais beau. Ton corps était une colonne d’ivoire sur un socle d’argent. C’était un jardin plein de colombes et de lis d’argent. C’était une tour d’argent ornée de boucliers d’ivoire. Il n’y avait rien au monde d’aussi blanc que ton corps. Il n’y avait rien au monde d’aussi noir que tes cheveux. Dans le monde tout entier il n’y avait rien d’aussi rouge que ta bouche. Ta voix était un encensoir qui répandait d’étranges parfums, et quand je te regardais j’entendais une musique étrange! Ah! pourquoi ne m’as-tu pas regardée, Iokanaan? Derrière tes mains et tes blasphèmes tu as caché ton visage. Tu as mis sur tes yeux le bandeau de celui qui veut voir son Dieu. Eh bien, tu l’as vu, ton Dieu, Iokanaan, mais moi, moi.. tu ne m’as jamais vue. Si tu m’avais vue, tu m’aurais aimée. Moi, je t’ai vu, Iokanaan, et je t’ai aimé. Oh! comme je t’ai aimé. Je t’aime encore, Iokanaan. Je n’aime que toi.. J’ai soif de ta beauté. J’ai faim de ton corps. Et ni le vin, ni les fruits ne peuvent apaiser mon désir. Que ferai-je, Iokanaan, maintenant? Ni les fleuves ni les grandes eaux, ne pourraient éteindre ma passion. J’étais une Princesse, tu m’as dédaignée. J’étais une vierge, tu m’as déflorée. J’étais chaste, tu as rempli mes veines de feu.. Ah! Ah! pourquoi ne m’as-tu pas regardée, Iokanaan? Si tu m’avais regardée tu m’aurais aimée. Je sais bien que tu m’aurais aimée, et le mystère de l’amour est plus grand que le mystére de la mort. Il ne faut regarder que l’amour.

HÉRODE. Elle est monstrueuse, ta fille, elle est tout à fait monstrueuse. Enfin, ce qu’elle a fait est un grand crime. Je suis sûr que c’est un crime contre un Dieu inconnu.

HÉRODIAS. J’approuve ce que ma fille a fait, et je veux rester ici maintenant.

HÉRODE [se levant] Ah! l’épouse incestueuse qui parle! Viens! Je ne veux pas rester ici. Viens, je te dis. Je suis sûr qu’il va arriver un malheur. Manasse, Issachar, Ozias, éteignez les flambeaux. Je ne veux pas regarder les choses. Je ne veux pas que les choses me regardent. Éteignez les flambeaux. Cachez la lune! Cachez les étoiles! Cachons-nous dans notre palais, Hérodias. Je commence à avoir peur.

[Les esclaves éteignent les flambeaux. Les étoiles disparaissent. Un grand nuage noir passe à travers la lune et la cache complètement. La scène devient tout à fait sombre. Le tétrarque commence à monter l’escalier.]

LA VOIX DE SALOMÉ. Ah! j’ai baisé ta bouche, Iokanaan, j’ai baisé ta bouche. Il y avait une âcre saveur sur tes lèvres. Était-ce la saveur du sang?.. Mais, peut-être est-ce la saveur de l’amour. On dit que l’amour a une âcre saveur.. Mais, qu’importe? Qu’importe? J’ai baisé ta bouche, Iokanaan, j’ai baisé ta bouche.

[Un rayon de lune tombe sur Salomé et l’éclaire.]

HÉRODE [se retournant et voyant Salomé] Tuez cette femme!

[Les soldats s’élancent et écrasent sous leurs boucliers Salomé, fille d’Hérodias, Princesse de Judée.]