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Œuvres complètes de lord Byron, Tome 11

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LETTRE CCLIX

A M. MOORE
Venise, 28 janvier 1817

«J'ai devant les yeux votre lettre du 8. Il y a un remède tout simple à votre pléthore: c'est l'abstinence. J'ai été obligé d'y avoir recours, il y a quelques années, c'est-à-dire en fait de régime; et, à l'exception de quelques jours, de quelques semaines (mettons même parfois de quelques mois), je m'en suis toujours tenu depuis à Pythagore: malgré tout cela, apprenez-moi que vous êtes mieux. Il ne faut pas vous permettre cette vilaine bière, ni le porter non plus, ni les soupers: ces derniers surtout sont le diable pour ceux qui dînent..... ..................... ..............................

»Je suis véritablement affligé du malheur de votre père: c'en est un cruel dans tous les tems, mais surtout dans un âge avancé. Cependant, vous aurez du moins la satisfaction de faire votre devoir à son égard, et, croyez-moi, cela ne sera pas sans fruit. La fortune, à la vérité, est une femme; mais elle n'est pas une si-grande 57… que les autres (en exceptant votre femme et ma sœur de ces termes un peu violens), car elle finit toujours par montrer quelque justice. Je ne lui en veux pas, quoiqu'avec elle et Némésis j'aie eu quelques lances à rompre; – quoi qu'il en soit, j'ai fait mon possible pour ne pas mériter pis. Elle est fort en arrière à votre égard; mais elle reviendra, vous le verrez. Vous avez pour vous toute l'énergie que peuvent donner le talent, l'indépendance, le courage et une bonne réputation. Vous avez fait et ferez toujours tout ce que vous êtes capable de faire dans vos intérêts; et assurément il y a des gens dans le monde qui ne seraient pas fâchés de vous servir, si vous vouliez leur permettre de vous être utile ou du moins de le tenter.

Note 57: (retour) B***. Nous ne croyons pas devoir remplir le mot laissé en blanc par lord Byron, et dont la traduction n'est rien moins qu'honnête dans notre langue.(Note du Trad.)

»Je songe à aller en Angleterre ce printems. S'il y a du bruit, de par le sceptre du roi Ludd, j'en serai, et s'il n'y en a pas, et que ce soit seulement la continuation de «ces tems d'une paix débonnaire,» j'irai prendre une chaumière à cent toises sud de votre habitation; et devenu votre voisin, nous composerons ensemble des cantiques, et nous tiendrons des conversations qui deviendront la terreur du tems (sans en excepter le journal de ce nom), et qui seront l'objet de l'admiration et des louanges du Morning-Chronicle et de la postérité.

»Je me réjouis d'apprendre que vous allez publier en février, quoique je tremble pour l'éclat que vous attribuez à ce nouveau Childe Harold. Je suis bien aise qu'il vous plaise: c'est un beau morceau de poésie, mais où quelque chose de vague et de sombre indique les ravages du désespoir. Pendant tout le tems qu'en a duré la composition, j'étais à moitié fou entre la métaphysique, les montagnes, les lacs, un amour inextinguible, de ces pensées qu'on n'exprime pas, et le cauchemar de mes propres méfaits. Plus d'une fois je me serais senti capable de me brûler la cervelle, sans le souvenir du plaisir que cela aurait fait à ma belle-mère; et même alors, si j'eusse été certain que mon ombre la poursuivrait, – mais je ne veux pas m'appesantir sur ces petites affaires de famille.

»Venise est dans l'estro de son carnaval; et j'ai passé les deux dernières nuits à la redoute, à l'opéra, et dans tous ces genres de plaisir. Maintenant, voici une aventure. Il y a quelques jours qu'un gondolier m'apporta un billet sans adresse, dans lequel on exprimait le désir de me rencontrer en gondole ou dans l'île de Saint-Lazare, ou à un troisième lieu de rendez-vous qu'on indiquait. «Je connais bien le caractère du pays;» à Venise «on ne craint pas de laisser voir au ciel ce qu'on n'ose pas montrer, etc., etc.» Ainsi, pour toute réponse, je dis qu'aucun des trois endroits indiqués ne me convenait, mais que je serais seul chez moi à dix heures du soir, ou à la redoute à minuit, où l'on pouvait venir me trouver masqué. A dix heures j'étais chez moi, seul; Marianna étant allée avec son mari à une conversazione. Tout-à-coup la porte de mon appartement s'ouvre, et je vois entrer une belle femme, d'environ dix-neuf ans, blonde, quoique Italienne, et qui m'apprend qu'elle est mariée au frère de mia amorosa, et désire avoir un entretien avec moi. Je réponds d'une manière honnête, et nous commençons à causer en italien et en romaïque, sa mère étant native de Corfou, quand, au bout de quelques minutes, entre, à ma très-grande surprise, Marianna S***, in propria persona, qui, après avoir fait à sa belle-sœur et à moi une révérence très-polie, saisit, sans dire un seul mot, la susdite belle-sœur par les cheveux, et lui applique une douzaine de claques dont le bruit vous aurait déchiré les oreilles. Je n'ai pas besoin de parler des cris qui s'en suivirent: l'infortunée visiteuse prit la fuite. Je m'emparai de Marianna qui, après avoir fait plusieurs efforts pour m'échapper, afin de poursuivre son ennemie, finit par se trouver mal dans mes bras; et en dépit de tous mes raisonnemens, d'un déluge d'eau de Cologne, de vinaigre, d'eau pure, et de je ne sais combien d'autres eaux encore, resta dans cet état jusqu'après minuit.

»Après avoir maudit mes domestiques de laisser entrer chez moi sans m'en avertir, je découvris que Marianna avait vu le matin, sur l'escalier, le gondolier de sa belle-sœur; et ne soupçonnant rien de bon de sa présence, était revenue de son propre mouvement, ou bien avait été avertie par quelqu'une de ses femmes, ou par quelqu'autre espion de sa maison, pendant la conversazione, qu'elle avait quittée pour venir accomplir ce haut fait de pugilat. J'avais vu des attaques de nerfs auparavant, comme aussi quelques petites scènes du même genre, dans notre île et ailleurs: mais ce n'était pas tout. Au bout d'une heure environ, qui nous arrive encore? le signor S*** lui-même, qui me trouve avec sa femme défaillante sur un sofa, et toutes les apparences du désordre: des cheveux épars, des chapeaux par terre, avec des mouchoirs, des sels, des flacons, et la dame elle-même, pâle comme la mort, sans mouvement et sans connaissance. Sa première question fut: «Que veut dire tout cela?» La dame ne pouvait pas répondre, ce fut donc moi qui m'en chargeai. Je lui dis que ce serait la chose du monde la plus facile à expliquer; mais qu'en attendant, il valait beaucoup mieux s'occuper de faire revenir sa femme-(au moins de faire revenir ses sens). Elle les reprit, après avoir passé un tems convenable en soupirs et en sanglots.

»Vous n'avez pas besoin de vous alarmer: – la jalousie n'est pas à l'ordre du jour à Venise, et les poignards y sont passés de mode, tandis que les duels pour affaires d'amour y sont inconnus. Mais malgré tout cela, ma situation était gauche; et quoiqu'il eût dû savoir que je faisais la cour à Marianna, je crois que, jusqu'à ce soir là, il ne s'imaginait pas que les choses eussent été jusque-là. On sait très-bien que toutes les femmes mariées ont des amans, mais la coutume est de conserver les apparences, comme chez les autres nations. Je ne savais donc que diable dire: – je ne pouvais laisser percer la vérité par égard pour elle, et je ne me souciais pas de mentir par rapport à moi: d'ailleurs la chose parlait d'elle-même. Je pensai que le meilleur parti serait de la laisser s'expliquer comme elle le voudrait (une femme n'est jamais embarrassée, elle a toujours le diable à son service), seulement je résolus de la protéger et de l'emmener en cas de quelque violence du signor; mais je vis qu'il était fort calme. Elle alla se coucher; et le lendemain-comment cela s'arrangea-t-il entre eux? je ne sais, mais cela s'arrangea. C'est bien, mais il me restait encore une explication à donner à Marianna au sujet de cette belle-sœur que je ne pourrai jamais assez maudire, et j'en vins à bout par des sermens répétés de mon innocence et d'une constance éternelle, etc., etc., etc. Cependant la belle-sœur, fort irritée d'avoir été traitée de la sorte (sans s'inquiéter de sa propre honte), a raconté l'affaire à la moitié de Venise, et les domestiques, attirés par le combat et les attaques de nerfs, l'ont apprise à l'autre moitié; mais ici, personne ne s'occupe de ces bagatelles que pour s'en amuser. Je ne sais pas si cela produira sur vous le même effet, mais voilà que j'ai rempli une longue lettre de toutes ces folies.

»Croyez-moi toujours, etc.»

LETTRE CCLX

A M. MURRAY

Venise, 24 janvier 1817.

................................................

«La comtesse Albrizzi m'a prié de lui donner un exemplaire de mes œuvres; je vous prie donc de m'en envoyer un, afin que je puisse la satisfaire. Vous pouvez y comprendre les dernières publications, dont je n'ai rien vu et ne connais rien, excepté d'après votre lettre du 13 décembre.

»Mrs. Leigh me dit que la plupart de ses amis préfèrent les deux premiers chants. Je ne sais pas si c'est là l'opinion générale (ce n'est pas la sienne au moins), mais cela me paraîtrait assez naturel. Quant à moi, je pense différemment, ce qui est naturel aussi; mais qui a tort ou raison, est ce qui importe fort peu.

»J'ai appris par une lettre de Pise, du docteur Polidori, qu'il était sur le point de retourner en Angleterre pour aller au Brésil faire une spéculation médicale avec le consul danois. Comme vous êtes en faveur auprès des puissances du jour, ne pourriez-vous pas lui procurer quelques lettres de recommandation de vos amis ministériels pour quelques-uns des colons portugais? Il connaît bien sa profession, et ne manque pas de mérite en général: – ses défauts sont ceux de la jeunesse et d'une vanité bien pardonnable. Il était impossible qu'il restât davantage avec moi: j'avais assez à faire de me tirer de mes propres embarras; et comme des préceptes sans exemple ne peuvent produire un très-bon effet, j'ai cru qu'il valait mieux lui donner son congé, mais je lui connais peu de défauts et quelques qualités. Il a des talens et de l'esprit, entend très-bien sa profession, est honorable dans sa conduite, et n'est pas du tout méchant. Je crois qu'avec quelque bonne chance, il deviendra un membre utile de la société (dont il retranchera tous les membres malades) et de la Faculté de Médecine. Si vous pouvez lui être utile, ou que vous connaissiez quelqu'un qui soit dans ce cas, employez-vous pour lui, je vous prie, car il a sa fortune à faire. Il a fait à Pise un journal de médecine, sous les yeux de Vacca (le premier chirurgien du continent); Vacca l'a corrigé, et il doit renfermer quelques renseignemens précieux sur la pratique du pays. Si vous pouvez l'aider aussi à publier ce journal, par votre influence sur vos confrères, ne manquez pas de le faire; – je ne vous demande pas de le publier vous-même, cette prière faite d'une manière aussi directe étant trop embarrassante. Il a aussi une tragédie que je n'ai pas vue, et dont par conséquent je ne dirai rien; mais la circonstance même d'avoir été capable d'une telle entreprise à vingt-et-un ans (en supposant qu'il n'ait pas d'autre mérite) prouve en sa faveur, et annonce en lui des dispositions à se cultiver. Ainsi, si par le moyen de vos recommandations vous pouvez le servir auprès de vos amis ministériels, dans le but qu'il se propose, je désire que vous le fassiez; il me semble que quelques-uns de vos gens de l'amirauté doivent se trouver dans le cas de le pouvoir.»

 

LETTRE CCLXI

A M. MURRAY

Venise, 15 février 1817.

«J'ai reçu vos deux lettres, mais non pas le paquet que vous m'annoncez. Puisque les dépouilles de Waterloo sont arrivées, je vous en fais présent, si vous voulez bien les accepter: faites-moi, je vous prie, ce plaisir.

»Je n'ai pas exactement compris, d'après votre lettre, ce qui a été omis ou non dans la publication, mais je la verrai probablement quelque jour. Je ne puis attribuer à M. Gifford ou à vous qu'un bon motif pour cette omission; cependant, comme notre manière de voir en politique est directement opposée, nous ne serions probablement pas du même avis sur ces passages: toutefois, s'il ne s'agit que d'une note ou de plusieurs notes, ou seulement d'un vers ou deux, cela ne peut avoir d'importance. Vous parlez d'un poème; quel poème? dites-le-moi dans votre première.

»Je ne connais, de la querelle de M. Hobhouse avec la Quarterly Review, que l'article lui-même, qui certainement est assez dur; mais je suis aussi d'avis qu'il eût mieux valu ne pas répondre, surtout après que M. W*** W***, qui ne vous tourmentera plus, vous avait déjà tracassé 58. J'ai été fort contrarié de ce que Hobhouse m'a dit que sa lettre ou sa préface devait m'être adressée. Lui et moi sommes amis d'ancienne date; je lui ai beaucoup d'obligations, et il ne m'en a aucune qui n'ait été effacée et plus qu'acquittée. Mais M. Gifford et moi sommes amis aussi, et il s'est montré le mien en littérature, en dépit de mille inconvéniens et malgré la différence de nos âges, de nos mœurs, de nos habitudes, et même de nos opinions politiques: c'est pourquoi je me trouve dans une situation très-gauche entre M. Gifford et mon ami Hobhouse, et ne puis que souhaiter qu'ils n'eussent pas ensemble de différend, ou que celui qu'ils ont pût s'arranger. Quant à la réponse, je ne l'ai pas vue. Une chose assez singulière, c'est que, liés aussi intimement que nous le sommes, M. Hobhouse et moi, nous soyons si réservés sur nos affaires littéraires. Par exemple, l'autre jour, il désirait avoir un manuscrit du troisième chant pour le lire à son frère: je lé lui ai refusé. Je n'ai jamais vu son journal, ni lui le mien (je n'ai fait que celui que j'ai envoyé à ma sœur, et qui n'est qu'une description très-rapide des montagnes); je ne sache pas non plus que l'un de nous deux ait jamais vu les productions de l'autre avant leur publication.

Note 58: (retour) Il y a ici beaucoup d'obscurité dans le texte, peut-être causée par une faute d'impression.(Note du Trad.)

»Je n'ai pas vu l'article de la Revue d'Édimbourg sur Coleridge; mais que je sois attaqué ou non dans celui-là ou dans quelqu'autre de la même revue, cela ne m'en donnera pas une plus mauvaise opinion de M. Jeffrey, et ne me fera jamais oublier que sa conduite envers moi a été des plus généreuses depuis quatre ans et plus.

»J'ai oublié de vous dire que je viens de terminer une espèce de poème ou de drame en dialogue 59 et en vers blancs, que j'avais commencé l'été dernier en Suisse, et dont l'Incantation est un fragment. Il est en trois actes, mais d'un genre sombre, métaphysique et indéfinissable. Presque tous les personnages, à l'exception de deux ou trois, sont des esprits de la terre, de l'air et des eaux. La scène est dans les Alpes: le héros est une espèce de magicien tourmenté par des remords, dont la cause n'est qu'à demi expliquée. Il erre en invoquant ces esprits qui lui apparaissent, et ne lui servent à rien. Enfin, il pénètre jusque dans la demeure du Mauvais Principe lui-même, pour évoquer une ombre qui paraît, et lui donne une réponse ambiguë et désagréable; et au troisième acte, ses domestiques le trouvent expirant dans une tour où il a étudié son art. Vous devez voir par cette esquisse que je n'ai pas grande opinion de ce caprice d'imagination; mais du moins j'ai fait en sorte d'en rendre la représentation impossible, mes relations avec Drury-Lane m'ayant donné le plus grand dégoût pour le théâtre.

Note 59: (retour) Manfred.

»Je ne l'ai pas même mis au net, et me sens en ce moment trop enclin à la paresse pour en commencer la copie. – Quand je l'aurai, je vous l'enverrai, et vous pourrez le jeter au feu, ou non.»

LETTRE CCLXII

A M. MURRAY

Venise, 25 février 1817.

«Je vous ai écrit l'autre jour en réponse à votre lettre; maintenant je viens vous importuner pour que vous me fassiez une commission, si vous voulez être assez bon pour vous en charger.

»Vous connaissez peut-être M. Love, le bijoutier d'Old-Bond-street. En 1813, ayant l'intention de retourner en Turquie, j'achetai chez lui, et lui payai argent comptant, une douzaine de tabatières environ, de plus ou moins de valeur, pour faire des présens à quelques Musulmans de ma connaissance. Je les ai maintenant avec moi. L'autre jour, ayant eu besoin de faire faire un changement au couvercle de l'une de ces boîtes (pour y placer un portrait), il s'est trouvé que c'était de l'argent doré au lieu d'or, quoiqu'elle ait été vendue et payée pour telle. J'ai, bien entendu, repris la boîte pour la conserver in statu quo. Ce que je désire de vous, est que vous voyiez le susdit M. Love, pour l'informer de cette circonstance, en ajoutant, de ma part, que j'aurai soin que sa fraude ne reste pas impunie.

»S'il n'y a pas de remède devant les tribunaux, il y a du moins celui très-équitable de faire connaître son crime 60, c'est-à-dire son argent doré, et que le diable l'emporte ensuite!

Note 60: (retour) Il y a ici un jeu de mot intraduisible: le mot guilt, qui veut dire crime, se prononce comme gilt (argent doré), et cette double acception forme dans le texte un calembourg, mais pour l'oreille seulement.(Note du Trad.)

»Je conserverai soigneusement, jusqu'à mon retour, tout ce que j'ai acheté chez lui dans cette occasion, puisque la peste, qui règne en Turquie, est une barrière au voyage que je voulais y faire, ou plutôt à cause de la quarantaine sans fin qu'il faudrait subir avant de débarquer au retour. Exposez-lui, je vous prie, l'affaire avec toute l'inflexibilité convenable.

»Je vous ai envoyé, l'autre jour, quelques extraits d'une espèce de drame, que j'ai commencé en Suisse, et fini ici. Vous me direz si vous les avez reçus. – Ils étaient contenus dans une seule lettre. Je n'ai pas encore eu le courage de le recopier, autrement je vous l'enverrais sous enveloppe en plusieurs fois.

»Le carnaval est terminé il y a aujourd'hui huit jours.

»M. Hobhouse est encore à Rome, à ce que je crois. Je suis en ce moment un peu indisposé: les veilles, la dissipation et quelques autres accessoires, m'ont un peu troublé le sang; mais j'ai en perspective la tranquillité et la tempérance du carême.

»Croyez-moi, etc.

»P. S. Rappelez-moi au souvenir de M. Gifford. Je n'ai pas reçu votre paquet de paquets. Cherchez pour moi, dans un Coup-d'œil sur l'Italie, par Moore (le docteur Moore); vous y trouverez une notice sur le doge Valière (ce devrait être Faliéri), et sa conspiration, ou les motifs qui l'y portèrent. Faites-moi copier cela et envoyez-le moi dans une lettre le plus tôt possible. J'en ai besoin, et ne puis trouver ici de narration aussi bonne de cette affaire; quoique le patriote voilé et le lieu où il fut couronné et décapité ensuite, existe encore, et qu'on vous les montre. J'ai fouillé dans toutes leurs histoires; mais la politique de l'ancienne aristocratie est la cause du silence que gardent les historiens sur les motifs qui déterminèrent ce doge, et qui n'étaient autre qu'une injure particulière que lui avait faite un des patriciens.

»J'ai envie d'écrire une tragédie sur ce sujet, qui me paraît très-dramatique: – un vieillard, jaloux et conspirant contre un état dont il est le chef régnant. Cette dernière circonstance rend ce fait le plus remarquable de l'histoire de toutes les nations, et le seul de ce genre qu'on puisse y trouver.»

LETTRE CCLXIII

A M. MOORE

Venise, 28 février 1817.

«Vous vous plaignez peut-être autant maintenant de la fréquence de mes lettres, que vous vous plaigniez autrefois de leur rareté. Je crois que celle-ci est la quatrième depuis autant de mois. Je suis impatient de recevoir de vos nouvelles, et même plus que de coutume, parce que votre dernière m'annonçait que vous ne vous portiez pas bien. A présent je suis moi-même à un régime de malade; je suis un peu sur les dents par suite du carnaval, c'est-à-dire des derniers jours, et d'avoir passé une partie des nuits; – mais c'est fini, – et maintenant nous avons le carême avec son abstinence et sa musique sacrée.

»Le carnaval s'est terminé par un bal masqué à la Fenice, où je suis allé, ainsi qu'à la plupart des redoutes, etc., etc.; – et quoiqu'au total je n'aie pas été très-dissipé, je m'aperçois pourtant que la lame use le fourreau, je ne fais cependant que d'entrer dans ma vingt-neuvième.

Ainsi donc, nous n'irons plus courir si tard la nuit, quoique le cœur soit toujours aussi tendre, et le clair de lune aussi beau; car, de même que la lame use le fourreau, l'ame use le sein qui la renferme, il faut au cœur une petite pause pour respirer, et l'amour lui-même a besoin de repos. Ainsi donc, quoique la nuit soit faite pour aimer, et que le jour revienne trop tôt, nous n'irons plus courir si tard à la clarté de la lune.

»J'ai eu dernièrement des nouvelles en fait de littératoure, ainsi que j'ai entendu prononcer ce mot une fois par l'éditeur du Monthly. J'ai appris que W. W. a publié et répondu aux attaques du Quarterly, dans la Chronique du savant Perry. J'ai lu ses poésies l'automne dernier, et entr'autres j'y ai trouvé une épitaphe sur son boule-dogue, et une autre sur moi-même; mais je prends la liberté de l'assurer (comme l'astrologue Partridge), que non-seulement je suis encore vivant, mais même que je l'étais au moment où il la composa......... ...............................

Hobhouse, aussi, à ce que j'apprends, a décoché une lettre contre le Quarterly qui m'est adressée. Je me trouve dans une position embarrassante entre lui et Gifford, qui sont tous deux mes amis.

»Et voici le mois où vous allez paraître. – Par le corps de Diane (c'est un juron vénitien), j'éprouve autant d'impatience (quoique sans aucune crainte pour vous), que si j'avais moi-même un ouvrage dans le genre plaisant prêt à être publié, ce qui serait, comme vous savez, les antipodes de mes compositions précédentes. Je ne crois pas que vous ayez autre chose à craindre que votre propre réputation. Il faut la soutenir. Comme vous ne m'avez jamais montré un vers de votre ouvrage, je ne sais pas même le rhythme que vous avez adopté; mais il faut que vous m'en envoyiez un exemplaire par Murray, et alors vous saurez ce que j'en pense. Je gage que vous vous faites petit: – réellement vous êtes, de tous les auteurs, le seul vraiment modeste que j'aie rencontré, ce qui paraîtrait assez étrange à ceux qui se rappellent vos mœurs quand vous étiez jeune, – c'est-à-dire quand vous étiez extrêmement jeune; – je ne veux vous reprocher ni votre âge, ni votre moralité.

 

»Je crois vous avoir dit que la E. R. m'avait attaqué dans un article sur Coleridge (que je n'ai pas lu). – «Et tu, Jeffrey? Il n'y a que perfidie dans la vile espèce humaine.» Cependant je l'absous de toute attaque présente et future; car je trouve qu'il a déjà poussé jusqu'au dernier point la clémence à mon égard, et j'aurai toujours bonne opinion de lui. Je m'étonne seulement qu'il n'ait pas commencé plus tôt, la ruine de mon bonheur domestique offrant à tout le monde une belle occasion, et dont tous ceux qui l'ont pu, ont bien fait de profiter.

»Si je vis encore dix ans, vous verrez pourtant que tout n'est pas fini pour moi. – Je ne dis pas en fait de littérature, car cela compte pour rien, et quelqu'étrange que cela puisse vous paraître, je ne crois pas que ce soit là ma vocation; – mais vous verrez que je ferai quelque chose (les tems et la fortune le permettant) qui, comme la cosmogonie ou création du monde, embarrassera les philosophes de tous les siècles. Cependant je doute que ma constitution tienne jusque-là, je l'ai parfois diablement exercée 61.

Note 61: (retour) Il y a dans le texte exorcised, qui veut dire exorcisée, à la place d'exercised (exercée), l'o qui est italique étant placé là par plaisanterie.(Note du Trad.)

»Je n'ai pas encore fixé l'époque de mon retour, mais je crois que ce sera au printems. Il y aura un an au mois d'avril que je suis absent. Vous ne me parlez jamais de Rogers, ni de Hodgson, ni de votre voisin l'ecclésiastique qui a obtenu dernièrement une cure auprès de vous. A-t-il aussi un enfant? C'était tout ce qui lui manquait la dernière fois que je l'ai vu..................... ..............

»Donnez-moi de vos nouvelles, je vous prie, à vos momens de loisir, et croyez-moi toujours sincèrement et affectueusement votre, etc.»