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L'archéologie égyptienne

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Le reste du mobilier funèbre ne donnait pas aux menuisiers moins d’ouvrage que les momies. On voulait des coffres de différente taille pour le trousseau du mort, pour ses intestins, pour ses figurines funéraires, des tables pour ses repas, des chaises, des tabourets, des lits où étendre le cadavre, des traîneaux pour l’amener au tombeau, même des chars de guerre ou de promenade. Les coffrets où l’on enfermait les canopes, les statuettes funéraires, les vases à libations, sont divisés en plusieurs compartiments : un chacal accroupi est posé quelquefois par-dessus et sert comme de poignée pour soulever le couvercle. Ils étaient munis chacun d’un petit traîneau, pour qu’on pût les traîner sur le sol pendant les cérémonies de l’enterrement. Les lits ne sont pas rares. Beaucoup sont identiques aux angarebs des Nubiens actuels, de simples cadres en bois, sur lesquels on tendait de grosses étoffes ou des lanières en cuir entre-croisées. La plupart n’ont guère plus d’un mètre et demi en longueur ; le dormeur ne pouvait pas s’y étendre, mais y reposait pelotonné sur lui-même. Les lits ornés étaient de la même longueur que les nôtres, ou à peu près. Le châssis en était le plus souvent horizontal, quelquefois incliné légèrement de la tête aux pieds. Il était souvent assez élevé au-dessus du sol, et on y montait au moyen d’un banc ou même d’un petit escalier portatif.

Le détail ne nous en serait guère connu que par les monuments figurés, si, en 1884 et 1885, je n’en avais découvert deux complets, l’un à Thèbes, dans une tombe de la XIIIe dynastie, l’autre à Akhmîm, dans la nécropole gréco-romaine. Deux lions de bonne volonté ont étiré leur corps en guise de châssis, la tête au chevet, la queue recourbée sur les pieds du dormeur. Au-dessus s’élève une sorte de baldaquin, qui servait lors de l’exposition des momies. Rhind en avait déjà rapporté un qui orne aujourd’hui le musée d’Édimbourg.

C’est un temple, dont le toit arrondi est soutenu par d’élégantes colonnettes en bois peint. Une porte gardée par deux serpents familiers était censée donner accès à l’intérieur. Trois disques ailés, de plus en plus grands, garnissaient les corniches superposées au-dessus de la porte, et une rangée d’uraeus lovés se dressait au couronnement de l’édifice. Le baldaquin du lit de la XIIIe dynastie est beaucoup plus simple, une sorte de balustrade en bois découpé et enluminé, à l’imitation des paquets de roseaux qui décorent le haut des parois de temple, le tout surmonté de la corniche ordinaire. Dans le lit de l’époque grecque, les balustres sont remplacés sur les côtés par des figures de la déesse Mâït, sculptées et peintes, accroupies et la plume aux genoux.

À la tête et au pied, Isis et Nephthys se tiennent debout et étendent leurs bras frangés d’ailes. La voûte est à jour : des vautours y planent au-dessus de la momie, et deux statuettes d’Isis et de Nephthys agenouillées pleurent sur elle. Les traîneaux qui menaient les morts au tombeau étaient, eux aussi, décorés d’une sorte de baldaquin, mais d’aspect très différent. C’est encore un naos, mais à panneaux pleins, comme ceux que j’ai découverts, en 1886, dans la chambre de Sennotmou à Gournét-Mourraï. Quand on y pratiquait quelques jours, c’étaient des lucarnes carrées par lesquelles on apercevait la tête de la momie : Wilkinson en a décrit un de ce genre, d’après les peintures d’une tombe thébaine.

Dans tous les cas, les panneaux étaient mobiles. Le mort une fois déposé sur la planche du traîneau, on les dressait chacun en sa place ; le toit recourbé et garni de sa corniche posait sur le tout et formait couvercle. Plusieurs des fauteuils du Louvre et du British Museum ont été fabriqués vers la XIe dynastie. Ce ne sont pas les moins beaux, et l’un d’eux a conservé une vivacité de couleurs extraordinaires.

Le cadre, jadis garni d’un treillis de cordelettes, repose sur quatre pieds de lion. Le dossier est orné de deux fleurs et d’une ligne de losanges en marqueterie d’ébène et d’ivoire, qui se détache sur un champ rouge. Des tabourets de travail semblable, et des pliants, dont les pieds sont formés par des têtes d’oies aplaties, se trouvent dans tous les musées.

Les Pharaons et les hauts fonctionnaires recherchaient des modèles plus compliqués. Leurs sièges étaient parfois fort hauts. Ils avaient pour bras deux lions courants, ou pour supports des prisonniers de guerre liés dos à dos.

Un escabeau, placé sur le devant, servait de marchepied pour y monter, ou de point d’appui au personnage assis. Nous ne possédons jusqu’à présent aucun meuble de ce genre. Les peintures nous montrent qu’on corrigeait la dureté des fonds cannés ou treillissés en les recouvrant de matelas et de coussins richement ouvrés. Les coussins et les matelas ont disparu, et l’on a supposé qu’ils étaient recouverts en tapisserie. Sans doute la tapisserie était connue en Égypte, et un bas-relief de Béni-Hassan nous apprend comment on la fabriquait.

Le métier, quoique très simple, rappelle celui dont se servent aujourd’hui encore les tisserands d’Akhmîm. Il est horizontal et se compose de deux cylindres minces, ou plutôt de deux bâtons, séparés par un espace d’un mètre cinquante, et engagés chacun dans deux grosses chevilles plantées dans le sol à quatre-vingts centimètres l’une de l’autre ou environ. Les lisses de la chaîne étaient attachées solidement, puis roulées autour du cylindre de tête jusqu’à tension convenable. Des bâtons de croisure, disposés d’espace en espace, facilitent l’introduction des broches chargées de fils. Le travail commençait par en bas, ainsi qu’on fait encore aux Gobelins. Le tissu était tassé et égalisé au moyen d’un peigne grossier, puis enroulé au fur et à mesure sur le cylindre inférieur. On fabriquait ainsi des tentures et des tapis décorés les uns de figures, les autres de dessins géométriques, zigzags ou damiers ; toutefois, un examen attentif des monuments m’a démontré que la plupart des sujets où l’on a cru reconnaître des exemples de tapisserie sont en cuir peint et découpé.

L’industrie du cuir était très florissante. Il y a peu de musées qui ne possèdent une paire au moins de sandales ou de ces bretelles de momie, dont les bouts sont en peau estampée, et portent une figure de dieu ou de Pharaon, une légende hiéroglyphique, une rosace, parfois le tout réuni. Ces petits monuments ne remontent guère plus haut que le temps des grands-prêtres d’Ammon ou des premiers Bubastites. C’est à la même époque qu’on doit attribuer l’immense dais du musée de Boulaq. Le catafalque sur lequel la momie reposait, pendant le transport de la maison mortuaire au tombeau, était garni souvent d’une couverture d’étoffe ou de cuir souple. Parfois les côtés retombaient droit, parfois ils étaient relevés en guise de rideaux par des embrasses et laissaient apercevoir le cercueil. Le dais de Déir-el-Baharî fut préparé pour la princesse Isimkheb, fille du grand-prêtre Masahirti, femme du grand-prêtre Menkhopirrî, mère du grand-prêtre Pinotmou III. La pièce centrale, plus longue que large, se divise en trois bandes d’un cuir bleu céleste qui a passé au gris perle. Les deux latérales sont semées d’étoiles jaunes : sur celle du milieu s’étagent des vautours, dont les ailes étendues protègent le mort. Quatre pièces, formées de carrés verts et rouges, disposés en damier, se rattachent aux quatre côtés. Celles qui pendent sur les côtés longs sont reliées à la centrale par une bordure d’ornements. À droite, des scarabées aux ailes déployées alternent avec les cartouches du roi Pinotmou II, sous une frise de fers de lance. À gauche, le motif est plus compliqué.

Une touffe de lotus, flanquée des cartouches royaux, occupe le centre ; viennent ensuite deux antilopes agenouillées chacune sur une corbeille, puis deux bouquets de papyrus, enfin deux scarabées, semblables à ceux de l’autre bordure. La frise en fers de lance court au-dessus. La technique de cet objet est très curieuse. Les hiéroglyphes et les figures étaient découpés dans de larges feuilles de cuir, comme nous faisons nos chiffres et nos lettres dans des plaques en cuivre. On cousait ensuite, sous les vides ainsi ménagés, des lanières de cuir de la couleur qu’on voulait donner aux ornements ou aux caractères, et, pour dissimuler le rapiéçage, on étalait par derrière de longs morceaux de cuir blanc ou jaune clair. Malgré les difficultés d’agencement que présente ce travail, le résultat obtenu est des plus remarquables. La silhouette des gazelles, des scarabées et des fleurs est aussi nette et aussi élégante que si elle était tracée au pinceau sur une muraille ou sur une feuille de papyrus. Le choix des motifs est heureux, la couleur harmonieuse et vive à la fois. Les ouvriers qui ont conçu et exécuté le dais d’Isimkheb avaient une longue pratique de ce système de décoration et du genre de dessin qu’il comportait. Je ne doute pas, quant à moi, que les coussins des fauteuils et des divans royaux, les voiles des barques funéraires ou divines sur lesquelles on embarquait les momies et les statues des dieux, ne fussent le plus souvent en cuir. La voile en damier d’une des barques peintes au tombeau de Ramsès III rappelle à s’y méprendre les pans en damier du dais.

Les vautours et les oiseaux fantastiques d’une autre barque ne sont ni plus étranges ni plus difficiles à obtenir en cuir que les vautours et les gazelles d’Isimkheb.

Les témoignages anciens nous permettent d’affirmer que les Égyptiens d’autrefois brodaient aussi bien que ceux du moyen âge. Les deux cuirasses qu’Amasis donna, l’une aux Lacédémoniens, l’autre au temple d’Athéna à Lindos, étaient en lin, mais ornées de figures d’animaux en fil d’or et de pourpre : chaque fil se composait de trois cent soixante-cinq brins tous distincts. Si nous remontons plus haut, nous voyons, par les monuments figurés, que les Pharaons avaient des vêtements chargés de bordures en tapisserie ou en broderie, appliquées ou exécutées à même l’étoffe. Les plus simples consistent en une ou plusieurs bandes de nuance foncée courant parallèlement au liséré. Ailleurs, on aperçoit des palmettes ou des séries de disques et de points, des feuillages, des méandres, et même, ça et là, des figures d’hommes, de divinités ou d’animaux, dessinées probablement à l’aiguille. Aucune des étoffes qu’on a trouvées jusqu’à présent sur les momies royales n’est décorée de la sorte et ne nous permet de juger la qualité et la technique de ce travail. Une fois, seulement, j’ai découvert, sur le corps d’une des princesses de Déir-el-Bahari, un cartouche brodé en fil rose pâle. Les Égyptiens de la bonne époque paraissent avoir estimé particulièrement les étoffes unies, surtout les blanches. Ils les fabriquaient avec une habileté merveilleuse, sur un métier identique de tous points à celui qu’ils avaient inventé pour la tapisserie. Les portions de linceul qui enveloppent les mains et les bras de Thoutmos III sont aussi ténues que la plus fine mousseline de l’Inde, et mériteraient le nom d’air tissé, aussi bien au moins que les gazes de Cos. C’est là toutefois pure question de métier où l’art n’a rien à réclamer. L’usage de la broderie et de la tapisserie ne se répandit communément en Égypte que vers la fin de la domination persane et le commencement de la domination grecque, sous l’influence des premiers Lagides. Alexandrie fut peuplée en partie de colons phéniciens, syriens, juifs qui y apportèrent avec eux les procédés de fabrication usités dans leur pays et y fondèrent des manufactures bientôt florissantes. Pline attribue aux Alexandrins l’invention de tisser à plusieurs lisses les étoffes qu’on appelle brocarts (polymita) ; et, au temps des premiers Césars, c’était un fait reconnu que « l’aiguille de Babylone était désormais vaincue par le peigne du Nil ». Les tapisseries alexandrines n’étaient pas décorées presque exclusivement de dessins géométriques, comme les vieilles tapisseries égyptiennes : on y voyait, au témoignage des anciens, des figures d’animaux et même d’hommes. Rien ne nous est resté des chefs-d’œuvre qui remplissaient le palais des Ptolémées, mais des fragments ont été découverts en Égypte, qu’on peut attribuer à la basse époque impériale, l’enfant à l’oie, décrit par Wilkinson, les divinités marines d’une pièce que j’ai achetée à Coptos. Les nombreux linceuls brodés et garnis de bandes en tapisserie, qu’on a découverts récemment au Fayoum et près d’Akhmîm, proviennent presque tous de tombes coptes et relèvent, par conséquent, de l’art byzantin plus que de l’art égyptien.

 

3. Les métaux

On partageait les métaux en deux groupes, séparés par la mention de quelques espèces de pierres précieuses, comme le lapis-lazuli et la malachite : celui des métaux nobles, l’or, l’électrum, l’argent ; celui des métaux vils, le cuivre, le fer, le plomb, auquel on joignit plus tard l’étain.

Le fer était réservé aux armes et aux outils de fatigue, ciseaux de sculpteur et de maçon, tranchants de hache ou d’herminette, lames de couteaux ou de scies. Le plomb ne servait guère. On en incrustait parfois les battants de portes des temples, des coffrets, des meubles, et on en fabriquait de petites statues de divinités, surtout des Osiris ou des Anubis. Le cuivre pur était trop mou pour résister à l’usage courant : le bronze était le métal favori des Égyptiens. Il n’est pas vrai qu’ils aient réussi, comme on l’a dit souvent, à lui procurer par la trempe la dureté du fer ou de l’acier, mais ils ont su en obtenir des qualités très différentes, en variant les éléments et les proportions de l’alliage. La plupart des objets examinés jusqu’à présent ont donné les quantités de cuivre et d’étain employées aujourd’hui encore à la fabrication du bronze commun. Ceux que Vauquelin étudia, en 1825, renfermaient 84 pour 100 de cuivre, 14 d’étain, 1 de fer et d’autres matières. Un ciseau, rapporté d’Égypte par Wilkinson, ne contenait que 5,9 pour 100 d’étain, 0,1 de fer et 94 de cuivre. Des débris de statuettes et de miroirs, analysés plus récemment, ont rendu une quantité notable d’or ou d’argent, et correspondent aux airains de Corinthe. D’autres ont la teinte et la composition du laiton. Beaucoup des plus soignés résistent d’une manière étonnante à l’humidité, et s’oxydent très difficilement ; on les frottait encore chauds d’un vernis résineux, qui en remplissait les pores et laissait à la surface une patine inaltérable. Chaque espèce avait son emploi : le bronze ordinaire pour les armes et pour les amulettes communs, les alliages analogues au laiton pour les ustensiles de ménage, les bronzes d’or et d’argent pour les miroirs, les armes de prix, les statuettes de luxe. Aucun des tableaux que j’ai vus dans les tombes ne représente la fonte et le travail du bronze, mais l’examen des objets eux-mêmes supplée à ce défaut des monuments figurés. Les outils, les armes, les anneaux, les vases à bon marché étaient partie forgés, partie coulés d’un seul coup dans des moules en terre réfractaire ou en pierre. Tout ce qui était œuvre d’art était coulé en un ou plusieurs morceaux, selon les cas, puis les pièces ajustées, soudées et retouchées au burin. Le procédé le plus fréquemment employé était celui de la fonte au carton : un noyau de sable ou de terre mêlée de charbon pilé était introduit dans le moule, et le modelé du dehors se répétait grossièrement au dedans. La couche de métal était souvent si mince qu’elle aurait cédé à une pression un peu forte si on n’avait pris la précaution de la consolider en laissant le noyau en place pour lui servir de soutien.

La plupart des ustensiles domestiques et des petits instruments du ménage étaient en bronze. On les rencontre par milliers en original dans nos musées, en figure sur les peintures et les bas-reliefs. L’art et le métier n’étaient pas incompatibles en Égypte, et le chaudronnier lui-même s’efforçait de prêter à ses œuvres les plus humbles une forme élégante et des ornements de bon goût. La marmite où le cuisinier de Ramsès III composait ses chefs-d’œuvre est supportée par des pieds de lion. Telle bouilloire semble ne différer en rien de la bouilloire moderne, mais examinez-la de près : l’anse est une fleur de papyrus épanouie, dont les pétales, inclinés sur la tige, s’appuient au rebord du goulot.

Le manche des couteaux ou des cuillers est presque toujours un cou de canard ou d’oie recourbé ; le bol est parfois un animal, une gazelle liée comme les bêtes offertes en sacrifice.

Un petit chacal est accroupi sur la poignée d’un sabre. Une paire de ciseaux du musée de Boulaq a, pour branche principale, un captif asiatique, les bras liés derrière le dos. Tel miroir est une feuille de lotus découpée : la queue sert de manche. Telle boîte à parfums est un poisson, telle autre un oiseau, telle autre un dieu grotesque. Les vases à eau lustrale, que les prêtres et les prêtresses portaient à la main pour asperger les fidèles ou le terrain sur lequel défilaient les processions, méritent une place particulière dans l’estime des connaisseurs. Ils sont pointus ou ovoïdes par le bout, et décorés de tableaux au trait ou en relief. Tantôt ce sont des images de dieux, chacune dans un cadre ; tantôt c’est une scène d’adoration. Le travail en est ordinairement très fin.

La statuaire s’était de bonne heure emparée du bronze : malheureusement, aucune ne nous a été conservée de ces idoles qui remplissaient les temples de l’ancien empire. Quoi qu’on en ait dit, nous ne possédons point de statuettes en bronze qui soient antérieures à l’expulsion des Hyksos. Quelques-unes des figures qui proviennent de Thèbes sont bien certainement de la XVIIIe et de la XIXe dynastie : la tête de lion ciselée qui était avec les bijoux de la reine Ahhotpou, l’Harpocrate de Boulaq, qui porte le prénom de Kamos et le nom d’Ahmos Ier, plusieurs Ammon du même musée, qu’on dit avoir été découverts à Médinét-Habou et à Shéikh Abd-el-Gournah. Les pièces les plus importantes appartiennent à la XXIIe dynastie, ou lui sont postérieures et contemporaines des Pharaons saïtes ; beaucoup ne remontent pas plus haut que les premiers Ptolémées. Un fragment qui est en la possession du comte Stroganoff, et qui a été recueilli dans les ruines de Tanis, faisait partie d’une statue votive du roi Pétoukhânou. Elle était exécutée aux deux tiers au moins de la grandeur naturelle, et c’est le morceau le plus considérable que nous ayons jusqu’à présent. Le portrait de la dame Takoushit, donné par M. Démétrio au musée d’Athènes, les quatre figures de la collection Posno, aujourd’hui au Louvre, le génie agenouillé de Boulaq, sont originaires de Bubastis et datent probablement des années qui précédèrent l’avènement de Psamitik Ier. La dame Takoushit est debout, le pied en avant, le bras droit pendant, le bras gauche replié et ramené contre la poitrine.

Elle est vêtue d’une robe courte, brodée de scènes religieuses, et a des bracelets aux bras et aux mains. La perruque à mèches carrées, régulièrement étagées, lui emboîte la tête. Le détail des étoffes et des bijoux est dessiné en creux, au trait, à la surface du bronze, et relevé d’un fil d’argent. La face est un portrait et semble indiquer une femme d’âge mûr. Le corps est, selon la tradition des écoles égyptiennes, un corps de jeune fille, élancé, ferme et souple. Le cuivre est mêlé fortement d’or et a des reflets doux, qui se marient de la manière la plus heureuse avec le riche décor de la broderie. Autant l’aspect en est fin et harmonieux, autant celui du génie agenouillé de Boulaq est rude et heurté. Il a la tête d’épervier et adore le soleil levant, comme c’est le devoir des génies d’Héliopolis ; son bras droit est levé en l’air, son bras gauche se serre contre la poitrine. Le style de l’ensemble est sec, et le grenu de l’épiderme augmente encore l’impression de dureté ; mais le mouvement est juste, énergique, et le masque d’oiseau s’ajuste au buste d’homme avec une sûreté surprenante. Les mêmes qualités et les mêmes défauts se retrouvent sur l’Hor de la collection Posno.

Debout, les bras lancés en avant, à hauteur de la tête, il soulève le vase à libations et en verse le contenu sur un roi jadis placé devant lui. La rudesse est moins sensible dans les trois autres figures, surtout dans celle qui porte le nom de Mosou gravé à la pointe sur la poitrine, à l’endroit du cœur.

Elle est debout, comme Hor, le pied gauche en avant, le bras gauche tombant près de la cuisse. La main droite, relevée à la hauteur du sein, tenait le bâton de commandement. Le torse est nu, les reins sont ceints du pagne rayé, dont la pointe retombe carrément entre les deux cuisses. La tête est coiffée de la perruque courte, à petites mèches fines, imbriquées l’une sur l’autre. L’oreille est ronde et grande. Les yeux, bien ouverts, étaient sertis d’argent et ont été volés par quelque fellah.

Les traits ont une expression remarquable de hauteur et de fermeté. Que dire, après cela, des milliers d’Osiris, d’Isis, de Nephthys, d’Hor, de Nofirtoum, qu’on a retirés du sable et des décombres à Saqqarah, à Bubaste et dans toutes les villes du Delta ? Beaucoup, sans doute, sont de charmants morceaux de vitrine et se recommandent par la perfection de la fonte ou par la délicatesse du travail ; mais la plupart sont des objets de commerce, fabriqués pendant des siècles sur les mêmes modèles, et peut-être dans les mêmes moules, pour l’édification des dévots et des pèlerins. Ils sont mous, vulgaires, sans originalité, et ne se distinguent non plus les uns des autres que les milliers de figurines coloriées, dont nos marchands d’objets de sainteté encombrent leurs étalages. Seules, les images d’animaux, les béliers, les sphinx, les lions surtout, gardèrent jusqu’à la fin un cachet d’individualité des plus prononcés. Les Égyptiens avaient pour les félins une prédilection particulière : ils ont représenté le lion dans toutes les attitudes, chassant l’antilope, se ruant sur les chasseurs, blessé et se retournant pour mordre sa blessure, au repos et couché d’un calme dédaigneux, et nul peuple ne l’a rendu avec pareille connaissance de ses habitudes ni avec pareille intensité de vie. Plusieurs dieux et plusieurs déesses, Shou, Anhouri, Bastît, Sokhit, Tafnout, avaient forme de lion ou de chat, et comme le culte en était plus populaire dans le Delta que partout ailleurs, il ne se passe guère d’années où l’on ne déterre, au milieu des ruines de Bubastis, de Tanis, de Mendès ou de quelque ville moins célèbre, de véritables dépôts où les figurines de lion ou de lionne, de femmes ou d’hommes à têtes de lion et de chat, se comptent par milliers. Les chats de Bubaste et les lions de Tell-es-sebâ remplissent nos musées. Les lions d’Horbaït peuvent compter parmi les chefs-d’œuvre de la statuaire égyptienne. Le nom d’Apriès est inscrit sur le plus grand d’entre eux, mais ce témoignage précis nous manquerait, que les caractères du morceau nous ramèneraient invinciblement à l’époque saïte.

 

Il faisait partie des pièces qui composaient l’ornementation d’une porte de temple ou de naos, et la face postérieure en était engagée dans un mur ou dans une pièce de bois. Il est pris au piège, ou couché dans une cage oblongue, d’où ne sortent que la tête et les pattes de devant. Les lignes du corps sont simples et puissantes, l’expression de la face calme et forte. Il égale presque par l’ampleur et la majesté les beaux lions en calcaire d’Amenhotpou III.

L’idée d’appliquer l’or et les métaux nobles sur le bronze, sur la pierre ou sur le bois, était déjà ancienne en Égypte, au temps de Khéops. L’or est très souvent mêlé d’argent à l’état naturel ; quand il en renfermait 20 pour 100, il changeait de nom et s’appelait électrum (asimou). L’électrum a une belle teinte jaune clair. Il pâlit à mesure que la proportion augmente : à 60 pour 100, il est presque blanc. L’argent venait surtout d’Asie en anneaux, en plaques ou en briquettes d’un poids déterminé. L’or et l’électrum arrivaient partie de Syrie, en briques et en anneaux, partie du Soudan, en pépites ou en poudre. L’affinage et la fonte sont figurés sur les monuments des anciennes dynasties. Un bas-relief de Saqqarah nous montre la pesée de l’or confié à l’ouvrier qui doit le travailler ; un autre, de Béni-Hassan, le lavage et la mise au feu du minerai ; un autre, de Thèbes, l’orfèvre assis devant son creuset, le chalumeau à la bouche pour attiser la flamme, et la pince à la main droite, prêt à saisir le lingot.

Les Égyptiens ne frappaient ni monnaies ni médailles. À cela près, ils tiraient le même parti que nous des métaux précieux. Comme nous dorons les croix et les coupoles des églises, ils recouvraient d’or les portes des temples, le soubassement des murs, les bas-reliefs, les pyramidions d’obélisque, les obélisques entiers. Ceux de la reine Hatshepsitou à Karnak étaient bardés d’électrum. « On les apercevait des deux rives du Nil, et ils inondaient les deux Égyptes de leurs reflets éblouissants, quand le soleil se levait entre eux, comme il se lève à l’horizon du ciel. » C’étaient des lames forgées à grands coups de marteau sur l’enclume. Pour les objets de petite dimension, on se servait de pellicules, battues entre deux morceaux de parchemin. Le musée du Louvre possède un véritable livret de doreur, et les feuilles qu’il renferme sont aussi fines que celles des orfèvres allemands au siècle passé. On les fixait sur le bronze au moyen d’un mordant ammoniacal. S’il s’agissait de quelque statuette en bois, on commençait par coller une toile fine ou par déposer une mince couche de plâtre, et l’on appliquait l’or ou l’argent par-dessus ce premier enduit. Il est question de statues en bois doré de Thot, d’Hor, de Nofirtoum, dès le temps de Khéops. Le seul temple d’Isis, dame de la pyramide, en renfermait une douzaine, et ce n’était pas l’un des plus grands dans la nécropole memphite. Les temples de Thèbes paraissent en avoir possédé des centaines, au moins sous les dynasties conquérantes du nouvel empire, et les sanctuaires ptolémaïques ne le cédaient pas en cela aux thébains.

Le bronze et le bois doré ne suffisaient pas toujours aux dieux : c’était de l’or massif qu’il leur fallait et on leur en donnait le plus possible. Les rois de l’ancien et du moyen empire leur dédiaient déjà des statues taillées en plein dans les métaux précieux. Les pharaons de la XVIIIe et de la XIXe dynastie, qui puisaient presque à volonté dans les trésors de l’Asie, renchérirent sur ce qu’avaient fait leurs prédécesseurs. Même quand la décadence fut venue, on vit de simples seigneurs féodaux continuer la tradition des grands règnes, et, comme Montoumhît, prince de Thèbes, remplacer les images en or et en argent, que les généraux d’Ashshourbanipal avaient enlevées à Karnak, pendant les invasions assyriennes. La quantité de métal ainsi consacrée au service de la divinité était considérable. Si on y trouvait beaucoup de figures hautes de quelques centimètres à peine, on en trouvait beaucoup aussi qui mesuraient trois coudées et plus. Il y en avait d’un seul métal, or ou argent ; il y en avait qui étaient partie en or, partie en argent ; il y en avait enfin qui se rapprochaient de la statuaire chryséléphantine des Grecs, et où l’or se combinait avec l’ivoire sculpté, avec l’ébène, avec les pierres précieuses. Ce qu’elles étaient, on le sait très exactement, et par les représentations qui en existent un peu partout, à Karnak, à Médinét-Habou, à Dendérah, dans les tombes, et par les statues de calcaire et de bois : la matière avait beau changer, le style ne variait pas. Rien n’est plus périssable que de pareilles œuvres ; la valeur même des matériaux qui les composent les condamne sûrement à la destruction. Ce que les guerres civiles, les invasions étrangères, la rapacité des pharaons et des gouverneurs romains avait épargné, devint la proie des chrétiens. Quelques statuettes mignonnes, placées sur les momies en guise d’amulettes, quelques figures, adorées comme divinités domestiques et égarées dans les ruines des maisons, quelques ex-voto, oubliés dans le coin obscur d’un temple, sont parvenus jusqu’à nous. Le Phtah et l’Ammon de la reine Ahhotpou, un autre Ammon en or de Boulaq et le vautour en argent découvert à Médinét-Habou vers 1885, sont les seules pièces de ce genre attribuées certainement à la grande époque. Le reste est saïte ou ptolémaïque et ne se recommande point par la perfection du travail. La vaisselle que renfermaient les temples et les maisons n’a pas eu meilleure chance que les statues. Le Louvre a acquis, au commencement du siècle, des coupes à fond plat que Thoutmos III donna à l’un de ses généraux, Thoutii, en récompense de sa bravoure. La coupe d’argent est très mutilée, la coupe d’or est intacte et d’un fort joli dessin.

Les parois latérales sont ornées d’une légende hiéroglyphique. On a gravé au fond une rosace, autour de laquelle circulent six poissons. Une bordure de fleurs de lotus, reliées par une ligne courbe, tourne autour du sujet principal. Les cinq vases de Thmouïs, conservés à Boulaq, sont en argent. Ils faisaient partie du mobilier sacré, et avaient été enfouis dans une cachette, où ils sont demeurés jusqu’à nos jours. Rien n’indique leur âge ; mais, qu’ils soient de l’époque grecque ou de l’époque thébaine, la facture est purement égyptienne. Il ne reste plus de l’un d’eux que le couvercle avec une poignée formée de deux fleurs réunies par la tige. Les autres sont intacts et décorés au repoussé de boutons de lotus et de lotus épanouis.

Le galbe en est élégant et simple, l’ornementation sobre et légère, le relief très fin ; l’un d’eux est pourtant entouré d’une ceinture d’oves assez fortes, dont la saillie altère un peu les contours de la panse.

Ce sont là des pièces intéressantes ; mais le nombre en est si restreint, que nous aurions une idée très incomplète de l’orfèvrerie égyptienne si les représentations figurées ne venaient à notre aide. Les pharaons n’avaient pas comme nous la ressource de jeter dans la circulation, sous forme de monnaie, l’or et l’argent qu’ils recevaient des peuples vaincus. La part des dieux prélevée, ils n’avaient d’autre alternative que de fondre en lingots, ou de changer en vaisselle et en bijoux ce qui leur revenait du butin. Ce qui était vrai des rois l’était encore plus des particuliers, et, pendant six ou huit siècles au moins, à partir d’Ahmos Ier, le goût de l’argenterie fut poussé jusqu’à l’extravagance. Toutes les maisons possédaient non seulement ce qu’il fallait pour le service de la table, plats, aiguières à pied, coupes, gobelets, paniers sur lesquels on gravait au trait des figures d’animaux fantastiques, mais de grands vases décoratifs qu’on remplissait de fleurs, ou qu’on étalait sous les yeux des convives les jours de gala.

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