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Chroniques de J. Froissart, Tome Premier, 1re partie

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SECONDE PARTIE.
DE L'ÉDITION DU PREMIER LIVRE

CHAPITRE I.
DU CHOIX DU TEXTE

Froissart ne se recommande pas seulement par l'importance historique du monument dont nous lui sommes redevables, il est encore un de nos écrivains les plus aimables et les plus naïvement originaux. Les moyens d'information et de vérification dont un chroniqueur, si consciencieux qu'il fût, pouvait disposer avant l'invention de l'imprimerie étaient fort imparfaits, tandis que la critique a maintenant sous la main des instruments de contrôle de toute sorte. Aussi, les progrès de l'érudition tendent, il faut bien en convenir, à diminuer la valeur purement historique de l'œuvre de Froissart: on peut, on doit même y relever, soit dans les noms de lieu ou de personne, soit dans les dates, soit dans le récit des faits, d'innombrables erreurs, en prenant garde toutefois de ne pas faire sonner trop haut ces faciles triomphes, sous peine de tomber dans un pédantisme qui ne serait pas exempt de niaiserie. Froissart historien est condamné à vieillir, et il ne reste debout que par parties. Seul, Froissart écrivain, Froissart peintre du détail des mœurs, est toujours jeune; et l'on peut dire qu'il défie les atteintes du temps et de la critique.

Tenir compte de ce double aspect, littéraire et historique, de l'œuvre de Froissart, et ne sacrifier, s'il est possible, aucun des deux à l'autre, telle est la première, l'indispensable condition que doit remplir une bonne édition des Chroniques.

Il y a une méthode qui consiste à découper plus ou moins arbitrairement le premier livre par chapitres et à publier les uns à la suite des autres les petits fragments des diverses rédactions qui correspondent à chacun de ces chapitres. Dans ce système, le lecteur voit se succéder sans cesse par morceaux des textes différents et souvent contradictoires qui viennent rompre presque à chaque page le fil du récit dont ils troublent en même temps l'unité morale. Une édition ainsi comprise est d'une exécution relativement facile, mais elle a un inconvénient capital: elle rend Froissart à peu près illisible, elle enlève à ce chroniqueur le bénéfice d'une narration homogène, limpide, courante, et le dépouille dans une certaine mesure de ce charme littéraire qui constitue la part la plus brillante, la plus durable de sa gloire. D'ailleurs, un si bizarre mélange, on dirait presque, une telle macédoine, qui peut plaire à des esprits préoccupés avant tout du solide et du copieux, n'aurait que peu de chances de recevoir un accueil favorable, en France du moins, où l'on porte jusque dans l'érudition un goût moins robuste peut être que dans d'autres pays. Enfin, ne serait-il pas regrettable, pour ne pas dire imprudent, de présenter au public un travail qui ferait double emploi avec l'édition si pleine d'ampleur, publiée sous les auspices de l'Académie de Belgique? Il a fallu, du reste, des considérations aussi puissantes pour qu'on se décidât à rejeter une méthode que recommande l'imposante autorité de M. le baron Kervyn de Lettenhove.

A défaut d'une combinaison satisfaisante de tout point que l'on a vainement cherchée, on a dû se contenter du système suivant qui a semblé le moins mauvais: on a adopté comme texte l'une des trois rédactions du premier livre, et l'on a renvoyé en appendice à la fin de chaque volume les variantes des autres rédactions qui ajoutent quelque chose à ce texte au point de vue des faits historiques.

Des trois rédactions, quelle est celle qui avait le plus de titres à devenir le texte de cette édition?

On doit supposer que la dernière en date, c'est-à-dire la troisième était dans la pensée de Froissart une édition définitive de son premier livre; car on ne s'expliquerait pas autrement pourquoi ce chroniqueur aurait pris la peine de remanier encore une fois son œuvre. Aussi, cette rédaction mériterait sans nul doute la préférence, si elle était complète; mais elle ne comprend qu'un tiers environ du premier livre et s'arrête à la fin du règne de Philippe de Valois. On ne pouvait donc la choisir comme texte sans emprunter à une autre rédaction la partie postérieure à 1350: on a repoussé cette combinaison pour ne pas retomber dans l'inconvénient d'un texte composite que l'on voulait éviter à tout prix.

La seconde rédaction a sur la troisième l'avantage d'embrasser le premier livre dans son entier. Toutefois, nous avons la preuve que l'auteur de cette seconde rétractation ne la considérait pas comme la forme définitive de son premier livre, qu'elle n'était pas ce qu'il eût désiré qu'elle fût: cette preuve, c'est le fait même d'une rédaction postérieure à la seconde qui la fournit. On ne voit pas, en effet, pourquoi Froissart, parvenu sur le seuil de la vieillesse, s'il avait été pleinement satisfait de la seconde, aurait repris la plume pour écrire la troisième.

Il a semblé qu'à tout prendre ce qu'il y avait de mieux à faire, c'était de choisir comme texte la première rédaction. Les seconde et troisième rédactions, longtemps ensevelies dans les archives de quelques grandes familles, avaient dormi dans un oubli complet jusqu'à nos jours: on ne connaît que deux manuscrits de la seconde et qu'un seul de la troisième. La première rédaction, au contraire, a joui aux quatorzième et quinzième siècles d'une vogue immense, attestée encore aujourd'hui par les cinquante manuscrits qui nous en restent, ainsi que par les nombreuses éditions qui datent des premiers temps de l'imprimerie. Or, la vogue d'un livre s'ajoute à sa valeur intrinsèque pour le recommander à l'attention de la postérité, parce que cette vogue qui ne peut s'expliquer que par une certaine affinité entre la nature de l'ouvrage, les opinions, les passions, les tendances de l'auteur et celles de ses contemporains, est un indice précieux des mœurs et du génie d'une époque. De plus, il ne faut pas perdre de vue qu'on lit toujours le texte d'un livre avant les variantes: ne convient-il pas dès lors de demander ce texte à celle des trois rédactions qui a précédé les deux autres?

Rien n'est plus curieux que d'étudier dans les trois rédactions du premier livre les modifications de toute sorte que Froissart a successivement apportées au récit des mêmes événements; rien n'est plus piquant que de rechercher, soit dans la vie du chroniqueur, soit dans l'histoire de son temps, la cause de ces modifications. Mais ces recherches ne peuvent être sûres et ces comparaisons fécondes que si les diverses rédactions apparaissent au lecteur dans l'ordre où elles se sont succédé chronologiquement: une considération aussi grave, aussi puissante, aurait suffi pour faire adopter comme texte la première rédaction; et si l'ordre chronologique que nous avons adopté est exact, la conformité à cet ordre assure à notre édition un avantage inappréciable qu'on ne trouve dans aucune autre.

La première rédaction revisée, qui a été choisie de préférence à la première rédaction proprement dite, offre d'ailleurs, de 1372 à 1377, le même texte que la seconde; elle a, suivant une remarque déjà faite, moins d'originalité et de développement que cette dernière de 1325 à 1345; en revanche, elle est souvent plus complète et parfois supérieure au point de vue littéraire pour toute la partie du premier livre comprise entre 1345 et 1372.

Le manuscrit de la Bibliothèque impériale coté 6477 à 6479 = B1 renferme sans contredit le plus ancien et le meilleur des trois exemplaires complets qui nous restent de la première rédaction revisée; le choix de ce manuscrit comme texte du premier livre de notre édition était donc naturellement indiqué. L'empreinte du dialecte wallon, qui est très-marquée dans B1, pourra dérouter un peu le lecteur; mais c'est un signe non douteux d'antiquité et d'authenticité, un trait caractéristique qui distingue les meilleurs manuscrits des deux premiers livres des Chroniques145.

On rencontre ça et là dans le manuscrit B1 des lacunes et de mauvaises leçons; on a comblé ces lacunes et corrigé ces leçons défectueuses à l'aide des autres manuscrits de la première rédaction revisée, en ayant soin d'indiquer au bas de la page les manuscrits qui ont fourni ces restitutions, et de mettre entre parenthèses les mots ou les passages empruntés.

Le manuscrit B1, comme tous les exemplaires vraiment anciens, n'a pas de titres de chapitres. Le texte y est divisé en alinéas dont le commencement est marqué par des lettres capitales alternativement rouges et bleues. Cette division a été, sauf de très-rares exceptions, scrupuleusement maintenue; seulement, les alinéas du manuscrit B1 forment autant de paragraphes dans notre édition.

La loi que s'est imposée l'éditeur de faire lui-même toutes ses copies et collations, a permis d'apporter au texte, déjà publié tant de fois, de la première rédaction, des améliorations vraiment imprévues. Comme on s'est abstenu d'avertir le lecteur par des notes placées au bas des pages, c'est ici le lieu de citer au moins un exemple de ces corrections. Dans le récit de la bataille de Cassel, tous les éditeurs qui nous ont précédé ont lu ainsi le passage suivant: «… onques de tous ces XVIm Flamens n'en escapa NUL, et fu leur chapitainne mors. Et si ne seut onques nuls de ces signeurs nouvelle li uns de l'autre, jusques adont qu'il eurent tout fait; et onques des XVm Flamens qui mors y demorèrent, n'en recula uns seuls146…» Ces lignes renferment une contradiction flagrante qui aurait dû rendre la leçon suspecte et éveiller la défiance des éditeurs. Il est clair, en effet, que si quinze mille Flamands seulement sur seize mille sont morts, Froissart n'a pas pu dire dans la phrase précédente qu'il n'en est pas échappé un seul. Dacier semble avoir aperçu cette contradiction, et c'est sans doute pour tourner la difficulté que le savant éditeur avait substitué le chiffre de seize mille morts147 aux quinze mille du texte; mais aucun manuscrit n'autorise cette substitution. On trouvera pour la première fois dans notre édition ce passage restitué tel que Froissart a dû l'écrire: «… onques de tous ces seize mille Flamens n'en escapa MIL148…» Du reste, nous avons corrigé sur ce point les éditions antérieures sans y viser le moins du monde; et grande a été notre surprise lorsque nous avons vu que tous nos prédécesseurs avaient mal lu le passage dont il s'agit. Ce curieux exemple prouve une fois de plus que dans les travaux d'érudition il faut tout faire soi-même. M. Jourdain faisait de la prose sans le savoir: en ne confiant à personne le soin de transcrire et de collationner les manuscrits, le plus humble corrige parfois les erreurs des autres sans s'en douter.

 

CHAPITRE II.
DES VARIANTES

Les variantes comprennent tout ce qui, dans les différentes rédactions et les divers manuscrits, ajoute quelque chose au texte au point de vue historique. La nature, le nombre de ces variantes qui, pour le premier livre du moins, dépassent presque toujours en étendue, et souvent en importance, le texte lui-même, les a fait renvoyer en appendice à la fin de chaque volume, où elles sont distribuées par paragraphes correspondant à ceux du texte et selon l'ordre chronologique des rédactions.

A désigne la première rédaction proprement dite; B la première rédaction revisée; les chiffres placés après A et B indiquent les divers manuscrits qui appartiennent à ces deux rédactions.

La mention: Ms. d'Amiens équivaut à la seconde rédaction, ainsi nommée du principal manuscrit qui la représente; cette mention s'applique, non-seulement au manuscrit d'Amiens, mais encore à celui de Valenciennes, qui n'est le plus souvent qu'un abrégé du premier, et dont le texte s'arrête au siége de Tournai, en 1340. Ce manuscrit offre néanmoins quelques additions que l'on trouvera dans notre appendice; et toutes les fois que les leçons par où il diffère de l'original ont semblé plus ou moins intéressantes au point de vue historique, on les a recueillies avec soin et placées au bas de la page comme variantes du texte d'Amiens.

La rubrique: Ms. de Rome correspond à la troisième rédaction que le manuscrit unique de la Bibliothèque du Vatican nous a conservée.

En tête de chaque variante figure l'indication du manuscrit qui l'a fournie, et dont le feuillet est marqué après cette variante. Ce soin constant de renvoyer au feuillet, plus indispensable pour les manuscrits, quoique moins usité, que l'indication de la page pour les imprimés, est une petite innovation de l'éditeur.

Si plusieurs manuscrits donnent la même variante, on s'impose la tâche de les indiquer tous; et dans ce cas le feuillet de la variante se rapporte toujours au manuscrit indiqué le premier et d'après lequel a été établi le texte de cette variante. Vous lisez, par exemple: «Mss. A 7, 18, 19, 23 à 35: ce roi Philippe nommé Beau de France. Fo 2 vo149.» Le fo 2 vo est celui du manuscrit A 7 d'où la variante est tirée; et si vous vous reportez au paragraphe150 consacré au classement des manuscrits A, vous y voyez que A 7 désigne le ms. de la Bibliothèque impériale coté 2655. Avec ce système, on ne publie pas une seule variante sans en faire connaître la provenance; or il est très-intéressant pour l'historien comme pour le philologue de se rendre un compte exact de cette provenance.

Ce serait, qu'on ne l'ignore pas, se méprendre étrangement que de voir dans cette énumération de tous les manuscrits qui reproduisent la même variante un vain étalage d'érudition. Une leçon a plus ou moins de valeur selon le nombre, l'ancienneté, l'authenticité des manuscrits qui la fournissent. Relever cette leçon sans indiquer tous les exemplaires où on la trouve, c'est ne faire que la moitié de la tâche; c'est produire un témoignage sans offrir au public les moyens de l'apprécier et de le contrôler.

Notre édition ne donne que les variantes historiques, mais on a compris le mot historique dans son sens le plus large, comme on pourra s'en convaincre si l'on jette un regard sur l'énorme appendice de ce volume. Les variantes relatives aux dates, aux noms de lieu et de personne, qui sont historiques au premier chef, ont été l'objet d'une attention toute spéciale. On a pris soin de recueillir les leçons même défectueuses, toutes les fois qu'elles modifient essentiellement la forme d'un nom. Bref, on a rejeté seulement les variantes de pure forme, celles qui n'auraient ajouté au texte ni un fait ni un détail nouveau. Du reste, les philologues n'y perdront rien, car les mots et les tournures plus ou moins remarquables sont réservés pour le glossaire qui doit embrasser tous les manuscrits et toutes les variantes sans exception.

Le but qu'on s'est proposé, en ne publiant que les variantes historiques, a été moins d'économiser du temps et de l'espace que d'éviter les répétitions et surtout de dégager nettement, de bien mettre en lumière ce qui appartient en propre à chaque rédaction. Tel est en effet le principal avantage du système adopté dans cette édition: il permet de comparer et de mesurer matériellement, de toucher pour ainsi dire du doigt les différences que les diverses rédactions du premier livre présentent entre elles. L'œuvre de Froissart ressemble à ces forêts où les arbres sont si rapprochés et si touffus qu'ils portent un ombrage trop épais; pour faire pénétrer davantage le jour et circuler la lumière dans les profondeurs de cette forêt, nous y avons percé des avenues, nous en avons élagué les broussailles et les branchages parasites.

On sera peut-être surpris de ne pas trouver ici un certain nombre de variantes d'un intérêt historique qui figurent dans l'édition de Dacier d'où elles ont sans doute passé dans celle de M. Kervyn de Lettenhove; mais il y avait une bonne raison de ne les pas reproduire: elles sont fausses. Il convient de citer quelques exemples à l'appui d'une assertion qui ne manque pas de gravité. La leçon: «huit151» dans l'édition de Dacier, p. 40, et dans celle de M. Kervyn, t. II, p. 168 au bas de la page; la leçon: «quatre cens» Dacier, p. 42 et M. Kervyn, t. II, p. 177; la leçon: «mars» Dacier, p. 57 et M. Kervyn, t. II, p. 234 en note; la leçon: «neuf» Dacier, p. 64 et Kervyn, t. II, p. 273 en note; ces leçons et une foule d'autres dont il serait fastidieux de donner le détail, doivent être le résultat de mauvaises152 lectures, car on n'a pu les retrouver dans aucun des nombreux manuscrits du premier livre; et pourtant tous ceux que Dacier et M. Kervyn ont compulsés ont été mis à contribution. L'illustre académicien français semble avoir commis la faute grave de laisser à des copistes le soin de recueillir les variantes de son édition: il n'y a donc pas lieu de s'étonner si les erreurs abondent dans cette partie de son travail. La reproduction de ces erreurs dans la belle publication de M. Kervyn est un peu plus difficile à comprendre: peut-être faut-il l'expliquer en supposant que l'érudit belge a cru pouvoir emprunter des variantes garanties par le nom de Dacier, sans les soumettre à un contrôle préalable.

CHAPITRE III.
DU SOMMAIRE

Le texte et les variantes forment deux parties qui, bien que distinctes par leur place respective, n'en sont pas moins inséparables; et si on les compare, les rapports qu'elles soutiennent se présentent sous un double aspect: tantôt, et c'est le cas le plus ordinaire, les variantes n'ajoutent au texte que des faits de détail et des développements plus complets; tantôt au contraire, la seconde et la troisième rédaction, qui ont fourni la majeure partie des variantes du premier livre, présentent de foncières différences, non-seulement entre elles, mais encore avec le texte, c'est-à-dire avec la première rédaction. Dans ce dernier cas, il n'y a évidemment rien autre chose à faire, même dans un sommaire, qu'à résumer les rédactions différentes en les publiant les unes à la suite des autres et selon l'ordre chronologique. Mais dans le premier cas, dans le cas où les variantes enrichissent le texte plutôt qu'elles ne le démentent, où les diverses rédactions, loin de se contredire, se complètent, il y a lieu d'assigner au sommaire un rôle vraiment important et jusqu'à un certain point original.

 

Il suffit de parcourir superficiellement l'ensemble de ce volume pour être frappé de la multitude innombrable de détails précieux disséminés çà et là, mais qui risquent d'échapper par leur éparpillement à l'attention des érudits eux-mêmes. Combien il serait désirable qu'il fût fait un choix, un triage intelligent de tout ce que l'on rencontre d'intéressant, soit dans le texte, soit dans les variantes! Combien il serait commode de trouver résumée, condensée dans une narration unique la matière historique éparse dans les diverses rédactions!

Le but principal de notre sommaire est précisément de répondre à ce besoin. C'est une tâche délicate, ardue, nécessairement imparfaite comme toute besogne composite, pleine de difficultés de plus d'un genre qu'on ne se flatte nullement d'avoir surmontées; mais l'utilité et la commodité qui doivent résulter d'un pareil travail rendront le lecteur, on l'espère du moins, indulgent pour les fautes inévitables de l'exécution.

Notre sommaire ne pouvait atteindre le but proposé sans prendre des développements relativement considérables. Aussi a-t-il le caractère d'une traduction à peu près littérale dans tous les passages que leur importance rend dignes d'une attention plus spéciale. Un cadre aussi large a permis en outre d'identifier presque tous les noms de lieu et de restituer les noms de personne sous leur forme moderne. Lorsqu'il s'agit de noms peu connus ou d'identifications et de restitutions plus ou moins sujettes à controverse, on a placé des notes au bas des pages pour expliquer et, s'il y a lieu, justifier la solution que l'on a adoptée. On a souligné les noms que l'on n'a pu parvenir à identifier afin d'appeler sur ces petits problèmes l'attention d'érudits plus spéciaux et plus compétents. Il n'a été apporté du reste au texte de Froissart que de très-légères et très-rares corrections de détail qui modifient çà et là un prénom, un nom ou une date, et ces corrections sont toujours mises entre parenthèses. Ainsi conçu, notre sommaire ne tient sans doute pas lieu d'un glossaire ou de tables géographique et onomastique; mais il aidera peut-être à attendre avec moins d'impatience ce complément indispensable de notre édition. Ce n'est pas encore la critique, mais c'est déjà l'élucidation aussi complète que possible du premier livre des Chroniques.

Ce sommaire est divisé en un certain nombre de chapitres dont chacun comprend une série de faits qui se relient entre eux et présentent un caractère d'unité véritable. Ces chapitres pourraient donner lieu à autant de dissertations critiques qui seraient destinées, dans une publication en quelque sorte parallèle, à compléter et à contrôler l'œuvre de Froissart à l'aide de tous les documents contemporains, imprimés ou manuscrits. Dans ces dissertations, on poserait à propos de chacun des chapitres du sommaire, et l'on essayerait, s'il était possible, de résoudre les trois questions suivantes: 1o Froissart a-t-il puisé son récit dans un autre chroniqueur, ou l'a-t-il tiré de son propre fonds? 2o Quelles modifications ont été apportées au récit primitif dans les rédactions successives du premier livre? 3o Enfin, quelle est la part de la vérité et celle de l'erreur dans le texte des Chroniques? Ces dissertations critiques permettraient de rassembler et de grouper en quelque sorte toute la matière historique du quatorzième siècle autour de l'œuvre de Froissart: les témoins si nombreux et si divers de cette curieuse époque seraient entendus tour à tour, mais c'est le chroniqueur de Valenciennes qui conduirait le chœur.

145Ce manuscrit, chef-d'œuvre de la calligraphie de la fin du quatorzième siècle, semble avoir appartenu à quelque membre de la famille flamande des Berthout, seigneurs de Grammene, dont on voit les armes: D'ARGENT à trois pals de gueules, sur le feuillet de garde placé en tête du premier volume. Sur les armes des Berthout, seigneurs de Grammene, voyez Butkens, Trophées de Brabant, édit. de 1724, t. I, p. 319. Les Berthout de Grammene étaient une branche cadette de l'illustre et puissante famille des Berthout, avoués de Malines, qui portaient: D'OR à trois pals de gueules. On peut lire sur ces derniers le beau mémoire de M. Félix van den Branden de Reeth, couronné par l'Académie de Belgique, 1844, in-4o de 195 pages.
146[OE]uvres de Froissart, publiées sous les auspices de l'Académie de Belgique, par M. le baron Kervyn de Lettenhove, Chroniques, t. II, p. 223.
147Chroniques de Froissart, édit. de Dacier, p. 50. Buchon a suivi Dacier ici comme partout. Voyez l'édition du Panthéon, t. I, p. 40.
148Froissart et les autres chroniqueurs du quatorzième siècle ont singulièrement exagéré les pertes des Flamands à Cassel. Notre ami, M. Mannier a publié les noms des victimes dont le nombre ne dépassa guère 3000. Voyez Les Flamands à la bataille de Cassel. Paris, A Aubry, 1863.
149P. 217.
150Voyez la première partie de cette Introduction, chap. I, , p. XXXIV.
151Une note de Dacier relative à ce passage prévient le lecteur que la leçon «huit» est, non une restitution pure et simple, mais une correction de l'éditeur. L'édition de Dacier dont il s'agit ici, commencée avant 1789, était en cours de publication lorsque la Révolution vint l'interrompre, et elle ne fut jamais reprise par son auteur; il n'en reste que des bonnes feuilles dont le beau caractère fait le plus grand honneur aux presses de l'Imprimerie royale. Notre exemplaire compte 632 pages, et il a été acheté à la vente du cabinet de feu Champollion-Figeac.
152Le lecteur voudra bien remarquer qu'on s'est abstenu dans le cours de l'édition de signaler les fautes commises par les précédents éditeurs. Ici, force nous était de critiquer les autres, si nous ne voulions laisser croire qu'un certain nombre de variantes véritablement historiques ont été omises dans notre relevé. Il n'en est pas moins vrai que nous n'avons aucun goût, Dieu merci, pour ce genre de besogne. Qui sait d'ailleurs si notre paresse n'y trouve pas son compte?