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Chroniques de J. Froissart, Tome Premier, 1re partie

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CHAPITRE XI.
1330 et 1331. NOUVELLE AMBASSADE ENVOYÉE A LONDRES PAR PHILIPPE DE VALOIS, ET PRESTATION DE FOI ET HOMMAGE AU ROI DE FRANCE PAR LE ROI D'ANGLETERRE. (§§ 46 et 47.)

1330. Philippe de Valois envoie en Angleterre l'évêque de Chartres218, l'évêque de Beauvais219, Louis de Clermont duc de Bourbon, Jean IV comte de Harcourt et Jean II sire de Tancarville220, pour recevoir l'hommage lige qui n'a pas été prêté à Amiens. Les envoyés français assistent à Londres aux parlements réunis par Édouard III pour délibérer sur la question de l'hommage auquel il est tenu comme duc de Guyenne. L'opinion circule déjà parmi le peuple que le roi d'Angleterre a plus de droits à la couronne de France que Philippe de Valois, mais Édouard III et ses conseillers ne font pas encore attention à ces rumeurs. P. 96 et 97.

1331. Après avoir passé tout l'hiver à Londres sans pouvoir obtenir une réponse définitive, les ambassadeurs de Philippe de Valois reçoivent enfin, le 30 mars 1331, des lettres patentes d'Édouard III, scellées de son grand sceau, où le roi d'Angleterre se reconnaît l'homme lige du roi de France et lui fait prestation de foi et hommage lige. Voici en substance la teneur de ces lettres. P. 97.

Le roi d'Angleterre rappelle que naguère, à Amiens, il s'est refusé à la prestation de foi et hommage lige, et qu'il n'a fait hommage au roi de France que par paroles générales, en disant qu'il entendait faire seulement ce que ses prédécesseurs avaient fait; mais aujourd'hui il n'hésite pas, après plus ample information, à se reconnaître l'homme lige du roi de France, et à déclarer lige l'hommage prêté jadis à Amiens, tant pour le duché de Guyenne que pour les comtés de Ponthieu et de Montreuil. Édouard III promet en outre, en son nom et au nom de ses successeurs, ducs de Guyenne, de faire hommage désormais, soit pour le duché de Guyenne, soit pour les comtés de Ponthieu et de Montreuil, selon les formules de l'hommage lige qui sont textuellement énoncées. Enfin, le roi d'Angleterre termine en disant que ses successeurs, ducs de Guyenne et comtes de Ponthieu et de Montreuil, seront tenus de renouveler ces présentes lettres, toutes les fois qu'ils entreront en l'hommage du roi de France. P. 97 à 99.

CHAPITRE XII.
1331 à 1334. BANNISSEMENT DE ROBERT D'ARTOIS QUI, APRÈS AVOIR SÉJOURNÉ EN BRABANT ET DANS LE MARQUISAT DE NAMUR, SE RÉFUGIE EN ANGLETERRE. (§§ 48 ET 49.)

1331. Robert d'Artois, marié à la sœur de Philippe de Valois qu'il a contribué plus que tout autre à faire arriver au trône de France, jouit d'un très-grand crédit pendant les trois premières années du règne de son beau-frère. Robert fabrique, dit-on, une fausse charte, espérant gagner par ce moyen un procès pendant entre lui et Jeanne II, femme d'Eudes IV, duc de Bourgogne, au sujet du comté d'Artois. Philippe de Valois, sollicité par la méchante reine Jeanne de Bourgogne sa femme, sœur de l'adversaire du comte d'Artois, prend parti contre ce dernier. La charte est reconnue fausse et cancellée en séance du Parlement, une demoiselle Divion, complice de Robert, est brûlée, et le comte d'Artois n'échappe à la mort qu'en vidant le royaume221. P. 100, 307 et 308.

Première rédaction. 1331 à 1334. – Robert se rend d'abord à Namur auprès de Jean II, son neveu, fils de sa sœur. A cette nouvelle, Philippe de Valois fait mettre en prison la femme et les deux enfants du fugitif. Bientôt même le jeune [marquis] de Namur, menacé d'une guerre par Adolphe de la Marck, évêque de Liége, tout dévoué au roi de France, est obligé de congédier son oncle. P. 101.

Robert se réfugie alors auprès du puissant duc de Brabant, son cousin, qui l'accueille avec empressement et le réconforte dans son malheur. La haine de Philippe de Valois poursuit son ennemi dans ce nouvel asile, et le duc Jean III, craignant de s'attirer une mauvaise affaire avec le roi de France, tient son cousin caché au château d'Argenteul (Argenteau-sur-Meuse, selon Lancelot222). La cachette est découverte par les émissaires de Philippe de Valois dont l'irritation ne connaît plus de bornes et qui soudoie à grands frais le roi de Bohême ainsi que plusieurs seigneurs des marches d'Allemagne pour qu'ils aillent défier le duc de Brabant. Ces seigneurs auxquels refuse de s'associer le jeune marquis de Namur, malgré l'invitation du roi de France, après avoir reçu un grand renfort de gens d'armes commandés par le comte d'Eu, pénètrent en Brabant en passant à travers le Hesbaing (pays de Liége) et s'avancent jusqu'à Hanut; ils ravagent à deux reprises le pays environnant et brûlent tout sur leur passage. P. 101, 102, 310 et 311.

Le comte Guillaume de Hainaut envoie en France Jean de Beaumont, son frère, ainsi que sa femme, sœur de Philippe de Valois, négocier une trêve entre les belligérants. Le roi de France n'accorde cette trêve qu'à grand peine, et le duc de Brabant doit prendre l'engagement de subir toutes les conditions qui lui seront faites, tant par son adversaire que par les alliés de celui-ci, et de mettre dans un délai fixé Robert d'Artois hors de ses États. P. 102 et 103.

1334. D'après le conseil du duc de Brabant, Robert d'Artois, traqué en France et dans l'Empire, passe en Angleterre, sous un déguisement de marchand. Édouard III l'accueille avec bienveillance, le retient à sa cour et de son Conseil et lui assigne en fief le comté de Richmond. P. 105.

Seconde rédaction. 1331 à 1334. – Robert d'Artois, chassé de France, se rend à Valenciennes auprès du comte Guillaume de Hainaut. Le comte fait le meilleur accueil au fugitif, et il charge Jean son frère et l'évêque de Cambrai d'aller en France implorer la clémence du roi en faveur du prince exilé. Cette démarche reste infructueuse, et Philippe menace Guillaume de toute sa colère s'il continue de prêter main forte à Robert d'Artois. P. 308.

Les barons de Hainaut engagent leur comte à ne pas se mettre pour ce sujet en guerre avec le roi de France. Robert, avant de quitter Valenciennes, est comblé de présents en vêtements, chevaux et joyaux, et six mille vieux écus lui sont remis pour payer ses dépenses par le comte Guillaume. Robert d'Artois va voir à Namur sa sœur, le jeune Jean II son neveu et les frères de celui-ci, Guillaume, Robert et Louis, encore fort jeunes.

Les menaces du roi de France forcent Jean II à congédier son oncle qui va chercher un asile à Leeuw223 auprès de Jean III, duc de Brabant, son cousin. Ce dernier répond à Philippe de Valois, qui réclame l'expulsion du fugitif, que les obligations d'une parenté très-rapprochée lui font un devoir de venir en aide à Robert d'Artois, et que d'ailleurs il n'est pas convaincu du tout de la culpabilité de son cousin. P. 309, 311.

1334. Philippe déclare alors la guerre au duc Jean qui n'obtient la paix qu'à la condition de mettre hors de son pays l'ennemi du roi de France. Congédié ainsi par le duc de Brabant après avoir reçu six mille vieux écus pour payer ses frais, Robert d'Artois s'embarque pour l'Angleterre à Anvers et arrive à Sandwich. Il se met en marche pour rejoindre Édouard III qui fait alors la guerre en Écosse. Il passe par Stamford, Lincoln, Doncaster et parvient à York, qu'on dit Ebruich, où il trouve la reine Philippe, sa nièce, enceinte d'un fils [qui fut nommé plus tard Guillaume de Hatfield.] La reine fait fête à son oncle et le retient près d'elle environ une semaine; la joie de Philippe est encore accrue par la nouvelle, qu'elle reçoit en ce moment-là même, de la reddition du château d'Édimbourg. Entouré d'une escorte de trois cents archers dont Henri de Beaumont est le chef, Robert d'Artois se rend à Berwick en Écosse où il passe trois jours. Là, il apprend qu'Édouard III, après avoir établi garnison au château d'Édimbourg, est allé mettre le siége devant Stirling, et il se dirige vers cette ville. P. 313 et 314.

 

Prévenu de l'arrivée de Robert d'Artois par Henri de Beaumont qui a pris les devants, Édouard III envoie quelques-uns de ses barons à la rencontre de son oncle qu'il reçoit avec magnificence. Robert d'Artois raconte ses malheurs, l'emprisonnement de ses deux fils Jean et Charles, la confiscation de ses biens, enfin son bannissement: il n'est plus nulle part en sûreté sur le continent; et il n'est ni comte de Hainaut ni duc de Brabant ni [marquis] de Namur qui consente à lui donner asile, par crainte du roi de France. P. 314.

Le roi d'Angleterre relève le courage de Robert d'Artois et lui dit: «Bel oncle, nous avons assez pour nous et pour vous. Soyez sans inquiétude et sans crainte, car si le royaume de France est trop petit pour vous, celui d'Angleterre vous sera tout grand ouvert.» – «Monseigneur, reprend Robert d'Artois, toute mon espérance gît en Dieu et en vous, et je confesse ici que j'ai eu tort et que j'ai péché en prêtant les mains naguère à votre exhérédation. J'ai contribué pour ma part à faire celui-là roi de France qui ne m'en sait aucun gré et qui n'y a pas autant de droit que vous, car vous êtes plus rapproché d'un degré de feu Charles, le dernier roi: Philippe n'est que son cousin germain et vous êtes son neveu.» Édouard III devient tout pensif en entendant ces paroles qui ne laissent pas toutefois de lui être agréables, mais pour lors il n'y donne point d'autre suite, se réservant d'y revenir, quand il croira le moment venu. P. 314 et 315.

Troisième rédaction. 1331 à 1334. – Robert d'Artois, après avoir séjourné successivement à Namur et en Brabant, vient en Hainaut trouver le comte Guillaume son beau-frère. La comtesse de Hainaut et Jean de Hainaut entreprennent inutilement un voyage en France afin de fléchir Philippe de Valois et de le réconcilier avec Robert. Ce que voyant, le comte d'Artois, désespéré, jure qu'il honnira tout et plongera la France en de telles luttes et divisions que les suites s'en feront encore sentir dans deux cents ans. Il reçoit du comte de Hainaut tout l'argent nécessaire pour payer ses dépenses, et il prend la résolution de passer en Angleterre; mais auparavant il retourne auprès du duc de Brabant qui, après l'avoir retenu à sa cour en lui promettant de le défendre envers et contre tous, est bientôt contraint de céder aux menaces du roi de France. P. 309 et 310.

1334. Robert d'Artois s'embarque à Anvers pour l'Angleterre et il se rend auprès d'Édouard III au moment où ce prince, qui l'accueille courtoisement, se dispose à entrer en campagne contre les Écossais. Au retour de cette campagne, le roi d'Angleterre fait proposer en séance du parlement d'assigner une dotation à Robert d'Artois, l'un des plus hauts et plus nobles seigneurs qu'il y ait au monde. Philippe de Valois a mis en prison la femme, les enfants, il a confisqué les biens de son ennemi, après l'avoir banni de son royaume. C'est justice, maintenant que Robert d'Artois fait partie du conseil d'Angleterre, de le dédommager dans son pays d'adoption de ce qu'il a perdu en France. La proposition d'Édouard III est agréée, et l'on assigne à Robert le comté de Bedford dont le revenu est évalué trois mille marcs. Robert d'Artois remercie son neveu et les seigneurs, et devient ainsi l'homme lige du roi d'Angleterre pour le comté de Bedford. P. 315 et 316.

CHAPITRE XIII.
1332 et 1333. PRÉLIMINAIRES DE LA REPRISE DES HOSTILITÉS ENTRE LES ANGLAIS ET LES ÉCOSSAIS (§§ 49 ET 50)

Première et seconde rédaction. 1332. – Un an environ après l'expiration de la trêve conclue pour trois ans entre Édouard III et Robert Bruce, le roi d'Angleterre envoie des ambassadeurs auprès de David Bruce, fils et successeur de Robert, sommer ce prince de lui livrer Berwick et de reconnaître sa suzeraineté sur le royaume d'Écosse. David Bruce, après avoir consulté son conseil, répond aux envoyés d'Édouard III que les rois ses prédécesseurs n'ont jamais fait hommage aux rois d'Angleterre, et, quant à Berwick, que Robert Bruce son père, après l'avoir loyalement conquise, la lui a léguée comme légitime héritage, et qu'il est bien résolu à ne s'en point dessaisir. Le roi d'Écosse ajoute qu'il a lieu d'être surpris de voir son beau-frère d'Angleterre, en qui il devrait trouver un défenseur, vouloir ainsi s'approprier injustement le bien d'autrui. Une telle réponse est loin de satisfaire Édouard III qui convoque à un parlement à Londres, pour délibérer sur cette question, tous les barons, chevaliers et conseillers des bonnes villes de son royaume. P. 103 à 105, 313.

Première rédaction. 1333. – Édouard III fait exposer devant les représentants des trois Ordres la réponse négative rapportée par les ambassadeurs qu'il vient d'envoyer vers David Bruce. L'avis unanime du parlement est qu'il faut contraindre par la force des armes le roi d'Écosse à faire hommage et à donner satisfaction au roi d'Angleterre, son légitime suzerain. P. 105 et 106.

Édouard III, ravi de trouver ses gens aussi bien disposés, les invite à faire leurs préparatifs pour entrer en campagne et leur donne rendez-vous, au jour fixé, à Newcastle. En même temps, il députe encore une fois des ambassadeurs auprès de son beau-frère pour le sommer de nouveau et ensuite pour le défier, si David Bruce persiste dans ses premières dispositions. P. 106 et 107.

Seconde rédaction.– 1333. Édouard III, quoique mécontent de la réponse faite à ses ambassadeurs par son beau-frère, est assez disposé à en rester là, mais ses conseillers ne lui épargnent aucune remontrance pour le pousser à la guerre. Ils lui représentent surtout que les Écossais ne cessent de menacer Newcastle, Brancepeth, Percy, Arcot et les autres châteaux voisins. P. 316 et 317.

Grandes fêtes et joutes magnifiques à Londres; Jean de Hainaut y vient assister en compagnie de douze chevaliers du continent. Le prix des chevaliers étrangers est décerné au sire de Fagnolles, et le prix des écuyers à Frank de Halle qui fut fait chevalier cette même année en Écosse aux côtés du roi d'Angleterre. Ces fêtes et ces joutes, qui durent huit jours, attirent un grand concours de dames et de damoiselles. Après ces fêtes, Édouard III convoque un parlement. L'évêque de Lincoln y expose au nom du roi le refus fait par David Bruce de livrer la cité de Berwick, la forteresse de Roxburgh et de faire hommage pour son royaume d'Écosse. P. 317.

Le parlement consulté est unanime à déclarer que tous les torts sont du côté de David Bruce. Il est évident, disent les conseillers anglais, que les rois d'Écosse faisaient autrefois hommage à nos rois, car leur pays n'a jamais formé une province distincte: ce n'est qu'une enclave de la province d'York qui est un archevêché d'Angleterre. De plus, ils fabriquent leurs monnaies d'après nos usages et ordonnances, ils ont les mêmes lois et les mêmes coutumes que les Anglais, et ils parlent la même langue. D'où il appert que le royaume d'Écosse est une dépendance de celui d'Angleterre. Il convient d'envoyer une nouvelle ambassade à David Bruce, et, s'il s'obstine, de le défier et de lui déclarer la guerre. P. 318.

L'évêque de Durham, les seigneurs de Percy, de Mowbray, de Felton sont chargés de cette ambassade. Édouard III ne s'en prépare pas moins à entrer en campagne et il fixe le rendez-vous général de son armée à Newcastle. Retour de Jean de Beaumont en Hainaut. P. 318 et 319.

Troisième rédaction.– Les Anglais n'aiment pas, n'ont jamais aimé et n'aimeront jamais les Écossais: ils ont vu avec un profond déplaisir le mariage de la sœur de leur roi avec le jeune David Bruce; et quand la trêve conclue pour trois ans avec l'Écosse est expirée, ils ne souffrent pas qu'on la renouvelle, car ils veulent avoir la guerre. Telle est la nature des Anglais: ils ne savent pas, ils ne peuvent pas, ils ne veulent pas rester longtemps sans guerroyer; ils demandent à se battre, peu leur importe sous quel prétexte, et ils n'ont que trop la passion et le génie des combats. Ils ne pardonnent pas aux Écossais de leur avoir pris et d'avoir gardé Berwick, et c'est pour cela surtout que le comte de Kent s'est rendu naguère si impopulaire en consentant au mariage de la princesse [Jeanne] d'Angleterre avec le roi d'Écosse. P. 311 et 312.

A l'expiration de la trêve, les Écossais députent à Londres, pour renouveler cette trêve, une ambassade composée des évêques de Saint-Andrews et d'Aberdeen, de Robert de Vescy, d'Archibald224 de Douglas, de Simon Fraser et d'Alexandre de Ramsay. Édouard III et la reine Philippe tenaient à cette époque leur cour, tantôt à Windsor, tantôt à Eltham. Les ambassadeurs d'Écosse se rendent à Eltham où la cour se trouvait alors, désireux de conclure une longue trêve ou même un traité de paix, car c'en est fait de la puissance de l'Écosse, depuis que Robert Bruce, [Jacques] de Douglas et le comte de Murray sont morts. P. 312.

Édouard III fait aux seigneurs écossais l'accueil courtois qui est dû à des ambassadeurs de son beau-frère. Il leur promet de soumettre leur demande aux délibérations de son parlement, et d'user de toute son influence en faveur de la paix. Sur ce, les envoyés du roi d'Écosse retournent à Londres. P. 312 et 313.

Le parlement est convoqué à Westminster, car rien ne peut ni ne doit se faire sans son concours. L'évêque de Saint-Andrews y porte la parole au nom du roi d'Écosse. L'archevêque de Canterbury répond au nom du roi d'Angleterre en demandant du temps pour délibérer sur les propositions de David Bruce. Sur ces entrefaites, Édouard III s'en vient demeurer en son hôtel de Sheen sur la Tamise, à peu de distance de Westminster, et les Écossais passent plus d'un mois à Londres avant de pouvoir obtenir une réponse. P. 319 et 320.

La crainte de voir le jeune Édouard III s'amollir dans l'oisiveté comme son père Édouard II jointe au désir de reprendre Berwick, Dunbar, Dalkeith, Édimbourg, Stirling et tout le pays jusqu'au détroit de Queensferry, détermine le parlement à refuser de renouveler les trêves et de conclure la paix avec l'Écosse tant qu'elle n'aura pas restitué les dites villes à l'Angleterre. Les envoyés de David Bruce quittent le palais de Westminster aussitôt qu'ils ont reçu cette réponse qui est une déclaration de guerre déguisée; ils cheminent au long de Londres et viennent à Saint-John's-lane en Gracechurch où ils sont descendus, et de là ils retournent en Écosse. P. 320.

Les plus sages entre les Écossais disent en apprenant les nouvelles apportées à Édimbourg par l'évêque de Saint-Andrews: «Nous aurons la guerre, et nous ne sommes pas prêts. Cette fois-ci, les Anglais nous abattront, ou nous les abattrons eux-mêmes. Notre roi est jeune, et aussi le leur. Il faut qu'ils s'essayent. Il n'y a pas sous le soleil de peuple plus orgueilleux et plus présomptueux que le peuple anglais.» Les jeunes chevaliers et écuyers d'Écosse, au contraire, qui aiment les armes et ont à cœur de s'avancer, sont au comble de la joie. P. 321.

CHAPITRE XIV.
GUERRE D'ÉCOSSE; CAMPAGNE DE 1333: SIÉGE ET PRISE DE BERWICK (§§ 51 et 52)

Première rédaction.– Édouard III vient avec le gros de son armée à Newcastle où il reste quatre jours, attendant ceux de ses gens qui ne l'ont pas encore rejoint. Le quatrième jour, il se dirige du côté de Berwick, en traversant les terres des seigneurs de Percy et de Nevill, deux grands barons de Northumberland, qui, comme les seigneurs de Ross, de Lucy et de Mowbray, font frontière aux Écossais. P. 107.

Édouard III passe la Tweed qui sépare l'Angleterre de l'Écosse et, sans s'arrêter devant Berwick, il ravage et incendie quantité de villes du plat pays entourées seulement de fossés et de palissades, il s'empare du fort château d'Édimbourg et y met garnison. Puis, il passe la seconde rivière d'Écosse sous Stirling [le Forth]. Les Anglais courent tout le plat pays des environs et s'avancent jusqu'à Saint-Johnston (Perth) et Aberdeen. Ils brûlent et pillent Dunfermline; l'abbaye seule est épargnée sur l'ordre exprès du roi. Ils poussent leurs incursions jusqu'à Dundee et Dumbarton où le roi et la reine d'Écosse se sont réfugiés. Les Écossais fuient devant les envahisseurs sans leur opposer de résistance et mettent leurs personnes et leurs biens en sûreté dans les forêts de Jedburgh impraticables pour quiconque ne connaît pas le pays. P. 107 et 108.

 

Le roi David Bruce et Guillaume de Douglas, neveu de [Jacques] de Douglas mort en Espagne, ont quinze ou seize ans; le comte de Murray est encore plus jeune: l'Écosse, privée de ses plus braves et de ses plus habiles capitaines, est livrée sans défense aux attaques victorieuses des Anglais. P. 108.

Après avoir pris le château de Dalkeith, à cinq lieues d'Édimbourg, qui appartient au comte de Douglas, le roi d'Angleterre vient mettre le siége devant Berwick, cité bien fortifiée, située aux confins de l'Écosse et du royaume de Northumberland, environnée d'un bras de mer et pourvue d'une bonne garnison. Ce n'est tous les jours, pendant la durée du siége, qu'assauts, hutins, escarmouches et apertises d'armes. Les Écossais font plusieurs fois des sorties, soit de jour, soit de nuit, pour réveiller et surprendre les assiégeants; mais chaque fois ils trouvent les Anglais prêts à les recevoir et ils sont repoussés après avoir essuyé des pertes plus ou moins graves. Les assiégés, menacés de famine, demandent et obtiennent une trêve d'un mois, promettant de se rendre si le roi d'Écosse ne leur envoie aucun secours dans cet intervalle. Robert d'Artois, qui voudrait voir Édouard III tourner tout l'effort de ses armes contre la France, contribue beaucoup à décider le roi d'Angleterre à accorder cette trêve. P. 109 à 111.

Reddition de la ville et du château de Berwick. Les bourgeois se soumettent à Édouard III auquel ils prêtent serment de foi et hommage. Le roi d'Angleterre fait son entrée solennelle à Berwick au son des trompes et des nacaires; il quitte cette ville après y avoir séjourné quinze jours, y laissant une garnison de jeunes chevaliers et écuyers sous les ordres d'Édouard Baillol. Après quoi, il donne congé à ses gens et retourne à Windsor. Robert d'Artois, qui l'accompagne partout, ne cesse de l'exhorter à faire valoir ses droits à la couronne de France. P. 111 et 112.

Seconde rédaction.– Édouard III, arrivé avec le gros de son armée à Newcastle, y reçoit la nouvelle que ses prétentions sont repoussées par les Écossais; il se met aussitôt en marche pour assiéger Berwick. Précédé de ses maréchaux, le comte de Suffolk et Thomas Wager, il va coucher à Arcot225, château et ville qui appartient au seigneur de Percy: les Écossais avaient pillé la ville sans pouvoir prendre le château. Le lendemain, le roi d'Angleterre vient dîner à Percy (Alnwick). P. 321 et 322.

L'armée anglaise ne compte pas moins de dix mille hommes à cheval et de vingt mille hommes à pied, archers et gallois, sans compter la ribaudaille. Siége de Berwick. Les machines et pierriers des assiégeants abattent les officines et même les combles des salles et des chambres, et bientôt il ne reste plus aux assiégés que deux grosses tours où ils se réfugient. Les Écossais demandent et obtiennent une trêve de quinze jours, promettant de se rendre et de vider le château, sauf leur vie et leurs biens, s'ils ne reçoivent pas de secours dans l'intervalle. En même temps, ils dépêchent un écuyer, chargé de réclamer ce secours, à Saint-Johnston (Perth), une bonne ville située sur un bras de mer, où se tiennent alors auprès de leur roi et de leur reine le jeune comte de Murray, le jeune Guillaume de Douglas, neveu de [Jacques] de Douglas, Robert de Vescy, Simon Fraser et une foule d'écuyers et de bacheliers d'Écosse. David Bruce marche au secours de Berwick en passant par son château d'Édimbourg. Le lendemain de son départ de cette dernière ville, à une heure d'après-midi, le roi d'Écosse vient camper avec son armée près d'une grande abbaye de moines noirs (bénédictins), nommée au temps du roi Arthur la Noire Combe, à cause de sa situation dans une vallée et sur le bord d'une Noire226 Rivière qui sépare l'Écosse de l'Angleterre. Cette abbaye jouit du privilége d'immunité dans les guerres entre les deux pays en vertu de chartes et de bulles qui lui ont été conférées. Elle est située à neuf lieues anglaises de Roxburgh et à dix-huit de Berwick. P. 329 et 330.

La nuit même qui suit leur arrivée près de cette abbaye, au coucher du soleil, le jeune Guillaume de Douglas, le jeune comte de Murray, Robert de Vescy et Simon Fraser partent avec quatre cents armures de fer pour réveiller les Anglais. Ils chevauchent à travers des landes désertes et arrivent vers minuit assez près de Berwick, à une petite lieue de l'armée anglaise. Ils tombent à l'improviste sur leurs ennemis qui ont à peine le temps de se reconnaître, en tuent ou blessent plus de deux cents, en font prisonniers plus de quarante, puis ils regagnent sains et saufs le camp écossais en traversant les bois par où ils sont venus. P. 331 et 332.

Deux jours après cette escarmouche dont le succès l'enhardit, le roi d'Écosse prend la résolution de joindre les Anglais. Son armée se compose d'environ seize mille hommes tous à cheval selon l'usage, les chevaliers et écuyers montés sur bons coursiers et gros roncins, les autres sur haquenées bien disposes et endurcies à la fatigue. Parvenus à deux lieues anglaises de Berwick, les Écossais se divisent en deux batailles: la plus petite bataille doit prendre les devants pour réveiller et escarmoucher les Anglais, tandis que la bataille la plus nombreuse formera la réserve en s'étendant sur les ailes, pour se porter où besoin sera. Les Anglais, avertis par leurs sentinelles, s'arment en toute hâte et conviennent de laisser l'ennemi s'avancer jusque dans leur camp, sans avoir l'air de se douter de rien et sans opposer tout d'abord aucune résistance. Les Écossais, témoins de cette immobilité, soupçonnent quelque ruse, ils ne tardent pas à s'apercevoir que les Anglais se sont mis à l'abri d'une surprise. Ils se postent alors sur une petite montagne à côté d'un bois qui sert de pâturage à leurs chevaux. L'escarpement de cette montagne en défend l'abord d'un côté, et les Écossais, après avoir fortifié le seul côté par où elle reste accessible à l'aide de troncs d'arbres abattus, en font garder l'entrée par leurs maréchaux. P. 333 et 334.

Le roi d'Angleterre envoie un de ses hérauts offrir la bataille au roi d'Écosse ou, à défaut de bataille, un combat partiel entre un nombre limité de chevaliers pris dans les deux armées. David Bruce, après avoir consulté son conseil, refuse d'accepter cette proposition. P. 334.

Un détachement, composé de cinq cents hommes d'armes au centre avec cinq cents archers sur chaque aile, va par l'ordre d'Édouard III escarmoucher les Écossais, qui sont chauds et bouillants, pour les exciter et les décider à accepter la bataille. Les seigneurs de Willoughby, de Bradeston, de la Ware, Édouard Spenser, fils du favori d'Édouard II, le seigneur de Greystock, Gautier de Mauny et Guillaume de Montagu, les deux frères d'armes, sont faits chevaliers à cette occasion de la main du roi d'Angleterre; mais l'escarmouche reste sans résultat, et l'on ne réussit pas à entraîner l'ennemi hors de ses positions. P. 335.

Les Écossais veulent prendre leur revanche en réveillant vers minuit les Anglais, ils sont repoussés à leur tour. Ils voient bien qu'ils ne sont pas de force à engager la lutte contre un ennemi très-supérieur en nombre, ils aiment mieux perdre Berwick que de tenter l'aventure, et ils effectuent leur retraite pendant la nuit. Le lendemain matin, les Anglais s'aperçoivent que les Écossais ont décampé. Depuis la veille, la trêve accordée aux habitants de Berwick est expirée. Édouard III envoie quatre chevaliers sommer les assiégés de tenir leur parole. Les clefs de Berwick sont apportées au roi d'Angleterre, qui fait son entrée dans la ville et le château le 7 juillet 1333. P. 336.

Troisième rédaction.– Vers la Saint Jean-Baptiste [1333], le roi et la reine d'Angleterre viennent à York chasser aux cerfs, daims et chevreuils. Le rendez-vous général de l'armée qui doit marcher contre l'Écosse est fixé pour le 1er août. D'York Édouard III se rend à Durham, puis à Newcastle où il attend les hommes d'armes des lointaines marches qui ne l'ont pas encore rejoint. P. 322.

A cette nouvelle, les Écossais s'empressent de mettre leurs villes et châteaux en état de défense, surtout la cité de Berwick dont la garnison a pour capitaine Alexandre de Ramsay. David Bruce et la reine sa femme se tiennent en la marche d'Édimbourg. Les Écossais, qui ne se sentent pas en force pour soutenir une lutte ouverte contre les Anglais, se décident à faire une guerre de partisans. P. 322.

Sur ces entrefaites, Robert d'Artois, traqué de tous côtés par le roi de France, vient implorer l'appui du roi d'Angleterre qui l'accueille avec bienveillance comme son proche parent. P. 323.

Édouard III, après avoir passé douze jours à Newcastle où il réunit sous ses ordres six mille hommes d'armes, chevaliers et écuyers, et cinquante mille archers, passe la Tyne sur le pont de cette ville, et, prenant la direction, non de Berwick, mais de Roxburgh, il arrive à Alnwich dans la terre du seigneur de Percy. P. 323.

A Alnwich, un héraut d'Écosse nommé Dundee sollicite et obtient du roi d'Angleterre des lettres de sauf-conduit pour sept ambassadeurs envoyés par David Bruce, deux prélats et cinq chevaliers. Ces ambassadeurs partent de Moreham et viennent trouver le beau-frère de leur roi à Alnwich. Édouard III leur souhaite la bienvenue dans sa propre langue qui diffère très-peu de la langue écossaise. P. 323 et 324.

Ces sept ambassadeurs sont les évêques de Saint-Andrews et d'Aberdeen, le frère de [Jacques] de Douglas qui porta le cœur de Robert Bruce en Grenade où il mourut, Archibald de Douglas son fils, le comte de Carrick, Robert de Vescy et Simon Fraser. L'évêque de Saint-Andrews prie le roi d'Angleterre, au nom des liens d'étroite parenté qui l'unissent au roi d'Écosse, son beau-frère, de vouloir bien nommer quatre prélats et autant de barons de son royaume chargés de s'entendre avec un égal nombre de prélats et de barons écossais pour renouveler les trêves et conclure une paix durable. P. 324 et 325.

Édouard III consulte son conseil. Renaud de Cobham, père du chevalier du même nom qui se rendit depuis si fameux par ses prouesses conseille de n'accorder la paix aux Écossais qu'à deux conditions. La première est la prestation de l'hommage dû par David Bruce au roi d'Angleterre pour tout le royaume d'Écosse, excepté certaines îles situées du côté de l'Irlande et de la Norvége, dites les Sauvages Escos, dont le seigneur a nom Jean des Adultilles227 et n'est tributaire que du roi d'Écosse. La seconde condition est la reddition de Berwick et de tout le pays jusqu'à la mer d'Écosse. P. 325.

218Pierre de Chappes, fait cardinal en 1327, fut évêque de Chartres de 1326 à 1336.
219Jean Ier, frère du célèbre Enguerrand de Marigny, fut évêque de Beauvais de 1313 à 1347, année où il fut promu à l'archevêché de Rouen.
220Froissart désigne ce seigneur par le titre de comte de Tancarville, mais ce titre ne fut conféré à Jean de Melun qu'en 1352.
221En mai 1332, Philippe de Valois donne à son fils Jean, duc de Normandie, comte d'Anjou et du Maine, «… la maison qui fu Robert d'Artoys et toutes les appertenances d'icelle assise à Paris en la rue de Saint-Germain des Prés devant l'ostel de Navarre» confisquée ainsi que tous les biens du dit Robert par arrêt du Parlement. (Arch. de l'Empire, JJ 66, p. 659, fo 275.)
222Mémoires de l'Académie des inscriptions, t. X, p. 622.
223Sans doute Leeuw-Saint-Pierre, Belgique, province de Brabant, à 13 kilomètres de Bruxelles.
224Ce prénom est encore porté aujourd'hui et s'est conservé dans l'onomastique française sous la forme Archambaud ou Archambauld.
225Froissart appelle cette localité Urcol. Arcot, avec lequel nous identifions Urcol, est un village situé dans le sud du Northumberland, au nord de Newcastle, à peu de distance de l'ancienne route de Londres à Edimbourg, qui passait par Newcastle et par Percy ou Alnwick. Cette identification serait à peu prés sûre, s'il était établi qu'il y avait à Arcot un château su quatorzième siècle. Il appartient aux savants anglais de nous renseigner sur ce point.
226Ces mots de Noire Rivière désignent sans doute la Blackadder, un des affluents de la Tweed. L'abbaye de bénédictins dont parle Froissart était peut-être l'un des deux monastères dont on voit encore aujourd'hui les ruines sur le Herrit's Dykke près de Greenlaw.
227Peut-être Jean des Athol-îles ou Jean d'Athol, suivant une conjecture un peu hardie, mais ingénieuse, de Buchon.