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«Au même instant et tandis qu’elle passait ainsi devant moi, ma femme revenait de la chambre de sa mère et passait juste à l’endroit où je voyais cette dame, sans paraître la remarquer. Je m’écriai aussitôt avec un vif sentiment de surprise: «Quelle est donc cette dame que vous venez de croiser à l’instant? – Mais je n’ai croisé personne! répliqua ma femme encore plus étonnée que moi. – Comment, répliquai-je, vous ne venez pas de voir à l’instant une dame qui vient de passer là, juste où vous êtes, qui sort sans doute de chez votre mère et qui doit être maintenant au vestibule?

« – C’est impossible, répondit-elle, il n’y a absolument que ma mère et nous en ce moment dans la maison.

«En effet, aucune étrangère n’était venue et la recherche que nous fîmes immédiatement n’aboutit à aucun résultat.

«Il était alors huit heures moins dix minutes. Le lendemain matin un télégramme nous annonçait la mort subite de ma mère par suite d’une maladie de cœur, précisément à la même heure. Elle était alors dans la rue et vêtue exactement comme l’inconnue qui était passée devant moi.»

Tel est le récit de l’observateur. L’enquête faite par la Société des Recherches psychiques a démontré l’absolue authenticité et la concordance des témoignages. C’est là un fait tout aussi positif qu’une observation météorologique, astronomique, physique ou chimique. Comment l’expliquer? Coïncidence, dira-t-on. Une rigoureuse critique scientifique peut-elle vraiment être satisfaite par ce mot?

Autre cas encore:

M. Frédérick Wingfield, habitant Belle-Isle en Terre (Côtes-du-Nord), écrit que le 25 mars 1880, s’étant couché assez tard après avoir lu une partie de la soirée, il rêva que son frère, habitant le comté d’Essex en Angleterre, était auprès de lui, mais qu’au lieu de répondre à une question qu’il lui adressait, celui-ci secoua la tête, se leva de sa chaise et s’en alla. L’impression avait été si vive que le narrateur s’élança, à moitié endormi, hors de son lit, et se réveilla au moment où il mettait le pied sur la descente de lit et appelait son frère. Trois jours après, il recevait la nouvelle que son frère venait d’être tué, d’une chute de cheval, le même jour, 25 mars 1880, dans la soirée (à huit heures et demie), quelques heures avant le rêve qui vient d’être rapporté.

Une enquête a démontré que la date de cette mort est exacte et que l’auteur de ce récit avait écrit son rêve sur un agenda à la date même de l’événement, et non après coup.

Autre cas encore:

«M. S… et M. L… employés tous les deux dans une administration, étaient depuis huit ans en intimes relations d’amitié. Le lundi 19 mars 1883, L… en allant à son bureau, eut une indigestion; alors il entra dans une pharmacie où on lui donna un médicament. Le jeudi suivant, il n’était pas mieux; le samedi de cette même semaine, il était encore absent du bureau.

Le samedi soir, 24 mars, S… était chez lui, ayant mal à la tête; il dit à sa femme qu’il avait trop chaud, ce qui ne lui était pas arrivé depuis deux mois; puis, après avoir fait cette remarque, il se coucha, et une minute après, il vit son ami L… debout devant lui, vêtu de ses vêtements habituels. S… nota même ce détail de l’habillement de L… que son chapeau avait un crêpe noir, que son pardessus n’était pas boutonné et qu’il tenait une canne à la main. L… regarda fixement S… et passa. S… alors se rappela la phrase qui est dans le livre de Job: «Un esprit passa devant ma face, et le poil de ma chair se hérissa.» A ce moment, il sentit un frisson lui parcourir le corps et ses cheveux se hérissèrent. Alors il demanda à sa femme: «Quelle heure est-il?» Celle-ci lui répondit: «Neuf heures moins douze minutes». Il lui dit: «Si je vous le demande, c’est parce que L… est mort: je viens de le voir». Elle essaya de lui persuader que c’était une pure illusion; mais il assura de la façon la plus formelle qu’aucun raisonnement ne pourrait le faire changer d opinion.»

Tel est le récit fait par M. S… Il n’apprit la mort de son ami L… que le lendemain dimanche, à trois heures de l’après-midi.

L… était effectivement mort le samedi soir, vers neuf heures moins dix minutes.

On peut rapprocher de cette relation l’événement historique rapporté par Agrippa d’Aubigné au moment de la mort du cardinal de Lorraine:

«Le roi estant en Avignon, le 23 décembre 1574, y mourut Charles, cardinal de Lorraine. La reine (Catherine de Médicis) s’estoit mise au lit de meilleure heure que de coutume, aiant à son coucher entre autres personnes de marque le roi de Navarre, l’archevêque de Lyon, les dames de Retz, de Lignerolles et de Saunes, deux desquelles ont confirmé ce discours. Comme elle estoit pressée de donner le bon soir, elle se jetta d’un tressaut sur son chevet, mit les mains au devant de son visage et avec un cri violent appela à son secours ceux qui l’assistoient, leur voulant monstrer au pied du lit le cardinal qui lui tendoit la main. Elle s’escria plusieurs fois: «Monsieur le cardinal, je n’ai que faire avec vous.» Le roi de Navarre envoie au mesme temps un de ses gentils hommes au logis du cardinal, qui rapporta comment il avoit expiré au mesme point.»

Dans son livre sur «l’humanité posthume» publié en 1882, Adolphe d’Assier se porte garant de l’authenticité du fait suivant, qui lui a été rapporté par une personne de Saint-Gaudens comme lui étant arrivé à elle-même.

«J’étais encore jeune fille, dit-elle, et je couchais avec ma sœur, plus âgée que moi. Un soir nous venions de nous mettre au lit et de souffler la bougie. Le feu de la cheminée, imparfaitement éteint, éclairait encore faiblement la chambre. En tournant les yeux du côté du foyer, j’aperçois, à ma grande surprise, un prêtre assis devant la cheminée et se chauffant. Il avait la corpulence, les traits et la tournure d’un de nos oncles qui habitait aux environs et qui était archiprêtre. Je fis part aussitôt de mon observation à ma sœur. Cette dernière regarde du côté du foyer, et voit la même apparition. Elle reconnaît également notre oncle l’archiprêtre. Une frayeur indicible s’empare alors de nous et nous crions: Au secours! de toutes nos forces. Mon père, qui dormait dans une pièce voisine, éveillé par ces cris désespérés, se lève en toute hâte, et arrive aussitôt une bougie à la main. Le fantôme avait disparu; nous ne voyions plus personne dans la chambre. Le lendemain, nous apprîmes par une lettre que notre oncle l’archiprêtre était mort dans la soirée.»

Autre fait encore, rapporté par le même disciple d’Auguste Comte et consigné par lui pendant son séjour à Rio-de-Janeiro.

C’était en 1858; on s’entretenait encore, dans la colonie française de cette capitale, d’une apparition singulière qui avait eu lieu quelques années auparavant. Une famille alsacienne, composée du mari, de la femme et d’une petite fille encore en bas âge, faisait voile pour Rio-de-Janeiro, où elle allait rejoindre des compatriotes établis dans cette ville. La traversée étant longue, la femme devint malade, et faute sans doute de soins ou d’une alimentation convenable, succomba avant d’arriver. Le jour de sa mort, elle tomba en syncope, resta longtemps dans cet état, et lorsqu’elle eut repris ses sens, dit à son mari, qui veillait à ses côtés: «Je meurs contente, car maintenant je suis rassurée sur le sort de notre enfant. Je viens de Rio-de-Janeiro, j’ai rencontré la rue et la maison de notre ami Fritz, le charpentier. Il était sur le seuil de la porte; je lui ai présenté la petite; je suis sûre qu’à ton arrivée il la reconnaîtra et en prendra soin. Le mari fut surpris de ce récit, sans toutefois y attacher d’importance. Le même jour, à la même heure, Fritz le charpentier, l’Alsacien dont je viens de parler, se trouvait sur le seuil de la porte de la maison qu’il habitait à Rio-de-Janeiro, lorsqu’il crut voir passer dans la rue une de ses compatriotes tenant dans ses bras une petite fille. Elle le regardait d’un air suppliant, et semblait lui présenter l’enfant qu’elle portait. Sa figure, qui paraissait d’une grande maigreur, rappelait néanmoins les traits de Latta, la femme de son ami et compatriote Schmidt. L’expression de son visage, la singularité de sa démarche, qui tenait plus de la vision que de la réalité, impressionnèrent vivement Fritz. Voulant s’assurer qu’il n’était pas dupe d’une illusion, il appela un de ses ouvriers qui travaillait dans la boutique, et qui lui aussi était Alsacien et de la même localité.

«Regarde, lui dit-il, ne vois-tu pas passer une femme dans la rue, tenant un enfant dans ses bras, et ne dirait-on pas que c’est Latta, la femme de notre pays Schmidt?

– Je ne puis vous dire, je ne la distingue pas bien», répondit l’ouvrier.

Fritz n’en dit pas davantage; mais les diverses circonstances de cette apparition réelle ou imaginaire se gravèrent fortement dans son esprit, notamment l’heure et le jour. A quelque temps de là il voit arriver son compatriote Schmidt portant une petite fille dans ses bras. La visite de Latta se retrace alors dans son esprit, et avant que Schmidt eût ouvert la bouche il lui dit:

«Mon pauvre ami, je sais tout; ta femme est morte pendant la traversée, et avant de mourir elle est venue me présenter sa petite fille pour que j’en prenne soin. Voici la date et l’heure.»

C’étaient bien le jour et le moment consignés par Schmidt à bord du navire.

Dans son ouvrage sur les hauts phénomènes de la Magie, publié en 1864, Gougenot des Mousseaux rapporte le fait suivant, qu’il certifie comme absolument authentique.

Sir Robert Bruce, de l’illustre famille écossaise de ce nom, est second d’un bâtiment; un jour il vogue près de Terre-Neuve, et, se livrant à des calculs, il croit voir son capitaine assis à son pupitre, mais il regarde avec attention, et celui qu’il aperçoit est un étranger dont le regard froidement arrêté sur lui l’étonnait. Le capitaine, près duquel il remonte, s’aperçoit de son étonnement, et l’interroge:

 

«Mais qui donc est à votre pupitre? lui dit Bruce.

– Personne.

– Si, il y a quelqu’un; est-ce un étranger?.. et comment?

– Vous rêvez… ou vous raillez.

– Nullement; veuillez descendre et venir voir.»

On descend, et personne n’est assis devant le pupitre. Le navire est fouillé en tout sens; il ne s’y rencontre aucun étranger.

«Cependant celui que j’ai vu écrivait sur votre ardoise: son écriture doit y être restée», dit Bruce.

On regarde l’ardoise; elle porte ces mots: «Steer to the north-west», c’est-à-dire: «Gouvernez au nord-ouest».

«Mais cette écriture est de vous ou de quelqu’un du bord?

– Non.»

Chacun est prié d’écrire la même phrase, et nulle écriture ne ressemble à celle de l’ardoise.

«Eh bien, obéissons au sens de ces mots; gouvernez le navire au nord-ouest, le vent est bon et permet de tenter l’expérience.»

Trois heures après, la vigie signalait une montagne de glace et voyait, y attenant, un vaisseau de Québec, démantelé, couvert de monde, cinglant vers Liverpool, et dont les passagers furent amenés par les chaloupes du bâtiment de Bruce.

Au moment où l’un de ses hommes gravissait le flanc du vaisseau libérateur, Bruce tressaillit et recula, fortement ému. Il venait de reconnaître l’étranger qu’il avait vu traçant les mots de l’ardoise. Il raconte à son capitaine le nouvel incident.

«Veuillez écrire «Steer to the north-west» sur cette ardoise», dit au nouveau venu le capitaine, lui présentant le côté qui ne porte aucune écriture.

L’étranger trace les mots demandés.

«Bien, vous reconnaissez là votre main courante? dit le capitaine, frappé de l’identité des écritures.

– Mais vous m’avez vu vous-même écrire! Vous serait-il possible d’en douter?»

Pour toute réponse le capitaine retourne l’ardoise, et l’étranger reste confondu voyant des deux côtés sa propre écriture.

«Aviez-vous rêvé que vous écriviez sur cette ardoise? dit, à celui qui vient d’écrire, le capitaine du vaisseau naufragé.

– Non, du moins je n’en ai nul souvenir.

– Mais que faisait à midi ce passager? demande à son confrère le capitaine sauveur.

– Étant très fatigué, ce passager s’endormit profondément, et autant qu’il m’en souvient, ce fut quelque temps avant midi. Une heure au plus après, il s’éveilla, et me dit: «Capitaine, nous serons sauvés, aujourd’hui même!» Ajoutant: «J’ai rêvé que j’étais à bord d’un vaisseau et qu’il venait à notre secours.» Il dépeignit le bâtiment et son gréement; et ce fut à notre grande surprise, lorsque vous cinglâtes vers nous, que nous reconnûmes l’exactitude de la description. Enfin ce passager dit à son tour: «Ce qui me semble étrange, c’est que ce que je vois ici me paraît familier, et cependant je n’y suis jamais venu.»

Le baron Dupotet, dans son cours de «Magnétisme animal», rapporte, d’autre part encore, le fait suivant, publié en 1814 par le célèbre Iung Stilling, qui le tenait de l’observateur même, le baron de Sulza, chambellan du roi de Suède.

Rentrant chez lui en été vers minuit, heure à laquelle il fait encore assez clair en Suède pour qu’on puisse lire l’impression la plus fine. «Comme j’arrivai, dit-il, dans mon domaine, mon père vint à ma rencontre devant l’entrée du parc; il était vêtu comme d’habitude, et il tenait à la main une canne que mon frère avait sculptée. Je le saluai et nous conversâmes longtemps ensemble. Nous arrivâmes ainsi jusqu’à la maison et à l’entrée de sa chambre. En y entrant, je vis mon père déshabillé; au même instant l’apparition s’était évanouie; peu de temps après, mon père s’éveilla et me regarda d’un air d’interrogation: «Mon cher Édouard, me dit-il, Dieu soit béni de ce que je te vois sain et sauf, car j’ai été bien tourmenté, à cause de toi, dans mon rêve; il me semblait que tu étais tombé dans l’eau, et que tu étais en danger de te noyer.» Or ce jour-là, ajouta le baron, j’étais allé avec un de mes amis à la rivière pour pêcher des crabes, et je faillis être entraîné par le courant. Je racontai à mon père que j’avais vu son apparition à l’entrée du domaine, et que nous avions eu ensemble une longue conversation. Il me répondit qu’il arrivait souvent des faits semblables.»

On voit dans ces divers récits des apparitions spontanées et des apparitions pour ainsi dire provoquées par le désir ou par la volonté. La suggestion mentale peut-elle donc aller jusque-là? Les auteurs du livre Phantasms of the Living, dont nous parlions plus haut, répondent affirmativement par sept exemples suffisamment attestés, parmi lesquels j’en offrirai encore un à l’attention de mes lecteurs. Le voici.

«Le rév. C. Godfrey, demeurant à Eastbourne, dans le canton de Sussex, ayant lu un récit d’apparition préméditée, en fut si frappé qu’il résolut d’en faire l’essai à son tour. Le 15 novembre 1886, vers onze heures du soir, il dirigea toute la force d’imagination et toute la tension de volonté dont il était capable sur l’idée d’apparaître à une dame de ses amies, en se tenant debout au pied de son lit. L’effort dura environ huit minutes, après quoi M. Godfrey se sentit fatigué et s’endormit. Le lendemain, la dame qui avait été le sujet de l’expérience vint de son propre mouvement raconter à M. Godfrey ce qu’elle avait vu. Invitée à en fixer le souvenir par écrit, elle le fit en ces termes: «La nuit dernière, je me réveillai en sursaut, avec la sensation que quelqu’un était entré dans ma chambre. J’entendis également un bruit, mais je supposai que c’étaient les oiseaux dans le lierre, hors de la fenêtre. J’éprouvai ensuite comme une inquiétude et un vague désir de sortir de la chambre et de descendre au rez-de-chaussée. Ce sentiment devint si vif que je me levai enfin; j’allumai une bougie et je descendis dans l’intention de prendre quelque chose pour me calmer. En remontant à ma chambre, je vis M. Godfrey, debout sous la grande fenêtre qui éclaire l’escalier. Il était habillé comme à l’ordinaire et avait l’expression que j’ai remarquée chez lui lorsqu’il regarde très attentivement quelque chose. Il était là immobile, tandis que, tenant la lumière levée, je le regardais avec une extrême surprise. Cela dura trois ou quatre secondes, après quoi, comme je continuais à monter, il disparut. Je n’étais point effrayée, mais très agitée, et je ne pus me rendormir.»

M. Godfrey pensa judicieusement que l’expérience à laquelle il s’était livré prendrait beaucoup plus d’importance si elle se répétait. Une seconde tentative manqua, mais la troisième réussit. Bien entendu que la dame sur laquelle il opérait n’était pas plus prévenue de son intention que la première fois. «La nuit dernière, écrit-elle, mardi 7 décembre, je montai me coucher à dix heures et demie. Je fus bientôt endormie. Soudainement, j’entendis une voix qui disait: «Réveillez-vous!» et je sentis une main qui se posait sur le côté gauche de ma tête. (L’intention de M. Godfrey, cette fois-ci, avait été de faire sentir sa présence par la voix et le toucher.) Je fus aussitôt complètement éveillée. Il y avait dans la chambre un son curieux, comme celui d’une guimbarde. Je sentais en même temps comme une haleine froide qui m’enveloppait; mon cœur se mit à battre violemment, et je vis distinctement une figure penchée sur moi. La seule lumière qui éclairât la chambre était celle d’une lampe à l’extérieur, formant une longue raie lumineuse sur la muraille au-dessus de la table de toilette; cette raie était particulièrement obscurcie par la figure. Je me retournai vivement, et la main eut l’air de retomber de ma tête sur l’oreiller, à côté de moi. La figure était inclinée au-dessus de moi, et je la sentais appuyée contre le côté du lit. Je vis le bras reposant tout le temps sur l’oreiller. J’apercevais le contour du visage, mais comme obscurci par un brouillard. Il devait être environ minuit et demi. La figure avait légèrement écarté le rideau, mais j’ai reconnu ce matin qu’il pendait comme d’habitude. Nul doute que la figure ne fût celle de M. Godfrey; je le reconnus à la tournure des épaules et à la forme du visage. Pendant tout le temps qu’il resta là, il régnait un courant d’air froid à travers la chambre, comme si les deux fenêtres eussent été ouvertes.»

Ce sont là des faits.

Dans l’état actuel de nos connaissances, il serait absolument téméraire d’en chercher l’explication. Notre psychologie n’est pas assez avancée. Il y a bien des choses que nous sommes forcés d’admettre sans pouvoir en aucune façon les expliquer. Nier ce qu’on ne peut expliquer serait de la pure démence. Expliquait-on le système du monde il y a mille ans? Aujourd’hui même, expliquons-nous l’attraction? Mais la science marche, et son progrès sera sans fin.

Connaissons-nous toute l’étendue des facultés humaines? Qu’il y ait dans la nature des forces encore inconnues de nous, comme l’était, par exemple, l’électricité il y a moins d’un siècle, qu’il y ait dans l’univers d’autres êtres, doués d’autres sens et d’autres facultés, c’est ce dont le penseur ne peut douter un seul instant. Mais l’homme terrestre lui-même nous est-il complètement connu? Il ne le semble pas.

Il y a des faits dont nous sommes forcés de reconnaître la réalité sans pouvoir en aucune façon les expliquer.

La vie de Swedenborg en offre trois de cet ordre. Laissons de côté, pour le moment, ses visions planétaires et sidérales, qui paraissent plus subjectives qu’objectives; remarquons en passant que Swedenborg était un savant de premier ordre en géologie, en minéralogie, en cristallographie, membre des académies des sciences d’Upsal, Stockholm et Saint-Pétersbourg, et contentons-nous de rappeler les trois faits suivants:

Le 19 juillet 1759, revenant d’un voyage en Angleterre, ce philosophe prit terre à Gottenbourg et alla dîner chez un certain William Costel, où la société était nombreuse. «Le soir à six heures, M. de Swedenborg, qui était sorti, rentra au salon, pâle et consterné, et dit qu’à l’instant même un incendie venait d’éclater à Stockholm, au Südermoln, dans la rue qu’il habitait, et que le feu s’étendait avec violence vers sa maison. Il sortit de nouveau, et revint, se lamentant que la maison d’un de ses amis venait d’être réduite en cendres et que la sienne courait le plus grand danger. A huit heures, après une nouvelle sortie, il dit avec joie: «Grâce à Dieu, l’incendie s’est éteint à la troisième porte qui précède la mienne.»

«La nouvelle s’en répandit dans toute la ville, qui s’en émut d’autant plus que le gouverneur y avait porté attention et que beaucoup de personnes étaient en souci de leurs biens ou de leurs amis… Deux jours après, le courrier royal apporta de Stockholm le rapport sur l’incendie: il n’y avait aucune différence entre ses indications et celles que Swedenborg avait données; l’incendie avait été éteint à huit heures.

Cette relation a été écrite par l’illustre Emmanuel Kant, qui avait voulu faire une enquête sur le fait, et qui ajoute: «Que peut-on alléguer contre l’authenticité de cet événement?»

Or Gottenbourg est à deux cents kilomètres de Stockholm.

Swedenborg était alors dans sa soixante-douzième année.

Voici le second fait.

En 1761, Mme de Marteville, veuve d’un ministre de Hollande à Stockholm, reçoit d’un créancier de son mari la réclamation d’une somme de vingt-cinq mille florins de Hollande (cinquante mille francs), qu’elle savait avoir été payée par son mari, et dont le nouveau payement la mettait dans le plus grand embarras, la ruinait presque. Il lui était impossible de retrouver la quittance.

Elle va rendre visite à Swedenborg, et, huit jours après, elle voit en songe son mari qui lui indique le meuble où se trouve la quittance avec une épingle à cheveux garnie de vingt diamants, qu’elle croyait perdue aussi. «C’était à deux heures du matin. Pleine de joie, elle se lève et trouve le tout à la place indiquée. S’étant recouchée, elle dort jusqu’à neuf heures. Vers onze heures, M. de Swedenborg se fait annoncer. Avant d’avoir rien appris de ce qui était arrivé, il raconta que dans la nuit précédente il avait vu l’esprit de M. de Marteville qui lui avait déclaré qu’il se rendait auprès de sa veuve.»

Voici le troisième fait.

Au mois de février 1772, étant à Londres, il envoya un billet au révérend John Wesley (fondateur de la communion des Wesleyens) pour lui dire qu’il serait charmé de faire sa connaissance. L’ardent prédicateur reçut ce billet au moment où il allait partir pour une mission, et répondit qu’il profiterait de cette gracieuse permission pour lui rendre visite au retour de cette absence qui devait être d’environ six mois. Swedenborg répondit: «qu’en ce cas, ils ne se verraient pas dans ce monde, le 29 mars prochain devant être le jour de sa mort».

Swedenborg mourut, en effet, à la date indiquée par lui plus d’un mois d’avance.

 

Ce sont là trois faits dont il n’est pas possible de nier l’authenticité, mais que dans l’état actuel de nos connaissances personne ne voudrait assurément se charger d’expliquer.

Nous pourrions multiplier indéfiniment ces relations authentiques. Les faits analogues à ceux qui ont été rapportés plus haut de communications à distance soit au moment de la mort, soit dans l’état normal de la vie, ne sont pas tellement rares – sans être pourtant bien fréquents – que chacun de nos lecteurs n’en ait entendu citer, et peut-être observé lui-même, en plus d’une circonstance. D’ailleurs, les expériences faites dans les domaines du magnétisme témoignent également qu’en certains cas psychologiques déterminés un expérimentateur peut agir sur son sujet à distance, non pas seulement à quelques mètres, mais à plusieurs kilomètres et même à plus de cent kilomètres de distance, selon la sensibilité et la lucidité du sujet et sans doute aussi selon l’intensité de la volonté du magnétiseur. D’autre part encore, l’espace n’est pas ce que nous croyons. La distance de Paris à Londres est grande pour un marcheur, et elle était même infranchissable avant l’invention des bateaux: elle est nulle pour l’électricité. La distance de la Terre à la Lune est grande pour nos modes actuels de locomotion: elle est nulle pour l’attraction. En fait, au point de vue de l’absolu, l’espace qui nous sépare de Sirius n’est pas une plus grande partie de l’infini que la distance de Paris à Versailles ou de votre œil droit à votre œil gauche.

Il y a plus encore: la séparation qui nous semble exister entre la Terre et la Lune, ou entre la Terre et Mars, ou même entre la Terre et Sirius, n’est qu’une illusion due à l’insuffisance de nos perceptions. La Lune agit constamment sur la Terre et la remue perpétuellement. L’attraction de Mars est également sensible pour notre planète, et à notre tour nous dérangeons Mars dans son cours en subissant l’influence de la Lune. Nous agissons sur le Soleil lui-même et le faisons mouvoir, comme si nous le touchions. En vertu de l’attraction, la Lune fait tourner mensuellement la Terre autour de leur centre commun de gravité, point qui voyage à 1700 kilomètres au-dessous de la surface du globe, la Terre fait tourner le Soleil annuellement autour de leur centre commun de gravité, situé à 456 kilomètres du centre solaire; tous les mondes agissent perpétuellement les uns sur les autres, de sorte qu’il n’y a pas d’isolement, de séparation réelle entre eux. Au lieu d’être un vide séparant les mondes les uns des autres, l’espace est plutôt un lien de communication. Or si l’attraction établit ainsi une communication réelle, perpétuelle, active et indiscutable, constatée par la précision des observations astronomiques, entre la Terre et ses sœurs de l’immensité, on ne voit pas trop de quel droit de prétendus positivistes pourraient déclarer que nulle communication ne soit possible entre deux êtres plus ou moins éloignés l’un de l’autre, soit sur la Terre, soit même sur deux mondes différents.

Deux cerveaux qui vibrent à l’unisson, à plusieurs kilomètres de distance, ne peuvent-ils être émus par une même force psychique? L’émotion partie d’un cerveau ne peut-elle, à travers l’éther, de même que l’attraction, aller frapper le cerveau qui vibre à une distance quelconque, de même qu’un son, à travers une pièce, va faire vibrer les cordes d’un piano ou d’un violon? N’oublions pas que nos cerveaux sont composés de molécules qui ne se touchent pas et qui sont en vibration perpétuelle.

Et pourquoi parler de cerveaux? La pensée, la volonté, la force psychique, quelle que soit sa nature, ne peut-elle agir à distance sur un être qui lui est attaché par les liens sympathiques et indissolubles de la parenté intellectuelle? Les palpitations d’un cœur ne se transmettent-elles pas subitement au cœur qui bat à l’unisson du nôtre?

Devons-nous admettre, dans les cas d’apparition signalés plus haut, que l’esprit du mort ait réellement pris une forme corporelle dans le voisinage de l’observateur? Dans la plupart des cas, cette hypothèse ne paraît pas nécessaire. Pendant nos rêves, nous croyons voir des personnes qui ne sont pas du tout devant nos yeux, d’ailleurs fermés. Nous les voyons parfaitement, aussi bien qu’au grand jour; nous leur parlons, nous les entendons, nous conversons avec elles. Assurément, ce n’est ni notre rétine ni notre nerf optique qui les voit, pas plus que ce n’est notre oreille qui les entend. Nos cellules cérébrales sont seules en jeu.

Certaines apparitions peuvent être objectives, extérieures, substantielles; d’autres peuvent être subjectives: dans ce cas, l’être qui se manifeste agirait à distance sur l’être qui voit, et cette influence sur son cerveau déterminerait la vision intérieure, laquelle paraît extérieure, comme dans les rêves, mais peut être purement subjective et intérieure.

De même qu’une pensée, un souvenir, éveille dans notre esprit une image qui peut être très évidente et très vive, de même un être agissant sur un autre peut faire apparaître en lui une image qui lui donnera un instant l’illusion de la réalité. On obtient maintenant expérimentalement ces faits dans les études d’hypnotisme et de suggestion, études qui en sont encore à leurs débuts et pourtant donnent des résultats assurément dignes de la plus haute attention, aussi bien au point de vue psychologique qu’au point de vue physiologique. Ce n’est pas la rétine qui est frappée par une réalité effective, ce sont les couches optiques du cerveau qui sont excitées par une force psychique. C’est l’être mental lui-même qui est impressionné. De quelle façon? nous l’ignorons.

Telles sont les inductions les plus rationnelles qui paraissent pouvoir être conclues des phénomènes de l’ordre de ceux dont nous venons de nous occuper, phénomènes inexpliqués, mais fort anciens, car l’histoire de tous les peuples, depuis la plus haute antiquité, en a conservé des exemples qu’il serait difficile de nier ou d’effacer.

Mais quoi, dira-t-on, devons-nous, pouvons-nous, dans notre siècle de méthode expérimentale et de science positive, admettre qu’un mourant, ou même un mort, puisse se communiquer?

Qu’est-ce qu’un mort?

Il meurt un être humain par chaque seconde, sur l’ensemble du globe terrestre, soit environ 86 400 par jour, soit environ 31 millions par an ou plus de 3 milliards par siècle. En dix siècles, plus de 30 milliards de cadavres ont été livrés à la terre et rendus à la circulation générale sous forme de produits divers, eau, gaz, vapeurs, etc. Si nous tenons compte de la diminution de la population humaine à mesure que nous remontons les âges historiques, nous trouvons que depuis dix mille ans deux cents milliards de corps humains au moins ont été formés de la terre et de l’atmosphère, par la respiration et l’alimentation, et y sont retournés. Les molécules d’oxygène, d’hydrogène, d’acide carbonique, d’azote qui ont constitué ces corps ont engraissé la terre et ont été rendues à la circulation atmosphérique.

Oui, la Terre que nous habitons est aujourd’hui formée en partie de ces milliards de cerveaux qui ont pensé, de ces milliards d’organismes qui ont vécu. Nous marchons sur nos aïeux comme ils marcheront sur nous. Les fronts des penseurs, les yeux qui ont contemplé, souri, pleuré, les bouches qui ont chanté l’amour, les lèvres roses et les seins de marbre, les entrailles des mères, les bras des travailleurs, les muscles des guerriers, le sang des vaincus, les enfants et les vieillards, les bons et les méchants, les riches et les pauvres, tout ce qui a vécu, tout ce qui a pensé, gît dans la même terre. Il serait difficile aujourd’hui de faire un seul pas sur la planète sans marcher sur la dépouille des morts; il serait difficile de manger et boire sans réabsorber ce qui a déjà été mangé et bu des milliers de fois, il serait difficile de respirer sans s’incorporer le souffle des morts. Les éléments constitutifs des corps, puisés à la nature, sont revenus à la nature, et chacun de nous porte en soi des atomes ayant précédemment appartenu à d’autres corps.