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Dictionnaire raisonné de l'architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 3 - (C suite)

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Nous donnons (27 bis) en A une ferme principale et en B la coupe longitudinale de ce comble. Il se compose d'une série de chevrons armés d'entraits retroussés R et de liens. Les entraits retroussés reposent sur une forte filière F soulagée par des liens C reportant sa charge sur un poinçon D, posé lui-même sur l'entrait ou la poutre E.


On comprendra que des constructeurs qui comprenaient si mal la fonction de l'entrait aient cherché à se priver de ce membre. Aussi voyons-nous, dès le XIVe siècle, les Anglo-Normands chercher des combinaisons de charpentes de combles dans lesquelles l'entrait se trouve supprimé. Ces combinaisons doivent être indiquées par nous, car certainement elles étaient employées, pendant le moyen âge, en Normandie, dans le nord de la France, et les charpentes des XIVe et XVe siècles que l'on rencontre encore en grand nombre en Angleterre dérivent d'un principe de construction normand, dont nous ne trouvons que des traces rares chez nous, presque toutes ces charpentes ayant été remplacées successivement depuis le XIIIe siècle par des voûtes. Ne pouvant remonter aux principes, il est bon toutefois de connaître les dérivés, d'autant plus qu'ils sont fort remarquables et méritent l'attention des constructeurs. Ainsi que nous l'avons dit en commençant cet article, c'est par la grosseur des bois employés que les charpentes anglo-normandes se distinguent tout d'abord de celles exécutées en France pendant les XIIIe, XIVe et XVe siècles, puis par des combinaisons qui ont des rapports frappants avec les constructions navales, et enfin par une perfection rare apportée dans la manière d'assembler les bois. Dans les charpentes apparentes anglo-normandes, la panne joue un rôle important et ne cesse d'être employée; seulement, au lieu d'être, comme chez nous, indépendante, posée sur l'arbalétrier, elle s'y lie intimement et forme avec lui un grillage, une sorte de châssis sur lequel viennent reposer les chevrons.



Un exemple fort simple fera comprendre ce système (28) 11. Cette ferme, sans entrait à sa base, se trouve, il est vrai, intercalée entre d'autres fermes qui en sont pourvues; elle n'est pas le résultat du hasard, mais d'un système souvent employé pendant les XIIIe et XIVe siècles. Le blochet A, sculpté à son extrémité vue, est pincé entre deux sablières B assemblées avec lui à mi-bois; une forte courbe D, d'un seul morceau, s'assemble dans l'arbalétrier C au moyen d'un long tenon doublement chevillé. La panne E inférieure est prise entre la courbe et l'arbalétrier; elle est franche, la courbe et l'arbalétrier étant entaillés pour la laisser passer. La panne E' supérieure repose dans une entaille pratiquée à l'extrémité de l'entrait retroussé F et dans l'arbalétrier. Ainsi les chevrons dont l'épaisseur est indiquée par la ligne ponctuée viennent araser la face extérieure de l'arbalétrier. Cette ferme n'a que 5m,40 de portée, et ses arbalétriers ne pourraient s'écarter sans déformer les courbes, ce qui n'est guère possible, ou sans briser les tenons dans l'entrait retroussé, lesquels ont une grande force et sont bien chevillés. Mais lorsque les portées étaient plus grandes, il eût été difficile de trouver des courbes d'un seul morceau. Les charpentiers anglo-normands en assemblèrent deux l'une au-dessus de l'autre, ainsi que l'indique la fig. 29, en ayant le soin de donner à leurs bois un fort équarrissage, afin d'obtenir des tenons très-puissants. Le point faible de ces charpentes était cependant à leur sommet. Il était facile, par des combinaisons de courbes et des bois d'un fort équarrissage, de donner aux arbalétriers une parfaite rigidité; ce qu'il était difficile d'empêcher, sans le secours de l'entrait, c'était la dislocation des assemblages à la tête de la ferme, par suite de l'écartement des deux arbalétriers.




Le problème que les charpentiers anglo-normands avaient à résoudre êtait celui-ci: donner à deux triangles A et B (30) une base C D commune. Ce problème résolu, on pouvait se passer d'un entrait réunissant les deux sommets E F.

Une des fermes de la grand'salle de l'abbaye de Malvern (Worcestershire) qui date du milieu du XIVe siècle 12, indique bien nettement cette tentative des charpentiers anglo-normands. En voici la représentation perspective (30 bis). Cette ferme n'est en réalité qu'une sorte d'équerre composée de diverses pièces de grosse charpente dont l'assemblage ne forme qu'un triangle rigide. Les bois ont beaucoup de champ, mais peu de plat, et sont maintenus ensemble par de fortes languettes ou des prisonniers noyés dans leur épaisseur. On remarquera comme les pannes sont soulagées par des liens ou écharpes courbes A qui ont encore l'avantage de porter les chevrons et d'arrêter le hiement de toute la charpente. Il faut avouer que ce système exigeait l'emploi de bois énormes comparativement au résultat obtenu; c'était payer bien cher la suppression des entraits. Cette ferme n'a cependant qu'une très-médiocre portée, et ce moyen ne pouvait s'appliquer à des charpentes destinées à couvrir de larges vaisseaux. Aussi le voyons-nous abandonné forcément lorsqu'il s'agit d'exécuter des fermes d'une grande dimension.



La nef et les transsepts de la cathédrale d'Ély sont encore couverts par une belle charpente qui date de la fin du XIVe siècle. Nous donnons (31) une ferme de cette charpente ainsi que l'entre-deux des fermes. La grande courbe A B est d'un seul morceau; elle s'assemble à sa base dans le grand blochet C, à son sommet, dans le faux poinçon D. Les vides triangulaires E F sont remplis par des madriers, assemblés en feuillure sous l'arbalétrier et dans l'extrados de la courbe, afin de rendre les courbes et arbalétriers solidaires. Les pannes sont prises entre l'arbalétrier et sa courbe. Le sous-faîte G est soulagé par des liens courbes. Quant au blochet, il est maintenu horizontal par le lien courbe H, et le vide laissé derrière ce lien est rempli par des madriers; ces liens portent sur un potelet I taillé en forme de colonnette et sur un corbelet K engagé dans le mur. Une corniche avec frise en bois, ornée de demi-figures d'anges tenant des écussons, masque les sablières et la tête du mur. Il n'est pas besoin de dire que cette charpente était décorée de peintures. La solidité de cette charpente réside principalement dans la grosseur des bois employés et dans l'extrême aiguité des deux courbes reportant une grande partie de la poussée sur le potelet I, c'est-à-dire en contrebas de la tête du mur. Ce système étant adopté conduisit les charpentiers anglo-normands à des combinaisons fort savantes et d'une grande hardiesse d'exécution.

Tous ceux qui ont été à Londres ont vu la charpente qui couvre la grand'salle de l'abbaye de Westminster, dont la largeur, dans oeuvre, est de 21m,00. C'est là un magnifique exemple de ces immenses constructions de bois qui se trouvaient si fréquemment dans le nord de la France et que l'on rencontre encore en Angleterre. Il mérite que nous en donnions une description exacte à nos lecteurs. Les murs de la grand'salle de l'abbaye de Westminster ont 2m,20 d'épaisseur sur une hauteur de 11m,50 environ. La charpente, de la tête des murs au faîtage, porte 14m,00, et près de 20m,00 des corbeaux au faîtage. Les arbalétriers et chevrons ont 17m,00 compris tenons; nous n'avons pu savoir s'ils sont d'un seul morceau. Les différentes pièces de cette charpente sont couvertes de belles moulures, toutes évidées dans la masse, et les assemblages sont exécutés avec une telle perfection qu'on a grand'peine à les reconnaître.



Nous donnons d'abord (32) l'ensemble d'une des fermes-maîtresses. Le principe dont nous avons indiqué les éléments dans la charpente de la cathédrale d'Ély se retrouve complétement développé dans la charpente de Westminster. Pas d'entraits, mais de grands blochets saillants portés par des liens, et portant eux-mêmes les courbes qui viennent s'assembler à la base du faux poinçon. Mais à Westminster, pour réunir la partie de la charpente élevée au-dessus des blochets avec les grandes potences qui portent ceux-ci, d'immenses moises courbes étreignent tout le système, rendent ses différents membres solidaires et donnent à chaque demi-ferme la roideur et l'homogénéité d'une planche. Le problème posé fig. 30 est ici résolu, car il était facile de lier les deux demi-fermes au faux poinçon, de façon à ne pas craindre une dislocation sur toute la longueur de ce poinçon; dès lors les deux demi-fermes formaient comme deux triangles rigides, pleins, ayant une base commune. En effet, l'entrait retroussé A (fig. 32) est d'une seule pièce; il est même posé sur son fort et plus épais vers son milieu qu'à ses extrémités. Cet entrait formant la base du triangle dont B C est un des côtés, ce triangle ne peut s'ouvrir; c'est une ferme complète, rendue plus rigide encore par les remplissages qui la garnissent. Cette ferme supérieure ou ce triangle homogène s'appuie sur deux poteaux D qui s'assemblent à leur pied sur l'extrémité du blochet E. Ce blochet est lui-même maintenu horizontal par le lien courbe F et les remplissages. Mais si la pression était très-forte à l'extrémité du blochet cette pression exercerait une poussée en G à la base du lien F. C'est pour éviter cette pression et cette poussée que sont posées les grandes courbes moises H qui, embrassant le milieu de l'entrait retroussé A, le poteau D le blochet E et le pied du lien F, arrêtent tout mouvement, et font de ces compartiments inférieurs une seule et même pièce de charpente, qui n'est susceptible d'aucune déformation ni dislocation. Remarquons, d'ailleurs que tous les vides entre les pièces principales sont remplis par des claires-voies en bois qui raidissent tout le système et maintiennent les courbes dans leur pureté. La poussée ne pourrait s'exercer au point G que si ces courbes se cintraient davantage sous la charge; les remplissages verticaux sont autant d'ordonnées qui, par leur pression verticale, empêchent les courbes de se déformer. Examinons maintenant comment le chevronnage a été établi entre les fermes-maîtresses, espacées l'une de l'autre de 5m,75 d'axe en axe. Les fermes-maîtresses portent, suivant le système anglo-normand, des pannes I; mais ces pannes ont une assez grande portée; elles doivent soutenir des chevrons énormes et toute la couverture.

 


Voici (fig. 33) une vue perspective d'une travée qui nous évitera de longues explications. C'est sur la tête des poteaux D qu'est placé le cours principal de pannes O, soulagé par des liens L et des remplissages à claire-voie. Des goussets M réunissent l'entrait retroussé A à la panne; ils contribuent anssi à empêcher le hiement 13 des fermes et des chevrons. Ce cours principal de pannes est doublé d'un plateau formant saillie sur lequel viennent s'assembler des jambettes destinées à arrêter le glissement des chevrons posés au-dessus des lucarnes. Les autres cours de pannes I sont soulagés par des liens courbes N suivant le plan du chevronnage et assemblés dans les arbalétriers. On remarquera que le cours de pannes inférieur I' est en outre maintenu par des contre-fiches P venant reposer sur l'extrados de la grande courbe moise; c'est qu'en effet ce cours inférieur de pannes doit porter, non-seulement le chevronnage, mais aussi les combles des lucarnes R; il eût certainement fléchi à l'intérieur s'il n'eût été contrebutté par ces contre-fiches. Il y a, entre fermes, onze chevrons.




Afin de donner une idée de la beauté d'exécution de cette oeuvre unique de charpenterie, nous dessinons (fig. 34) un détail de sa partie inférieure. Les extrémités des grands blochets qui reçoivent les pieds des poteaux D sont décorées de figures d'anges tenant des écussons aux armes écartelées de France et d'Angleterre, le tout pris dans la masse du bois. Seules, les ailes des anges sont rapportées. En S, nous donnons la coupe des deux courbes faite sur J T; en V la coupe sur l'un des montants de la claire-voie de remplissage, et en X la coupe sur Y Z du blochet. Autant qu'on peut en juger sans démonter une charpente, les assemblages, les tenons sont coupés avec une rare précision; c'est grâce à cette pureté d'exécution, et plus encore à la qualité des bois employés ainsi qu'à la bonté du système, qne la charpente de la grand'salle de Westminster s'est conservée intacte jusqu'à nos jours.

À la fin du XIVe siècle et au commencement du XVe, l'Angleterre était victorieuse, riche et florissante; la France, au contraire, était ruinée par des invasions désastreuses et les querelles des grands vassaux de la couronne; aussi n'avons-nous rien, à cette époque, qui puisse être comparé à la grand'salle de l'abbaye de Westminster comme luxe de construction. Les charpentes qui nous sont restées de ce temps sont simples et ne diffèrent guère de celles données ci-dessus fig. 19, 21, 23, 26, 28, car elles ne couvrent généralement que des salles d'une médiocre largeur. Si la Normandie ou la Picardie ont possédé des charpentes de combles élevées conformément au système anglo-normand, ce qui est possible, elles ne sont pas parvenues jusqu'à nos jours. Nous trouvons cependant, près de Maubeuge, dans la petite église de Hargnies (Nord), une charpente dont la combinaison se rattache aux deux systèmes anglo-normand et français. Cette charpente est, ou plutôt était dépourvue d'entraits, car, vers le milieu du XVIe siècle, des tirants furent posés de deux en deux fermes sous les arbalétriers. Les fermes-maîtresses, dont nous donnons le profil en A (34 bis), reposent sur de forts blochets B; elles se composent de deux courbes C s'assemblant à l'extrémité inférieure du poinçon D, d'arbalétriers E courbes eux-mêmes à leur point de rencontre avec le poinçon, afin de trouver des assemblages solides indiqués dans le détail M. La courbe et l'arbalétrier sont bridés à la tangente, au moyen de deux petites moises F dont le détail N explique la forme et les attaches. Sous les arbalétriers sont chevillés et assemblés à mi-bois deux cours d'entre-toises ou pannes G dans lesquelles viennent s'assembler des croix de Saint-André inclinées suivant la pente du chevronnage, et figurés en I dans la coupe longitudinale. Ces pannes soulagent le chevronnage profilé en P, mais ont pour but principal d'empêcher le hiement de la charpente. Le chevronnage est muni également de courbes sous lesquelles sont cloués les bardeaux, ainsi qu'on le voit en H. Le sous-faîte K et les entre-toises L sont réunis par des croix de Saint-André qui maintiennent les poinçons verticaux.

Cette charpente, malgré le soin apporté dans les assemblages, a poussé au vide, et, comme nous l'avons dit plus haut, on a dû, quelques années après sa construction, maintenir son écartement par des entraits posés de deux en deux fermes; elle paraît dater des dernières années du XVe siècle.



Nous donnons (34 ter) le détail des sablières, des blochets, des gros et petits couvre-joints rapportés sur les bardeaux, à l'échelle de 0,05 c. pour mètre. On remarquera (fig. 34 bis) que les courbes du chevronnage viennent s'assembler dans des entraits retroussés, qui eux-mêmes s'assemblent dans les entre-toises R posées d'un poinçon à l'autre. Cela n'est guère bon; mais on se fiait, avec assez de raison, aux bardeaux pour maintenir les courbes légères du chevronnage, ces bardeaux formant comme une voûte qui offrait elle-même une assez forte résistance. Entre les chevrons, espacés de 0,45 c. environ d'axe en axe, sont posées, sous la volige, des chanlattes destinées à lui donner une plus grande solidité 14.

La salle principale de l'hôtel de ville de Saint-Quentin nous laisse voir encore une charpente sans entraits, du commencement du XVIe siècle, dont la disposition rappelle celle de l'église de Hargnies.

Depuis le XIIe siècle, on avait pris le parti d'élever, soit sur les tours, soit au centre de la croisée des églises, de hautes flèches de bois recouvertes d'ardoise ou de plomb. Ces flèches exigeaient, les dernières surtout, des combinaisons fort savantes afin de reporter le poids de tout le système sur les quatre piles des transsepts. Dès le commencement du XIIIe siècle, les charpentiers avaient su élever d'une façon ingénieuse ces masses énormes de bois et les suspendre au-dessus des fermes des noues, sans charger les arcs doubleaux bandés d'une pile à l'autre. Nous aurons l'occasion de nous occuper de ces sortes de charpentes au mot FLÈCHE, auquel nous renvoyons nos lecteurs.

Quant aux charpentes coniques qui couvrent les tours cylindriques, elles dérivent du système adopté pour les charpentes de croupes circulaires. Le moyen âge ayant élevé une quantité considérable de tours, soit dans les châteaux, soit pour protéger les enceintes des villes, les charpentes de ces ouvrages qui servaient à la défense et à l'habitation se rencontrent encore aujourd'hui en grand nombre; à Paris même, il en existe dans l'enceinte du Palais qui sont fort belles et bien conservées. Il nous suffira de donner un seul exemple résumant les combinaisons ordinaires de ces charpentes pour faire comprendre ce qu'elles présentent de particulier.



Soient le plan de la charpente d'une tour cylindrique (35) et le profil (36). Le quart du plan A (fig. 35) présente l'enrayure basse au niveau A des sablières (fig. 36); le quart B, la seconde enrayure B, le quart C, la troisième enrayure et le quart D la projection horizontale au niveau D. Deux entraits E F, G H (fig. 35), posés à angle droit, portent sur le cours de doubles sablières circulaires. Deux fermes se coupant à angle droit et réunies par un poinçon central I donnent le profil K (fig. 36).



Chaque quart de cercle porte six chevrons dont les blochets prolongés forment l'enrayure L (fig. 35) en s'assemblant dans le grand gousset M. Le profil de ces chevrons est donné en N (36). Entre chacun d'eux sont posés, de la première à la deuxième enrayure A et B, de faux chevrons profilés en O, afin de soutenir la volige entre les chevrons qui sont, dans la partie inférieure du cône, largement espacés. Ces faux chevrons portent sur des blochets ordinaires, ainsi qu'on le voit dans le quart du plan A. Les six chevrons par quarts sont d'un seul morceau de P en R et se terminent en bec de flûte, à leur tête R, ainsi que nous le verrons tout à l'heure. Les deux fermes se coupant à angle droit sont munies, à la hauteur B, de coyers qui, recevant des goussets comme les entraits de l'enrayure basse, forment la seconde enrayure. Mais cette seconde enrayure mérite toute notre attention.




Nous en donnons un détail perspectif (36 bis) vers la circonférence, et (36 ter) vers le poinçon. La fig. 36 bis démontre comment les courbes, ou esseliers A, sous les arbalétriers B des deux fermes principales, soulagent les coyers D et sont moisées avec ces arbalétriers et coyers, au moyen des petites moises C C serrées par la clef F; comment les chevrons E sont également armés de moises qui les réunissent aux courbes; comment la flexion de ces chevrons est arrêtée par les coyers G s'assemblant dans les goussets H; comment les lincoirs I, détaillés en I', I'' et I''', s'assemblent entre les chevrons et reçoivent les têtes des faux chevrons K, afin de rendre la pose possible. La fig. 36 ter va démontrer comment les courbes L, sous les chevrons, ne pouvant s'assembler dans les coyers G, s'assemblent dans un second gousset M.

 

Enfin la fig. 36 quater démontrera comment les arbalétriers des deux fermes s'assemblent dans le poinçon au sommet du comble; comment les extrémités des chevrons E, coupés en bec de flûte, viennent reposer et s'assembler sur les petites entre-toises courbes O. La section horizontale R, faite au niveau Y, et les deux rabattements S S', indiquent comment ces petites entre-toises courbes sont maintenues entre les arbalétriers.

Les charpentes coniques présentent d'assez grandes difficultés d'assemblage, car il faut qu'au levage les tenons puissent entrer dans leurs mortaises; or, toutes les pièces tendant vers un axe, il est nécessaire que le charpentier prévoie sur le chantier les moyens pratiques qui lui permettront d'assembler d'abord les pièces principales, puis les pièces, secondaires, sans être obligé de retailler les tenons et même quelquefois de les supprimer totalement pour que ces pièces puissent prendre leur place. Ainsi, dans l'exemple présent, les sablières courbes étant posées, les deux fermes à angle droit sont mises au levage et assemblées, puis les goussets, les chevrons, leurs coyers et esseliers, puis enfin les lincoirs et les faux chevrons. Toutes ces dernières pièces se posent sans difficulté du dehors au dedans, sans qu'il soit nécessaire de soulever les fermes principales pour faire arriver les tenons des pièces secondaires dans leurs mortaises. Les charpentes coniques donnent la mesure de l'expérience des charpentiers des XIVe et XVe siècles; elles sont toujours, non-seulement bien combinées et bien taillées, mais encore les moyens d'assemblage en sont prévus avec une adresse rare pour éviter les difficultés au levage. Souvent ces charpentes coniques sont dépourvues d'entraits à la base; les sablières circulaires, étant fortement reliées au moyen de clefs, empêchent seules l'écartement des chevrons, comme le ferait un cercle d'une seule pièce.

L'art de la charpenterie ne se bornait pas à élever des combles au-dessus des voûtes ou des charpentes apparentes. De tout temps, en France, on avait construit des maisons et même des palais et des églises en bois. Nous retrouvons encore quelques traces de maisons du XIIIe siècle construites suivant ce mode, particulièrement dans le Nord; mais ces bâtisses, remaniées, ne nous donnent pas des exemples assez complets pour qu'il nous soit possible de rendre compte des moyens de construction employés. Il nous faut commencer notre examen au XIVe siècle; ce n'est qu'à cette époque que nous retrouvons des pans-de-bois entiers formant façade des maisons sur la voie publique.




Sur un rez-de-chaussée composé de murs pleins, d'une succession d'arcades ou de piles isolées, les charpentiers établissaient, comme de nos jours, une sablière basse qui recevait les pans-de-bois de face. On voyait encore, il y a trois ans, en face du flanc sud du choeur de la cathédrale de Chartres, une petite maison en bois du XIVe siècle 15 dont le pan-de-bois de face était très-gracieux de forme; c'est un des plus complets et des plus élégants que nous connaissions de cette époque. Sur un rez-de-chaussée, maçonné plein et renforcé de chaînes de pierre, sont posées les poutres A supportant le plancher du premier étage (37) [poutres qui traversent l'épaisseur du mur et apparaissent à l'extérieur]. Les bouts de ces poutres reçoivent la sablière basse B. Sur la sablière s'assemblent les poteaux principaux P au droit des poutres horizontales A; puis, dans l'intervalle d'une poutre à l'autre, se dressent d'autres poteaux C, dont le dévers est maintenu par des alléges D munies de croix de Saint-André. Ces poteaux C s'assemblent à leur tête dans un chapeau F, qui est lui-même assemblé à tenons et mortaises dans les poteaux principaux P. Des liens G élégis en tiers-point avec redents forment une succession de fenêtres éclairant l'intérieur. Les chapeaux F portent deux potelets H au droit des poteaux C qui soulagent la sablière haute destinée à recevoir la charpente du comble. Mais cette sablière est double, suivant l'usage, ainsi que l'indique la coupe K. La sablière extérieure I, qui ne porte que les coyaux du comble, est posée sur les bouts des poutres L assemblées sur la tête des poteaux principaux P. Ces poutres L remplissent la fonction d'entraits pour les fermes des combles et portent les solives du plancher haut. La sablière intérieure M, qui ne peut fléchir puisqu'elle est soutenue par les potelets, reçoit le pied du chevronnage. Les alléges et les intervalles carrés entre les potelets sont remplis par une maçonnerie légère. On remarquera que les bouts des poutres supérieures L sont épaulés par des liens N assemblés dans les gros poteaux P.

Dans les villes du moyen âge, encloses de murs, la place était rare; aussi les maisons prenaient-elles, aux dépens de la voie publique, plus de largeur à chaque étage; elles présentaient ainsi une succession d'encorbellements assez saillants parfois pour qu'il fût possible de se donner la main des étages supérieurs des maisons situées en face les unes des autres. Pour obtenir ces encorbellements, que l'on appelait ligneaux, on faisait saillir les poutres des planchers à chaque étage en dehors des pans-de-bois inférieurs, on soutenait leur bout par des liens et on élevait le pan-de-bois supérieur au nu de l'extrémité de ces poutres.



Voici (38) qui expliquera cet ouvrage de charpenterie. Ce genre de construction de bois mérite d'être étudié. Soient les poteaux du rez-de-chaussée A. La tête de ces poteaux reçoit les consoles B destinées à épauler l'extrémité extérieure des poutres C. Des sablières D s'assemblent à l'about des poutres C, ainsi que l'indique la mortaise. Ces sablières sont soulagées par de petits liens fortement embrévés et assemblés à tenons et mortaises. Un poitrail E s'assemble dans la tête des poteaux A et est lui-même soulagé par des liens F. C'est ce poitrail qui porte les solives du plancher du premier étage. Des poteaux G posent sur l'extrémité des poutres C en porte-à-faux sur les poteaux A. Ces poteaux G reçoivent les sablières hautes du premier étage et les poutres K dont l'extrémité extérieure saillante est soulagée par des liens courbes. Sur le bout de ces poutres sont posées les sablières basses I du second étage, et ainsi de même à chaque étage, jusqu'aux combles. Les solives du plancher du second étage portent sur la sablière haute H, la débordent et contribuent à soulager la sablière basse I. Des écharpes disposées dans les pans-de-bois à chaque étage reportent les pesanteurs de ces pans-de-bois et de leurs remplissages, en platras ou en brique, sur les abouts des poutres maîtresses. Ces poutres, étant retenues dans le pan-de-bois ou le mur intérieur, brident tout le système et l'empêchent de basculer. Il est facile de voir que l'on gagnait ainsi sur la voie publique, à chaque étage, un, deux ou trois pieds qui profitaient aux locaux destinés à l'habitation. Ces encorbellements successifs formaient encore des abris qui protégeaient les pans-de-bois, les devantures des boutiques et les passants contre la pluie. Ils n'avaient que l'inconvénient de rendre les rues étroites très-sombres; mais il ne semble pas que, dans les villes du moyen âge, on eût, à cet égard, les mêmes idées que nous.

Lorsque les maisons présentaient sur la rue leur petit côté, c'est-à-dire lorsque le terrain qu'elles occupaient était plus profond que large, les pans-de-bois de face se terminaient par un pignon et non par une croupe. Ce pignon n'était que la première ferme du comble, le plus souvent posée en saillie sur les bouts des sablières, afin de former une sorte d'auvent destiné à protéger la façade contre la pluie. Ces dispositions, ainsi que celles relatives aux pans-de-bois de face, étant développées dans le mot MAISON, nous y renvoyons nos lecteurs.

Quant aux charpentes des planchers, elles sont généralement fort simples pendant le moyen âge; peu ou point d'enchevêtrures, mais des poutres posées de distance en distance sur les murs de face ou de refend, et recevant les solives restant apparentes comme les poutres elles-mêmes (voy. PLAFOND).



On savait déjà cependant, au XVe siècle, armer les pièces de bois horizontales de manière à les empêcher de fléchir sous une charge. La tribune des orgues de la cathédrale d'Amiens, qui date de cette époque, repose sur une poutre armée avec beaucoup d'adresse; cette poutre a 15m,00 environ de portée, et elle est fortement chargée. Nous donnons (39) une autre poutre armée de la grand'salle du château de Blain en Bretagne, bâti, à la fin du XIVe siècle, par le connétable Olivier de Clisson, et réparé vers 1475. Cette poutre armée se compose de deux pièces horizontales A et B. Celle B plus large que celle A, de manière à former lambourdes pour recevoir les solives du plancher. L'armature consiste en une pièce de bois courbe assemblée dans la poutre B et reliée à la flèche par deux boulons de fer serrés au moyen de clavettes 16. Nous avons vu aussi, dans des constructions civiles, et entre autres dans l'ancien hôtel de la Trémoille à Paris, élevé pendant les dernières années du XVe siècle, des poutres de planchers d'environ 12m,00 de portée armées, ainsi que l'indique la fig. 40; les deux pièces B B, posées bout à bout, étaient noyées en partie dans l'épaisseur de la poutre A recevant les solives, ainsi que l'indique la coupe en C. Les pièces A et B étaient reliées entre elles par des boulons avec clavettes.



Un des caractères particuliers à l'art de la charpenterie du moyen âge, c'est sa franchise d'allure, sa connaissance des bois et son respect, dirons-nous, pour leurs propriétés. Les assemblages des charpentes du moyen âge méritent d'être scrupuleusement étudiés; ils sont simples, bien proportionnés à la force des bois ou à l'objet particulier auquel ils doivent satisfaire. La prévision qui fait réserver, dans une longue pièce de bois, certains renforts, certains épaulements qui ajouteront à la force d'un assemblage, le choix des bois ou leur position suivant la place qu'ils doivent occuper, l'attention à ne pas les engager dans les maçonneries mais à les laisser libres, aérés, indiquent de la part des maîtres la connaissance parfaite de leur art, des qualités des matériaux, l'étude et le soin; de même que la pureté et la juste proportion des assemblages indiquent chez les ouvriers une longue habitude de bien faire. Le charpentier du moyen âge n'appelle pas à son aide le serrurier pour relier, brider ou serrer les pièces de bois qu'il met en oeuvre, si ce n'est dans quelques cas particuliers et fort rares; il se suffit à lui-même, et le fer ne vient pas, comme dans les charpentes modernes, suppléer à l'insuffisance ou à la faiblesse des assemblages.

1111 Voir l'ouvrage de M. J. H. Parker, Some account of Domest. Architect. in Engl., from Edward I to Richard II, p. 242. Parsonage bouse, Market Deeping, Lincolnshire. Aussi le Gloss. of Terms used in Grec. Rom. Ital. and Gothic Archit., du même auteur. Oxford, vol. II.
1212 Voy. dans le Gloss. of Terms used in Grec. Rom. Ital. and Gothic Archit., par J. H. Parker, Oxford, vol. II, une curieuse collection de charpentes anglaises.
1313 On appelle hiement, en termes de charpenterie, le mouvement que l'effort du vent imprime aux fermes et chevrons.
1414 Nous devons les dessins de cette charpente à M. Bruyerre, architecte, qui l'a relevée avec soin et a bien voulu nous communiquer ses notes.
1515 Cette maison vient d'être dénaturée depuis peu; nous l'avons dessinée en 1853; elle était alors à peu près intacte.
1616 Ce renseignement curieux nous a été fourni par M. Alfred Ramé.