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Dictionnaire raisonné de l'architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 3 - (C suite)

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CLÔTURES DISPOSÉES DANS L'INTÉRIEUR DES ÉGLISES MONASTIQUES. Il ne reste aujourd'hui nulle trace des clôtures nombreuses qui divisaient à l'intérieur les églises monastiques. Pendant les premiers siècles du moyen âge, des clôtures étaient disposées autour de chaque autel. Frodoard 276 parle de l'autel que l'archevêque de Reims Hérivée «éleva et consacra au milieu du choeur de la cathédrale en l'honneur de la sainte Trinité, et qu'il entoura de tables revêtues de lames d'argent». Dès le XIIe siècle, il paraîtrait que les nombreuses clôtures qui divisaient l'intérieur des églises furent supprimées pour laisser, probablement, plus de place aux fidèles; car, à dater de cette époque, les textes et les monuments n'indiquent plus guère que les clôtures des choeurs et celles des sanctuaires.

Le plan de l'abbaye de Saint-Gall 277, si curieux à consulter lorsque l'on veut prendre une idée de ce qu'était, au IXe siècle, un grand établissement monastique, nous fait voir dans l'église un grand nombre de clôtures disposées de telle façon que l'espace réservé aux fidèles devait être fort restreint, à moins que ceux-ci ne fussent appelés dans l'église à l'occasion d'une cérémonie particulière, auquel cas ils devaient être admis à l'intérieur de plusieurs de ces clôtures. Les moeurs religieuses se sont évidemment successivement modifiées depuis cette époque reculée. Alors les diverses parties des églises n'étaient point ouvertes tout le jour comme elles le sont aujourd'hui en France, et les fidèles qui voulaient faire une prière dans la maison du Seigneur ne pouvaient circuler partout; ils se tenaient près de l'entrée dans un espace assez restreint. Déjà, au XIIe siècle, les religieux réguliers avaient senti le besoin de modifier cet état de choses au milieu de populations dont la dévotion moins ardente avait besoin d'être soutenue par le spectacle de grandes pompes religieuses. Vers le milieu de ce siècle, les évêques, voulant reprendre l'importance que les grandes abbayes leur avaient fait perdre, élevèrent, sur presque toute la surface de la France, de vastes cathédrales dont les dispositions intérieures contrastaient avec celles des églises monastiques en ce qu'elles laissaient au contraire des espaces considérables à la foule, et que les cérémonies du culte, faites à un autel unique, découvert de toutes parts, pouvaient être vues par un grand nombre d'assistants (voy. CATHÉDRALE, CHOEUR). Cette observation, qui nous est suggérée par une étude attentive des dispositions intérieures des églises du moyen âge, et à laquelle nous attachons une certaine importance puisqu'elle nous explique en partie le mouvement prodigieux qui fit reconstruire les cathédrales sur de vastes plans, à la fin du XIIe siècle et au commencement du XIIIe, ne saurait s'appuyer sur un monument plus ancien et plus authentique que celui dont nous venons de parler, le plan manuscrit de l'abbaye de Saint-Gall. L'église comprise dans ce plan est, comme les églises rhénanes, à deux absides, l'une à l'occident, l'autre à l'orient.


En voici (6) une copie réduite. Les fidèles entrent par l'abside occidentale, pourvue d'un double bas-côté AA. Ils sont arrêtés par la clôture qui entoure l'autel dédié à saint Pierre et par des barrières B, B donnant entrée dans les deux ailes de la nef C, C. Un exèdre, ou banc circulaire pour les religieux, entoure l'autel de Saint-Pierre E, élevé de deux degrés. Un premier choeur clôturé est établi en F; puis on trouve une seconde clôture entourant les fonts baptismaux G, à l'orient desquels est un autel dédié à saint Jean l'Évangéliste. Vers le milieu de la nef s'élève en H un troisième autel dédié au saint Sauveur et surmonté d'un grand crucifix; cet autel est clôturé. Puis vient le grand choeur divisé en plusieurs parties 278; la première contient l'ambon I pour la lecture des évangiles. Deux autres petits ambons K précèdent la seconde clôture du choeur réservée aux offices de nuit. Dans l'axe, à l'extrémité orientale de cette seconde clôture, est la descente à la Confession ou crypte, contenant les restes du saint; deux petits autels sont disposés en LL des deux côtés de cette descente. Sept marches M montent au sanctuaire à droite et à gauche de l'entrée de la crypte. Deux autres descentes donnent accès dans cette crypte en NN. L'autel principal O, dédié à la Vierge et à Saint-Gall, est entouré d'une galerie désignée sur le dessin par ces mots «Involutio arcuum». Cette galerie paraît être une clôture double, derrière laquelle s'ouvre l'abside orientale, dont l'autel P est dédié à saint Paul et est entouré d'un exèdre et par conséquent d'une clôture. Dans les deux transsepts RR sont deux autels dédiés à saint André et à saint Jacques et saint Philippe, autels qui ont leur clôture. Chaque travée des bas-côtés est pourvue d'un autel orienté avec clôtures divisant ces travées en chapelles. Il est facile de se rendre compte, en examinant ce plan, pourquoi le peuple ne pouvait circuler librement à travers tous ces obstacles, et comment l'église était tout entière réservée aux divers services religieux, c'est-à-dire presque uniquement occupée par les moines. Ce sont ces dispositions que les abbés cherchèrent à modifier plus tard, ainsi qu'il apparaît en étudiant les plans des églises des ordres de Cluny et de Cîteaux, et que les évêques français des XIIe et XIIIe siècles abandonnèrent absolument dans la construction de leurs nouvelles cathédrales par les motifs déduits ci-dessus. Ce mouvement du haut clergé français ne fut pas suivi également dans tout l'Occident, et les cathédrales allemandes ou rhénanes conservent encore certaines dispositions qui rappellent les clôtures des édifices monastiques carlovingiens. C'est ainsi que les cathédrales de Bamberg et de Trèves, pourvues de deux absides opposées comme toutes les cathédrales rhénanes, ont conservé encore des clôtures des XIe et XIIe siècles, en pierre, richement sculptées; elles nous indiquent quelle était la forme et la décoration des clôtures d'églises abbatiales. À défaut de monuments analogues existant en France, on peut recourir aux monuments que nous venons de citer. Celle du choeur oriental de Bamberg se compose, entre chaque pile du sanctuaire, d'un mur élevé, dans le soubassement duquel sont percés des arcs qui éclairent la crypte. Une arcature forme la décoration principale à l'extérieur, et sous chaque arcade sont sculptées deux figures d'apôtres de 1m,10 de hauteur environ, d'un grand style quoique déjà maniéré. Ces apôtres semblent discuter entre eux; ils ont tous un phylactère déroulé dans la main. Toute cette décoration était peinte et les colonnes dorées. Il est regrettable que nous n'ayons conservé en France aucune clôture de cette époque, car il n'est pas douteux que ces monuments intérieurs dussent être fort beaux et traités avec un grand soin. Il ne nous reste plus, dans quelques églises monastiques, que des clôtures en fer d'une époque plus récente, c'est-à-dire exécutées lorsque les abbés voulurent laisser voir le choeur de leurs églises. Il y avait, dans l'église de Saint-Denis de l'abbé Suger, de très-belles clôtures en fer forgé dont il existe encore quelques fragments, et nous voyons encore autour du sanctuaire de l'église abbatiale de Saint-Germer en Beauvoisis les grilles qui servaient de clôture et qui datent du commencement du XIIIe siècle. Jusque pendant le dernier siècle, les églises monastiques supprimèrent autant qu'elles le purent les clôtures pleines pour les remplacer par des claires-voies en pierre, en bois ou en fer; cependant on trouve, dans quelques pauvres églises, des restes de clôtures fermées autour des choeurs. L'église abbatiale de Saint-Seine en Bourgogne a conservé sa clôture en grossière maçonnerie, couverte, du côté extérieur, de peintures du commencement du XVIe siècle représentant l'histoire de saint Seine.

CLÔTURES DES CHOEURS DES CATHÉDRALES. En France, des clôtures de choeur existaient dans les églises cathédrales primitives; mais, lorsqu'au XIIe siècle les évêques français reconstruisirent ces monuments sur des plans beaucoup plus vastes et d'après des programmes nouveaux, il ne paraît pas qu'ils aient songé à fermer les choeurs par des clôtures fixes (voy. CHOEUR). Ce n'est que vers la fin du XIIIe siècle que nous voyons en France élever des clôtures en pierre autour des choeurs des cathédrales. L'une des plus anciennes est celle dont il reste des fragments derrière les stalles de la cathédrale de Paris; elle fut commencée pendant les dernières années du XIIIe siècle, et achevée en 1351 par Jean le Bouteillier 279. Cette clôture représente l'histoire de Notre-Seigneur disposée par travées, formant une suite de scènes ronde-bosse entre les piliers du choeur. Ces scènes, derrière les stalles, n'étaient vues que des bas-côtés; mais, autour du sanctuaire, elles se trouvaient complétement ajourées de manière à être vues de l'intérieur du choeur comme des collatéraux (voy. CHOEUR, fig. 1). Un riche soubassement décoré d'arcatures les supporte. Suivant l'usage, l'architecture et la statuaire de la clôture du choeur de Notre-Dame de Paris étaient peintes et dorées. Le choeur de la cathédrale de Bourges fut clos vers la même époque; il ne reste que des fragments fort beaux de cette clôture, déposés aujourd'hui dans la crypte. Les choeurs des cathédrales de Limoges et de Narbonne sont encore clos en partie par des tombeaux d'évêques. Il en était de même à Amiens. À Narbonne, outre les tombeaux, on voit encore les restes d'une clôture architectonique du XIVe siècle, dont nous donnons (7) une travée. Ce fragment de clôture, placé dans l'axe du sanctuaire, est complétement peint.

 


Plus tard, ces clôtures furent quelquefois exécutées en bois. Les XVe et XVIe siècles en élevèrent de fort riches. La clôture du choeur de la cathédrale de Chartres fut presque entièrement exécutée au commencement du XVIe siècle, et c'est une des plus remarquables. Mutilée par le Chapitre pendant le dernier siècle, pour garnir le choeur à l'intérieur de la plus lourde décoration qui se puisse imaginer, la face extérieure seule est conservée. Elle représente, comme à la cathédrale de Paris, l'histoire de Jésus-Christ divisée par travées, dans lesquelles sont sculptées des scènes ronde-bosse. Cette clôture est en pierre, exécutée avec une finesse et une richesse de détails prodigieuses. À Amiens, on voit encore, derrière les belles stalles du commencement du XVIe siècle, une clôture en pierres peintes, de la même époque, représentant du côté sud l'histoire de saint Firmin, et du côté nord l'histoire de saint Jean-Baptiste. Cette clôture, d'un assez mauvais style, est cependant fort curieuse à cause de la quantité de costumes que l'on y trouve, costumes qui sont fidèlement copiés sur ceux du temps auquel appartiennent ces sculptures. Il n'est personne qui ne connaisse la belle clôture du choeur de la cathédrale d' Alby, qui date des premières années du XVIe siècle (voy. JUBÉ). Les XVIIe et XVIIIe siècles virent détruire dans nos cathédrales la plupart de ces clôtures en pierre, au moins autour des sanctuaires; elles furent remplacées par des grilles plus ou moins riches, enlevées à la fin du dernier siècle. De sorte qu'aujourd'hui ces sanctuaires sont clos d'une manière peu convenable par des boiseries sans valeur ou des grilles d'un aspect misérable.

CLOU, s. m. Tige de fer pointue garnie d'une tête, destinée à fixer des ferrures sur le bois ou à maintenir ensemble certaines pièces de charpente ou de menuiserie. L'antiquité grecque et romaine employa souvent les clous comme motif de décoration des barrières de bois, et principalement des portes.



Il n'est pas un architecte qui ne connaisse les clous de la porte en bronze du Panthéon à Rome, ceux des portes en bronze de Saint-Jean de Latran. Ces clous sont munis de têtes richement ciselées qui en font des objets d'art d'une grande valeur. Cette habitude fut suivie pendant le moyen âge, et il nous reste un grand nombre de ventaux de portes de cette époque dont les ferrures ou les plaques de bronze sont retenues au bois par des clous dont les têtes sont d'un travail remarquable. Lors même que ces petites pièces de forge sont simples comme forme, elles conservent toujours la trace d'une fabrication soignée. Nous avons entre les mains quelques clous provenant des ventaux vermoulus de la grande porte de l'église abbatiale de Vézelay qui, au point de vue de la fabrication, sont d'un grand intérêt, et sont évidemment une tradition antique. Ils se composent (1) 280 d'une tête en forme de capsule hémisphérique, munie dans sa concavité d'une longue pointe. Cette tête, très-mince, et sa tige sont en fer; une seconde capsule A en cuivre jaune, de l'épaisseur d'une carte à jouer, enveloppe exactement la tête de fer de manière à présenter, à l'extérieur, l'apparence d'une demi-sphère en bronze. Ces clous, que nous croyons appartenir au XIe siècle, sont bien forgés, et la capsule de bronze parfaitement ajustée sur la tête du clou. Un point de soudure retient celle-ci sur le fer. Nous pensons que l'on enfonçait d'abord le clou dans le bois et que l'on appliquait ensuite la capsule de bronze, car on ne remarque sur celle-ci aucune de ces traces que les coups de marteau y eussent laissées. Quelquefois ces revêtements de cuivre sur les têtes de clous en fer sont fondus et ciselés, représentant habituellement des mufles d'animaux. La belle porte revêtue de lames de bronze qui existe encore du côté méridional de la cathédrale d'Augsbourg (porte dont la plupart des panneaux appartiennent à une époque fort ancienne, VIIe ou VIIIe siècle), et qui fut remontée au XIIe, présente une série de clous appartenant à cette dernière époque, dont les têtes figurent des masques humains en bronze (2). Ces traditions antiques se perdirent vers la fin du XIIe siècle, et depuis lors les clous simples ou ornés ne furent plus que des pièces de forge en fer. Il existe encore sur les ventaux de portes du XIIe siècle un grand nombre de clous dont la tête est forgée en pointe de diamant, et dont la tige, divisée en deux pointes, est rivée sur les traverses, ainsi que l'indique la fig. 3.



C'était un moyen sûr et puissant de serrer les planches des huis contre les membrures qui les portaient, car alors on ne connaissait point les écrous taraudés, les vis et les boulons. Quelquefois les têtes de clous sont forgées en forme de graines ou de pistils de fleurs, ainsi que l'indiquent les fig. 4 et 4 bis 281, refendues et à facettes (5) 282, coniques (6 et 6 bis) 283.



Bientôt on reconnut que quand les clous étaient enfoncés directement dans le bois, pour relier des huis, et qu'ils ne portaient pas sur des bandes de fer, telles que pentures, équerres, etc., la tête enfoncée à coups de marteau éraillait le bois ou ne le joignait pas exactement; on posa entre cette tête et le bois une rondelle de fer battu légèrement modelée, le creux posé du côté du bois afin de faire ressort et de joindre ainsi exactement les têtes de clous aux planches, comme on place aujourd'hui des rondelles sous les écrous des boulons. Seulement les serruriers du moyen âge donnaient à ces rondelles des formes variées; plus barbares apparemment que ceux de notre temps, ils ne pensaient pas qu'une nécessité de métier dût exclure l'art comme une superfluité inutile. À dater du XIIIe siècle, les exemples de clous munis de rondelles sont si fréquents et si variés, que nous ne pouvons que choisir quelques-uns des plus remarquables. Ces rondelles sont composées d'une petite plaque de fer battu très-mince, percée au milieu d'un trou juste assez grand pour laisser passer la tige du clou, dont le collet vient forcer la rondelle à s'appliquer sur le bois. Celle-ci ayant presque toujours sa concavité du côté du bois, il en résulte qu'en frappant sur la tête du clou pour l'enfoncer, on fait pénétrer les extrémités de la rondelle dans les fibres du bois, de manière à ne pas présenter sur la surface des planches des aspérités ou saillies de nature à écorcher les mains ou à arrêter la poussière.



La fig. 7 donne plusieurs exemples de ces clous à rondelles: le clou A provient de la porte méridionale de l'église de Schelestadt, XIIe siècle; le clou B, en notre possession, provient d'une porte de Carcassonne, XIIIe siècle; le clou C, d'une porte de Rouen; le clou D, d'une porte de l'église de Flavigny (Côte-d'Or). On alla plus loin; on mit bientôt deux rondelles l'une sur l'autre, dont les formes, en se contrariant, présentaient des dessins plus variés et d'un modelé plus apparent. C'est surtout à dater du XVe siècle que cette méthode fut employée. Nous possédons deux clous de cette époque munis de doubles rondelles qui sont de véritables chefs-d'oeuvre; ils proviennent de démolitions 284. L'un d'eux présente deux rondelles superposées dont la forme est inscrite chacune dans un carré (8). Ces rondelles sont découpées et modelées au moyen d'un procédé bien simple. Des coups de poinçon sous les feuilles leur ont donné le galbe reproduit dans notre dessin. La tête du clou est finement forgée et retouchée au burin. L'autre clou (9), d'une époque plus récente, possède deux rondelles inscrites chacune dans un triangle. Ici le forgeron a mis plus d'art dans le modelé des feuilles, et, de plus, il les a retouchées au burin. La tête du clou est refendue à chaud et burinée.



Les clous qui maintiennent les serrures, les entrées ou les marteaux de porte, ont souvent leurs têtes forgées en forme de figurines très-délicatement travaillées.

 


Nous donnons (10) un de ces clous, qui date du XIIIe ou du XIVe siècle, et qui provient d'une église de Basse-Bretagne 285. Quelquefois les têtes de ces clous de serrures sont en forme d'écussons armoyés, ou représentent des muffles d'animaux (voy. SERRURERIE).

La renaissance conserva ces habitudes d'art industriel dans les moindres détails de la construction; elles ne se perdirent que vers le milieu du XVIIe siècle. Cependant on trouve encore, en province surtout, la trace de ces traditions du moyen âge dans la serrurerie du dernier siècle.

COLLATÉRAL, s. m. S'emploie pour désigner les ailes, les nefs latérales ou bas-côtés des églises (voy. CATHÉDRALE, ÉGLISE).

COLLÉGE, s. m. Établissement destiné à l'enseignement des lettres, des arts et des sciences, élevé par suite d'une fondation particulière. Sauval nous donne de curieux détails sur l'origine de ces établissements dans la ville de Paris 286. Nous indiquons, dans l'article sur l'ARCHITECTURE MONASTIQUE, quelques-unes des raisons qui déterminèrent les riches abbayes à fonder des colléges dans Paris ou dans d'autres villes populeuses et puissantes. Les cathédrales (voy. CATHÉDRALE, CLOÎTRE) possédaient, la plupart, sous l'ombre de leurs clochers, des écoles, dont quelques-unes devinrent célèbres. Jusqu'au XIIe siècle, l'enseignement ne sortit pas de l'enceinte des cloîtres des abbayes ou des églises épiscopales; mais, à cette époque déjà, il se répandit au dehors. Abailard fut un des premiers qui enseignât la dialectique, la théologie et la philosophie, en dehors des écoles alors seules reconnues; son succès fut immense: après avoir battu ses adversaires, il vit le nombre de ses élèves s'accroître sans cesse autour de sa chaire, jusqu'au moment où le pape Innocent II, confirmant le jugement du concile de Sens qui condamnait la doctrine d'Abailard, lui interdit l'enseignement. Il n'entre pas dans le cadre de notre Dictionnaire de traiter les questions qui alors divisaient le monde enseignant; il nous suffira d'indiquer ici le mouvement extraordinaire des esprits vers les études philosophiques, mouvement qui, malgré les persécutions dont Abailard fut l'objet, comme le sont tous les professeurs qui prétendent quitter les voies de la routine, entraîna bientôt les prélats, les abbayes et même les particuliers, à fonder, à Paris principalement, un grand nombre d'établissements moitié religieux, moitié laïques, qui s'ouvrirent à la jeunesse avide de savoir. Sous Louis VII, les écoles du cloître Notre-Dame ne pouvant contenir le nombre des étudiants qui venaient s'y presser, le chapitre de la cathédrale de Paris souffrit que les écoliers passassent la rivière et s'établissent autour de Saint-Julien-le-Pauvre. Ce fut là que Guillaume de Champeaux, le maître et bientôt après l'adversaire malheureux d'Abailard, vint enseigner. De Saint-Julien, l'école des humanistes et des philosophes fut transférée à Saint-Victor. «Depuis, dit Sauval, le nombre des écoliers de dehors étant venu à s'augmenter, les écoles des Quatre-Nations furent bâties à la rue du Fouare; ensuite on fonda le collége des Bons-Enfants, celui de Saint-Nicolas-du-Louvre, et le collége Sainte-Catherine-du-Val des écoliers. Il fut permis même, en 1244, d'enseigner les sciences partout où l'on voudroit, et dans les maisons que les régents trouveroient les plus commodes. Mais afin que pas un d'eux ne dépossédât son compagnon de celle qu'il avoit louée, Innocent IV fit des défenses expresses là-dessus, par deux bulles consécutives, l'une donnée à Lyon le deux des nones de mars, l'an deuxième de son pontificat; l'autre, sept ans après, datée de Péronne le troisième des calendes de juin, avec commandement au chancelier de l'Université de faire taxer le louage des maisons où ils demeuroient. Dans tout ce temps-là, et même jusqu'au règne de saint Louis, il n'y eut point à Paris de colléges, bien que nous apprenions de Rigord en la vie de Philippe-Auguste, et même de l'Architremius de Joannes Hantivillensis, qu'en 1183 on y comptoit plus de dix mille écoliers; et nonobstant cela, il est constant qu'ils n'avoient point de quartier affecté, et se trouvoient dispersés de côté et d'autre dans la ville, de même que les écoles et les régents; personne encore ne s'étant avisé de fonder des colléges ou hospices. Je me sers du mot hospice, non sans raison; car les colléges qu'on vint à bâtir d'abord n'étoient simplement que pour loger et nourrir de pauvres étudiants. Que si depuis on y a fait tant d'écoles, ce n'a été que longtemps après, et pour perfectionner ce que les fondateurs, en quelque façon, n'avoient qu'ébauché.»

Sous le règne de saint Louis cependant furent fondés et rentés les colléges de Calvi, de Prémontré, de Cluny et des Trésoriers. «Mais, ajoute Sauval, comme depuis ce temps-là, tant les rois que les reines, les princes, les évêques, outre beaucoup de personnes riches et charitables, en firent d'autres presque à l'envi, insensiblement il s'en forma un corps, dont l'union fut cause que ce grand quartier où ils se trouvèrent prit le nom d'Université... Or par ce moyen des colléges tout le quartier devint si plein d'écoliers, que quelquefois ils ont forcé, tant le Parlement que ceux de Paris, et les rois eux-mêmes, à leur accorder ce qu'ils demandoient, quoique la chose fût injuste. Et de fait leur nombre étoit si grand, que, dans Juvénal des Ursins, il se voit qu'en 1409 le recteur alla en procession à Saint-Denis en France pour l'assoupissement des troubles, et, lui n'étant qu'aux Mathurins (Saint-Jacques), les écoliers néanmoins du premier rang, et qui marchoient à la tête des autres, entroient déjà dans Saint-Denis.»

Dès le XIIIe siècle, Paris était devenu la ville des lettres, des arts et des sciences en Europe. Les élèves y affluaient de l'Angleterre, de l'Allemagne et de l'Italie 287. Les écoliers, réunis d'abord dans des maisons que louaient des recteurs ou que donnaient des particuliers, purent bientôt s'assembler dans des établissements construits pour les contenir. En 1252, saint Louis institue le collége de la Sorbonne. Robert de Sorbone fonde le collége de Calvi. En 1246, les Bernardins, moines de l'ordre de Cîteaux, érigent les écoles des Bernardins. En 1255, l'abbé de Prémontré achète neuf maisons de la rue des Étuves afin de bâtir à leur place un collége pour les religieux. En 1269, Ives de Vergé, abbé de Cluny, fonde un collége au-dessus de la rue de la Sorbonne pour les religieux de son ordre. Devant la porte de l'Hôtel-Dieu, sur le parvis Notre-Dame, existait une maison où étaient logés dix-huit pauvres écoliers. Cette fondation fut transférée devant le collége de Cluny. En 1269, Guillaume de Saona, trésorier de l'église de Notre-Dame de Rouen, fonde un collége dans la rue de la Harpe pour vingt-quatre écoliers. En 1280, Raoul de Harcourt, chanoine de l'église Notre-Dame de Paris, fonde un autre collége rue de la Harpe. En 1289, Jean Cholet, évêque de Beauvais, laisse par testament 6,000 livres pour fournir aux frais de la guerre d'Arragon; mais Gérard de Saint-Just et Évrard de Nointel, ses exécuteurs testamentaires, convertissent ce legs en achat de quelques maisons près de l'église Saint-Étienne-des-Grès, lesquelles ils érigent en collége. En 1302, le cardinal J. le Moine établit un collége sur des terrains situés entre la rue Saint-Victor et la Seine. En 1304, Jeanne, femme de Philippe le Bel, fonde le collége de Navarre; c'était un des plus beaux colléges de Paris. En 1308, Guillaume Bonnet, évêque de Bayeux, bâtit le Collége de Bayeux. En 1313, Gui de Laon et Raoul de Preelles, secrétaire de Philippe le Bel, établissent un collége au bas du mont Saint-Hilaire pour les pauvres étudiants de Laon et de Soissons. En 1314, Gilles Aiscelin, archevêque de Rouen, achète, proche l'église de Sainte-Geneviève, un terrain sur lequel il bâtit le collége appelé depuis de Montaigu. En 1317, Bernard de Forges, archevêque de Narbonne, fonde le collége de Narbonne. En 1322, Geoffroi du Plessis, notaire du pape Jean XXII et secrétaire de Philippe le Long, affecte son hôtel, situé rue Saint-Jacques, à l'établissement d'un collége. Vers 1325, Jeanne de Bourgogne, reine de France, fonde le collége de Bourgogne. En 1332, Nicolas le Candrelier, abbé de Saint-Vaast, fonde le collége d'Arras pour de pauvres étudiants de l'Artois. André Chini, Florentin, évêque d'Arras, élève un collége en faveur des écoliers italiens. En 1332, onze boursiers sont institués dans ce collége par trois seigneurs italiens. En 1333, Étienne de Bourgueil, archevêque de Tours, fait édifier le collége de Tours. En 1336, Gui de Harcourt, évêque de Lizieux, laisse par testament une somme suffisante pour louer une maison propre à entretenir vingt-quatre écoliers. En 1334, Jean Huban, conseiller du roi, fonde le collége de l'Ave-Maria. En 1341, Pierre Bertrand, cardinal, évêque d'Autun, érige, rue Saint-André-des-Arcs, le collége d'Autun. En 1343, Jean Mignon, conseiller du roi, achète plusieurs maisons tenant à l'ancien hôtel de Vendôme qu'il destine à l'érection d'un collége. En 1348, les trois évêques de Langres, de Laon et de Cambrai, laissent par testament la somme nécessaire à la fondation du collége de Cambrai. En 1342, Guillaume de Chanac, évêque de Paris, institue un collége en l'honneur de saint Michel pour les pauvres étudiants du Limousin, son pays. En 1353, Pierre de Boucourt, chevalier, fonde le collége de Boucourt et de Tournay. En la même année, Jean de Justice, chanoine de l'église Notre-Dame de Paris, achète plusieurs maisons rue de la Harpe pour y établir le collége de Justice. En 1359, Étienne de Boissé laisse quelques maisons, situées derrière l'église Saint-André-des-Arcs, pour être converties en collége.

Vers la même époque, un autre collége est érigé derrière les Mathurins-Saint-Jacques par Maistre Gervais, médecin de Charles V. En 1365, le cardinal Jean de Dormans, évêque de Beauvais, chancelier de France, élève le collége dit de Dormans. En 1380, Michel de Dainville, chanoine archidiacre de Noyon, conseiller du roi Charles V, fonde le collége de Dainville. La même année, le collége de Cornouailles est fondé par Galeran Nicolas. En 1391, Pierre de Fortet, chanoine de Notre-Dame de Paris, ordonne qu'un collége soit érigé sur ses biens. En 1400, le collége de Treguier est établi par Guillaume Coëtman, chantre de l'église de Treguier. Ajoutons à cette longue liste de fondations celles des colléges de Reims, de Coquerel, de la Marche, de Sées, de la Merci, du Mans, de Sainte-Barbe, des Jésuites et des Grassins, élevés pendant les XVe et XVIe siècles.

La ville de Paris possédait, en dehors de ces établissements, plusieurs écoles publiques: l'école des Quatre-Nations, rue du Fouare, citée par Pétrarque. En 1109, Guillaume de Champeaux avait fondé une école rue Saint-Victor. En 1182, il existait plusieurs écoles pour les Juifs. En 1187, il y avait à Saint-Thomas-du-Louvre une école pour cent soixante pauvres prêtres. En 1208, Étienne Belot et sa femme donnent un arpent de terre, près le cimetière Saint-Honorat, pour établir le collége des Bons-Enfants. En 1415 est bâtie l'École de droit. En 1472, l'École de médecine est construite rue de la Bucherie. L'École des beaux-arts n'existait pas alors; les arts plastiques et l'architecture s'enseignaient dans le sein des corporations qui avaient leurs traditions et leur enseignement. De tous ces colléges, plusieurs, à la fin du dernier siècle, conservaient encore quelques-uns de leurs anciens bâtiments. De nos jours, nous avons encore vu, à la place qu'occupe aujourd'hui la bibliothèque Sainte-Genevière, le collége de Montaigu, qui présentait quelques traces de ses dispositions primitives.

Les colléges élevés pendant les XIIIe et XIVe siècles n'avaient pas les dimensions que l'on a dû donner depuis à ces établissements; ils ne contenaient qu'un nombre assez restreint de pensionnaires; c'était des asiles ouverts aux écoliers de province qui obtenaient la faveur d'être envoyés à Paris pour étudier les lettres et les sciences. Mais ils réunissaient dans les classes un personnel assez nombreux d'externes logés au dehors, pour que, dans les temps de troubles, cette population flottante fût un véritable danger pour la ville de Paris. Aussi, pendant le XVIe siècle, la plupart de ces établissements furent-ils augmentés, afin de pouvoir contenir des pensionnaires en plus grand nombre; mais l'espace manquait dans une ville aussi populeuse, et les bâtiments s'aggloméraient successivement autour du premier noyau sans qu'il fût possible de donner de l'unité à leur réunion. Les colléges de Paris ne purent jamais présenter un ensemble de constructions élevées d'un seul jet, tels que ceux que nous voyons encore à Oxford et à Cambridge en Angleterre. C'est dans ces deux villes qu'il faut aller pour prendre une idée exacte de ce qu'était un collége pendant le moyen âge, car les universités d'Oxford et de Cambridge ont conservé à peu près intacts leurs immenses revenus et maintiennent leurs vieilles coutumes. Chacun de ces colléges contient une vaste chapelle, une bibliothèque, un réfectoire, des cuisines et leurs dépendances, un logement pour le principal, des chambres pour les élèves, des logements pour les associés, fellows 288, des salles, des jardins, des prés, une brasserie, quelquefois un jeu de paume. Tous ces grands établissements, richement dotés, admirablement entretenus, bien situés, entourés de jardins magnifiques, présentent l'aspect de l'abondance et du calme. Si on devait leur adresser un reproche, c'est d'habituer les jeunes gens à une existence princière; mais les moeurs anglaises ne ressemblent pas aux nôtres. Les colléges d'Oxford et de Cambridge semblent n'être faits que pour les classes élevées de la société. Depuis deux cents ans, nous sommes tombés en France dans l'excès opposé; la plupart de nos colléges, établis dans de vieux bâtiments, resserrés, sans air, sans verdure autour d'eux, ou bâtis avec une parcimonie déplorable, tristes en dedans ou au dehors, accumulant les étages les uns sur les autres, les bâtiments à côté les uns des autres, ne montrant aux écoliers que des murs nus et noirs, des cours fermées et humides, des couloirs sombres, partout la pauvreté avec ses tristes expédients, semblent destinés à faire regretter la maison paternelle aux écoliers qui doivent y passer huit ou dix années de leur jeunesse. Dans ces tristes demeures, l'art n'entre pas, il semble exclu; tout ce qui frappe les yeux de la jeunesse est dépouillé, froid, maussade, comme si ces établissements étaient destinés à froisser les âmes délicates, celles qui sont les plus propres à former des artistes, des hommes de lettres, des savants, celles chez qui l'étude ne pénètre qu'en se parant d'une enveloppe aimable. Avant de jeter l'épithète de barbares aux siècles qui sont déjà loin de nous, portons nos regards sur nous-mêmes, et demandons-nous si un peuple intelligent, sensible, facile à émouvoir pour le bien comme pour le mal, si un peuple qui tient le premier rang dans les travaux de l'esprit, n'a besoin que de routes, de ponts, de larges rues, de marchés magnifiques et de boutiques splendides; s'il n'est pas nécessaire d'élever la jeunesse dans des établissements sains, bien disposés, agréables à la vue, dans lesquels le goût et l'art interviennent pour quelque chose.

276276 Chap. XIII.
277277 Voy. ARCHITECTURE MONASTIQUE, fig. 1.
278278 Il est souvent question de sanctuaires à doubles clôtures dans les églises des premiers temps du moyen âge; Galbert, dans la Vie de Charles le Bon, écrite en 1130, chap. IV, s'exprime ainsi: «Dans le premier sanctuaire, Baudoin, chapelain et prêtre, et Robert, clerc du comte, se tenaient cachés auprès de l'autel;... dans le second sanctuaire s'étaient réfugiés Oger, clerc, et Frumold le jeune, syndic,... et avec eux Arnoul... Oger et Arnoul s'étaient couverts d'un tapis, et Frumold s'était fait une cache sous des faisceaux de branches... Alors les serviteurs qui avaient été introduits dans le sanctuaire, cherchant et retournant tous les rideaux, les manteaux, les livres, les tapis et les branches que les moines avaient coutume d'apporter tous les ans au dimanche des Rameaux...»
279279 Voy. Corrozet, Du Breul, et la Description de Notre-Dame de Paris par MM. de Guilhermy et Viollet-le-Duc. Bance, 1856.
280280 Cette figure est de la grandeur de l'original.
281281 De la porte de la chapelle de Saint-Venceslas, à Prague (XIIIe siècle); de la cathédrale de Laon (XIIIe siècle).
282282 De la porte de Saint-Eusèbe d'Auxerre (XIIIe siècle).
283283 Des portes de la façade de Notre-Dame de Paris (commencement du XIIIe siècle), de la cathédrale de Laon (XIIIe siècle).
284284 Ces clous nous ont été donnés par M. Roiché, serrurier-forgeron à Vézelay; la gravure les montre grandeur d'exécution.
285285 Nous devons ce dessin à l'obligeance de M. Gaucherel.
286286 Hist. et Antiq. de la ville de Paris, t. II, p. 352 et suiv.
287287 C'est là un fait que devraient détruire d'abord les personnes qui, nous ne savons pour quel motif ne veulent pas admettre une influence purement française sur les arts du moyen âge. Que cette influence dérange les systèmes qu'elles veulent faire prévaloir, cela est fâcheux; mais il serait bon d'opposer autre chose que des phrases banales à des faits dont tout le monde peut reconnaître l'importance. Ce XIIIe siècle, livré à la barbarie et à l'ignorance, couvre tout un quartier de Paris d'établissements destinés non-seulement à l'enseignement, mais encore au logement gratuit des écoliers pauvres; des rentes attachées à ces établissements sont affectées au payement des professeurs et à la nourriture des élèves. Il est certain qu'une ville qui pense à bâtir des colléges et à réunir dans son sein des écoliers venus de tous les coins de l'Europe, même aux dépens de sa tranquillité intérieure, avant de songer à aligner ses rues, à élever des marchés, des abattoirs, à faire des trottoirs et des égouts, est une ville peuplée de sauvages laissant dans l'histoire un pernicieux exemple.
288288 Les fellows sont d'anciens élèves qui demeurent associés au collége par un privilége particulier; les fellows conservent toute leur vie durant le droit d'avoir un logement dans le collége, d'y entretenir un cheval, d'y prendre la bière. Il est des colléges d'Oxford ou de Cambridge qui entretiennent jusqu'à quinze et vingt fellows.