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Chronique de 1831 à 1862, Tome 4 (de 4)

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Le Roi est tiré à quatre par mille intrigues et par les différents partis que j'ai signalés il y a quelque temps. Tout cela fait le plus déplorable gâchis. Je ne vois nulle part, ni un grand courage, ni un esprit lumineux pour prendre, en temps utile, je ne dis pas le meilleur parti, car tous ont des inconvénients incontestables, mais celui qui présente le moins de côtés fâcheux. Et puis l'à-propos, ce dieu rancuneux, qui ne pardonne pas de ne pas être saisi au vol, quelle vengeance ne tirera-t-il pas de ces oscillations?

M. de Bismarck veut, dans la négociation avec le comte Thun, se faire prier, tenir la dragée haute; il dit que moins on se montrera pressé, plus on mettra à Vienne de prix à obtenir la coopération de la Prusse; et, par conséquent, qu'il la fera payer plus cher par de nouvelles concessions et par une prépondérance moins contestée à la Diète. Bref, il fait le juif et traite à la manière dont Rothschild fait un emprunt. Je ne trouve pas que ce soit la bonne et vraie manière dont un grand État doive, à travers de grandes crises européennes, conduire une barque qui, dirigée ainsi, pourrait bien chavirer.

Charles de Talleyrand, qui est venu de Weimar me voir ici, raconte que Mme la Duchesse d'Orléans avait entièrement changé d'allures; elle a quitté l'attitude d'exilée, de veuve enveloppée de voiles lugubres. Elle a des jours de réception, pendant lesquels, assise à une table de whist, elle fait défiler devant elle les dames dont elle reçoit, par un signe de tête, les révérences. A Weimar, elle paraît au spectacle en grande loge. On la dit mal entourée, mal conseillée, fort en intrigues et en agitations plus ou moins souterraines; elle touche très régulièrement les trois cent mille francs que la France lui paie; elle s'est fait, soit par la vente d'une partie de son écrin, soit par d'autres arrangements, un revenu considérable qu'elle dépense avec assez d'évidence.

Hier au soir, il y a eu ici un petit concert dans le salon de la Reine, très beau comme musique. Le Roi ayant fait venir la partition du grand Miserere d'Allegri, de Rome, et l'ayant fait chercher par quelqu'un chargé d'étudier la manière dont cet admirable morceau est exécuté à la Chapelle Sixtine, le Dom-Chor d'ici l'a chanté hier. On n'a pas même omis la partie psalmodiée qui alterne avec le chant et donne à l'ensemble un caractère si particulier. Des voix, des voix seules, admirablement bien conduites, un grand ensemble, un religieux silence; mais hélas! pas d'église, pas de cierges, pas d'encens, pas de génuflexions. Des femmes parées et quelques pasteurs protestants me faisaient, malgré leurs allures piétistes, l'effet de prêtres de Baal. J'étais la seule catholique. On avait convoqué, en dehors de la Famille Royale, une douzaine d'hommes et de femmes qu'on ne voit pas habituellement à la Cour, parce qu'ils appartiennent to the rather serious turn118. Cela faisait le plus singulier auditoire pour cette musique latine, toute parfumée de l'encens de Saint-Pierre, toute colorée des feux sacrés du Vatican!

Vieuxtemps est venu à son tour et m'a tirée de mon extase; il a cependant le plus magnifique coup d'archet que j'aie entendu.

J'ai vu avant-hier M. et Mme de Castelbajac revenant de Saint-Pétersbourg. Lui a parlé très librement devant moi, déplorant la guerre, très frappé de l'enthousiasme russe, de l'impossibilité pour l'Empereur Nicolas de reculer, assurant qu'il ne désirait pas la guerre et que c'est le mélange de ruse, de mauvaise foi, d'intrigue et d'insolence de l'Angleterre, qui a envenimé la plaie et l'a rendue incurable.

Voici l'extrait d'une lettre de lady Westmorland de Vienne, 1er mars: «L'état des affaires publiques ne laisse pas que d'agir sur la société. Les Russes ne viennent plus chez nous, ni chez le ministre de France. Bourqueney exulta et s'anima119 sur la gloire de son maître qui a bien certainement joué ses cartes; car il est incontestablement, dans ce moment, à la tête des Conseils de l'Europe. Nous le suivons à la remorque et il entraîne ce gouvernement-ci. J'avoue que je ne puis oublier son passé et le nôtre; et je me sens profondément humiliée de cette alliance tant vantée. Le jeune Empereur a été placé dans la position la plus difficile. Je vois qu'il a été fort blessé du refus de l'Empereur Nicolas d'accepter les propositions qu'il lui avait recommandées si chaleureusement; et depuis le départ d'Orloff, il paraît avoir pris son parti et s'être résolu à se mettre du côté des alliés occidentaux120.

«Je suis sûre qu'une fois décidé, il suivra son chemin avec droiture et loyauté, mais il n'entraînera pas ici toutes les opinions. Les Meyendorff sont profondément affligés: lui, avec douceur, elle, avec irritation, surtout contre son frère121 qui est anti-russe.

«La princesse de Metternich est dans un état désespéré. Le Prince est fort ému, malgré son calme habituel si près de l'indifférence. Pendant que j'étais ce matin chez lui, Monténégro est venu le prier d'entrer chez la Princesse qui le désirait; et quand il y est allé, Monténégro m'a dit que la fin s'approchait, que la respiration devenait bien pénible, la faiblesse excessive et que cela ne pouvait durer longtemps. La Princesse est soignée par lui, par son fils et par son gendre avec un grand dévouement. Elle a reçu les sacrements avec beaucoup de piété; elle connaît son danger et se montre résignée et patiente.»

Berlin, 10 mars 1854.– Je pars demain pour Sagan fort ignorante des destinées du monde et par conséquent des miennes propres. Le prince de Hohenzollern et le général de Grœben envoyés à Paris et à Londres sont chargés de faire reconnaître et respecter la neutralité de la Prusse122. Si on me demandait si ces messieurs réussiront, je dirais, non. Si on me demandait alors au profit de qui on la rompra? je plaiderais ignorance complète. Si je crois que ce sera pour l'Occident? je dirai que je ne le crois pas. Si alors ce sera pour le voisin septentrional? je dirai non, de même. Si on me pousse pour me faire dire si on s'entendra avec l'Autriche? je hausserai les épaules. Si on compte alors s'isoler complètement et voir l'Allemagne se fractionner? je répondrai: Quelles questions! Faut-il encore plus de négations, j'en ai la poche pleine, mais faut-il une seule affirmation? qu'on demande ailleurs, je n'en ai pas à mon service et les plus haut placés ne sauraient, je crois, dire plus ou mieux.

Cette hésitation, ces obscurités sont insupportables et déplorables dans leur source et dans leurs résultats; et depuis mars 1848, je ne sache pas un moment plus critique, plus fatal que ne le sera peut-être mars 1854. Je ne sais si je me trompe; mais il me semble que la plus mauvaise voie, bien prononcée, vaudrait mieux que le ballottage du moment actuel.

Le Prince de Prusse est rétabli, c'est-à-dire qu'il sort en voiture pour se promener. Il n'a pas reparu au Château; la Reine est venue le voir pendant sa maladie, mais non le Roi. Il y a eu seulement, à ce que je crois, des communications fraternelles écrites, des plus aigres de part et d'autre123. Le Prince a très mauvais visage, et je le crois agité et irrité.

 

La princesse de Metternich a fait dire la messe le matin de sa mort dans sa chambre, l'autel placé de façon à le voir de son lit; elle a expiré sans agonie, à la fin du saint sacrifice. Son mari est, dit-on, très affligé, ce qui n'empêche pas qu'il ne donne lui-même aux visiteurs des détails anatomiques sur la cause du mal de sa femme.

Je ne savais rien du châle donné par l'Impératrice de Russie à Mme de Castelbajac; mais, j'ai remarqué la tendance du mari qui est bien plus russe, malgré les hostilités, qu'anglaise, malgré l'entente cordiale.

Sagan, 20 mars 1854.– Le Gouvernement prussien, pour faire respecter sa neutralité aux Chambres, a besoin de trente millions d'écus qui vont se traduire en une augmentation d'impôts qui font faire bien des grimaces124.

Je reste bien décidée à mon voyage du Rhin, de la Seine et de la Loire; mais quand je lis les gazettes, que je regarde la carte européenne et que j'écoute les échos qui ci et là m'arrivent, je me demande, non sans hésitation, ce qui sera possible dans deux mois.

Je lis avec une grande curiosité les pièces diplomatiques publiées à Londres, les conversations de sir Hamilton Seymour avec le Czar, et les réponses de lord John Russel125. Le Czar me paraît y jouer le rôle d'un mauvais comédien, d'un Tartuffe politique; ses précédents ont si mal préparé à le juger ainsi qu'il faut attendre les publications russes qui, sans doute, suivront celles qui ont été faites à Londres pour asseoir un jugement absolu sur ce singulier incident. Il me semble qu'il y aurait eu folie ou stupidité à soulever la curiosité publique, comme on l'a fait dans le Journal de Saint-Pétersbourg, si on n'avait provoqué par là les publications dont retentissent les gazettes en ce moment.

La Princesse Charles de Prusse, qui m'avait confié, il y a vingt jours, à Berlin, les projets de mariage de sa fille Louise, vient de m'écrire pour me les confirmer. Le parti n'est pas riche, pas brillant, mais la bourse généreuse du Roi comblera la lacune financière; et, quant à la jeune Princesse, dont aucun grand Prince ne voulait, qui se mourait d'ennui, de déplaisir, d'impatience, il est très heureux qu'en définitive elle épouse un jeune homme de famille souveraine. Ce n'est pas, du moins, un de ces pitoyables mariages morganatiques, trop à la mode maintenant. Le futur est un prince Alexis de Hesse-Philippsthal, fils aîné d'une branche fort cadette et très pauvre; il est entré au service de la Prusse, il y a six mois. Pour lui, il a tout avantage à épouser une princesse de Prusse, jolie, bonne enfant, nièce du Roi, pour le mari de laquelle il y aura protection, avancement rapide, etc., etc. Je suis convaincue que le mariage remettra la singulière santé de la Princesse, et donnera à tout son être l'équilibre qui parfois lui manque126.

Depuis ma dernière lettre, j'en ai reçu quelques-unes dont voici les extraits: «Paris, 22 mars.– L'horizon s'obscurcit de plus en plus, la Prusse ne se dessine pas comme il y avait lieu de l'espérer; l'Autriche, elle-même, est moins explicite qu'on ne pouvait le supposer. Nous avons la fièvre intermittente par rapport à ces deux pays, et, en définitive, je prévois que l'Angleterre et la France ne pourront compter que sur elles-mêmes. On dit l'Impératrice triste, ennuyée et délaissée!»

Extrait d'une lettre de Berlin, du 25 mars, écrite par un membre du parti Gerlach. (Traduction.) «D'après les ouvertures et les éclaircissements donnés par le ministre Manteuffel à la Chambre et à la Commission, il résulte que nos efforts, et je les crois sincères, tendent à nous unir fermement à l'Autriche et au reste de l'Allemagne (autant que les intérêts de l'Allemagne, dans l'acception la plus étendue du mot, le demandent), et à écarter tout ce qui pourrait nous gêner dans cette marche. J'ignore si l'Autriche et la Russie peuvent s'entendre sur certaines questions en discussion et sur leurs opérations respectives; mais je n'en désespère pas encore. Si cette entente pouvait s'effectuer, nous n'aurions alors que les inimitiés de l'Occident à redouter; et une union complète entre l'Autriche, le reste de l'Allemagne et nous, serait extrêmement facilitée. Nos adversaires dans les deux Chambres, et tout d'abord dans la Commission, s'appliquent à arracher à M. de Manteuffel les notions les plus détaillées; je ne crois pas que jusqu'à présent il ait dit trop.

«Ces messieurs déclarent, du reste, tout haut, qu'ils ne nous accorderont l'argent demandé que si nous leur donnons, noir sur blanc, la garantie que le gouvernement ne s'unira pas à la Russie et n'agira pas dans les intérêts de cette puissance. Nos adversaires ne se sont pas prononcés sur quoi devait reposer cette garantie; ils veulent traîner la question en longueur et attendre le retour du Prince de Prusse dans lequel ils espèrent trouver un soutien et un appui.»

Extrait d'une lettre de M. de Humboldt, de Berlin, le 24 mars 1854: «Le Roi s'est blessé à la joue, en faisant une de ces promenades solitaires et nocturnes dans le parc de Charlottenbourg, qui inquiètent sous plus d'un rapport. Il s'est blessé au visage contre une grosse branche d'acacia. Cet accident n'aura pas de suites graves; cependant, il y a un peu de fièvre et nécessité absolue de quelques jours de tranquillité. On concevrait ces promenades nocturnes dans une nuit d'été, mais dans cette saison! Goût fantastique du vague dans l'obscurité, plaisir d'imagination cherchant sa nourriture. La veille de l'accident, nous avons eu un grand dîner pour les anges de paix envoyés en Occident127. Ils en sont revenus très moroses, car ils n'ont fait que de la bouillie pour les chats. Le prince de Hohenzollern, le seul qui observe juste, l'avait prédit. Malheureusement, encore aujourd'hui, on ne veut pas croire ici combien les choses sont furieusement avancées à Paris et surtout à Londres, d'où Palmerston, dès novembre dernier, avait envoyé à Berlin, par le pieux Bunsen, un projet de démembrement de l'Empire russe.

«Les uns et les autres mettent leurs ennemis à la broche, avant de les avoir expédiés dans l'autre monde. La Russie propose de faciliter l'agonie turque, Albion propose d'écarteler la Russie; on se vaut bien en fait de traîtrise!

«Le pauvre Grœben a frappé à Londres par son ignorance parfaite de la langue française. Son premier mot à lord Clarendon a été, dit-on: «L'Empereur de Russie, guerre veut pas.» Clarendon a fait alors la réflexion qu'il était naturel que la Prusse, se complaisant dans une position inexplicable, eût choisi un représentant qui ne sût pas s'expliquer.

«Il y a ici beaucoup d'humeur contre Bunsen; il y en a aussi à Osborn-House, où il avait fait croire que la Prusse guerroyerait bel et bien contre la Russie, contre cette douce Russie, qui ne veut prendre Constantinople qu'en dépôt.

«L'envoi du général Lindheim au Czar excitera encore l'humeur contre nous, à Paris et à Londres128. Je crois l'homme taciturne des Tuileries beaucoup plus entreprenant que ne l'est la Russie; il se pourrait bien que le centre d'action fût déplacé et que la querelle commençât sur la rive gauche du Rhin; on y parviendrait par quelques détours, on n'attaquerait pas tout de suite la Belgique, mais on attaquerait, conjointement avec la Belgique, notre Prusse rhénane. L'Angleterre voudra-t-elle, pourra-t-elle s'y opposer? Bunsen a envoyé ici deux de ses fils (l'aîné a épousé la fille de la prêcheuse Mme Frey). Le Roi ne les a pas reçus. Cependant on ne rappellera pas le père, de peur de contrarier le Prince Albert.

«Vous aurez sans doute lu l'article du journal de Bethmann-Holweg dans le numéro du 18129. Il est d'Albert de Pourtalès, qui raconte la véritable cause de sa défaite. Il s'est cru le maître, tandis qu'il était berné par M. de Manteuffel qu'il pensait détrôner. Celui-ci faisait venir en hâte et en cachette son neveu, qui est persona grata, pour contre-balancer Albert de Pourtalès.»

 

Sagan, 2 avril 1854.– On a eu officiellement à Vienne la certitude que Mazzini avait débarqué à Gênes cinq ou six jours avant l'attentat de Parme130. Un groupe de spectateurs, en apparence bénévoles, s'est ouvert pour donner refuge au meurtrier, qui a porté son coup en se glissant derrière le Duc et le blessant par le côté dans le bas-ventre. Le Duc était accompagné de deux officiers, dont l'un l'a reçu dans ses bras, l'autre s'est précipité sur le meurtrier abrité par le groupe, qui, en se refermant, a un instant barré, sans affectation, le chemin à l'officier et a laissé au criminel le temps de s'évader derrière le rideau humain qui l'abritait. Tout ceci est officiel. Il l'est de même que de nouvelles tentatives ont été faites d'empoisonner les puits des casernes dans le royaume lombardo-vénitien. On est obligé de placer des sentinelles près de chacun de ces puits et de les couvrir de grands couvercles fermés à clef.

Sagan, 5 avril 1854.– Lady Westmorland m'écrit de Berlin, où elle s'est rendue de Vienne au-devant de son fils: «J'ai dîné chez la Reine. Le Roi a paru après le dîner, plein de la plus charmante bonté pour moi, mais avec un bien mauvais et pâle visage, la joue couverte d'emplâtres. Il m'a parlé longtemps avec abandon; il s'imagine que la lettre que le duc Georges de Mecklembourg-Strélitz, arrivé en courrier de Saint-Pétersbourg ici, lui a apportée, doit aplanir toutes les difficultés. Personne ici ne partage cette opinion. Le Prince de Prusse est venu me voir entre deux accès de fièvre (il est menacé d'une fièvre quarte, qui n'est pas chose indifférente sur un corps aussi mal disposé); il est très fâché de la venue du duc Georges de Strélitz. En général, je ne vois ici que confusion et méfiance.»

Hélas! Lady Westmorland ne voit que trop juste; et à force d'indécisions, de brouillards et de mauvaises finesses, on découragera l'Autriche; la Prusse détachera d'elle les petits États, et deviendra honteusement la proie de ses grands voisins et la pâture des révolutionnaires qui sont partout, et qui enlacent la pauvre vieille Europe de leur brûlant réseau.

Sagan, 7 avril 1854.– J'ai revu hier à la station voisine, où j'ai été l'embrasser, lady Westmorland retournant de Berlin à Vienne. Elle rapporte une fort triste impression du lieu qu'elle quitte. Tout y est confusion, la plus grande gît dans la tête du Roi. Le voilà qui s'imagine être le maître de l'Europe, empêcher la guerre à son gré; bref, ce sont des rêves creux si étranges qu'on serait tenté de leur donner un autre nom. Où tout cela conduira-t-il? Impossible de le prévoir. En attendant, on perd un temps précieux, on se déconsidère de plus en plus. L'opinion publique s'excite et l'avenir se rembrunit cruellement.

Louis-Napoléon a dit au Prince de Hohenzollern qu'il ne s'agissait plus de la question d'Orient, que c'étaient des billevesées; mais bien d'ôter à la Russie sa prépondérance en Europe, dont, sans doute, il veut à son tour la direction. Le Prince de Prusse a montré beaucoup d'inquiétude pour les provinces rhénanes et une grande indignation contre le Roi Léopold qui, de peur de perdre la Belgique, se lie étroitement à son puissant voisin et se dispose à l'aider dans ses convoitises rhénanes.

On dit M. de Manteuffel très découragé, très fatigué des irrésolutions et des changements continuels. La lettre apportée par le duc Georges de Mecklembourg ne dit rien que des phrases vagues, faites pour plaire à celui à qui elle est adressée, pour ajouter du brouillard au brouillard, pour gagner du temps, ou, pour mieux dire, en faire perdre aux autres. Malheureusement, ce but paraît atteint. Cependant, le Préfet de police de Berlin a dit à son maître qu'il ne pouvait pas répondre de la sûreté publique, si le Gouvernement se rejetait du côte russe. On dit la pauvre Reine triste et bien agitée. La santé du Roi n'est pas ce qu'elle devrait être, et celle du Prince de Prusse est décidément très mauvaise.

Sagan, 25 avril 1854.– On me mande de Vienne que le prince de Metternich a bien pauvre mine. Il paraît que la société viennoise se divise d'une façon très aigre et très absolue en deux camps fort hostiles; la majorité penchant pour la Russie et blâmant le jeune Empereur de s'allier avec, ou, du moins, de se rapprocher des Puissances maritimes qu'on suppose pleines de traîtrise et fomentant sourdement le mouvement révolutionnaire, pour le faire éclater à leur profit et au détriment de la Prusse, aussitôt qu'on n'aura plus besoin d'elle pour contenir et pour diminuer la Russie.

Sagan, 8 mai 1854.– Un mot que je reçois de Berlin me dit que le Prince de Prusse s'est brouillé d'une manière éclatante avec le Roi, ou bien le Roi avec le Prince, tant il y a que celui-ci a dû quitter Berlin hier au soir.

Le renvoi de M. de Bonin, ministre de la Guerre, fait un mauvais effet; il déplaira aux Cours occidentales et donnera de l'humeur à Vienne où, malgré les paroles données au général de Hess et ratifiées depuis, on n'a plus ni estime, ni confiance, ni foi en la franchise du Gouvernement prussien, ni en sa fixité131. Quel état, bon Dieu!

Sagan, 19 mai 1854.– La Cour de Potsdam est très préoccupée de la scission des deux frères. Si je puis me permettre une opinion, c'est qu'au fond le Prince de Prusse a parfaitement raison, mais que ses conseils auraient dû rayer quelques expressions qui ont fourni des armes contre lui.

La mission du comte Alvensleben à Vienne est destinée à neutraliser, autant que possible, la portée et les résultats de l'accord conclu avec le général de Hess, et à entraver, par conséquent, la marche de l'Autriche. On voulait surtout empêcher la levée des quatre-vingt-quinze mille hommes; mais Alvensleben aura trouvé la chose faite132. Les quatre Rois de Würtemberg, Bavière, Saxe et Hanovre, travaillés par l'intrigue russe et les incertitudes de la Prusse, font bande à part. Tout cela constitue le plus triste état de choses.

On m'assure que Napoléon est dans un fort mauvais état de santé! Autre complication.

Nouvelle réunion des deux correspondants, qui interrompit l'échange de leurs lettres pendant plusieurs mois.

Paris, 14 août 1854.– Je suis arrivée ici, hier. Aujourd'hui dans la matinée, mon fils Louis133 m'a conduite par la place Louis XV, la terrasse du bord de l'eau, le Carrousel, la colonnade du Louvre, Saint-Germain-l'Auxerrois et la rue de Rivoli: tout cela sans sortir de voiture; mais j'ai vu un peu du nouveau Paris, dont beaucoup de choses sont belles, d'autres manquées. Les bâtiments des Ministères, par lesquels on a rétréci la grande place du Carrousel, écrasent le bâtiment principal; le Louvre, en lui-même, vu de ce côté-là, n'a plus l'air de rien du tout. Je regrette le grand et vaste jardin que je rêvais entre les deux palais.

Orléans, 16 août 1854.– Je suis descendue ici dans le petit ermitage de Pauline, au couvent du Sacré-Cœur. Ici, du moins, je suis à l'abri du bruit extérieur dont j'étais assourdie à Paris. J'ai eu toutes les facilités possibles pour suivre les offices pendant la fête d'hier; ils s'y font très bien et la musique était bonne: les jeunes voix sont les vraies pour chanter la Sainte Vierge. La cloche sonne pour la distribution des prix; par exception j'y suis admise; j'hérite de tous les privilèges de Pauline, quoique je n'en mérite aucun.

Rochecotte, 20 août 1854.– M'y voici, dans ce pauvre Rochecotte qui me serre le cœur plus que je ne puis le dire134. Notre vie y est toute conventuelle: chaque matin la messe, chaque soir la prière en commun, un maigre strict, une conversation plus ou moins sainte, jamais profane; aucun autre bruit que celui des deux garçons et de la toux de leur abbé. Je ne demande pas mieux, je m'arrange fort bien de genres fort divers, dès qu'ils ne choquent pas le bon sens ni le goût. Le silence est un grand repos; le coup de cloche vaut mieux que la pendule qui n'avertit pas tout le monde de même. La simplicité apaise et les bons propos musellent les coups de langue impétueux.

J'applaudirai aux spectacles qui se préparent à Valençay; je crois que la vraie bonne grâce est de revêtir la livrée des personnes chez lesquelles on se trouve, dès qu'elle n'est pas choquante. Chez moi, je voudrais un mezzo-termine entre les deux genres, et, peut-être, cela ne serait-il pas meilleur? Tant il y a que Pauline135 remplit bien le cadre dans lequel elle s'est placée, et il est rare d'y réussir aussi complètement.

Rochecotte, 23 août 1854.– M. de Falloux, qui est ici depuis hier, nous quitte samedi. Je l'honore et le trouve fort aimable par le cœur et par l'esprit: la grande ferveur de sa dévotion n'a rien d'étroit; mais quelle santé! Il m'a raconté des choses curieuses sur M. de Persigny; il lui reconnaît beaucoup de qualités, et il en trouve aussi à Louis-Napoléon. Ce dernier a mandé par télégraphe M. de Persigny à Biarritz; et, malgré une violente cholérine, il s'y est rendu avec son médecin; il en est revenu, mais on n'a pu me dire le motif de l'appel, ni le résultat de l'entrevue.

Valençay, 10 septembre 1854.– M. de Salvandy nous est arrivé hier avec la même verve, la même rédaction brillante, les mêmes nobles et beaux sentiments, la même emphase, le corps grossi, alourdi, le visage ridé et ses longs cheveux cachant péniblement sa triste infirmité136.

Paris, 18 octobre 1854.– L'Évêque d'Orléans va passer trois mois à Rome; il voudrait que sa réception à l'Académie française eût lieu avant son départ; ce sera probablement le 8 novembre, et comme il tient beaucoup que j'assiste à cette séance, je prolongerai mon séjour jusqu'à cette époque à Paris137.

Le duc de Noailles est venu hier, de Maintenon, pour me voir; il a dîné chez moi avec Mme de Chabannes, Max de Hatzfeldt et mon fils Alexandre. Il y avait dans ce petit dîner toutes les nuances d'opinions représentées; cela ne rendait pas la conversation plus vive. Tout le monde me paraît vieilli, attristé, ennuyé, et cela en regard d'un luxe effréné, d'une cherté excessive, d'une avidité de jouissances matérielles menaçante.

Les obsèques du maréchal de Saint-Arnaud ont été affreusement arrosées par la pluie, et c'est sur l'air des patineurs de l'opéra du Prophète, joué par la musique des guides, que l'Archevêque de Paris a donné l'absoute138. Toute l'époque présente est là.

Sagan, 28 novembre 1854.– Je viens d'arriver ici. Tout est couvert d'une neige épaisse, la misère extrême, les désastres infinis, les santés compromises; les inquiétudes de guerre augmentent, les impôts s'accroissent, les Chambres prussiennes aussi énigmatiques, dans leur composition singulière, que douteuses dans les travaux qu'on leur demande. Les persécutions religieuses contre les catholiques, quoique sourdes encore, deviennent de plus en plus irritantes; je n'ai jamais vu une époque plus compliquée, qui offre moins d'issues consolantes, tant pour les individus que pour les masses.

Sagan, 6 décembre 1854.– A Berlin la division est partout et je ne sais ce qui est le plus envenimé et le plus embrouillé, de la politique extérieure ou de l'état intérieur. On dit déjà que la seconde Chambre va être dissoute. Les deux traités signés coup sur coup entre la Prusse et l'Autriche, et entre celle-ci et les Puissances occidentales, sans se contredire, sans s'exclure, changent cependant l'état des choses. L'Autriche s'était, à la vérité, réservé le droit de conclure indépendamment des traités139, mais on ne pensait pas, à Berlin, qu'elle ferait un si prompt usage de ce droit, qu'elle en userait sans prévenir la Prusse, et en se bornant à lui laisser la faculté de s'y réunir, si elle le juge convenable. On m'écrit de Berlin que rien n'égale la colère qui y règne, si ce n'est la fureur des Russes qui s'y trouvent. Je suis fort tentée de croire que la Prusse accédera au second traité, mais qu'on ne lui en saura aucun gré. Quel rôle que le sien! mais on peut bien dire: Tu l'as voulu, George Dandin!

Sagan, 11 décembre 1854.– C'est assurément un fort grand événement que le traité du 2 décembre, pour le présent et pour l'avenir. Il fait entrer l'Europe dans une nouvelle phase. C'est, il me semble, la certitude qu'il n'y aura point de guerre allemande révolutionnaire, ce qui était le grand danger des circonstances actuelles; et de l'autre, la certitude de la paix dans un temps donné. J'imagine, néanmoins, que les Français et les Anglais voudront prendre Sébastopol avant de la conclure. Pour l'avenir, c'est un changement complet de la politique européenne; l'arrêt des progrès de la Puissance russe en Orient et la perte de sa prépondérance en Allemagne. C'est aussi, je crois, le pas donné en Allemagne à l'Autriche sur la Prusse (qui l'aura bien voulu); c'est enfin, si je m'en souviens bien, la réalisation des projets et de la politique de M. de Talleyrand et la rupture du redoutable faisceau des trois Cours du Nord, qui existait depuis trente ans. Tous ces événements, s'ils arrivent à bonne fin, serviront admirablement l'Empereur Louis-Napoléon.

Pauline, ma fille, m'écrit de Rome des volumes sur l'unanimité des Évêques à l'occasion de l'Immaculée-Conception140. Elle est dans un ravissement séraphique. Je crains cependant que les Évêques aient voulu plaire au Pape en se conformant à ses désirs, car j'en connais plus d'un qui reculait devant une innovation inutile. Je ne sais rien de particulier sur la manière dont Mgr l'Évêque d'Orléans a été reçu à Rome. L'Église raisonnable sera-t-elle écoutée plus favorablement que l'Église exagérée et agressive? Ces querelles intestines dans le clergé sont funestes à la religion. Je crois que la querelle des Jésuites et des Jansénistes a été pour beaucoup dans l'incrédulité du dix-huitième siècle, comme les discordes de l'Église, du temps des Conciles de Bâle et de Constance, ont amené la Réforme. Le Pape actuel a l'air d'être créé pour toucher à tout, c'est-à-dire pour tout ébranler.

118De l'anglais: A la classe des caractères plus sérieux.
119De l'italien: triomphe et s'anime.
120La Russie avait envoyé à Vienne un projet de préliminaires de paix, offrant d'évacuer les Principautés, lorsque ces préliminaires seraient signés. La Conférence, réunie alors à Vienne, considérant les conditions, auxquelles cet arrangement était subordonné, absolument inacceptables, rejeta ce projet.
121Le comte Buol.
122L'esprit faible et flottant de Frédéric-Guillaume IV était disputé par deux influences rivales: d'un côté, le parti de la Cour, acquis à la Russie; de l'autre, les Chambres prussiennes acquises à l'opinion libérale et parlementaire, naturellement peu favorable à cette Puissance du nord. Le Roi, cherchant toujours à temporiser, envoya le prince de Hohenzollern à Paris et le général de Grœben à Londres pour donner confidentiellement des explications sur sa politique, qui furent assez froidement reçues, comme étant celles d'un homme à la parole duquel on croyait peu.
123Les tiraillements entre les deux frères étaient comme étouffés par la noble attitude du Prince de Prusse, qui disait très haut que la volonté du Roi devait faire loi. Mais personne n'ignorait que le Prince déplorait les hésitations du Roi, sa politique vacillante, et que, désirant un rapprochement avec les Puissances occidentales, il se trouvait en contradiction avec la politique conseillée à son royal frère.
124Le 18 mars 1854, le Ministère prussien présenta à la seconde Chambre un projet d'emprunt de 30 millions de thalers, accompagné d'un mémoire annonçant que la Prusse maintiendrait le protocole de Vienne, et établissant les résolutions que le Roi se proposait de prendre à l'égard des États de la Confédération allemande.
125Le Gouvernement anglais fit alors la publication des pièces diplomatiques échangées en 1853 entre la Russie et l'Angleterre, au sujet de la Turquie, dans lesquelles se trouvaient de longs récits des conversations de l'Empereur Nicolas avec sir Hamilton Seymour. Le Czar dissimulait mal ses ambitieux projets et, pour arriver à son but, il représentait à l'ambassadeur d'Angleterre la ruine certaine et imminente de la Turquie, et il semblait avoir arrêté dans sa pensée que l'heure pour sa dissolution devait être arrivée. A cette politique, John Russel et lord Clarendon furent aussi explicites que conséquents; ils refusèrent ouvertement de partager cette idée fixe de l'Empereur Nicolas et se montrèrent très décidés à prévenir une catastrophe en Turquie.
126Une fièvre typhoïde des plus graves, dont la Princesse Louise fut atteinte à l'âge de seize ans, l'avait laissée faible de tête. Cette maladie causa la rupture de négociations déjà entamées avec la Cour de Sardaigne au sujet d'un mariage projeté avec le Duc de Gênes.
127Le prince de Hohenzollern-Sigmaringen à Paris, le général de Grœben à Londres.
128Les rapports du prince de Hohenzollern-Sigmaringen et du général de Grœben à la Cour de Berlin déterminèrent le départ du général de Lindheim pour Saint-Pétersbourg, avec une lettre particulière pour le Czar dans laquelle le Roi faisait de nouvelles propositions de médiation. L'Empereur Nicolas, ne pouvant maîtriser sa colère, chargea le prince Georges de Mecklembourg-Strélitz de porter sa réplique dans une lettre où il disait hautement à son royal beau-frère: «que quand les Puissances occidentales assureront l'émancipation des chrétiens en Turquie par un traité, lui, le Czar, consentirait à évacuer les Principautés, en même temps que les flottes combinées évacueraient le Pont-Euxin.»
129Dans le parti libéral en Prusse, il y avait la nuance des vieux Prussiens, à la tête desquels se trouvaient Bethmann-Holweg, Usedom, Pourtalès, Goltz. Le Preussische Wochenblatt était leur organe et avait comme rédacteur le docteur Jasmund. On le nommait communément le Journal de Bethmann-Holweg. Cette feuille se distinguait par des articles bien écrits, critiquant avec une certaine modération les actes du Gouvernement, mais pleins d'amertume contre le parti représenté par la Kreuzzeitung. Cette feuille cessa de paraître en 1861.
130Ferdinand-Charles III, duc de Parme, avait succombé le 27 mars 1854, après avoir été frappé la veille par un assassin qui lui avait porté un coup de couteau dans le ventre.
131Le parti russe de la Cour regardait le général de Bonin comme un ennemi personnel, et multiplia ses intrigues dans les hauts parages pour le faire sortir du ministère de la Guerre. Comme le Prince de Prusse, M. de Bonin était également favorable à un rapprochement avec les Puissances occidentales; aussi, sa démission, demandée par le Roi, fit la plus fâcheuse impression en dehors du cercle de la Cour. On se rappela l'énergie déployée par le Ministre dans la Commission au sujet de l'emprunt, et l'ardeur avec laquelle il sentait la nécessité de la réalisation d'une entente plus intime entre la Prusse et l'Autriche. Cette entente était devenue un si pressant besoin que l'Empereur d'Autriche n'hésita pas d'envoyer alors à Berlin le général de Hess avec des propositions formelles d'une alliance offensive et défensive, insistant pour que la Prusse concentrât un corps d'armée sur sa frontière. Ces négociations aboutirent à un renouvellement formel du traité secret de 1851, par lequel la Prusse et l'Autriche se garantissaient réciproquement leurs États, quoique le Gouvernement prussien se fût efforcé d'écarter toute stipulation qui pouvait l'obliger à se montrer en armes contre la Russie.
132Le comte d'Alvensleben, qui avait refusé une mission spéciale à Londres et était retourné dans ses terres, venait d'en être rappelé et pressé de partir pour Vienne, afin de s'y concerter et d'y surveiller de plus près les mesures à prendre avec le Cabinet autrichien, après la négociation du général de Hess à Berlin.
133Duc de Valençay.
134La duchesse de Talleyrand se retrouvait pour la première fois à Rochecotte, depuis qu'elle en avait cédé la propriété à sa fille en 1847.
135Marquise de Castellane.
136M. de Salvandy était atteint au cou d'une loupe d'un volume considérable. Il en souffrit durant de longues années et cette tumeur fut la cause de sa fin.
137Dans la lutte de l'Épiscopat français contre l'enseignement des langues anciennes, Mgr Dupanloup, s'étant prononcé avec beaucoup de talent pour l'Université, s'était acquis un titre qui lui ouvrit les portes de l'Académie française où il remplaça M. Tissot, le traducteur des Bucoliques de Virgile. Cette réception eut lieu le 8 novembre 1854.
138Lorsque éclata la guerre d'Orient, le maréchal de Saint-Arnaud reçut le commandement de l'armée française qui s'embarqua du 24 au 29 avril 1854. Il débarqua avec ses troupes le 14 septembre en Crimée; et, de concert avec les troupes alliées, remporta la victoire de l'Alma qui leur ouvrit la route de Sébastopol. Accablé d'une maladie mortelle, il dut remettre le commandement de l'armée au général Canrobert, puis s'embarqua pour la France. Il mourut pendant la traversée le 29 septembre. Ses restes furent déposés en grande pompe à l'Hôtel des Invalides à Paris.
139L'Autriche avait à peine conclu à Berlin le traité d'alliance offensive et défensive négocié par le général de Hess, que, sans en prévenir la Prusse, et profitant des droits qu'elle s'était réservé de conclure indépendamment des traités, elle s'était empressée de s'entendre avec les Puissances belligérantes. Le Moniteur de Paris, du 4 décembre, annonçait que le 2, à Vienne, un traité d'alliance avait été signé entre les plénipotentiaires de la France, de l'Autriche et de la Grande-Bretagne.
140Désirant assister aux solennités qui se préparaient dans la Ville Éternelle pour la proclamation du dogme de l'Immaculée-Conception le 8 décembre, la marquise de Castellane, emmenant sa fille avec elle, se rendit à Rome, par mer, vers la fin de novembre; elle y séjourna jusqu'à la fin du mois d'avril 1855.