Za darmo

Observations grammaticales sur quelques articles du Dictionnaire du mauvais langage

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V

Balustre. Sorte de petit pilier façonné… Il ne faut pas confondre ce mot avec balustrade; celui-ci est un assemblage de balustres. Cependant l'Académie leur donne quelquefois la même signification.

Le mot balustrade ne peut jamais signifier un seul pilier; mais balustre peut, quand on le veut, être employé pour balustrade. En ce sens, il est autorisé, non-seulement par l'Académie, mais encore par nos meilleurs écrivains. S'il falloit n'entendre par balustre qu'un pilier façonné, le dernier de ces vers de Boileau:

 
Ici s'offre un perron; là, règne un corridor;
Là, ce balcon s'enferme en un balustre d'or.2
 

deviendroit absolument inintelligible.

VI

Benne. C'est une de ces expressions locales nécessaires, ou parce que l'invention des choses qu'elles désignent est de fraîche date, ou parce que l'instrument a une forme particulière.

Benot. Dites, banneau.

Benne, Benneau, Banneau, ne se trouvent point dans le Dictionnaire de l'Académie. Le Dictionnaire de Trévoux les admet tous les trois, et ne donne la préférence à aucun. Il les définit également: vaisseaux de bois qui servent à contenir les liquides, le blé, la vendange, la chaux, etc. Ces mots viennent du latin benna, qu'on retrouve dans Varron, et du diminutif benellus qu'employoient les écrivains du moyen âge.

Benneau et benel signifioient aussi autrefois une espèce de chariot. Ces mots, pris dans les deux sens, sont très-anciens.

VII

Bretagne. Pièce de fonte qu'on applique au fond de la cheminée. Dites, plaque ou contre-mur.

Contre-mur, pris dans le sens que lui donne ici M. Molard, n'est pas françois. Un contre-mur est un mur que l'on bâtit le long d'un autre, pour le conserver. On fortifie quelquefois le mur d'une terrasse par un contre-mur.

VIII

Broche de Bas. Petite verge de fer. Dites, aiguille, s. f.; aiguille de bas. Dans ce sens, broche et brocher ont vieilli.

Broche est françois dans le sens que M. Molard indique. L'Académie ne dit point que ce mot ait vieilli.

IX

Caneçons. Sorte de culotte de toile ou de coton. Dites, caleçons, s. m. pl.; donnez-moi des caleçons. Ce mot s'emploie toujours au pluriel.

M. Molard assujettit à la même règle les mots pincette et tenaille. L'Académie n'emploie caleçon qu'au singulier. Caleçon de toile; se mettre en caleçon; être en caleçon. Le Dictionnaire de Trévoux s'exprime de même, et ajoute seulement qu'on peut employer ce mot au pluriel. Quant aux mots pincette et tenaille, l'Académie cite des exemples du singulier comme du pluriel.

X

Capon, Caponner. Qui a peur. Ces deux mots ne sont pas françois. Dites, poltron, poltronner.

Capon, Caponner sont françois, mais n'expriment pas l'idée qu'on y attache à Lyon. Un capon est un joueur rusé et fin, attentif à prendre toute sorte d'avantages aux jeux d'adresse. Caponner c'est user de ruse, d'adresse au jeu. Ces deux termes sont populaires.

XI

Carabasse. Vendre la carabasse; dites; découvrir le pot aux roses.

Pour conserver la figure, on pourroit dire, ce me semble, vendre la calebasse. L'Académie n'autorise-t-elle pas cette locution en citant celle-ci: Frauder la calebasse?

XII

Carnier. Sac où l'on met le gibier; dites, carnacière, s. f.

La troisième syllabe de ce mot ne prend pas un c; d'après l'Académie, il faut écrire carnassière.

XIII

Chaîne d'oignons. Acheter une chaîne d'oignons; dites, acheter une glane d'oignons.

Une glane d'oignons et une chaîne d'oignons ne sont pas une même chose. Glane, à proprement parler, signifie une poignée d'épis que l'on ramasse après que les gerbes ont été emportées. C'est le substantif de glaner. Il se dit par extension des fruits, des légumes, etc. Ainsi une glane d'oignons signifie une poignée d'oignons. Le mot le plus propre à désigner ce que le peuple entend par une chaîne d'oignons, est chapelet d'oignons. Cette locution se trouve dans l'Académie.

XIV

Chauffe-lit. Bassin ayant un couvercle percé de plusieurs trous, et servant à chauffer le lit; dites, bassinoire. Par la même raison vous direz, bassiner, et non pas chauffer un lit.

Chauffe-lit est une expression que l'on trouve dans nos anciens Dictionnaires. L'Académie ne l'admet pas. Le Dictionnaire de Trévoux le place au nombre des mots françois, et le définit ainsi: Ce qui sert à chauffer un lit, soit une bassinoire, un moine, ou autres ustensiles.

Quant à cette locution: chauffer un lit, elle est françoise. L'Académie dit: Chauffer un lit avec une bassinoire, chauffer des draps; et M. Molard l'emploie lui-même dans l'article où il la condamne. Chauffer ne désigne que l'action; bassiner exprime à-la-fois l'action et l'instrument avec lequel on la fait.

XV

Chercher. On ne doit pas dire être à la cherche de quelque chose; mais dites, être à la poursuite.

Être à la poursuite n'est pas l'équivalent d'être à la cherche. Je crois qu'il faut dire être à la recherche. Le mot poursuite se rapportant aux personnes, suppose qu'elles fuient. On est à la poursuite des ennemis. Appliqué aux choses, il donne à entendre qu'elles peuvent nous échapper. On est à la poursuite d'un emploi. Recherche signifie perquisition. On est à la recherche d'un objet lorsqu'on s'occupe de découvrir où il est.

XVI

Classique. Ce mot ne s'employoit autrefois que pour désigner les auteurs approuvés et qui ont une grande autorité; c'est la définition qu'on en trouve dans le Dictionnaire de l'Académie; mais celui de Trévoux et quelques autres disent que cet adjectif désigne aussi les livres dont on fait usage en classe. Laharpe l'emploie dans ce sens, ainsi que Geoffroi, et l'usage paroît avoir consacré cette nouvelle signification.

L'origine du mot classique doit être cherchée dans la langue latine de laquelle nous l'avons emprunté. Les citoyens de Rome étoient, comme l'on sait, divisés en diverses classes. Ceux de la première se nommoient exclusivement Classiques, cives classici. On donna dans la suite aux témoins recommandables par leur probité et leurs vertus morales l'épithète de classiques, testes classici. Enfin ce mot s'appliqua par extension aux auteurs dont l'excellence et le mérite étoient universellement reconnus, et c'est ainsi que l'on trouve dans Aulu-Gelle cette expression, auteurs classiques, scriptores classici. Ces citoyens, ces témoins, ces auteurs, chacun sous des rapports différens, faisoient autorité. L'opinion des premiers, les dépositions des seconds, le langage des troisièmes, servoient en quelque sorte de modèle et de règle. Peut-on douter que ce ne soit sur ces notions qu'est basée la définition de l'Académie françoise? Comment quelques Grammairiens n'ont-ils pas reconnu, aux termes dont elle se sert, qu'elle a voulu consacrer en quelque sorte le sens qu'indique une étymologie si glorieuse?3

Les personnes qui parlent bien se conforment encore aujourd'hui à la décision de l'Académie. L'Encyclopédie, dans un long article consacré à développer le sens précis du mot classique, déclare «qu'on peut être applaudi, plaire, devenir célèbre parmi ses contemporains, et cependant n'être jamais un auteur classique; que ce droit n'appartient qu'aux meilleurs écrivains de la nation la plus éclairée et la plus polie, etc.»

«Je voudrois, dit Boileau, que la France pût avoir ses auteurs classiques, aussi bien que l'Italie. Pour cela, il nous faudroit un certain nombre de livres qui fussent déclarés exempts de fautes quant au style. Quel est le tribunal qui aura droit de prononcer là-dessus, si ce n'est l'Académie?» Boileau propose ensuite un travail grammatical sur les bonnes traductions, parce que, dit-il, «les bonnes traductions avouées par l'Académie, en même temps qu'elles seroient comme des modèles pour bien écrire, serviroient aussi de modèles pour bien penser.»

L'abbé d'Olivet juge l'idée de Boileau solide; mais il doute qu'il convienne de préférer des traductions, et appliquant à Racine et à Boileau lui-même ce que ce dernier dit des auteurs qui doivent servir de modèles, «Je suis, dit-il, persuadé avec toute la France, qu'ils mériteroient incontestablement tous les deux d'être mis à la tête de nos auteurs classiques, si l'on avoit marqué le très-petit nombre de fautes où ils sont tombés.»

Que l'on ôte au mot classique la signification consacrée par l'Académie, ou qu'on en rende seulement le sens incertain en lui associant une acception nouvelle, et dès-lors ce que l'on vient de lire, comme ce que nos écrivains ont cru dire de plus juste et de plus précis pour caractériser les modèles qu'offre notre littérature, ne sera plus senti, et même ne pourra plus l'être. D'Olivet, l'Encyclopédie, l'Académie, hésitoient en quelque sorte à proclamer classiques nos plus beaux chefs-d'œuvre. Boileau vouloit que ce jugement fût réservé à un tribunal; et aujourd'hui on donnera ce nom à une méthode, à un vocabulaire, à une traduction interlinéaire, à un cours de thèmes, en un mot, au plus petit comme au moins important de tous les livres, pourvu qu'il soit en usage dans les classes! Cela ne fait-il pas pitié?

 

On répondra sans doute que dans le cas dont je viens de parler, le mot classique n'a plus le même sens que lorsqu'il est question de nos grands écrivains. Il faut bien le supposer; autrement la sottise seroit trop forte. Mais alors, je le demande, à quel signe reconnoîtra-t-on ce second sens si différent du premier? Quel moyen d'éviter la confusion, lorsqu'il sera permis de dire également des œuvres de Racine et des rudimens de Bistac, que ce sont des classiques? Et à quelle fin dénaturer ainsi une expression dont tout le mérite consiste dans l'unité de l'idée qu'on y attache? Beaucoup de gens, je le sais, disent livres classiques, au lieu de livres de classe, parce qu'ils confondent les uns et les autres, ou parce qu'ils trouvent la première de ces locutions plus commode et plus rapide. Mais en voyant la multitude d'ouvrages sur l'éducation dont nous sommes inondés, décorés par leurs auteurs du nom de classiques, auroit-on bien tort de soupçonner que c'est la noblesse primitive du mot qui a flatté la vanité de cette foule d'écrivains médiocres par lesquels il est employé? Il n'y a pas, dans la langue françoise, de terme dont l'amour-propre littéraire doive être plus jaloux; et je sens combien il seroit doux de pouvoir, à l'aide d'une heureuse équivoque, se dire à soi-même: les œuvres de Racine, de Boileau, de Pascal, sont classiques, et les miennes aussi.

M. Molard s'appuie de quelques autorités; il dit: Le Dictionnaire de Trévoux et quelques autres, déclarent que cet adjectif désigne aussi les livres dont on fait usage en classe.

Il y a dans cette phrase beaucoup plus d'adresse qu'on n'imagine. On ne peut mieux dire, et ne dire pas ce que dit le Dictionnaire de Trévoux. Voici ce qu'on y trouve.

«Classique ne se dit guère que des auteurs qu'on lit dans les classes, dans les écoles, ou qui ont grande autorité. Saint Thomas et Le Maître des sentences sont des classiques en théologie; Virgile et Cicéron, dans les Humanités, etc.»

Je ne sais si mes lecteurs ne verront pas quelque différence entre ces paroles que M. Molard prête au Dictionnaire de Trévoux, les livres dont on fait usage en classe, et celles-ci que j'ai extraites textuellement, les auteurs qu'on lit dans les classes. Je crois apercevoir entre ces deux manières de parler, la même nuance qu'entre celles-ci: Faire usage des rudimens de Bistac, et lire Cicéron ou Horace.

On s'autorise encore de M. de Laharpe. J'ai lu avec quelque attention les œuvres de cet illustre écrivain, et je les ai consultées plus d'une fois sur des questions de grammaire et de littérature. J'y ai trouvé des phrases telles que celles-ci:

«Que de choses à connoître encore dans ce que nous croyons savoir le mieux! Qui de nous, en relisant nos classiques, n'est pas souvent étonné d'y voir ce qu'il n'avoit pas encore vu?»4

«Un autre genre de défauts peut leur faire illusion (aux jeunes étudians) dans un auteur tel que Fontenelle; et s'ils ne sont pas bien accoutumés par la lecture des classiques à ne goûter que ce qui est sain, l'abus qu'il fait de son esprit, et ses agrémens recherchés pourront leur paroître ce qu'il y a de plus charmant et de plus parfait.»5

Il n'est pas besoin de dire ce que signifie dans ces exemples le mot classique. M. de Laharpe parle comme l'Académie, cela est incontestable. Ce qui l'est beaucoup moins, c'est qu'il se soit servi de la même expression dans le sens restreint de livre de classe. On est d'autant plus porté à le croire, qu'en parlant des Délices et des Élégances de la langue latine, il dit: «Ce sont les titres de quelques livres de classe6 N'auroit-il pas employé cette locution livres classiques si elle eût eu à ses yeux le même sens? Tout le monde connoît d'ailleurs l'aversion qu'il avoit pour les mots nouveaux, et son zèle à défendre la langue contre toute espèce de néologisme.

Il seroit malgré cela très-possible que M. de Laharpe eût donné à certains livres de classe le nom de classiques; cela prouveroit qu'il regardoit comme tels quelques uns des ouvrages employés dans les colléges et dans les écoles, chose qui est vraie et dont personne ne doute; mais cela ne montreroit pas qu'il suffit, selon lui, qu'un livre soit en usage dans les classes pour mériter la dénomination de classique, chose qui fait précisément le sujet de la question.

Je n'ignore pas que le mot classique n'a pas toujours été pris dans un sens rigoureux. Plus d'une fois, lorsqu'on a complimenté un auteur, on a encensé sa vanité en donnant le nom de classique à son livre; mais en cette circonstance même, l'expression dont il s'agit a conservé presque toute sa valeur. M. de Voltaire écrivant à l'abbé d'Olivet, lui disoit: «Tous ceux qui parlent en public doivent étudier votre Traité de la Prosodie; c'est un livre classique qui durera autant que la langue françoise.» Qu'à cette manière de parler, c'est un livre classique, on substitue celle-ci, c'est un livre de classe; et que l'on décide quels seroient en ce cas la délicatesse et le mérite du compliment.

Au reste, je ne nie point que plusieurs écrivains estimables de ces derniers temps n'aient employé le mot classique dans le sens de M. Molard. J'avoue encore que chez les libraires, tous les livres de classe sont des classiques. Un compilateur qui travaille pour un collége, dit qu'il fait un classique. Il n'y a pas jusqu'aux élémens d'arithmétique, de géographie, aux abécédaires même qu'on n'appelle classiques. L'usage peut finir par faire la loi, et l'Académie par obéir: mais alors il faudra une expression nouvelle pour rendre ce que les personnes qui parlent bien entendent par classique. Ce mot le plus beau, le plus précieux de notre langue, perdra toute sa noblesse; il sera dégradé.

22 Art poétique, chant premier.
33 Les Dictionnaires italiens et espagnols définissent le mot classique d'une manière qui rappelle évidemment la même étymologie.
44 Cours de Littér., tom. 1.er
55 Ibid., tom. 2.
66 Cours de Littérature, t. XVI, p. 160.