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Histoire amoureuse des Gaules; suivie des Romans historico-satiriques du XVIIe siècle, Tome III

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Lettre de l'Archevêque de Reims a la Duchesse d'Aumont

Je vois bien des femmes, mais je n'en vois point qui me plaisent tant que vous. J'enrage que je ne sois du monde pour vous le pouvoir dire ouvertement: l'on me verroit à vos pieds sans me soucier ni de l'alliance que j'ai avec votre mari, ni des jaloux que je pourrois faire; mais il faut déférer quelque chose au rang que je tiens, qui n'empêchera point pourtant que je m'y rende si vous l'avez agréable. Songez, cependant, que l'intérêt que les gens comme moi ont d'être discrets assure la réputation d'une femme, laquelle court grand risque avec les galants de profession.

La duchesse n'étoit pas fâchée que l'archevêque l'aimât, mais elle trouva cette déclaration trop cavalière, et elle eût voulu que, comme elle faisoit profession de piété, il lui en eût fait quelque mention, c'est-à-dire qu'il lui eût témoigné moins de confiance dans son entreprise. C'est ainsi qu'elle cherchoit les apparences de vertu quand elle y avoit renoncé absolument. Mais l'archevêque n'étoit pas un homme à s'amuser à ces bagatelles, lui qui alloit droit au fait et dont la coutume étoit de ne ménager personne; aussi, voyant qu'il n'avoit point de réponse de son billet, il s'en fut chez elle, où, le visage rouge comme un chérubin: «Vous me jugez donc bien indigne, Madame, lui dit-il, de votre amitié, puisque vous ne daignez pas seulement m'apprendre quelque chose de ma destinée? – Moi, je ne sais que vous répondre, lui dit la duchesse; cependant, vous devriez bien vous dire vous même que qui se plaît à écrire des choses qui ne sont point, mérite bien qu'on ne lui fasse point de réponse.»

L'archevêque, qui s'étoit attendu à un traitement plus rigoureux, fut ravi qu'elle ne le payât que d'incrédulité. En effet, il sentoit des choses qui lui permettoient de croire qu'il ne seroit pas longtemps sans la convaincre. Ainsi, tout rempli d'espérance: «Madame, lui dit-il, je ne sais à quoi servent toutes ces façons entre gens comme nous, qui ne manquent pas d'expérience. Pourquoi vous dirois-je que je vous aime, si je ne vous aimois pas? Dois-je souhaiter de perdre mon temps dans le siècle où nous sommes, où on peut si bien l'employer, et ne le devrois-je pas compter pour perdu si je recherchois des faveurs où je me trouverois peu sensible? Je vous aime, premièrement, parce que vous êtes tout aimable; mais j'ajouterai à cela que vous êtes belle sans être coquette, ce qui me plaît encore plus que tout le reste. Je vous dirai aussi que c'est parce que vous êtes vertueuse, et que toutes les autres ne le sont pas; mais prenez garde de ne pas interpréter ce mot au pied de la lettre: la vertu ne consiste pas à être farouche, mais à savoir goûter les plaisirs sans que les apparences nous découvrent. Pour vous, vous pouvez avoir cette qualité au suprême degré quand il vous plaira, et l'on vous verroit faire toutes choses, qu'on n'en auroit pas seulement le moindre soupçon.»

La duchesse pensa se fâcher, lui entendant dire que les apparences étoient belles en elle; elle crut que c'étoit l'accuser tacitement de galanterie, et, comme le soupçon règne toujours parmi le crime, elle le pria, mais d'un ton qui marquoit quelque ressentiment, de vouloir s'expliquer mieux. Il lui accorda volontiers sa demande, et lui dit qu'il ne doutoit point qu'elle n'eût été vertueuse, mais qu'il seroit fort fâché qu'elle la fût toujours; qu'il n'étoit pas homme à aimer sans espérance, et que, comme un feu s'éteint faute de matière, de même un homme se retiroit bientôt d'auprès d'une femme quand il voyoit qu'il n'y avoit rien à faire.

Il lui expliqua ainsi les mystères amoureux, en quoi il avoit meilleure grâce que dans la chaire; aussi y étoit-il entré plusieurs fois sans sentir ce qu'il disoit, au lieu qu'alors il étoit si ému qu'il ne l'avoit jamais été davantage. Aussi voulut-il voir tout d'un coup ce qu'il avoit à espérer: c'est pourquoi il se mit à vouloir caresser la dame, qui se défendit quelque temps; mais, feignant de ne pouvoir résister à un homme de sa force, elle se laissa enfin coucher sur un lit, où la trop grande ardeur de l'archevêque fut cause qu'elle ne prit point de part au plaisir qu'il avoit goûté. Comme il étoit homme à retourner toutes choses à son avantage, il lui dit que, pour avoir quarante ans passés, c'étoit encore être assez prêt à rendre service aux dames; que devant qu'il fût un moment il n'y auroit rien de perdu pour elle, et qu'il se méconnoîtroit bien s'il demeuroit court dans l'affaire dont il s'agissoit. En effet, il se sentit bientôt une nouvelle vigueur, et, se mettant à la caresser, il fut fort surpris de voir qu'elle tâchoit de se dérober de dessous lui. Il crut d'abord que c'étoit des façons; mais, les efforts qu'elle faisoit continuellement ne le tenant pas incertain davantage de la vérité, il ne voulut pas faire davantage le coup de poing avec elle, et lui demanda froidement d'où venoit tant de changement? «Comment! lui dit-elle tout en colère, vraiment vous m'alliez faire de belles affaires! j'allois commettre un inceste, si je n'y eusse fait réflexion: vous êtes parent de mon mari, et il auroit fallu que j'eusse été à Rome.»

Il fut impossible à l'archevêque de s'empêcher de rire à ce discours. Il lui dit cependant qu'elle étoit bien simple de dire ce qu'elle disoit; qu'il n'étoit nullement parent du duc d'Aumont, et qu'une marque de cela, c'est que, si lui, qui parloit, étoit à marier, et que le duc eût une sœur, rien ne l'empêcheroit de l'épouser. La duchesse n'avoit pas la conception prompte en matière de cas de conscience; ainsi il lui fallut expliquer celui-là plus au long, et c'étoit quelque chose sans doute de plaisant de voir qu'une femme qui venoit de faire un adultère voulût faire la scrupuleuse. Aussi tout cela n'étoit que pure grimace; mais comme, depuis qu'elle étoit dévote, elle s'étoit accoutumée à en faire beaucoup, elle ne prit pas garde qu'il y avoit des rencontres où elles n'étoient nullement de saison.

L'archevêque appréhendoit après cela qu'elle ne lui fît quelque difficulté sur son caractère; mais l'exemple de tant d'évêques qui avoient des maîtresses avoit tellement frappé l'esprit de cette dame, qu'elle ne pensa pas seulement à lui en parler. Ainsi les choses allèrent le mieux du monde, et dans peu il prit dans son cœur la place que Roquelaure y avoit tenue. La raison en étoit plausible: c'est qu'il n'avoit point de femme avec qui il couchât tous les jours, raison qui, comme nous avons dit ci-devant, avoit arraché l'autre de son cœur. Roquelaure avoit trop d'esprit pour être longtemps sans s'apercevoir de ce commerce, et, comme la chose lui tenoit au cœur, il fut chez la duchesse, qu'il accabla de reproches. Elle se retrancha sur la négative, l'appela mille fois impertinent; mais, toutes ces injures ne lui ayant pu faire prendre le change, il sortit outré, la menaçant de la perdre.

La duchesse en avertit aussitôt l'archevêque, qui, ne voulant pas donner le temps à Roquelaure de faire quelque folie, le fut trouver, et lui dit qu'ayant toujours été de ses amis, il espéroit qu'il lui accorderoit une prière; qu'il ne s'amuseroit donc point à finasser avec lui, qu'il lui avouoit de bonne foi qu'il étoit bien avec madame d'Aumont, laquelle il savoit l'avoir aimé; qu'il ne falloit prendre des femmes que ce qu'elles vouloient, et non pas prétendre les retenir par force; qu'à ce qu'il pouvoit connoître, il étoit cause lui-même de ce changement; qu'il ne devoit pas se marier; qu'une belle femme comme madame d'Aumont n'aimoit pas à partager les caresses d'un homme avec une autre; qu'enfin, il ne lui diroit autre chose sinon qu'il lui auroit une obligation infinie de se faire un peu de violence pour l'amour de lui, et qu'en revanche il pouvoit compter sur ses services et sur son amitié.

Biran étoit des amis de l'archevêque; mais, ayant peine à digérer un morceau comme celui-là, il lui fit réponse qu'il s'étonnoit qu'il lui demandât d'avoir quelque égard pour une femme qu'il avoit tant de sujet de haïr, surtout après la déclaration qu'il venoit de lui faire lui-même; qu'il falloit du moins le laisser dans l'incertitude, et non pas l'accabler par un aveu si choquant; qu'il tomboit d'accord que les dames n'étoient pas obligées d'aimer toujours, mais que, si elles vouloient qu'on en usât honnêtement avec elles, il falloit que de leur côté elles en usassent bien aussi avec ceux à qui elles avoient donné leur amitié; que, si la duchesse d'Aumont vouloit rompre avec lui, elle devoit du moins l'en avertir auparavant; mais de n'apprendre les choses, comme il venoit de faire, que quand elles étoient faites, c'étoit le pousser un peu trop pour qu'il pût répondre de sa discrétion.

C'étoit quelque chose de surprenant que de voir deux rivaux raisonner ainsi ensemble sur leur bonne fortune; mais la différence de profession de l'un et de l'autre faisoit qu'il n'y avoit rien à craindre; outre que l'archevêque étoit en possession, à cause du crédit de son frère, de se faire porter respect. En effet, cela fut cause que Roquelaure se modéra plus qu'il n'auroit fait avec un autre. Cependant il ne lui voulut rien promettre, et, l'archevêque étant allé rendre compte de son message à la duchesse, elle fut extrêmement en peine.

L'archevêque résolut d'y retourner une seconde fois, et, deux visites si près l'une de l'autre ayant donné quelque curiosité à la duchesse de Roquelaure, elle en demanda le sujet à son mari, qui n'avoit pas donné au prélat plus de contentement qu'il n'avoit fait l'autre fois. Comme il étoit encore tout bouffi de colère et qu'il ne cherchoit qu'à décharger son cœur: «C'est, Madame, lui dit-il, qu'il me vient parler pour sa maîtresse, qui a été la mienne, et il désire que je n'en dise point de mal, ce que je n'ai garde de lui promettre. – Pourquoi donc, Monsieur? lui répondit la duchesse. C'est une chose à quoi la considération vous engage; outre qu'il est toujours honnête à un homme d'en bien user avec une femme qu'il a aimée. Mais ne sauroit-on savoir qui c'est? et vaut-elle assez la peine de vous mettre dans l'inquiétude où je vous vois? – Non, Madame, elle ne le mérite pas. C'est la duchesse d'Aumont, puisque vous le voulez savoir, et elle ne vaut pas mieux que ses sœurs, qui s'en font donner par Roussi et par le chevalier de Tilladet. – Ah! Monsieur, s'écria en même temps la duchesse, trève de raillerie, et ne m'épargnerez-vous pas plus que les autres? La duchesse d'Aumont! un exemple de vertu et de sainteté, et à qui il seroit à désirer que toutes les femmes ressemblassent. – Dites, Madame, plutôt un exemple de tromperie et de perfidie: je la ferai connoître devant qu'il soit peu, et, puisque l'archevêque de Reims en use si mal avec moi, je ne vois pas que je sois obligé d'en user mieux avec lui.»

 

Roquelaure, tout spirituel qu'il étoit, lâcha ces paroles un peu légèrement: car, quoiqu'il ne se souciât pas de faire connoître à sa femme qu'il avoit été bien avec la duchesse, c'étoit néanmoins lui faire voir que sa passion duroit encore; ce qu'il étoit obligé de cacher. Aussi la duchesse ne doutant point de la chose, elle se prit à pleurer, et lui dit que, s'il ne l'aimoit pas, du moins devoit-il avoir la discrétion de ne la pas prendre pour confidente de ses amours; qu'elle avouoit qu'elle n'avoit ni la beauté ni le mérite de la duchesse d'Aumont, mais que c'étoit moins sa faute que la sienne de ne l'avoir pas choisie plus à son gré. Roquelaure, qui étoit meilleur mari qu'on n'avoit cru et qu'il n'auroit cru lui-même, voyant cette nouvelle querelle, fut obligé de ne plus songer à l'autre, pour apaiser celle-ci. Il lui en coûta quelques caresses, et, n'y ayant rien qui aide plus à remettre une femme de belle humeur, elle voulut s'enquérir encore plus particulièrement qu'elle n'avoit fait des circonstances de son intrigue. Il lui en avoit trop dit pour ne pas achever; ainsi il lui apprit en peu de mots tout ce qu'elle vouloit savoir, lui promettant néanmoins qu'il lui seroit si fidèle qu'elle n'auroit point sujet de s'en alarmer. La duchesse, qui aimoit la cour et tout ce qui étoit de la faveur, lui dit alors que, s'il parloit de bonne foi, il ne lui refuseroit pas une grâce qu'elle avoit à lui demander, qu'elle le prioit pour l'amour d'elle que la chose n'allât pas plus avant avec l'archevêque de Reims; qu'autrement ce seroit lui faire voir qu'elle lui tenoit encore au cœur; ce qu'elle ne vouloit pas croire de lui, après tous les témoignages qu'il venoit de lui donner de son amitié. Roquelaure se crut obligé de le lui promettre, et la dame, toute ravie de sa victoire, écrivit en même temps un billet de sa main à l'archevêque de Reims pour l'avertir qu'elle avoit obtenu ce que son mari lui avoit refusé. Voici ce qu'il contenoit:

Lettre de la Duchesse de Roquelaure a l'Archevêque de Reims

Le soin que je prends de la réputation de mon mari et de celle de madame d'Aumont m'a fait le tant prier de ne pas écouter son ressentiment, qu'il m'a accordé ce que je lui demandois. Comme je sais que vous prenez part à la dame, vous pouvez l'en avertir, et même lui montrer ce que je vous mande. Elle sera peut-être fâchée que j'aie tant de connoissance de ses affaires; mais les miennes m'obligent à lui faire voir que je sais tout, afin qu'elle en use bien avec moi. Belle et aimable comme elle est, je craindrois toujours que mon mari ne l'aimât; et je suis obligée, étant si éloignée d'avoir tant de mérite, de lui faire connoître que, quoique je ne sois pas méchante naturellement, il est dangereux néanmoins d'offenser une personne qui a son secret entre les mains.

Cette lettre, qui avoit été écrite sans la participation du duc de Roquelaure, ayant été envoyée pareillement sans qu'il en eût connoissance, réjouit extrêmement l'archevêque. Il n'étoit pas besoin néanmoins de lui mander de la montrer: il n'y auroit pas manqué, quand même on ne lui en eût pas donné l'ordre. En effet, il prétendoit que cela achèveroit de chasser Roquelaure du cœur de la duchesse, dont il auroit par conséquent l'entière possession. Aussi lui dit-il, en lui faisant voir qu'elle alloit connoître le peu de fonds qu'il y avoit à faire sur la discrétion de ces sortes de gens, qu'il falloit être folle pour s'y confier, et qu'il ne comprenoit pas comment il y avoit tant de femmes qui y faisoient si peu de réflexion. La duchesse, étant si bien prévenue, n'eut garde de ne pas sentir quelque ressentiment à la lecture de cette lettre; cependant elle fut plus sensible à la joie de savoir que Roquelaure s'étoit radouci qu'à la crainte de se voir à la discrétion de sa femme. L'archevêque, qui alloit à ses fins, fut fâché de lui voir tant de tranquillité là-dessus; et ils alloient peut-être commencer déjà à se quereller, si elle ne lui eût fait connoître que l'état où elle étoit ne procédoit que des assurances que la duchesse de Roquelaure sembloit donner qu'elle en useroit toujours bien tant qu'elle n'attireroit point son mari; que, son dessein étant de ne le jamais voir, il étoit donc inutile de se faire des craintes mal à propos.

Roquelaure, n'ayant plus tant de sujet de se louer de l'amour, chercha à s'en consoler dans une autre sorte de plaisir qui étoit toujours à la mode, je veux parler du vin, à quoi tous les jeunes gens qui venoient à la cour étoient obligés de s'adonner, s'ils vouloient faire coterie avec ceux qui s'appellent petits-maîtres367. Et ce qui rendoit ce désordre plus commun, c'est que, quelque réprimande qu'en eût faite le Roi, il n'avoit pas été à son pouvoir de se faire obéir. Cependant on auroit eu lieu d'espérer que l'âge les auroit fait rentrer en eux-mêmes, si l'on n'eût vu que les barbons comme les autres commençoient à s'en mêler. Entre ceux-là il n'y en avoit point qui les mît plus en humeur que le marquis de Termes368, homme dans un désordre épouvantable, et qui avoit quitté sa femme pour vivre avec la marquise de Castelnau369, laquelle avoit si bien renoncé à la pudeur, que, quoique son mari, qui lui avoit servi un temps de couverture, fût mort, elle ne laissoit pas de paroître publiquement le ventre plein. Ils étoient ordinairement dans une maison en Brie, appelée Fontenay, et il ne venoit à la cour qu'à la dérobée; mais il y faisoit toujours parler de lui. Au reste le désordre où il vivoit lui avoit attiré plusieurs affaires, et une entre autres où personne n'avoit jamais pu voir clair. Comme il étoit un soir dans cette maison, il vint descendre un homme dans une hôtellerie du village, lequel pria qu'on le menât au château. Or, c'étoit la coutume que, tant que le marquis de Termes y étoit, le pont-levis étoit levé, ce qui faisoit dire qu'il travailloit à la fausse monnoie370. Mais, celui-ci s'étant fait connoître à un signal, on l'abaissa incontinent, et il lui fit fort bonne chère. Le lendemain matin cet homme s'en retourna à son hôtellerie, où il trouva huit cavaliers qui étoient aussi arrivés la veille, et, montant à cheval avec eux, ils s'en vinrent tous de compagnie du côté du château, dont le marquis de Termes étoit sorti avec un gentilhomme de ses amis et avec tous ses domestiques, à qui il avoit fait prendre les armes. Ce marquis rangea tout cela en un gros, et, les autres s'étant rangés de même, l'on commença à combattre de part et d'autre à bons coups de mousqueton et de fusil. Il y en eut quatre ou cinq d'estropiés, et, après que le combat eut duré près d'un demi-quart d'heure, tout d'un coup quatre cavaliers de ces étrangers se détachèrent des autres et vinrent embrasser le marquis de Termes, qui les mena dans le château, où il y avoit un grand déjeuner.

Cette affaire fit grand bruit à la cour, et le Roi donna ordre qu'il fût arrêté; mais madame de Montespan, qui, à cause de son mari371, étoit de ses proches parentes, et qui étoit encore alors fort bien auprès du Roi, empêcha qu'il ne reçût cet affront. Cependant on lui fit demander ce que tout cela vouloit dire, car ce n'étoit ni duel, ni assassinat, puisque c'étoit de l'infanterie contre de la cavalerie, et que les choses s'étoient passées ainsi que je les viens de rapporter; mais n'en ayant pas voulu dire la vérité, on écrivit au président Robert372, qui a une maison dans le voisinage, où il étoit alors, de mander ce qu'il en savoit. Ce président, pour satisfaire aux ordres de la cour, fit ce qu'il put pour éclaircir ce mystère; mais, après bien des perquisitions, il ne put mander autre chose que ce que je viens de dire, dont le Roi fut obligé de se contenter.

Après cette affaire, il lui en arriva bientôt une autre, pour laquelle le Roi n'auroit eu garde d'écouter madame de Montespan, quand même elle auroit eu si peu d'esprit que de vouloir s'entremettre en sa faveur. Il fut soupçonné de poison, crime alors fort en usage en France373, et qui avoit envoyé en l'autre monde beaucoup de gens qui se portoient bien. Ce qui le fit soupçonner fut qu'une femme qui avoit été condamnée à la mort pour le même sujet l'accusa d'être venu chez elle sous prétexte de se faire dire sa bonne aventure, et chargea en même temps un homme qui avoit été son écuyer de lui être venu demander du poison. Or, on craignoit qu'il n'eût envie de faire un grand crime, car il y avoit longtemps qu'il étoit mécontent, d'autant que le Roi avoit pris tout le bien de sa femme, qui étoit fille d'un partisan; et comme on ne pouvoit avoir trop de précaution là-dessus, on jugea à propos de s'assurer de sa personne. Il est difficile de dire au vrai s'il étoit coupable ou non, car on tâcha autant qu'on put de dérober au public la connoissance de son affaire. On dit même qu'on fit passer son écuyer par les oubliettes, d'autres disent qu'il fut empoisonné. Quoi qu'il en soit, cet homme n'ayant pu déposer contre lui, il revint à la Cour, où, trouvant la jeunesse si disposée, comme nous avons dit, à faire la débauche, il se mit non-seulement de la partie, mais devint encore un des chefs.

 

Le duc de La Ferté, qui s'étoit séparé tout à fait d'avec sa femme, fit grande amitié avec lui par la sympathie qu'ils avoient à cet égard. Roquelaure, quoiqu'il fît un peu le sage depuis qu'il étoit marié, ne put refuser néanmoins à ses anciens amis de se trouver à leurs parties de plaisir; si bien que, s'y fourrant encore avec un grand nombre d'autres débauchés, ce fut de quoi donner matière à bien des nouveautés. On n'eut garde d'épargner là le prochain, et, après avoir médit de tous les gens de la cour, de Termes dit que, comme Noël approchoit, il falloit faire des paroles qu'on pût chanter au lieu de noëls. On trouva sa pensée fort juste; et, comme l'on savoit qu'il se mêloit de faire des vers, on lui donna de l'encre, du papier et une plume, pour voir comme il s'en acquitteroit. Son dessein étoit de travailler sur eux-mêmes, sur leurs femmes et sur toutes celles qui faisoient parler d'elles. Mais restant encore un peu de jugement à Roquelaure, il lui dit qu'il n'étoit pas de bon sens d'apprêter aux autres matière de rire à leurs dépens, et que d'ailleurs il alloit entreprendre une chose impossible, le nombre en étant trop grand. Il se rendit à de si bonnes raisons, et, changeant ainsi de pensée, il résolut de faire quelque chose sur la maison royale. Roquelaure, sachant son dessein, l'approuva, moyennant que son style ne fût pas trop peste374: car il le fit ressouvenir que le Roi n'aimoit pas les railleurs, et qu'il étoit bien aise de ne se point faire d'affaire. Cela fut cause que de Termes, qui avoit déjà fort bien débuté, raya ce qu'il avoit écrit, et il mit à la place les noëls que voici:

Noels nouveaux
 
O messager fidèle
Qui reviens de la cour,
Apprends-nous des nouvelles;
Qu'y fait-on chaque jour?
Chacun à l'ordinaire
Y passe mal son temps;
Les gens du ministère
Y sont les seuls contens.
 
 
Que fait le grand Alcandre
Au milieu de la paix?
N'a-t-il plus le cœur tendre?
N'aimera-t-il jamais?
L'on ne sait plus qu'en dire,
Ou l'on n'ose en parler;
Si ce grand cœur soupire,
Il sait dissimuler.
 
 
Est-il vrai qu'il s'ennuie
Partout, hors en un lieu 375 ;
Qu'il y passe la vie
Sans chercher le milieu?
Si nous en voulons croire
Au moins ce qu'on en dit,
Il y fait son histoire;
Mais sa plume est son v…
 
 
Sa superbe maîtresse 376
En est-elle d'accord?
Voit-elle avec tristesse
La rigueur de son sort?
L'on dit qu'elle en murmure
Et que, sans ses enfans,
Elle feroit figure
Avec les mécontens.
 
 
Que fait dans son bel âge,
Monseigneur le Dauphin?
Est-il toujours si sage?
Va-t-il son même train?
Il n'aime que la chasse,
Cela lui coûte peu;
Quand ce plaisir le lasse
Il revient à son feu.
 
 
Madame la Dauphine
A-t-elle du pouvoir,
Comme l'on s'imagine
Qu'elle en devroit avoir?
Son pouvoir se publie;
Mais l'on s'aperçoit bien
Que sans la comédie
Elle ne pourroit rien.
 
 
La divine princesse,
La charmante Conti,
A-t-elle la tendresse
Toujours de son parti?
Elle en a de son père
Et peu de son époux;
Mais pour monsieur son frère,
Il en a pour eux tous.
 
 
La princesse de Nante 377
Fait-elle du fracas?
Est-elle bien contente
De ses tendres appas?
Elle a sujet de l'être,
Si le duc de Bourbon 378,
Qui commence à paroître,
Lui fait changer de nom.
 
 
Du colonel des Suisses 379
Ne nous direz-vous rien?
Fait-il ses exercices,
Y réussit-il bien?
Il a beaucoup d'adresse,
Grand esprit et grand cœur,
Fierté, beauté, jeunesse,
Et de la belle humeur.
 
 
Que fait-on chez les dames 380
Dans ce charmant séjour?
Le commerce des flammes
Y règne-t-il toujours?
Les amans sans ressource
Font voir, pour leur malheur,
Peu d'argent dans leur bourse,
Peu d'amour dans leur cœur.
 
 
Des dames renommées 381
Ne dit-on que cela?
Sont-elles réformées?
Ont-elles dit holà?
Chez les aventurières
L'amour règne toujours:
Ainsi que les rivières
Celles-là vont leur cours.
 
 
En est-il d'assez fières
Pour se faire prier?
D'autres assez sévères
Pour ne rien octroyer?
Dans toutes les ruelles
De différens états,
L'on a vu les plus belles
Faire le premier pas.
 
 
Comment font les coquettes
Qui n'ont point d'agrément.
Et qui comme allumettes
Brûlent pour un amant?
Dans le siècle où nous sommes,
Chacun est indigent:
Elles trouvent des hommes
Quand elles ont de l'argent.
 

De Termes ayant fait ce que vous venez de lire, il y en eut qui le trouvèrent bien, d'autres mal, disant que cela étoit trop sérieux. Il répondit qu'on ne s'en prît pas à lui, mais à Roquelaure, qui avoit voulu, comme ils savoient, qu'il fît quelque chose de moins libre que ce qu'il avoit envie de faire. La Ferté dit que Roquelaure étoit un sot; dont tout le monde convint, et lui-même tout le premier, quoique ce ne fût que sous cape. C'est pourquoi il jura qu'il ne chanteroit que les couplets de la princesse de Conti et de madame de Maintenon. Chacun savoit aussi bien que lui que c'étoient les meilleurs; mais, comme on commença à entonner depuis le premier jusqu'au dernier, il fut obligé de faire comme les autres. On eut bientôt appris par cœur ces noëls nouveaux, et ils coururent bientôt dans les meilleures compagnies. Le prince de Condé, qui, contre son ordinaire, avoit quitté sa maison de Chantilly pour venir passer une partie de l'hiver à Paris, étant curieux de toutes sortes de nouveautés, on le régala de celle-ci, dont on avoit supprimé néanmoins l'article de la princesse de Conti382. Il demanda à celui qui lui faisoit ce présent d'où vient que le duc d'Orléans, lui, son fils383, le prince de Conti384 et le prince de La Roche-sur-Yon385 n'y étoient pas. A quoi l'autre ayant répondu que l'auteur n'avoit voulu parler que du Roi et de ses enfans: «Donnez-moi donc, lui dit-il, celui de la princesse de Conti, car elle est aussi bien sa fille que mademoiselle de Nantes.» L'autre se trouva embarrassé de cette réponse et vouloit chercher quelque détour; mais le prince de Condé lui commanda de lui obéir. Ainsi il vit celui qu'on vouloit cacher; de quoi ayant averti le prince de Conti, son neveu, il lui conseilla de se venger de l'auteur, qui n'étoit pas encore connu. Cependant on ne manqua pas d'attribuer cela à la cabale, comme étant capable de toutes sortes de sottises; et, s'y trouvant un faux frère, de Termes fut décelé et abandonné au ressentiment du prince de Conti, qui, sans attendre le conseil du prince de Condé, s'étoit déjà déterminé, sur la connoissance qu'il en avoit eue, à le récompenser de ses peines. En effet, il lui fit donner des coups de bâton, et le duc de La Ferté en auroit eu sa part, pour l'approbation qu'il avoit donnée à ce couplet, s'il ne se fût allé jeter à ses pieds et lui demander pardon386. Quoique la punition fût un peu rude pour de Termes, personne ne le plaignit, et l'on trouva qu'il la méritoit bien, puisqu'à l'âge qu'il avoit il étoit assez fou pour oser médire d'une fille qui appartenoit de si près au Roi, et qui d'ailleurs étoit mariée à un prince du sang.

Si les noëls étoient devenus publics en peu de temps, l'affront qu'avoit reçu l'auteur ne fut pas davantage à se publier. Ainsi, comme les hommes ont coutume d'estimer une personne selon le bien ou le mal qui lui arrive, on vit que le marquis de Termes devint bientôt le mépris de tous les honnêtes gens. Ses amis lui conseillèrent de s'en retourner à Fontenay; mais, par malheur pour lui, sa femme, à qui appartenoit cette terre, l'avoit obligé d'en sortir, tellement qu'à moins que d'aller dans le fond de la Gascogne il n'avoit point de retraite. Il ne laissoit pas cependant de se montrer encore à la cour, et le prince de Conti, voulant se moquer de lui, lui dit un jour, en présence de tout le monde, qu'il falloit qu'il eût des ennemis; qu'on faisoit courir le bruit qu'il lui avoit fait donner des coups de bâton; que cela n'étoit pas vrai, et qu'il l'appeloit à témoin si ce n'étoit pas une imposture.

Cette aventure défraya la conversation pendant quelques jours; mais, comme tout s'oublie avec le temps, on n'en parla plus au bout de trois semaines, et il n'y eut que ceux qui y prenoient intérêt qui s'en ressouvinssent. Cependant il étoit arrivé du changement dans les amours du comte de Roussi et du chevalier de Tilladet, aussi bien que dans celles du marquis de Biran. Roussi s'étoit rebuté de sa maîtresse pour un méchant présent qu'elle lui avoit fait, et, quoiqu'elle l'eût reçu de son mari, il ne voulut pas s'exposer davantage à acheter ses faveurs à un tel prix. La duchesse de Vantadour, qui avoit filé doux sur la débauche de son mari pour la couverture qu'elle en avoit, n'en ayant plus de besoin, se mit à pester contre lui et ses parens lui conseillèrent de suivre l'exemple de la duchesse de La Ferté, sa sœur, qui s'étoit séparée du sien387. Mais elle n'en voulut rien faire, espérant que Roussi reviendroit à elle, et qu'ainsi elle en auroit encore besoin. Elle fit valoir ce refus au petit bossu, qui n'en usa pas plus honnêtement. Au contraire, continuant toujours dans ses débauches, non seulement il entretint la réputation où il étoit d'être parfaitement débauché, mais il eut encore bientôt celle de grand fripon. Le chemin pris pour y parvenir fut de se transformer dans le sentiment des p… qu'il voyoit, et, étant tombé entre les mains d'une, qui joignoit à son métier celui de savoir filouter, il lui aida à tromper de pauvres dupes, qui étoient assez fous pour attribuer le tout au hasard388. Cependant, comme il est difficile qu'en continuant toujours le même métier l'on ne soit à la fin reconnu, il arriva qu'un homme d'Angers perdit mille écus, ce qui fit que toutes choses furent découvertes. Cela se passa de cette manière: Cet homme, qui étoit riche, aimoit les femmes, et un filou, ayant reconnu son inclination, le mena en voir une à petit couvent au faubourg Saint-Jacques, qui sert ordinairement de retraite à toutes les filles qui ont eu quelque affaire et à toutes les femmes qui sont mal avec leurs maris pour quelque galanterie. Il lui fit accroire que c'étoit une femme de qualité, et celui-ci, qui ne connoissoit pas encore Paris, la trouva si à son gré que, pendant un mois entier, il ne fut point de jour sans lui rendre visite.

La dame ne manqua pas de lui témoigner de la reconnoissance, et, cela l'ayant rendu encore plus amoureux, il la pria de vouloir sortir de ce couvent, où il ne la pouvoit voir si commodément qu'il vouloit. La dame, le voyant tout à fait engagé, feignit de se rendre à ses raisons, et, étant allée chez une de ses amies, qui ne valoit pas mieux qu'elle, elle lui fit valoir pour une grande grâce la permission qu'elle lui donnoit de l'y venir visiter. Dès la seconde fois il y trouva le duc de Vantadour et deux ou trois autres dames, l'une desquelles ayant proposé de jouer à la bête389 en attendant qu'il fût heure d'aller à la comédie, on fit si bien qu'on l'y engagea. Cependant, pour lui faire croire que ce n'étoit que pour passer le temps, on ne fit valoir les marques que fort peu de chose; mais le duc, deux de ces dames, qui étoient du jeu, faisant bête sur bête, et les mettant toujours l'une sur l'autre, enfin il se trouva mille écus sur le jeu, et ce fut alors qu'avec des cartes apprêtées tout exprès on donna si beau jeu à cette pauvre dupe qu'il crut que la fortune le favorisoit. Il fit donc jouer, mais ce fut pareillement pour faire la bête, tellement qu'il fallut mettre tout ce qu'il avoit d'argent devant lui et faire bon du reste. On ne joua plus guère après cela; on donna avec de pareilles cartes la vole au duc, et il demanda à cet homme de lui faire un billet de ce qu'il lui devoit. Il fallut qu'il en passât par là, quelque soupçon qu'il eût que cela n'étoit pas arrivé naturellement; mais, après être sorti (car il n'étoit plus question de comédie), il s'informa plus particulièrement qui étoient ces femmes, et, sans qu'il lui fût besoin de faire de grandes enquêtes, il en apprit tout autant qu'il en vouloit savoir.

367On prétend que ce nom de petits-maîtres commença à s'établir en France lorsque le duc de Mazarin, fils du maréchal de La Meilleraie, fut reçu grand-maître de l'artillerie en survivance de son père: on appela petits-maîtres les jeunes seigneurs de son âge. On donna ensuite ce nom aux jeunes gens qui prétendoient briller plus que les autres; et Saint-Evremont nous montre déjà cette qualification tombée dans le discrédit parce qu'on l'appliquoit à la bourgeoisie.
368«M. De Termes étoit de la même maison que M. de Montespan et n'avoit de noble que de la naissance et de la valeur. Il étoit pauvre, et si bas qu'il fit l'impossible pour être premier valet de chambre du Roi.» (Saint-Simon, Comment. sur le Journal de Dangeau, t. 1, p. 81.) – M. de Montespan ne tenoit à l'illustre maison de Saint-Lary, d'où le duc de Bellegarde et son frère le marquis de Termes, que par les femmes. La sœur du duc de Bellegarde avoit en effet épousé le bisaïeul du marquis de Montespan, dont la femme fut aimée de Louis XIV, et l'aïeul du marquis épousa aussi une Saint-Lary.
369Louise Marie Foucault, fille du maréchal de ce nom, étoit veuve, depuis le 2 déc. 1672, de Michel II de Castelnau, fils lui-même d'un maréchal de France. La marquise avoit aimé, paroît-il, le duc de Longueville, qui se moquoit d'elle. Quand il mourut, madame de Castelnau apprit vite les vrais sentiments du duc, et, le 8 juillet 1672, madame de Sévigné écrivoit: «La Castelnau est consolée.»
370Nombre de gentilshommes en province se mêloient de fabriquer de la monnoie: on a vu que le père de madame de Maintenon avoit été accusé de ce crime. Les Grands jours d'Auvergne, par Fléchier, donnent des renseignements curieux sur ce sujet.
371Voy. la note ci-dessus, p. .
372Louis Robert, président en la Cour des Comptes depuis 1679. Il avoit été d'abord intendant en Flandres.
373Les mémoires de la Fare ne parlent pas autrement: «Ce qui donna l'idée de ce crime, qui étoit alors fort commun en France, fut l'affaire de madame de Brinvilliers, fille du lieutenant-civil d'Aubray.» Nous ne rappellerons pas les scandaleuses affaires de ce temps, portées à la trop fameuse chambre des poisons, etc.
374Nous avons déjà vu ce mot employé plus haut.
375Maintenon. (Note du texte.)
376Montespan. (Id.)
377Fille de madame de Montespan et du Roi. (Ibid.) – Elle épousa le duc de Bourbon.
378Petit-fils du prince de Condé. (Ibid.)
379C'étoit le duc du Maine.
380Sur les dames en général. (Ibid.)
381D'Olonne, Meklebourg, de Fiesque. (Ibid.)
382Marie Anne de Bourbon, fille de Louis XIV et de mademoiselle de La Vallière, mariée, le 16 janvier 1680, à Louis Armand de Bourbon, prince de Conti. Voy. ci-dessous.
383Le prince Henri-Jules, fils du grand Condé. Nous avons déjà rencontré son nom.
384Louis Armand de Bourbon, prince de Conti, né le 4 avril 1661, fils d'Armand de Bourbon, prince de Conti, et d'Anne Marie Martinozzi. – Il mourut le 9 nov. 1685. – Voy. la note , ci-dessus.
385François-Louis de Bourbon, prince de la Roche sur Yon, frère d'Armand de Bourbon, prince de Conti, naquit le 30 avril 1664. Il devint lui-même prince de Conti, en nov. 1685, après la mort de son aîné, et épousa sa cousine, fille du prince Henri-Jules et petite-fille du grand Condé. Le prince de Conti et le prince de la Roche sur Yon firent en 1685 la campagne de Hongrie. On connoît les emportements du Roi à leur égard.
386Le bâton n'étoit pas seulement l'arme des vengeances quand il s'agissoit de châtier un poëte ou quelque bourgeois. Les gentilshommes ne se l'épargnoient pas. Ainsi le cardinal de Sourdis fut bâtonné par le duc d'Epernon, et il eut l'honneur, dit Tallemant, d'être le prélat le plus battu de France. Le comte de Bautru passa aussi par le bois, ce qui fournit un bon mot à sa verve intarissable. – Dans la hiérarchie des offenses dont connoissoit le tribunal des maréchaux de France, la bastonnade venoit entre le démenti et le soufflet. – Le traitement dont fut l'objet le marquis de Termes n'a donc rien d'étonnant. Dangeau, à la date du 17 déc., assez près de Noël, comme on voit, 1686, confirme le rapport de notre texte, et Saint-Simon, dans son commentaire, entre, sur ce fait, dans d'assez longs détails. (Journal de Dangeau, I, 81.)
387Le Journal de Dangeau, et surtout le commentaire de Saint-Simon, font bien connoître le ménage du duc de Ventadour: «Madame de Ventadour étoit fort belle et fort agréable, son mari très laid et très contrefait. Ils étoient très mal ensemble, et les choses étoient allées souvent fort loin… On se soucioit peu du mari, dont la débauche et une absence continuelle de la cour ne lui donnoient pas grande considération…» (Journal de Dangeau, t. 23.)
388La démoralisation même des classes élevées étoit alors arrivée à un point que les pamphlets ne sont pas seuls à signaler. Le jeu, dont la mode, ou plutôt la fureur, avoit été apportée d'Italie, étoit une des principales causes de cette corruption incroyable. On, – je dis les gens qui sembloient devoir être le moins susceptibles de succomber à la tentation, – on ne se faisoit aucun scrupule d'aider un peu ou de corriger la fortune. L'abus ne cessa pas entre Mazarin et la marquise de Parolignac, un des personnages de Candide.
389Le jeu de la bête ou de l'homme étoit un jeu où le perdant payoit, non sa mise, mais celle de tous les joueurs.