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Œuvres de Napoléon Bonaparte, Tome V

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Titre VI—Droit des citoyens.

59. Les Français sont égaux devant la loi, soit pour la contribution aux impôts et charges publiques, soit pour l'admission aux emplois civils et militaires.

60. Nul ne peut, sous aucun prétexte, être distrait des juges qui lui sont assignés par la loi.

61. Nul ne peut être poursuivi, arrêté, détenu, ni exilé que dans les cas prévus par la loi et suivant les formes prescrites.

62. La liberté des cultes est garantie à tous.

63. Toutes les propriétés possédées ou acquises en vertu des lois, et toutes les créances sur l'état, sont inviolables.

64. Tout citoyen a le droit d'imprimer et de publier ses pensées, en les signant, sans aucune censure préalable, sauf la responsabilité légale, après la publication, par jugement par jurés, quand même il n'y aurait lieu qu'à l'application d'une peine correctionnelle.

65. Le droit de pétition est assuré à tous les citoyens. Toute pétition est individuelle. Les pétitions peuvent être adressées, soit au gouvernement, soit aux deux chambres: néanmoins, ces dernières mêmes doivent porter l'intitulé: à S. M. l'Empereur. Elles seront présentées aux chambres sous la garantie d'un membre qui recommande la pétition. Elles sont lues publiquement, et si la chambre les prend en considération, elles sont portées à l'Empereur par le président.

66. Aucune place, aucune partie du territoire ne peut être déclarée en état de siége que dans le cas d'invasion de la part d'une force étrangère, ou de troubles civils. Dans le premier cas, la déclaration est faite par un acte du gouvernement. Dans le second cas, elle ne peut l'être que par la loi. Toutefois, si, le cas arrivant, les chambres ne sont pas assemblées, l'acte du gouvernement déclarant l'état de siége doit être converti en une proposition de loi, dans les quinze premiers jours de la réunion des chambres.

67. Le peuple français déclare en outre que, dans la délégation qu'il a faite et qu'il fait de ses pouvoirs, il n'a pas entendu et n'entend pas donner le droit de proposer le rétablissement des Bourbons ou d'aucun prince de cette famille sur le trône, même en cas d'extinction de la dynastie impériale, ni le droit de rétablir, soit l'ancienne noblesse féodale, soit les droits féodaux et seigneuriaux, soit les dîmes, soit aucun culte privilégié et dominant, ni la faculté de porter aucune atteinte à l'irrévocabilité de la vente des domaines nationaux; il interdit formellement au gouvernement, aux chambres et aux citoyens, toute proposition à cet égard.

Paris, 30 avril 1815.
Décret

En convoquant les électeurs des collèges en assemblée du Champ-de-Mai, nous comptions constituer chaque assemblée électorale de département en bureaux séparés, composer ensuite une commission commune à toutes, et, dans l'espace de quelques mois, arriver au grand but, objet de nos pensées.

Nous croyions alors en avoir le temps et le loisir, puisque notre intention étant de maintenir la paix avec nos voisins, nous étions résigné à souscrire à tous les sacrifices qui déjà avaient pesé sur la France.

La guerre civile du midi à peine terminée, nous acquîmes la certitude des dispositions hostiles des puissances étrangères, et dès-lors il fallut prévoir la guerre, et s'y préparer.

Dans ces nouvelles occurrences, nous n'avions que l'alternative de prolonger la dictature dont nous nous trouvons investi par les circonstances et par la confiance du peuple, où d'abréger les formes que nous nous étions proposé de suivre pour la rédaction de l'acte constitutionnel. L'intérêt de la France nous a prescrit d'adopter ce second parti. Nous avons présenté à l'acceptation du peuple un acte qui à la fois garantit ses libertés et ses droits, et met la monarchie à l'abri de tout danger de subversion. Cet acte détermine le mode de la formation de la loi, et dès-lors contient en lui-même le principe de toute amélioration qui serait conforme aux voeux de la nation, interdisant cependant toute discussion sur un certain nombre de points fondamentaux déterminés qui sont irrévocablement fixés.

Nous aurions voulu aussi attendre l'acceptation du peuple avant d'ordonner la réunion des collèges, et de faire procéder à la nomination des députés; mais également maîtrisé par les circonstances, le plus haut intérêt de l'état nous fait la loi de nous environner, le plus promptement possible, des corps nationaux.

A ces causes, nous avons décrété et décrétons ce qui suit:

Art. 1er. Quatre jours après la publication du présent décret au chef-lieu du département, les électeurs des collèges de département et d'arrondissement se réuniront en assemblées électorales au chef-lieu de chaque département et de chaque arrondissement; le préfet pour le département, les sous-préfets pour les arrondissemens, indiqueront le jour précis, l'heure et le lieu de l'assemblée, par des circulaires et par une proclamation qui sera répandue avec la plus grande célérité dans tous les cantons et communes.

2. Pour cette année, à l'ouverture de l'assemblée, le plus ancien d'âge présidera, le plus jeune fera les fonctions de secrétaire, les trois plus âgés après le président seront scrutateurs. Chaque assemblée ainsi organisée provisoirement nommera son président; elle nommera aussi deux secrétaires et trois scrutateurs; ces choix se feront à la majorité absolue.

3. On procédera ensuite aux élections des députés à la chambre des représentans, conformément à l'acte envoyé pour être présenté à l'acceptation du peuple, et inséré au Bulletin des lois, nº 19, le 22 avril présent mois.

4. Les préfets des villes, chefs-lieux d'arrondissemens commerciaux, convoqueront, à la réception du présent, la chambre de commerce et les chambres consultatives pour faire former les listes de candidats sur lesquelles les représentans de l'industrie commerciale et manufacturière doivent être élus par les collèges électoraux, appelés à les nommer, conformément à l'acte joint à celui énoncé en l'article précédent.

5. Les députés nommés par les assemblées électorales se rendront à Paris pour assister à l'assemblée du Champ-de-Mai, et pouvoir composer la chambre des représentans, que nous nous proposons de convoquer après la proclamation de *de l'acceptation de l'acte constitutionnel.

NAPOLÉON.
Paris, 24 mai 1815.
Réponse de l'empereur à une députation des fédérés de Paris

Soldats fédérés des faubourgs St.-Antoine et St.-Marceau,

Je suis revenu seul, parce que je comptais sur le peuple des villes, les habitans des campagnes et les soldats de l'armée, dont je connaissais l'attachement à l'honneur national. Vous avez tous justifié ma confiance. J'accepte votre offre. Je vous donnerai des armes; je vous donnerai pour vous guider des officiers couverts d'honorables blessures et accoutumés à voir fuir l'ennemi devant eux. Vos bras robustes et faits aux pénibles travaux, sont plus propres que tous autres au maniement des armes. Quant au courage, vous êtes Français; vous serez les éclaireurs de la garde nationale. Je serai sans inquiétude pour la capitale, lorsque la garde nationale et vous vous serez chargés de sa défense; et s'il est vrai que les étrangers persistent dans le projet impie d'attenter à notre indépendance et à notre honneur, je pourrai profiter de la victoire sans être arrêté par aucune sollicitude.

Soldats fédérés, s'il est des hommes dans les hautes classes de la société, qui aient déshonoré le nom français, l'amour de la patrie et le sentiment d'honneur national se sont conservés tout entiers dans le peuple des villes, les habitans des campagnes et les soldats de l'armée. Je suis content de vous voir. J'ai confiance en vous: Vive la Nation!

Paris, 1er juin 1815.
Discours de l'empereur au Champ-de-Mai

Messieurs les électeurs des collèges de département et d'arrondissement,

Messieurs les députés de l'armée de terre et de mer au Champ-de-Mai,

Empereur, consul, soldat, je tiens tout du peuple. Dans la prospérité, dans l'adversité, sur le champ de bataille, au conseil, sur le trône, dans l'exil, la France a été l'objet unique et constant de mes pensées et de mes actions.

Comme ce roi d'Athènes, je me suis sacrifié pour mon peuple dans l'espoir de voir se réaliser la promesse donnée de conserver à la France son intégrité naturelle, ses honneurs et ses droits.

L'indignation de voir ces droits sacrés, acquis par vingt-cinq années de victoires, méconnus et perdus à jamais, le cri de l'honneur français flétri, les voeux de la nation m'ont ramené sur ce trône qui m'est cher parce qu'il est le palladium de l'indépendance, de l'honneur et des droits du peuple.

Français, en traversant au milieu de l'allégresse publique les diverses provinces de l'empire pour arriver dans ma capitale, j'ai dû compter sur une longue paix; les nations sont liées par les traités conclus par leurs gouvernemens, quels qu'ils soient.

Ma pensée se portait alors toute entière sur les moyens de fonder notre liberté par une constitution conforme à la volonté et à l'intérêt du peuple. J'ai convoqué le Champ-de-Mai.

Je ne tardai pas à apprendre que les princes qui ont méconnu tous les principes, froissé l'opinion et les plus chers intérêts de tant de peuples, veulent nous faire la guerre. Ils méditent d'accroître le royaume des Pays-Bas, de lui donner pour barrières toutes nos places frontières du nord, et de concilier les différens qui les divisent encore, en se partageant la Lorraine et l'Alsace.

Il a fallu se préparer à la guerre.

Cependant, devant courir personnellement les hasards des combats, ma première sollicitude a dû être de constituer sans retard la nation. Le peuple a accepté l'acte que je lui ai présenté.

 

Français, lorsque nous aurons repoussé ces injustes agressions, et que l'Europe sera convaincue de ce qu'on doit aux droits et à l'indépendance de vingt-huit millions de Français, une loi solennelle, faite dans les formes voulues par l'acte constitutionnel, réunira les différentes dispositions de nos constitutions aujourd'hui éparses.

Français, vous allez retourner dans vos départemens. Dites aux citoyens que les circonstances sont grandes!!! Qu'avec de l'union, de l'énergie et de la persévérance, nous sortirons victorieux de cette lutte d'un grand peuple contre ses oppresseurs; que les générations à venir scruteront sévèrement notre conduite; qu'une nation a tout perdu quand elle a perdu l'indépendance. Dites-leur que les rois étrangers que j'ai élevés sur le trône, ou qui me doivent la conservation de leur couronne, qui, tous, au temps de ma prospérité, ont brigué mon alliance et la protection du peuple français, dirigent aujourd'hui tous leurs coups contre ma personne. Si je ne voyais que c'est à la patrie qu'ils en veulent, je mettrais à leur merci cette existence contre laquelle ils se montrent si acharnés. Mais dites aussi aux citoyens, que tant que les Français me conserveront les sentimens d'amour dont ils me donnent tant de preuves, cette rage de nos ennemis sera impuissante.

Français, ma volonté est celle du peuple; mes droits sont les siens; mon honneur, ma gloire, mon bonheur, ne peuvent être autres que l'honneur, la gloire et le bonheur de la France.

Paris, 7 juin 1815.
Discours de l'empereur à l'ouverture de la chambre des représentans

Messieurs de la chambre des pairs et de la chambre des représentans, depuis trois mois les circonstances et la confiance du peuple m'ont investi d'un pouvoir illimité, et je viens aujourd'hui remplir le premier désir et le besoin le plus pressant de mon coeur en ouvrant votre session et en commençant ainsi la monarchie constitutionnelle.

Les hommes sont impuissans pour fixer les destinées des nations; ce n'est que par des institutions sages que leur prospérité peut être établie sur des bases solides. La monarchie est nécessaire à la France pour assurer sa liberté et son indépendance. Nos constitutions sont encore éparses, et un de nos premiers soins sera de les réunir et d'en coordonner les différentes parties en un seul corps de loi. Ce travail recommandera l'époque actuelle à la postérité. J'ambitionne de voir la France jouir de toute la liberté possible, je dis possible, parce que l'anarchie conduit les peuples au despotisme.

Une coalition formidable d'empereurs et de rois en veut à notre indépendance; la frégate la Melpomène a été prise, après un combat sanglant, par un vaisseau anglais de 74; ainsi le sang a coulé pendant la paix. Nos ennemis comptent sur nos dissensions intestines, et cherchent à en profiter; on communique aujourd'hui avec Gand comme on communiquait en 1789 avec Coblentz.

Des mesures législatives seront nécessaires pour réprimer ces complots; je confie à vos lumières et à votre patriotisme les destinées de la France et la sûreté de ma personne. La liberté de la presse est inhérente à nos institutions; on n'y peut rien changer sans porter atteinte à la liberté civile, mais des lois sages seront nécessaires pour en prévenir les abus: je recommande à votre attention cet objet important.

Mes ministres vous feront connaître successivement la situation de nos affaires: nos finances offriraient de plus grandes ressources sans les sacrifices indispensables qu'ont exigés les circonstances, et si les sommes portées dans le budget rentraient aux époques déterminées. Il est possible que le premier devoir des princes m'appelle à la tête des enfans de la patrie. L'armée et moi nous ferons notre devoir. Vous, pairs, et vous, représentans, secondez nos efforts en entretenant la confiance par votre attachement au prince et à la patrie, et la cause sainte du peuple triomphera. Paris, 11 juin 1815.

Réponse de l'empereur à une députation de la chambre des pairs

Monsieur le président et messieurs les députés de la chambre des pairs,

La lutte dans laquelle nous sommes engagés est sérieuse. L'entraînement de la prospérité n'est pas le danger qui nous menace aujourd'hui. C'est sous les Fourches Caudines que les étrangers veulent nous faire passer!

La justice de notre cause, l'esprit public de la nation et le courage de l'armée, sont de puissans motifs pour espérer des succès; mais si nous avions des revers, c'est alors surtout que j'aimerais à voir déployer toute l'énergie de ce grand peuple; c'est alors que je trouverais dans la chambre des pairs des preuves d'attachement à la patrie et à moi.

C'est dans les temps difficiles que les grandes nations, comme les grands hommes, déploient toute l'énergie de leur caractère, et deviennent un objet d'admiration pour la postérité.

Monsieur le président et messieurs les députés de la chambre des pairs, je vous remercie des sentimens que vous m'exprimez au nom de la chambre.

Paris, 11 juin 1815.
Réponse de l'empereur à une députation de la chambre des représentans

Monsieur le président et messieurs les députés de la chambre des représentans,

Je retrouve avec satisfaction mes propres sentimens dans ceux que vous m'exprimez. Dans ces graves circonstances, ma pensée est absorbée par la guerre imminente, au succès de laquelle sont attachés l'indépendance et l'honneur de la France.

Je partirai cette nuit pour me rendre à la tête de mes armées; les mouvemens des différens corps ennemis y rendent ma présence indispensable. Pendant mon absence, je verrais avec plaisir qu'une commission nommée par chaque chambre méditât sur nos constitutions.

La constitution est notre point de ralliement; elle doit être notre étoile polaire dans ces momens d'orage. Toute discussion publique qui tendrait à diminuer directement ou indirectement la confiance qu'on doit avoir dans ses dispositions, serait un malheur pour l'état; nous nous trouverions au milieu des écueils, sans boussole et sans direction. La crise où nous sommes engagés est forte. N'imitons pas l'exemple du Bas-Empire, qui, pressé de tous côtés par les Barbares, se rendit la risée de la postérité en s'occupant de discussions abstraites, au moment où le bélier brisait les portes de la ville.

Indépendamment des mesures législatives qu'exigent les circonstances de l'intérieur, vous jugerez peut être utile de vous occuper des lois organiques destinées à faire marcher la constitution. Elles peuvent être l'objet de vos travaux publics sans avoir aucun inconvénient.

Monsieur le président et messieurs les députés de la chambre des représentons, les sentimens exprimés dans votre adresse me démontrent assez l'attachement de la chambre à ma personne, et tout le patriotisme dont elle est animée. Dans toutes les affaires, ma marche sera toujours droite et ferme. Aidez-moi à sauver la patrie. Premier représentant du peuple, j'ai contracté l'obligation que je renouvelle, d'employer dans des temps plus tranquilles toutes les prérogatives de la couronne et le peu d'expérience que j'ai acquis, à vous seconder dans l'amélioration de nos institutions.

Charleroy, le 15 juin, à neuf heures du soir.
NOUVELLES DE L'ARMÉE EN 1815
(Extrait du Moniteur.)

L'armée a forcé la Sambre, pris Charleroy, et poussé des avant-gardes à moitié chemin de Charleroy à Namur, et de Charleroy à Bruxelles. Nous avons fait quinze cents prisonniers, et enlevé six pièces de canon. Quatre régimens prussiens ont été écrasés. L'empereur a perdu peu de monde, mais il a fait une perte qui lui est très-sensible, c'est celle de son aide-de-camp, le général Letort, qui a été tué sur le plateau de Fleurus, en commandant une charge de cavalerie.

L'enthousiasme des habitans de Charleroy, et de tous les pays que nous traversons, ne peut se décrire.

Dès le 13, l'empereur était arrivé à Beaumont. Sur toute la route, des arcs de triomphe étaient élevés dans toutes les villes, dans les moindres villages. Le 14, S. M. avait passé l'armée en revue, et porté son enthousiasme au comble par la proclamation suivante, datée d'Avesnes le même jour.

Soldats,

C'est aujourd'hui l'anniversaire de Marengo et de Friedland, qui décidèrent deux fois du destin de l'Europe. Alors, comme après Austerlitz, comme après Wagram, nous fûmes trop généreux; nous crûmes aux protestations et aux sermens des princes que nous laissâmes sur le trône. Aujourd'hui cependant, coalisés entre eux, ils en veulent à l'indépendance et aux droits les plus sacrés de la France. Ils ont commencé la plus injuste des agressions; marchons à leur rencontre: eux et nous, ne sommes-nous plus les mêmes hommes!

Soldats, à Jéna, contre ces mêmes Prussiens aujourd'hui si arrogans, vous étiez un contre trois, et à Montmirail un contre six. Que ceux d'entre vous qui ont été prisonniers des Anglais, vous fassent le récit de leurs pontons et des maux affreux qu'ils y ont soufferts.

Les Saxons, les Belges, les Hanovriens, les soldats de la confédération du Rhin gémissent d'être obligés de prêter leurs bras à la cause de princes ennemis de la justice et des droits de tous les peuples. Ils savent que cette coalition est insatiable. Après avoir dévoré douze millions de Polonais, douze millions d'Italiens, un million de Saxons, six millions de Belges, elle devra dévorer les états du second ordre de l'Allemagne.

Les insensés! un moment de prospérité les aveugle; l'oppression et l'humiliation du peuple français sont hors de leur pouvoir.

S'ils entrent en France, ils y trouveront leur tombeau.

Soldats, nous avons des marches forcées à faire, des batailles à livrer, des périls à courir; mais, avec de la constance, la victoire sera à nous; les droits de l'homme et le bonheur de la patrie seront reconquis. Pour tout Français qui a du coeur, le moment est arrivé de vaincre ou de périr.

NAPOLÉON.
Charleroi, le 15 juin au soir.
(Extrait du Moniteur.)

Le 14, l'armée était placée de la manière suivante.

Le quartier impérial à Beaumont.

Le premier corps, commandé par le général d'Erlon, était à Solre, sur la Sambre.

Le deuxième corps, commandé par le général Reille, était à Ham-sur-Heure.

Le troisième corps, commandé par le général Vandamme, était sur la droite de Beaumont.

Le quatrième corps, commandé par le général Gérard, arrivait à Philippeville.

Le 15, à trois heures du matin, le général Reille attaqua l'ennemi et se porta sur Marchiennes-au-Pont. Il eût différens engagemens, dans lesquels sa cavalerie chargea un bataillon prussien et fit trois cents prisonniers.

A une heure du matin, l'empereur était à Jamignan-sur-Heure.

La division de cavalerie légère du général Daumont sabra deux bataillons prussiens et fit quatre cents prisonniers.

Le général Pajol entra à Charleroi à midi. Les sapeurs et les marins de la garde étaient à l'avant-garde, pour réparer les ponts. Ils pénétrèrent les premiers en tirailleurs dans la ville.

Le général Clari, avec le premier de hussards, se porta sur Gosselines, sur la route de Bruxelles, et le général Pajol sur Gilly, sur la roule de Namur.

A trois heures après midi, le général Vandamme déboucha avec son corps sur Gilly.

Le maréchal Grouchy arriva avec la cavalerie du général Excelmans.

L'ennemi occupait la gauche de la position de Fleurus; à cinq heures après-midi, l'empereur ordonna l'attaque. La position fut tournée et enlevée. Les quatre escadrons de service de la garde, commandés par le général Letort, aide-de-camp de l'empereur, enfoncèrent trois carrés; les vingt-sixième, vingt-septième et vingt-huitième régimens prussiens furent mis en déroute. Nos escadrons sabrèrent quatre à cinq cents hommes et firent cent cinquante prisonniers.

Pendant ce temps, le général Reille passait la Sambre à Marchiennes-au-Pont, pour se porter sur Gosselies avec les divisions du prince Jérôme et du général Bachelu, attaquait l'ennemi, lui faisait deux cent cinquante prisonniers, et le poursuivait sur la route de Bruxelles.

Nous devînmes ainsi maîtres de toute la position de Fleurus.

A huit heures du soir, l'empereur rentra à son quartier-général à Charleroi.

 

Cette journée coûte à l'ennemi cinq pièces de canon et deux mille hommes, dont mille prisonniers. Notre perte est de dix hommes tués et de quatre-vingt blessés, la plupart des escadrons de service qui ont fait les charges, et des trois escadrons du vingtième de dragons, qui ont aussi chargé un carré avec la plus grande intrépidité. Notre perte, légère quant au nombre, a été sensible à l'empereur, par la blessure grave qu'a reçue le général Letort, son aide-de-camp, en chargeant à la tête des escadrons de service. Cet officier est de la plus grande distinction; il a été frappé d'une balle au bas-ventre, et le chirurgien fait craindre que sa blessure ne soit mortelle.

Nous avons trouvé à Charleroi quelques magasins. La joie des Belges ne saurait se décrire. Il y a des villages qui, à la vue de leurs libérateurs, ont formé des danses, et partout c'est un élan qui part du coeur.

Dans le rapport de l'état-major-général on insérera les noms des officiers et soldats qui se sont distingués.

L'empereur a donné le commandement de la gauche au prince de la Moskowa, qui a eu le soir son quartier-général aux Quatre-Chemins, sur la route de Bruxelles.

Le duc de Trévise, à qui l'empereur avait donné le commandement de la jeune garde, est resté à Beaumont, malade d'une sciatique qui l'a forcé de se mettre au lit.

Le quatrième corps, commandé par le général Gérard, arrive ce soir au Châtelet. Le général Gérard a rendu compte que le lieutenant-général Bourmont, le colonel Clouet et le chef d'escadron Villoutreys ont passé à l'ennemi.

Un lieutenant du onzième de chasseurs a également passé à l'ennemi.

Le major-général a ordonné que ces déserteurs fussent sur-le-champ jugés conformément aux lois.

Rien ne peut peindre le bon esprit et l'ardeur de l'armée. Elle regarde comme un événement heureux la désertion de ce petit nombre de traîtres qui se démasquent ainsi.

Philippeville, le 19 juin 1815.
(Extrait du Moniteur.)

Le 17, à dix heures du soir, l'armée anglaise occupa Mont-Saint-Jean par son centre, se trouva en position en avant de la forêt de Soignes: il aurait fallu pouvoir disposer de trois heures pour l'attaquer, on fut donc obligé de remettre au lendemain.

Le quartier-général de l'empereur fut établi à la ferme de Caillou près Planchenois. La pluie tombait par torrens.

Bataille de Mont-Saint-Jean.

A neuf heures du matin, la pluie ayant un peu diminué, le premier corps se mit en mouvement, et se plaça, la gauche à la route de Bruxelles, et vis-à-vis le village de Mont-Saint-Jean, qui paraissait le centre de la position de l'ennemi. Le second corps appuya sa droite à la route de Bruxelles, et sa gauche à un petit bois à portée de canon de l'armée anglaise. Les cuirassiers se portèrent en réserve derrière, et la garde en réserve sur les hauteurs. Le sixième corps avec la cavalerie du général d'Aumont, sous les ordres du comte Lobau, fut destiné à se porter en arrière de notre droite, pour s'opposer à un corps prussien qui paraissait avoir échappé au maréchal Grouchy, et être dans l'intention de tomber sur notre flanc droit, intention qui nous avait été connue par nos rapports, et par une lettre d'un général prussien, que portait une ordonnance prise par nos coureurs.

Les troupes étaient pleines d'ardeur. On estimait les forces de l'armée anglaise à quatre-vingt mille hommes; on supposait qu'un corps prussien qui pouvait être en mesure vers le soir, pouvait être de quinze mille hommes. Les forces ennemies étaient donc de plus de quatre-vingt-dix mille hommes, les nôtres moins nombreuses.

A midi, tous les préparatifs étant terminés, le prince Jérôme, commandant une division du deuxième corps, et destiné à en former l'extrême gauche, se porta sur le bois dont l'ennemi occupait une partie. La canonnade s'engagea; l'ennemi soutint par trente pièces de canon les troupes qu'il avait envoyées pour garder le bois. Nous fîmes aussi de notre côté des dispositions d'artillerie. A une heure, le prince Jérôme fut maître de tout le bois, et toute l'armée anglaise se replia derrière un rideau. Le comte d'Erlon attaqua alors le village de Mont-Saint-Jean, et fit appuyer son attaque par quatre-vingts pièces de canon. Il s'engagea là une épouvantable canonnade, qui dut beaucoup faire souffrir l'armée anglaise. Tous les coups portaient sur le plateau. Une brigade de la première division du comte d'Erlon s'empara du village de Mont-Saint-Jean; une seconde brigade fut chargée par un corps de cavalerie anglaise, qui lui fit éprouver beaucoup de perte. Au même moment, une division de cavalerie anglaise chargea la batterie du comte d'Erlon par sa droite, et désorganisa plusieurs pièces; mais les cuirassiers du général Milbaud chargèrent cette division, dont trois régimens furent rompus et écharpés.

Il était trois heures après midi. L'empereur fit avancer la garde pour la placer dans la plaine, sur le terrain qu'avait occupé le premiers corps au commencement de l'action, ce corps se trouvant déjà en avant. La division prussienne, dont on avait prévu le mouvement, s'engagea alors avec les tirailleurs du comte Lobau, en prolongeant son feu sur tout notre flanc droit. 11 était convenable, avant de rien entreprendre ailleurs, d'attendre l'issue qu'aurait cette attaque. A cet effet, tous les moyens de la réserve étaient prêts à se porter au secours du comte Lobau, et à écraser le corps prussien lorsqu'il se serait avancé.

Cela fait, l'empereur avait le projet de mener une attaque par le village de Mont-Saint-Jean, dont on espérait un succès décisif; mais par un mouvement d'impatience, si fréquent dans nos annales militaires, et qui nous a été souvent si funeste, la cavalerie de réserve s'étant aperçue d'un mouvement rétrograde que faisaient les Anglais pour se mettre à l'abri de nos batteries, dont ils avaient déjà tant souffert, couronna les hauteurs de Mont-Saint-Jean et chargea l'infanterie. Ce mouvement, qui, fait à temps, et soutenu par les réserves, devait décider de la journée, fait isolément et avant que les affaires de la droite ne fussent terminées, devint funeste.

N'y ayant aucun moyen de le contremander, l'ennemi montrant beaucoup de masses d'infanterie et de cavalerie, et les deux divisions de cuirassiers étant engagées, toute notre cavalerie courut au même moment pour soutenir ses camarades.

Là, pendant trois heures, se firent de nombreuses charges gui nous valurent l'enfoncement de plusieurs carrés et six drapeaux de l'infanterie anglaise, avantage hors de proportion avec les pertes qu'éprouvait notre cavalerie par la mitraille et les fusillades.

Il était impossible de disposer de nos réserves d'infanterie jusqu'à ce qu'on eût repoussé l'attaque de flanc du corps prussien. Cette attaque se prolongeait toujours et perpendiculairement sur notre flanc droit; l'empereur y envoya le général Duhesme avec la jeune garde et plusieurs batteries de réserve. L'ennemi fut contenu, fut repoussé, et recula: il avait épuisé ses forces, et l'on n'en avait plus rien à craindre. C'est ce moment qui était celui indiqué pour une attaque sur le centre de l'ennemi. Comme les cuirassiers souffraient par la mitraille, on envoya quatre bataillons de la moyenne garde pour protéger les cuirassiers, soutenir la position, et, si cela était possible, dégager et faire reculer dans la plaine une partie de notre cavalerie.

On envoya deux autres bataillons pour se tenir en potence sur l'extrême gauche de la division qui avait manoeuvré sur nos flancs, afin de n'avoir de ce côté aucune inquiétude; le reste fut disposé en réserve, partie pour occuper la potence en arrière de Mont-Saint-Jean, partie sur le plateau en arrière du champ de bataille qui formait notre position en retraite.

Dans cet état de choses, la bataille était gagnée; nous occupions toutes les positions que l'ennemi occupait au commencement de l'action; notre cavalerie ayant été trop tôt et mal employée, nous ne pouvions plus espérer de succès décisifs. Mais le maréchal Grouchy ayant appris le mouvement du corps prussien, marchait sur le derrière de ce corps, ce qui nous assurait un succès éclatant pour la journée du lendemain. Après huit heures de feu et de charges d'infanterie et de cavalerie, toute l'armée voyait avec satisfaction la bataille gagnée et le champ de bataille en notre pouvoir.

Sur les huit heures et demie, les quatre bataillons de la moyenne garde qui avaient été envoyés sur le plateau au-delà de Mont-Saint-Jean pour soutenir les cuirassiers, étant gênés par la mitraille, marchèrent à la baïonnette pour enlever les batteries. Le jour finissait; une charge faite sur leur flanc par plusieurs escadrons anglais les mit en désordre; les fuyards repassèrent le ravin; les régimens voisins qui virent quelques troupes appartenant à la garde à la débandade, crurent que c'était de la vieille garde et s'ébranlèrent: les cris tout est perdu, la garde est repoussée, se firent entendre; les soldats prétendent même que sur plusieurs points, des malveillans apostés ont crié sauve qui peut! Quoi qu'il en soit, une terreur panique se répandit tout à la fois sur tout le champ de bataille; on se précipita dans le plus grand désordre sur la ligne de communication; les soldats, les canonniers, les caissons se pressaient pour y arriver; la vieille garde, qui était en réserve, en fut assaillie, et fut elle-même entraînée.