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Mémoires du comte Reynier … Campagne d'Égypte, deuxième partie

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Bardisy leur fit beaucoup d'amitiés, témoigna sa surprise de ce que les Français osaient se défendre contre tant d'ennemis; il ajouta qu'il avait vu le général anglais, et qu'il lui avait dit: «Pourquoi fais-tu la guerre aux Français, qui sont chrétiens comme toi? – Parce que mon gouvernement me l'ordonne. – Et pourquoi ton gouvernement te l'ordonne-t-il? – Parce qu'il ne veut pas que les Français occupent l'Égypte. – Et si tu prends les Français, qu'est-ce que tu leur feras? – Si les Français m'avaient pris, ils m'auraient bien traité; de même si je les prends, je les traiterai en amis; je leur laisserai leurs armes et leurs canons et je les enverrai en France.»

Il était impossible de faire des ouvertures plus adroites. Majou n'eut pas l'air de les comprendre, et assura Bardisy que les Français avaient la plus grande envie de se battre; il le questionna sur la force des Anglais; le bey répondit qu'il ne la connaissait pas, mais qu'il avait compté deux cent quarante tambours, et demanda combien les Européens mettaient d'hommes par tambour.

La correspondance entre Bardisy et Pétrucy continua, mais par lettres seulement, et sur des choses indifférentes.

Le 3 messidor, le général Belliard conclut un armistice de trois jours avec l'ennemi; le soir même il assembla un conseil de guerre composé des généraux, de tous les chefs des corps, des citoyens Estève, Champy, directeur des poudres, et Comté, chef de brigade des aérostiers. Il dit qu'il avait conclu avec l'ennemi un armistice, pour pouvoir rassembler avec plus de sécurité les généraux et les chefs de chaque corps qui devaient composer le conseil.

Il fit un tableau rapide de notre position; il lut une lettre insignifiante du général en chef, qui lui avait été apportée douze jours auparavant, par le chef de brigade Latour-Maubourg, arrivé d'Alexandrie par le désert, sous l'escorte d'un détachement de dromadaires; il avait sur-le-champ réexpédié les dromadaires avec un de ses aides-de-camp, en priant instamment le général en chef de lui envoyer une instruction détaillée sur la conduite qu'il avait à tenir; il ajouta que dix jours suffisaient pour le retour des dromadaires, et que si à cette époque ils n'étaient pas revenus, il traiterait avec l'ennemi, parce qu'il regardait comme impossible de défendre le Caire avec le peu de troupes qu'il avait à ses ordres.

Le général Belliard invita les membres du conseil à discuter avec modération; mais il ne posa aucune question, en sorte que la discussion s'engagea vaguement et sans suite.

Le chef de brigade Tarreyre essaya de poser des questions, qui furent trouvées insignifiantes par le général Lagrange; le chef de brigade Guanget lut un discours assez bien écrit, mais qui parut un peu trop se ressentir de l'opinion exagérée de son auteur, et qui n'eut point de suite. Le conseil, dans ce moment, ressemblait assez à ces assemblées de la révolution, prêtes à décider une question importante, et où la grande majorité était tenue en échec par une faible minorité. Le général Lagrange trouvait que les négociations avaient été prématurées; le général Belliard eut beau lui observer qu'une trève n'engageait à rien; qu'en se prévenant réciproquement deux ou trois heures d'avance, l'ennemi pouvait, comme nous, la rompre sans inconvénient; qu'il avait cru ne pouvoir sans danger ôter de leurs postes respectifs les généraux et les chefs des corps, et que c'était la seule raison qui l'avait engagé à demander un armistice. Le général Lagrange persistait toujours, et semblait vouloir éloigner le véritable point de la discussion.

Enfin, le commandant du génie lui demanda s'il croyait, avec les troupes qui étaient au Caire, pouvoir défendre l'enceinte immense que nous occupions; s'il croyait qu'en combinant une attaque de vive force sur tous les points, il serait impossible à l'ennemi d'en forcer quelques uns et de pénétrer dans le Caire, et alors quel serait le point de jonction et de retraite de nos troupes dispersées sur une aussi grande étendue. Le général Lagrange refusa de s'expliquer; il semblait que les généraux, surtout ceux qui témoignaient la plus grande confiance, auraient dû prendre la parole, et répondre aux questions importantes que l'on venait de faire; cependant tout le monde se tut.

Le général Belliard interpella alors le commandant du génie de donner son avis.

L'ingénieur le donna en ces termes:

«Je vais prendre notre ligne de défense à partir de la batterie de l'île de la Quarantaine, vis-à-vis Embabëh, suivant Boulac-Babelmas, le front Dupuy, la citadelle, le front de l'Aquéduc, l'île Roda, Gisëh, et le front depuis Gisëh à l'île de la Quarantaine.

«Cette ligne, mesurée par les ingénieurs géographes, a douze mille six cents toises de développement.

«La batterie de l'île de la Quarantaine, composée de quatre pièces de gros calibre, est destinée à défendre le passage du fleuve aux nombreuses chaloupes canonnières de l'ennemi.

«Cette batterie est faite avec beaucoup de soin, mais sa position, qu'il a été impossible de changer, est extraordinairement vicieuse; dominée par le village d'Embabëh, elle sera parfaitement contre-battue et détruite en peu de temps.

«La ligne de Boulac, malgré toute l'activité que l'on a pu mettre dans le travail, est encore imparfaite sur plusieurs de ses points. Les fossés de la gauche, creusés dans le sable, se sont comblés, et il ne reste plus qu'une simple palissade qui lie chaque batterie entre elles, et qui ne peut point être regardée comme un obstacle.

«On a pratiqué, il est vrai, au moyen des maisons qui bordent la place du côté du rivage, une seconde ligne, mais elle est composée en grande partie de faibles murs qui n'ont pas plus de six pieds de hauteur; elle ne peut être regardée que comme devant protéger la retraite de la droite.

«Le front de Rubelnass est généralement regardé comme la partie la plus forte de l'enceinte; cependant, si j'avais à attaquer le Caire, ce serait sans contredit par là que je le ferais; les maisons des faubourgs qui étaient en démolition ne sont encore, en plusieurs endroits, qu'à huit à dix toises du pied du rempart, les Turcs les occupent; et nous savons tous que supérieurs dans la guerre de maisons, il nous est presque impossible de les en chasser. Qui les empêche donc, en moins de cinq ou six jours, d'établir à couvert plusieurs puits, et de pousser des rameaux de mine sous nos remparts? Une fois qu'ils seront dans le Caire, il ne faut songer qu'à la retraite.

«Le front Dupuy n'est défendu que par cinq petits fortins portant chacun une pièce de canon et vingt-cinq hommes de garnison, placés sur les mamelons les plus élevés; ils ne défendent que très imparfaitement le pied des monticules; on a construit pour y suppléer des retranchemens, mais le peu de troupes dont nous disposons ne nous permettant pas de mettre sur ce point une colonne mobile de plus de cinq ou six cents hommes, je demande au chef de brigade Tarreyre, chargé de cette défense, si, avec un peu de monde disséminé sur un aussi grand front, il lui sera possible de résister à une attaque de vive force: je ne parle pas du mur contigu aux maisons; il est plus faible et plus mal construit qu'un mur de jardin.

«La citadelle ne peut être considérée que comme un point de retraite. Cette masse informe, que nous n'avons jamais envisagée que comme un lieu de dépôt, fait pour épouvanter une populace ignorante, peut-elle résister à une attaque tentée avec un peu d'art? Les maisons de la ville touchent le pied des remparts, rien de plus facile que d'y attacher le mineur en beaucoup d'endroits; le mont Kattam la domine à une petite portée de fusil, et les chemins pour conduire du canon sur le sommet de la hauteur sont très bons. Qu'est-ce d'ailleurs que les remparts de la citadelle? des tours unies entre elles par des murs de trente pieds d'élévation; quelques unes de ces tours sont fort bonnes, et contiennent des magasins à l'abri de la bombe; mais les murailles des courtines, qui paraissent avoir sept à huit pieds d'épaisseur, sont construites de manière que l'on a ménagé dans leur épaisseur une galerie de quatre pieds de largeur et huit à dix pieds de hauteur, en sorte que le boulet n'aurait à abattre qu'un faible mur de deux pieds d'épaisseur pour faire autant de brèches qu'il y a de courtines.

«Je demande, d'après l'exposé que je viens de faire, si l'on peut raisonnablement regarder la citadelle comme notre point de retraite? Bornons-nous à la considérer, ce qu'elle a été jusqu'ici, comme un lieu d'entrepôt et un épouvantail pour la ville du Caire. Je me dispenserai d'entrer dans de plus grands détails; tout le monde doit sentir que l'ennemi, plaçant quelques mortiers sur le mont Kattam, pourrait en peu de temps détruire nos puits et nos moulins, et nous forcer de nous rendre à discrétion.

«Le front de l'Aquéduc, qui occupe une immense étendue, ne peut être regardé comme défendu; il a été fait pour empêcher les Arabes de pénétrer sur les derrières du Caire, dans la plaine située entre cette ville et Boulac, où souvent ils viennent égorger les Français. Le vieux Caire est entièrement ouvert, et l'île de Roda, qui en est séparée par une faible branche du Nil, guéable en plusieurs endroits, n'a pour toute défense que le Mékyas. Cette île se prolonge jusqu'à la batterie de la Quarantaine, et communique dans beaucoup d'endroits, à raison des basses eaux, avec la plaine d'Ibrahim-Bey et de Boulac. Cette île et le front de l'Aquéduc demanderaient seuls, pour être défendus avec succès, toutes les troupes qui sont au Caire et à Gisëh. Le visir peut y porter des troupes et du canon par le point de Thora; et les Anglais, maîtres du haut du Nil, peuvent, au moyen des barques, y jeter toute espèce de moyens d'attaque.

«La place de Gisëh serait regardée en Europe comme un faible camp retranché. Les batteries que l'ennemi a déjà commencées suffiront pour couper en peu de temps le pont de bateaux et pour abattre la muraille de jardin qui unit les lunettes en terre que l'on a faites dernièrement. Ainsi, dès les premiers jours d'attaque, le corps de place sera ouvert partout où l'ennemi voudra diriger son canon. Je demande le cas qu'on ferait en Europe d'une pareille place; il faudrait en outre garder soigneusement toute la partie située sur le Nil, qui est accessible de tous côtés.

 

«Gisëh ne peut point servir de retraite pour l'armée, parce qu'il n'y a que très peu de blé et surtout pas assez de moulins pour faire de la farine. Ces deux inconvéniens auraient, il est vrai, pu être prévus; mais on n'aurait jamais eu le temps de former les magasins nécessaires: il faudrait tout mettre en plein air ou dans de mauvaises maisons; l'armée et tous ceux qui sont à sa suite encombreraient l'enceinte de Gisëh, et l'on peut juger des ravages que produirait un bombardement dans une place aussi étroite, et où rien n'est à l'abri de la bombe.

«Cependant, comme point militaire, je préférerais Gisëh à la citadelle pour la retraite de l'armée; d'abord parce que nous pourrions y retirer toute notre cavalerie, retarder les progrès de l'ennemi par des sorties nombreuses et fréquentes, que nous ne serions plongés de nulle part, et qu'en formant des retranchemens en terre derrière les murailles détruites, la bravoure de nos soldats en rendrait la prise difficile à l'ennemi; mais que peut le courage le plus grand quand on manque de vivres? D'ailleurs, une fois renfermés dans Gisëh, l'ennemi, satisfait de posséder le Caire, nous cernerait; et quinze jours plus tôt ou quinze jours plus tard il faudrait bien se rendre.

«Je ne parle point de notre position, considérée sous ses rapports avec l'Europe; on ne peut établir que des conjectures. Recevra-t-on des secours, ou n'en recevra-t-on pas? La marche excessivement lente des Anglais prouve assez que nous n'avons pas de grands moyens dans la Méditerranée.

«J'observerai que toutes les fortifications qui sont à l'entour du Caire, n'étaient faites que pour empêcher un parti ennemi de se jeter dans la place.

«L'exemple de l'année dernière nous a trop appris combien les Turcs sont redoutables dans les maisons: pour s'opposer à ce parti, il suffisait de murailles, de retranchemens et de fortins, situés de distance en distance pour les flanquer; il ne faut donc point s'étonner de l'insuffisance de ces fortifications contre deux armées combinées, et qui, par le secours d'une flottille nombreuse, ont tous les moyens d'attaque que l'on pourrait rassembler en Europe contre une place forte.»

Le général Belliard voyant que personne ne répondait, posa ainsi la question, et la mit aux voix, en invitant chaque membre de motiver son opinion.

Se défendra-t-on dans la ville du Caire, ou traitera-t-on avec l'ennemi?

La grande majorité fut pour traiter; quelques membres donnèrent un avis mitigé; quatre seulement furent d'avis qu'on devait se battre. Il fut donc décidé que l'on conclurait avec l'ennemi un traité honorable: l'on s'en rapporta là-dessus au général Belliard.

Le général Lagrange, le général Duranteau, le général Valentin, et le chef de brigade Dupas, qui furent d'avis qu'on devait se battre, auraient dû beaucoup plus parler qu'ils ne l'ont fait.

Quelques phrases emportées, et quelques lieux communs à part, ils ne dirent rien de rassurant et d'encourageant pour les membres du conseil. Le général Lagrange s'obstinait à appeler négociations l'armistice qui avait été conclu, et disait qu'elles avaient été préméditées. Pressé de donner un avis plus clair et plus positif, il s'éleva entre lui et le général Alméras une légère discussion. Le général Lagrange dit qu'il convenait que notre position n'était pas bonne; qu'il était entièrement convaincu que nous ne recevrions pas de secours. «Mais, ajouta-t-il, je crois que nous pouvons encore tenir une quinzaine de jours; et combien de reproches n'aurions-nous pas à nous faire, si dans cet intervalle il nous arrivait du renfort!» On lui dit qu'on ferait en sorte de traîner les négociations pendant un pareil nombre de jours, et que si au bout de ce temps on recevait des nouvelles du général en chef ou d'autre part, on serait toujours maître de rompre avec l'ennemi. Il ne répondit autre chose, sinon que les négociations avaient été prématurées, et que nous aurions dû nous battre pour notre honneur.

Le commandant d'artillerie exposa, dans son avis motivé, l'état de nos munitions de guerre: il dit que les pièces de position étaient très faiblement approvisionnées, et que nos pièces de campagne n'avaient pas le nombre de coups suffisans pour résister à des tentatives un peu sérieuses de l'ennemi.

Le citoyen Champy, administrateur de la poudrerie, déclara qu'il avait fourni jusqu'à mille livres de poudre par jour; mais que les matières premières lui manquant, il était obligé de cesser la fabrication.

Le commissaire des guerres Duprat, secrétaire du conseil, déclara qu'il avait pour deux mois de vivres à la citadelle.

Le citoyen Estève, directeur des finances, dit qu'il ne lui restait plus que 30,000 francs en caisse, et que la troupe n'était pas soldée depuis le mois de pluviôse.

Le lendemain, 4 messidor, le général Belliard nomma pour traiter avec l'ennemi les généraux de brigade Donzelot et Morand, et le chef de brigade Tarreyre. Le 9 messidor, ils conclurent la convention dont copie est ci-jointe.

CONVENTION POUR L'ÉVACUATION DE L'ÉGYPTE PAR LE CORPS DE TROUPES DE L'ARMÉE FRANÇAISE ET AUXILIAIRES AUX ORDRES DU GÉNÉRAL DE DIVISION BELLIARD

Conclue entre les citoyens Donzelot général de brigade, Morand général de brigade; Tarreyre, chef de brigade, de la part du général de division Belliard;

Et M. le général de brigade Hope, de la part de son excellence le général en chef de l'armée anglaise; Osman-Bey, de la part de son altesse le suprême visir; Isaac-Bey, de la part de son altesse le capitan-pacha.

Les commissaires ci-dessus s'étant réunis dans un lieu de conférence entre les deux armées, après l'échange de leurs pouvoirs respectifs, sont convenus des articles suivans:

ARTICLE 1er

Les corps de l'armée française de terre et de mer, les troupes auxiliaires aux ordres du général de division Belliard, évacueront la ville du Caire, la citadelle, les forts Boulac et Gisëh, et toute la partie de l'Égypte qu'ils occupent dans ce moment.

ARTICLE 2

Les corps de l'armée française et les troupes auxiliaires se retireront par terre à Rosette, en suivant la rive gauche du Nil, avec armes, bagages, artillerie de campagne, caissons et munitions, pour y être embarqués, et de là transportés dans les ports français de la Méditerranée, avec leurs armes, artillerie, caissons, munitions, bagages, effets, aux frais des puissances alliées. L'embarquement desdits corps de troupes françaises et auxiliaires devra se faire aussitôt qu'il sera possible de l'effectuer; mais au plus tard dans cinquante jours, à dater de la ratification de la présente convention. Il est d'ailleurs convenu que lesdits corps seront transportés dans lesdits ports du continent français par la voie la plus prompte et la plus directe.

ARTICLE 3

À dater de la signature et ratification de la présente convention, les hostilités cesseront de part et d'autre; il sera remis aux armées alliées le fort Sulkousky et la porte des Pyramides de la ville de Gisëh. La ligne d'avant-postes des armées respectives sera déterminée par les commissaires nommés à cet effet, et il sera donné les ordres les plus précis pour qu'elle ne soit dépassée, afin d'éviter les rixes particulières, et s'il en survenait, elles seraient terminées à l'amiable.

ARTICLE 4

Douze jours après la ratification de la présente convention, la ville du Caire, la citadelle, les forts et la ville de Boulac seront évacués par les troupes françaises et auxiliaires, qui se retireront à Ibrahim-Bey, île de Raouddah et dépendances, le fort Leturq et Gisëh, d'où elles partiront le plus tôt possible, et au plus tard dans cinq jours, pour se rendre au point de l'embarquement. Les généraux des armées anglaise et ottomane s'engagent en conséquence à faire fournir à leurs frais, aux troupes françaises et auxiliaires, les moyens de transport par eau, pour porter les bagages, vivres et effets au point de l'embarquement. Tous ces moyens de transport par eau seront mis, le plus tôt possible, à la disposition des troupes françaises.

ARTICLE 5

Les journées de marche et les campemens du corps de l'armée française et des auxiliaires seront réglés par les généraux des armées respectives, ou par des officiers d'état-major nommés de part et d'autre; mais il est clairement entendu que suivant cet article, les journées de marche et de campement seront fixées par les généraux des armées combinées. En conséquence, lesdits corps de troupes françaises et auxiliaires seront accompagnés dans leur marche par des commissaires anglais et ottomans, chargés de faire fournir les vivres nécessaires pendant la route et les séjours.

ARTICLE 6

Les bagages, munitions et autres objets voyageant par eau, seront escortés par des détachemens français et par des chaloupes armées des puissances alliées.

ARTICLE 7

Il sera fourni aux troupes françaises et auxiliaires et aux employés à leur suite, les subsistances militaires, à compter de leur départ de Gisëh jusqu'au moment de l'embarquement, conformément aux réglemens de l'armée française, et du jour de l'embarquement jusqu'au débarquement en France, conformément aux réglemens maritimes de l'Angleterre.

ARTICLE 8

Il sera fourni par les commandans des troupes britanniques et ottomanes, tant de terre que de mer, les bâtimens nécessaires, bons et commodes, pour transporter dans les ports de France de la Méditerranée, les troupes françaises et auxiliaires, et tous les Français et autres employés à la suite de l'armée. Tout à cet égard, ainsi que pour les vivres, sera réglé par des commissaires nommés à cet effet par le général de division Belliard, et par les commandans en chef des armées alliées, tant de terre que de mer. Aussitôt la ratification de la présente, ces commissaires se rendront à Rosette ou à Aboukir, pour y faire préparer tout ce qui est nécessaire à l'embarquement.

ARTICLE 9

Les puissances alliées fourniront quatre bâtimens et plus, s'il est possible, préparés pour transporter des chevaux, les futailles pour l'eau et les fourrages nécessaires jusqu'à leur débarquement.

ARTICLE 10

Il sera fourni aux corps de l'armée française et auxiliaires, par les puissances alliées, une escorte de bâtimens de guerre suffisante pour garantir leur sûreté et assurer leur retour en France. Lorsque les troupes françaises seront embarquées, les puissances alliées promettent et s'engagent à ce que, jusqu'à leur arrivée sur le continent de la République française, elles ne seront nullement inquiétées; comme, de son côté, le général Belliard et les corps de troupes sous ses ordres promettent de ne commettre aucune hostilité pendant ledit temps, ni contre la flotte, ni contre les pays de Sa Majesté britannique et de la Sublime Porte, ni de leurs alliés. Les bâtimens qui transporteront et escorteront lesdits corps de troupes ou autres Français, ne s'arrêteront à aucune autre côte que celle de la France, à moins d'une nécessité absolue: les commandans des troupes françaises, anglaises et ottomanes prennent réciproquement les mêmes engagemens que ci-dessus pour le temps que les troupes françaises resteront sur le territoire de l'Égypte, depuis la ratification de la présente convention jusqu'au moment de leur embarquement. Le général de division Belliard, commandant les troupes françaises et auxiliaires de la part de son gouvernement, promet que les bâtimens d'escorte et de transport ne seront pas retenus dans les ports de France, après l'entier débarquement des troupes, et que les capitaines pourront s'y procurer à leurs frais, de gré à gré, les vivres dont ils auront besoin pour leur retour. Le général Belliard s'engage en outre, de la part de son gouvernement, que lesdits bâtimens ne seront point inquiétés jusqu'à leur retour dans les ports des puissances alliées, pourvu qu'ils n'entreprennent et ne servent à aucune opération militaire.

ARTICLE 11

Toutes les administrations, les membres de la Commission des Sciences et Arts, et enfin tous les individus attachés au corps de l'armée française, jouiront des mêmes avantages que les militaires. Tous les membres desdites administrations et de la Commission des Sciences et Arts emporteront en outre avec eux, non seulement tous les papiers qui regardent leur gestion, mais encore leurs papiers particuliers, ainsi que les autres objets qui les concernent.

 
ARTICLE 12

Tout habitant de l'Égypte, de quelque nation qu'il soit, qui voudra suivre l'armée française, sera libre, sans qu'après son départ sa famille soit inquiétée ni ses biens séquestrés.

ARTICLE 13

Aucun habitant de l'Égypte, de quelque religion qu'il soit, ne pourra être inquiété, ni dans sa personne ni dans ses biens, pour les liaisons qu'il aurait eues avec les Français pendant leur occupation de l'Égypte, pourvu qu'il se conforme aux lois du pays.

ARTICLE 14

Les malades qui ne pourront pas supporter le transport seront admis dans un hôpital, où ils seront soignés par des officiers de santé et employés français jusqu'à leur parfaite guérison; alors ils seront envoyés en France les uns et les autres, aux mêmes conditions que les corps de troupes. Les commandans des troupes des armées alliées s'engagent à faire fournir, sur des demandes en règle, tous les objets qui seront nécessaires à cet hôpital, sauf les avances à être remboursées par le gouvernement français.

ARTICLE 15

Au moment de la remise des villes et forts désignés dans la présente convention, il sera nommé des commissaires pour recevoir l'artillerie, les munitions, magasins, papiers, archives, plans et autres effets publics que les Français laisseraient aux puissances alliées.

ARTICLE 16

Il sera fourni, autant que possible, par le commandant des troupes de mer des puissances alliées, un aviso pour conduire à Toulon un officier et un commissaire des guerres, chargés de porter au gouvernement français la présente convention.

ARTICLE 17

Toutes les difficultés ou contestations qui pourraient s'élever sur l'exécution de la présente convention, seront terminées à l'amiable par des commissaires nommés de part et d'autre.

ARTICLE 18

Aussitôt la ratification de la présente convention, tous les prisonniers anglais ou ottomans qui se trouvent au Caire seront mis en liberté, de même que les commandans et chefs des puissances alliées mettront en liberté les prisonniers français qui se trouvent dans leurs camps respectifs.

ARTICLE 19

Un officier supérieur de l'armée anglaise, un officier supérieur de son altesse le suprême visir et de son altesse le capitan-pacha, seront échangés contre des otages de pareil nombre et grade de troupes françaises, pour servir de garantie à l'exécution du présent traité. Aussitôt que le débarquement des troupes françaises sera effectué dans les ports de France, les otages seront réciproquement rendus.

ARTICLE 20

La présente convention sera, par un officier français, portée et communiquée au général Menou, à Alexandrie, et il sera libre de l'accepter pour les troupes françaises et auxiliaires de terre et de mer qui se trouvent avec lui dans cette place, pourvu que son acceptation soit notifiée au général commandant les troupes anglaises devant Alexandrie, dans dix jours, à compter de celui où la communication lui en aura été faite.

ARTICLE 21

La présente convention sera ratifiée par les commandans en chef des troupes et armées respectives, vingt-quatre heures après la signature.

Fait quadruple, au camp des Conférences, entre les deux armées, le 8 messidor an IX, à midi, ou le 27 juin 1801, ou le 16 du mois saffar 1216.

Signé, Donzelot, général de brigade;
Morand, général de brigade;
Tareyre, chef de brigade;
John Hope, brigadier général;
Osman-Bey, Isaac-Bey.

Approuvé.

J. Hely Hutchinson, général en chef.

Approuvé de la part de lord Keith.

Jacques Stivenson, capitaine de la marine royale.

Nous avons approuvé les articles de la présente convention pour l'évacuation de l'Égypte, et la remise à la Porte ottomane.

Hhadjy-Yousoueff, visir.

Nous avons approuvé les articles de la présente convention pour l'évacuation de l'Égypte, et la remise à la Porte ottomane.

Husseyn-Pacha, Capoutauderya.

Approuvé et ratifié la présente convention le 9 messidor an IX de la République française.

Le général de division, Belliard.
Au Caire, le 11 messidor an IX (30 juin 1801).
Le général de division Belliard, au premier consul Bonaparte

Mon Général,

Après le départ du général en chef Menou et de l'armée pour Aboukir, le 21 ventôse, je demeurai au centre de l'Égypte avec un corps de troupes de deux mille cinq cent cinquante-trois hommes, pour défendre l'Égypte, la ville du Caire et son arrondissement, contre l'armée du visir, qui s'avançait par les déserts de la Syrie, et contre les troupes anglaises apportées de l'Inde à Cosséir et Suez. (On avait eu avis que plusieurs vaisseaux étaient dans la mer Rouge, à la hauteur de Gedda.)

Une partie des troupes sous mes ordres formait la garnison de la citadelle, des tours de l'enceinte du Caire, des places de Gisëh, le vieux Caire et Boulac. Il me restait une réserve mobile de quatre cent quatre-vingt-cinq hommes, avec laquelle je devais faire le service de la place, réunir des grains et des subsistances, et faire l'escorte des convois militaires de vivres et de munitions pour l'armée, arrêter l'armée du visir, et manœuvrer devant elle lorsqu'elle se présenterait, pour donner le temps au général en chef de se porter sur lui avec toutes ses forces, après avoir battu l'armée anglaise.

Le 24, j'écrivis au général Donzelot, qu'on avait laissé à Siout, d'évacuer la Haute-Égypte, et de se rendre à grandes journées au Caire avec ses troupes. J'invitai pareillement Mourâd-Bey, qui se montrait toujours fidèle à ses traités, de descendre, de venir occuper Siout et Miniet, de maintenir la tranquillité dans le pays, et de nous envoyer des grains. J'écrivis aussi aux commandans de Miniet et de Benisouef de réunir des barques et d'expédier sur le Caire tous les grains qu'ils pourraient ramasser; nos magasins étaient presque vides.

Le 4 germinal, je reçus la nouvelle de la malheureuse journée du 30 ventôse. Alors l'espoir de forcer l'armée anglaise à se rembarquer fut perdu; il restait à la contenir sur les sables d'Aboukir, à arrêter l'invasion du visir, et empêcher la jonction des deux armées. Le général en chef, avec son armée, se retira à Alexandrie, fit travailler à former un camp retranché, et à mettre la place en état de défense.

D'après les ordres du général en chef, je fis sortir des places de Salêhiëh et Belbéis tous les hommes qui étaient inutiles pour leur défense; et comme il y avait dans ces places des magasins considérables, j'en fis évacuer une partie sur le Caire.

Le 14, conformément aux ordres que j'avais reçus du général en chef, j'écrivis aux commandans de Belbéis et de Salêhiëh, que lorsqu'ils seraient assurés que des forces considérables étaient en marche de la Syrie pour l'Égypte, d'évacuer les places, d'apporter le plus de munitions et de vivres qu'ils pourraient, de faire sauter les forts, et de les mettre dans l'impossibilité de servir aux ennemis. Des rapports annonçaient déjà la marche de l'armée turque.

Le 16 germinal, je reçus un renfort de cinq cent soixante-dix hommes, que le général Donzelot amena de la Haute-Égypte. La peste faisait beaucoup de ravages dans la garnison du Caire et parmi ses habitans.

Le 21, j'appris la prise de Rosette, l'arrivée de l'armée ottomane à Salêhiëh. La garnison de cette place, celles de Belbéis et Birket-el-Adji se retirèrent sur le Caire, où elles arrivèrent le 24. Je donnai ordre à la garnison de Suez de revenir au Caire par la vallée de l'Égarement.

J'appris que Damiette avait été évacuée, et qu'il était resté deux cents hommes pour occuper Lesbëh et les forts de la côte.

La Charkié envahie, l'une des branches du Nil ouverte, l'autre sur le point de l'être, la fidélité des mameloucks, dont le caractère de Mourâd-Bey était la garantie, ébranlée par sa mort et nos pertes, je pris le seul parti qui me restât dans cet état extrême, celui de fortifier l'enceinte et les environs du Caire, de prendre une attitude imposante qui pût faire craindre à l'ennemi de s'avancer avant d'avoir réuni de grands moyens.