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Œuvres Complètes de Frédéric Bastiat, tome 2

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En effet, la liberté est un bien très-précieux et qu'un peuple ne saurait payer trop cher. Mais la question est précisément de savoir si un peuple surtaxé peut être libre, s'il n'y a pas incompatibilité radicale entre la liberté et l'exagération de l'impôt.

Or, j'affirme que cette incompatibilité est radicale.

Remarquons, en effet, que la fonction publique n'agit pas sur les choses, mais sur les hommes; et elle agit sur eux avec autorité. Or l'action que certains hommes exercent sur d'autres hommes, avec l'appui de la loi et de la force publique, ne saurait jamais être neutre. Elle est essentiellement nuisible, si elle n'est pas essentiellement utile.

Le service de fonctionnaire public n'est pas de ceux dont on débat le prix, qu'on est maître d'accepter ou de refuser. Par sa nature, il est imposé. Quand un peuple ne peut faire mieux que de confier un service à la force publique, comme lorsqu'il s'agit de sécurité, d'indépendance nationale, de répression des délits et des crimes, il faut bien qu'il crée cette autorité et s'y soumette.

Mais s'il fait passer dans le service public ce qui aurait fort bien pu rester dans le domaine des services privés, il s'ôte la faculté de débattre le sacrifice qu'il veut faire en échange de ces services, il se prive du droit de les refuser; il diminue la sphère de sa liberté.

On ne peut multiplier les fonctionnaires sans multiplier les fonctions. Ce serait trop criant. Or, multiplier les fonctions, c'est multiplier les atteintes à la liberté.

Comment un monarque peut-il confisquer la liberté des cultes? En ayant un clergé à gages.

Comment peut-il confisquer la liberté de l'enseignement? En ayant une université à gages.

Que propose-t-on aujourd'hui? De faire le commerce et les transports par des fonctionnaires publics. Si ce plan se réalise, nous payerons plus d'impôts, et nous serons moins libres.

Vous voyez donc bien que, sous des apparences philanthropiques, le système qu'on préconise aujourd'hui est illusoire, injuste, qu'il détruit la sécurité, qu'il nuit à la formation des capitaux et, par là, à l'accroissement des salaires, enfin, qu'il porte atteinte à la liberté des citoyens.

Je pourrais lui adresser bien d'autres reproches. Il me serait facile de prouver qu'il est un obstacle insurmontable à tout progrès, parce qu'il paralyse le ressort même du progrès, la vigilance de l'intérêt privé.

Quels sont les modes d'activité humaine qui offrent le spectacle de la stagnation la plus complète? Ne sont-ce pas précisément ceux qui sont confiés aux services publics? Voyez l'enseignement. Il en est encore où il en était au moyen âge. Il n'est pas sorti de l'étude de deux langues mortes, étude si rationnelle autrefois, et si irrationnelle aujourd'hui. Non-seulement on enseigne les mêmes choses, mais on les enseigne par les mêmes méthodes. Quelle industrie, excepté celle-là, en est restée où elle en était il y a cinq siècles?

Je pourrais accuser aussi l'exagération de l'impôt et la multiplication des fonctions de développer cette ardeur effrénée pour les places qui, en elle-même et par ses conséquences, est la plus grande plaie des temps modernes. Mais l'espace me manque, et je confie ces considérations à la sagacité du lecteur.

Je ne puis m'empêcher, cependant, de considérer la question au point de vue de la situation particulière où la révolution de Février a placé la France.

Je n'hésite pas à le dire: si le bon sens du peuple, si le bon sens des ouvriers ne fait pas bonne et prompte justice des folles et chimériques espérances que, dans une soif désordonnée de popularité, on a jetées au milieu d'eux, ces espérances déçues seront la fatalité de la République.

Or elles seront déçues, parce qu'elles sont chimériques. Je l'ai prouvé. On a promis ce qu'il est matériellement impossible de tenir.

Quelle est notre situation? En mourant, la monarchie constitutionnelle nous laisse pour héritage une dette dont l'intérêt seul grève nos finances d'un fardeau annuel de trois cents millions, sans compter une somme égale de dette flottante.

Elle nous laisse l'Algérie, qui nous coûtera pendant longtemps cent millions par an.

Sans nous attaquer, sans même nous menacer, les rois absolus de l'Europe n'ont qu'à maintenir leurs forces militaires actuelles pour nous forcer à conserver les nôtres. De ce chef, c'est cinq à six cents millions à inscrire au budget de la guerre et de la marine.

Enfin, il reste tous les services publics, tous les frais de perception, tous les travaux d'utilité nationale.

Faites le compte, arrangez les chiffres comme vous voudrez, et vous verrez que le budget des dépenses est inévitablement énorme.

Il est à présumer que les sources ordinaires des recettes seront moins productives, dès la première année de la révolution. Supposez que le déficit qu'elles présenteront soit compensé par la suppression des sinécures et le retranchement des fonctions parasites.

Le résultat forcé n'en est pas moins qu'il est déjà bien difficile de donner actuellement satisfaction au contribuable.

Et c'est dans ce moment que l'on jette au milieu du peuple le vain espoir qu'il peut, lui aussi, puiser la vie dans ce même trésor, qu'il alimente de sa propre vie!

C'est dans ce moment, où l'industrie, le commerce, le capital et le travail auraient besoin de sécurité et de liberté pour élargir la source des impôts et des salaires, c'est dans ce moment que vous suspendez sur leur tête la menace d'une foule de combinaisons arbitraires, d'institutions mal digérées, mal conçues, de plans d'organisation éclos dans le cerveau de publicistes, pour la plupart étrangers à cette matière!

Mais qu'arrivera-t-il, au jour de la déception, et ce jour doit nécessairement arriver?

Qu'arrivera-t-il quand l'ouvrier s'apercevra que le travail fourni par l'État n'est pas un travail ajouté à celui du pays, mais soustrait par l'impôt sur un point pour être versé par la charité sur un autre, avec toute la diminution qu'implique la création d'administrations nouvelles?

Qu'arrivera-t-il quand vous serez réduit à venir dire au contribuable: Nous ne pouvons toucher ni à l'impôt du sel, ni à l'octroi, ni à la taxe sur les boissons, ni à aucune des inventions fiscales les plus impopulaires; bien loin de là, nous sommes forcés d'en imaginer de nouvelles?

Qu'arrivera-t-il quand la prétention d'accroître forcément la masse des salaires, abstraction faite d'un accroissement correspondant de capital (ce qui implique la contradiction la plus manifeste), aura désorganisé tous les ateliers, sous prétexte d'organisation, et forcé peut-être le capital à chercher ailleurs l'air vivifiant de la liberté?

Je ne veux pas m'appesantir sur les conséquences. Il me suffit d'avoir signalé le danger tel que je le vois.

Mais quoi! dira-t-on, après la grande révolution de Février, n'y avait-il donc rien à faire? n'y avait-il aucune satisfaction à donner au peuple? Fallait-il laisser les choses précisément au point où elles étaient avant? N'y avait-il aucune souffrance à soulager?

Telle n'est pas notre pensée.

Selon nous, l'accroissement des salaires ne dépend ni des intentions bienveillantes, ni des décrets philanthropiques. Il dépend, et il dépend uniquement de l'accroissement du capital. Quand dans un pays, comme aux États-Unis, le capital se forme rapidement, les salaires haussent et le peuple est heureux.

Or, pour que les capitaux se forment, il faut deux choses: sécurité et liberté; Il faut de plus qu'ils ne soient pas ravis à mesure par l'impôt.

C'est là, ce nous semble, qu'étaient la règle de conduite et les devoirs du gouvernement.

Les combinaisons nouvelles, les arrangements, les organisations, les associations devaient être abandonnés au bon sens, à l'expérience et à l'initiative des citoyens. Ce sont choses qui ne se font pas à coups de taxes et de décrets.

Pourvoir à la sécurité universelle en rassurant les fonctionnaires paisibles, et, par le choix éclairé des fonctionnaires nouveaux, fonder la vraie liberté par la destruction des priviléges et des monopoles, laisser librement entrer les subsistances et les objets les plus nécessaires au travail, se créer, sans frais, des ressources par l'abaissement des droits exagérés et l'abolition de la prohibition, simplifier tous les rouages administratifs, tailler en plein drap dans la bureaucratie, supprimer les fonctions parasites, réduire les gros traitements, négocier immédiatement avec les puissances étrangères la réduction des armées, abolir l'octroi et l'impôt sur le sel, et remanier profondément l'impôt des boissons, créer une taxe somptuaire, telle est, ce me semble, la mission d'un gouvernement populaire, telle est la mission de notre république.

Sous un tel régime d'ordre, de sécurité et de liberté, on verrait les capitaux se former et vivifier toutes les branches d'industrie, le commerce s'étendre, l'agriculture progresser, le travail recevoir une active impulsion, la main-d'œuvre recherchée et bien rétribuée, les salaires profiter de la concurrence des capitaux de plus en plus abondants, et toutes ces forces vives de la nation, actuellement absorbées par des administrations inutiles ou nuisibles, tourner à l'avantage physique, intellectuel et moral du peuple tout entier.

FIN DU DEUXIÈME VOLUME