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Fierabras

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Comment fierabras vaincu creut en dieu. et comment il fut porté par olivier et comment il fut assailly des sarrazins et tormenté

Le .xv. chapitre.

Après que le payen fut frappé et navré mortellement comme j'ay dit et luy voyant qu'il ne povoit plus resister contre olivier par la vertu de dieu il fut illuminé tellement qu'il eut congnoissance de l'erreur des payens et leva les yeulx contre le ciel et commença a escrier la grace de la saincte trinité: et puis regarda olivier et dist. O noble olivier et vaillant chevalier en l'onneur de dieu que tu croys auquel je consens je te crye mercy et te requiers que je ne meure pas jusques je soye baptisé et rendu vaincu a charles qui tant est redoubté car je croiray en la foy crestienne et rendray les relicques dont vous estes assemblez et pour lesquelles vous prenés tant de peine et je te jure que se par ton deffault je meurs sarrazin: de mon damnement je te feray culpable. et se tu ne me prens en ta garde je pers mon sang tu me verras mourir devant tes yeulx: pourquoy en l'onneur de dieu aye pitié de moy. Olivier eut telle compassion de luy pour son mal moult fermement ploura et puis le coucha a l'ombre dessoubz ung arbre et puis luy benda ses playes mortelles et les luy benda par telle maniere qu'il ne perdoit plus son sang si habondamment et puis luy pria le payen qu'il luy pleust de le porter. car luymesmes ne s'en pourroit aller: mais quant olivier veit qu'il estoit moult pesant luy dist qu'il estoit a luy impossible. Fierabras moult s'esforça et vint près de luy et dist. O noble olivier en l'onneur de dieu meines moy a charles avant que je meure. car je suis près de ma fin tout mon corps saigne prens celluy cheval et monte dessus et viens près de moy se je puis traverser devant toy sur l'arçon de la selle tu me pourras mener et tiens mon espee et la metz a ton cousté si en auras quatre que lon ne sauroit payer et te despaische: car aujourd'uy au matin j'ay laissé en ce boys que tu voys la près de nous cincquante mille hommes qui sont tous mes subjetz et leur ay dit que nul ne bougast jusques je fusses retourné de la bataille. Quant olivier l'eut entendu il en fut tout effroié. mais nonobstant dist il. Sire roy puis qu'il vous plaist j'en suis content et monta au travers sur le cheval comme il estoit dit et se mist a chemin en grant douleur. et subitement va partir de celuy boys ou estoient les subjectz de Fierabras ung moult fier payen nomme Brullant de mommiere. Sortibrant de conimbres. Le roy de mantrible. Le roy maradas / et bien cincquante mille après. Quant olivier le veit venir il commença a frapper de l'esperon son cheval. mais sa charge estoit si pesante qu'il ne pouvoit aller selon que les ennemys venoient a luy. quant les françoys veirent venir payens en si grant nombre moult habilement furent armez et entre les aultres Rolant Gerard de mondidier Guillaume l'estoc. Naymes de bavyeres. Ogier. Richard de normandie. Guy de bourgoigne. Geoffroy l'angevin et semblablement Regnier de gennes pere de olivier ne faillit point. Olivier regarda aval le pré et veit venir les aultres. Brullant de mommiere qui estoit monté sur ung cheval qui couroit comme ung lievre et fasoit moult grant bruyt entre les aultres. car il sembloit que ce fust fouldre et tempeste. et en sa main portoit ung dart a grant fer d'acier quarré et agu qui estoit tout envenymé du sang d'ung crapault et estoit fort dangereux: Quant olivier le veit il fut tout esbahy et dist a Fierabras. Sire roy il fault que vous descendiés plus ne vous puis conduyre dont je suys desplaisant. et je congnois qu'il me convient estre oppressé vous le veez. et s'ilz me peuvent attaindre je seray mis a mort. ne jamais charles ne me verra qui luy sera grant desconfort. tantost Fierabras crya a haulte voix O noble olivier me voulés vous laisser. vous m'avés conquis a vous me suis donné et rendu. ce ne seroit pas noblement fait a vous de me regnyer. Helas povre dolent et chetif que je suis se je meurs payen que deviendray je vierge marie mere de dieu prenés pitié de moy indigne que je suis de me trouver a vous puis dist a olivier. O noble conte je suis conquis par toy et ay promis que je me feray baptiser. se tu me laisse tu te peulx bien peu priser encores vois je que ne suis ne frappé ne vaincu. Olivier respondit. Fierabras tu parles en chevalier. mais je voue dieu et la court celestielle que je ne te laisseray si auray je bataille pour toy et deffendray tant que je seray en vie tu t'y peulx bien fier et sur ce il print le haubert du sarrazin et de ce qu'il se peust mieulx armer prestement s'abilla et mist a sa teste ung chappeau de fin acier. et tint son espee traicte nommee haulteclere de laquelle il se sçavoit bien aider. et sur cecy tantost vint Brullant a tout son faulx dart et si attaint olivier en la poictrine et luy donna ung mauvais coup tellement que celluy faulx dart se rompit. adonc dist Fierabras. Sire olivier vous avés assés fait pour moy. car vous en estes navré. descendés moy et me mettés a part hors du chemin affin que je ne soye foulé des sarrazins prins ne gasté. De cecy eut grant compassion olivier. et mist le payen a l'ombre d'ung pin loing de la voye. Et quant il s'en voulut fouyr il veit entour luy bien dix mille sarrazins et va dire. Helas bon jhesus mon createur tu scés mon intencion. je te requiers que tu me donne grace que je ne meure point pour le present jusques a ce que pour l'exaltation de la sainte foy me trouve avec rolant mon compaignon. et au nom de jhesus trait haulteclere et se mist en chemin et le premier qu'il rencontra ce fut le filz du plus grant que y fust. et luy donna tel coup qu'il le fendit jusques a la poictrine bien avant et cheut mort. et olivier fut abille et print son escu tout neuf. car en la bataille devant faicte il avoit perdu le sien. et aussi il eut sa lance et laissa courre son cheval et se mesla parmy ces mescreans. et va ataindre du premier coup clorgis et le frape jusques au cueur dont fut la mort et en se retournant trois sarrazins a occis et couroyent devant luy comme les brebis devant le loup qui est affamé. Sur ce vindrent sur luy maradas. turgis. fortibrant de conimbres et le roy margaris et le crierent a haute voix tous ensemble. par mahon nostre dieu françois de nous n'eschapperas garde toy bien. car par nous tu mourras. et sur ce olivier vint aux ennemis et frappa et les mist a mort. Et ces sarrazins fraperent dessus luy dont ce fut merveilles qu'il ne fut deschappelé et vaincu. mais a force de coupz et de trait son cheval luy fut occis dessoubz luy. et luy estant a terre a force le plus tost qu'il peust se leva sus et tout dempié mist devant luy l'escu qu'il avoit conquesté et tint haulteclere qui estoit tout son confort pour le devoir secourir. Tousjours celluy qu'il en attaignoit tresbuschoit bas et estoit mis a mort. On ne list point en livre que oncques homme desja navré comme il estoit fist si grant portement.

Comment olivier fut prins et bendé les yeulx piteusement qu'il ne peust estre secouru par les françois

Le .xvi. chapitre.

Olivier retourna tout seul et de pié entre ces sarrazins esquelz il fit grant resistance et merveilleuse: mais ne luy fut pas chose possible que il peut eschapper de leurs mains. car a glayves a espees et a faulx dartz de fer le vont tant presser que son escu fut percé en plus de trente lieux et quant son haubert fut aussi percé. cassé et rompu. de quatre faulx dartz agus le vont percer au corps mortellement parquoy force luy fut qu'il cheust a terre et le prindrent moult oultrageusement. et puis luy ont bendé les yeulx et conceuz estroictement qu'il ne veoit riens. ne ne sçavoit ou il estoit. et le monterent sur ung bon cheval et l'estacherent bien seurement. Et quant cestuy vaillant olivier fut ainsi despourveu de toute adjutoire. de toute clarté. de toute esperance. de tout confort. que sans le dire se peut entendre. luy estant en celle desplaisance. car il ne sçavoit qu'on alloit faire de luy a haulte voix par une compassion de cueur va dire. O charlemaigne roy de noblesse. empereur de valeur ou es tu maintenant. et sçay tu point ou je suis voy tu riens que je fais. te souvient il de moy. noble compaignon rolant es tu bien endormy. suis je sourt ou comment je ne puis ouyr. Est il homme crestien qui s'en peust souvenir. Cecy et aultres plaintes faisant le roy maradas luy dist. Françoys quelque tu soyes tu parles de folie. car je ne mengeray que tu ne soyes pendu Ces sarrazins s'en coururent a tout olivier les yeulx bendez. les mains liees bien estroictement en la garde de quatre faulx tyrans. Et specialement sur ce vindrent rolant. tierry. et tous les pers et charles aussy. mais ce fut bien tart pour saulver olivier a grans crys requierent dieu et tous les saintz de paradis. et avec parolles malicieuses rolant frappa corsuble en la poictrine. Gerard de mondidier vint contre turgis. ogier fier athennas et richard de normandie. guy de bourgoigne brullant. Il n'y eut celluy des pers de france n'ait mis bas son homme. et firent si grant desconfite de ses sarrazins qu'ilz estoient tous empechez d'eulx tenir a aller oultre. mais les aultres payens qui conduisoient olivier alloyent tousjours oultre. Et a celle bataille fut occis guillaume gautier et assez des françoys moult valeureuses gens et plusieurs menues gens des françoys. Et misdrent par terre gerad de mondidier le filz au duc tyerry. Guillaume l'estoc. et geoffroy l'engevin. et puis diligenment les lierent a cheval. et chevaucherent moult hastivement. mais quant charles les veit ainsi emmener. a bien peu qu'il ne perdit le sens et a haulte voix crya sauvegarde secours a ses barons. o chevaliers desloyaulx que vous estes tardifz. s'ilz emmaine les contes ja bien ne vous en viendra. Quant les françoys ouyrent charles ainsi esmeu comme enragés frapperent des esperons et les vindrent attendre au bas d'une montee. et se trouva rolant des premiers qui tint son espee durandal traicte pour se venger fierement et celluy qu'il attaignoit estoit bien seur de passer par la mort. car il estoit tout enragé de ce qu'on emmenoit son compaignon olivier. et va attaindre lampatris et le fendit jusques au millieu du corps. Et en celle heure fit grant portement rolant. mais a cause de la multitude des payens ilz ne peurent passer oultre pour secourir les barons prisonniers. et les dechasserent plus de cinq lieues de long et si ne les sceurent approcher. Et furent pour lors plusieurs bons chevaulx mors morfonduz et lassez. Et nonobstant rolant jura que jamais ne tourneroit jusques a tant que les barons de france fussent ostez de la main de leurs ennemis. mais il ne se peust faire. car la nuyt survint et ne sçavoient ou aller. Les sarrazins qui estoient devant vont tousjours fuyant a leur plaisir. Cecy voiant charles ne sceut plus qu'il deust dire ne faire. car il doubtoit que les payens n'eussent fait agait et arriere garde pour les laisser enclorre. Et par ainsi leur fut force laisser les champs et en grant desplaisance d'angoisse se vont tous mettre a eulx en retourner.

 

La seconde partie du second livre contient .xvii. chapitres et parle du torment des barons de france. et comment ceulx qui ne furent point prins allerent parler a Ballant l'admiral d'espaigne.

Comment fierabras fut trouvé par charles l'empereur. et puis baptisé et guery de ses playes

Le premier chapitre.

Après que charles congneut qu'il ne povoit ravoir olivier ne les aultres prisonniers. force luy fut de retourner avec ses gens. car la nuyt leur fut pour lors nuysable. et ainsi en retournant vont trouver Fierabras dessoubz ung arbre languissant. auquel le roy va dire. O payen malheureux je te doy bien hayr. car par toy sont mes hommes prisonniers et perdus. Tu m'as osté olivier l'un des bien aymez que j'eusse entre tous les humains celluy qui a esté singulier a maintenir mon honneur. et par toy en la fin en lieu de joye me rens douleur quant fierabras l'entendit ung grant soupir va getter et dire. O riche empereur et noble le plus puissant des humains. en l'onneur de dieu je te crye mercy pardonne moy. Il est vray que olivier m'a conquis ja ne le celeray et luy ay promis que je me feray crestien j'ay laissé tous mes dieux et n'en fais plus compte et me rens a jhesus le createur du monde. et te requier de rechief que je soye baptisé. et se je estoie de mes playes guery. je exaulceroie de mon povoir la foy crestiene et seryont fais plusieurs crestiens moyen moy. Je rendray le saint sepulchre et les reliques saintes dont vous prenez tant de peine. Et si vous fais serment par le dieu que je croy que je suis plus dolent du noble olivier qui est prins pour prisonnier que je ne suis de mon corps qui est navré mortellement. et se dieu plaist nous l'aurons une foys. Pourquoy concluons que je soye crestien se je meurs sarrazin il vous sera reprouche. et charles qui en eut compassion le fit porter en son logis par ses barons. Quant ilz le veirent ainsi membré il furent tous esbahis de la grandeur et grosseur de luy: car quant il fut desarmé c'estoit ung des beaulx hommes qui fust jamais veu et tous les françoys donnerent grant honneur a olivier qui avoit combatu ung tel homme. Et ainsi qu'il fut devestu ses playes se vont ouvrir et commencerent a seigner dont le cueur luy faillit et cheut tout paulmé Mais rolant le retint Et tantost furent les fons aprestés. et incontinent on manda l'arcevesque Turpin et naymon qui estoient moult joyeulx de ce que celluy payen devoit estre crestien. Et après que le baptesme fut apresté les sarrazins luy misrent aultre nom. et fut nommé florent. mais tant comme il vesquit fierabras s'appella. Et la fut mis en ung lit moult honnorable. et en la fin de ses jours fut saint et fist plusieurs miracles. Et se dit ores saint Florent de roye. Et puis tantost l'empereur le fist visiter par les medecins bien expers. et cercherent en toutes ses playes les plus mortelles. et comment il pleust a dieu ilz ne trouverent point les boyaulx entamés Pourquoy les medecins furent seurs de le rendre bien guary devant deux moys advenir. En faisant celle visitacion l'empereur estoit present et dist a fierabras. Si devant toy tu veois Olivier et les aultres prisonniers nous serions bien contens. Et se tenoit charles assis couroucé et marri moult fort pensant sur les barons plus qu'il n'en faisoit semblant.

Comment olivier et ses compaignons furent presentés a Balam l'admiral et cruellement passionnez de prison

Le .ii. chapitre.

Les sarrazins après qu'ilz eurent les barons de france dessus nommés pour prisonniers ilz n'arresterent de courre jusques qu'ilz fussent en une riche cité qui se disoit aigremoire. et a l'entree de la cité ilz vont sonner trompettes faisant grant bruit. Quant Balam l'admiral pere de Fierabras les veit venir il s'en vint au devant d'eulx et se mist près de brullant de mommiere. auquel l'admiral va dire. O brullant mon amy comptez nous des nouvelles comment se portent mes affaires. avez vous prins l'empereur charles que tant se fait redoubter. et ces pers de france sont ilz point desconfitz. Brullant luy va dire. O sire admiral les nouvelles que je vous apporte sont beaucoup moindres que vous ne dittes. De par le roy charles nous avons a peu esté deffaitz et desconfitz. car sa puissance est chose merveilleuse. Fierabras vostre filz est avec luy vaincu par l'ung de ses barons et c'est fait crestien. et a esté prins vaincu. Et en loyalle bataille sans faire traison. Et quant l'admiral l'eut entendu tout transy va cheoir a terre. et avant qu'il peust retourner en sa memoire il demoura une grant piece de la douleur qu'il eut de son filz. Et quant il fut relevé il va crier a haulte voix O dolent malheureux que je suis povre chetif que doys je devenir. O fierabras mon fils treschier ou estes vous allé dont vient cestuy meffaict de quoy vous fustes prins qui jamais en bataille ne fustes lassé ne reprins. O la maulvaise nouvelle qu'on m'a comptee de vous. s'il s'est fait crestien dolant suis de sa vie j'aymaisse mieulx qu'il eust esté desmembré et mys a mort. et sur ce comme tout scandalizé cheut a terre et va crier. O brullant de mommiere qu'est devenu le roy si noble de cordube et mon nepveu bruchard et nugis de pramelle. puis mon filz fierabras le conduiseur de tout s'il est vray qu'il soit perdu je fendray la cervelle a mahommet le dieu qui m'a promis tant de biens a qui je me suis donné et rendu: Ce disant comme tout enraigé se tormenta briefvement sur la terre. et quant l'admiral fut ung peu refroidi de son mal. il demanda a brullant lequel estoit le chevalier qui avoit vaincu fierabras son filz brullant respondit. Sire admiral vostre filz a esté conquis par cestuy damoyseau en luy demonstrant olivier qui estoit beau et bien formé et membré: lequel eut entre les aultres les ieulx bendez. Or tost ce dist l'admiral d'espaigne despeschez vous amenez le moy. jamais ne boyray ne mangeray qu'il ne soit desmembré. Quant les françoys vont entendre qu'on vouloit faire mourir olivier qui estoit tout leur confort se vont prendre a plourer griefvement et olivier qui les entendit les reconforta en leur disant par maniere que les sarrazins ne sçavoient qu'ilz disoient. Messeigneurs et mes freres vous sçavez nostre necessité se l'admiral ballant peult sçavoir que nous soions des pers de france nostre vie est terminee. car pour nul riens ne prendroit pitié de nous que ne mourions pourquoy je vous prie que nous nous disions aultre comme je commenceray auquel olivier tous les aultres françoys qui estoient prisonniers vont consentir et dirent qu'il ne feroient si non ce qu'il leur conseilleroit. après que l'admiral l'eut commandé venir devant luy les payens le vont desarmer et luy destacherent les mains et desbenderent les yeulx dont il estoit moult grevé et dangereusement navré. Et tantost L'admiral furieusement luy demanda Françoys garde toy bien que tu me dies verité: comment te nommes tu ne me cele pas. Olivier va respondre et dire Sire je me nomme enginees filz a ung vassal de povre lignaige et m'en partis une foys et fus né en lorraine: si vins une foys a la court de charles l'empereur qui me donna armes après que je fus adoubé et aussi mes compaignons que vous veez devant vous sont povres chevaliers adventuriers et avons prins peine de servir nostre roy affin que par nostre service nous puissions estre avancez et avoir quelque bon guerdon. O mahon va dire l'admiral or suis je bien trompé: je cuydoie par mon dieu avoir cincq vaillans contes des plus grans de france et avoir le royaulme de france par le moyen de ses barons. Et tantost appella barcabas son chamberlant et luy dist. Despeschés vous prenez moy ces françois: faictes les despoiller et a ce pillier estacher durement et puis me faictes apporter mes dars de fer bien eschauffez et enrougis et a ces françois les feray frapper et tirer a mon plaisir. Sur ce se leva brullant et dist. Sire admiral je vous prie que pour le present vous ne fasiés ceste entreprinse car ce ne seroit pas bien fait. vous voyés qu'il est vespre et trop tard pour faire justice et en pourriez bien estre blasmé: veu que vostre seigneurie et voz barons ne sont point cy presens pourquoy je vous supplye que pour meshuy vous ne leur facés riens jusques demain que chascun le sçaura et vostre jugement sera mieulx approuvé: car je sçay bien qu'ilz ont ja deservy la mort evidente. Et d'autre part se charles vous vouloit rendre monseigneur Fierabras vostre filz de bon gré vous luy pourriez semblablement remettre les françoys que vous avez. Pour l'amour de vous dist l'admiral j'en suis content et demande brutamont qui estoit garde de la prison et luy recommanda les françoys moult grandement et qu'il fust bien seur d'eulx et qui les mist en lieu pour apprendre comment ilz avoient ouvré follement d'eulx mettre en sa main.

De la prison ou les françoys furent visitez par la belle floripes fille de l'admiral et de la beaulté d'elle

Le .iii. chapitre.

Après que ballant l'admiral eut dist que les françoys fussent mis en griefve prison brutamont le chartrier vint descendre olivier et les aultres ses compaignons en une prison moult dangereuse qui estoit tant estroicte en terre qu'on ne veoit clarté quelconcques: en laquelle estoient mis et nourriz serpens crapaulx et aultres bestes venimeuses et detestables. auquel lieu estoient toutes punaisies et y passoit ung ruisseau de la mer sallee qui avoit son entree sans conduit par lequel l'eaue peust partir qu'elle ne fust bien hault selon l'eure que la marine croist. Et avant que le maistre de la prison s'en allast il leur desbenda les yeulx et ferma les partuis dessus eulx et eulx estans en ce travail et punaisie tantost l'eau y vint si treshabondamment que les povres françoys furent en l'eau jusques aux espaules dont les playes d'olivier se commencerent a ouvrir et la douleur a cause de l'eaue sallee luy tresperçoit le cueur vous pouvés penser l'angoisse especiallement d'olivier qui estoit navré mortellement en plusieurs lieux qui avoit grant necessité de remede et il fut mis an lieu auquel toutes ses douleurs furent renouvellees et ses plaies ouvertes car tantost se sentit baigné tantost va cheoir tout pasmé et fut mort a l'eure se ne fust Guerard de mondidier lequel le soubstint et vous me pourriez demander comment ilz ne furent noyez voyant que l'eaue croissoit tousjours vous devez sçavoir que en celle prison d'aventure avoit deux gros pilliers bien de quinze piez de hault sur lesquelz ilz vont monter a grant force Olivier qui ne se pouvoit gueres aider. Et quant olivier fut la assis par grant angoisse de ce se va complaindre et dire O pouvre homme malheureux soubmis a faulce fortune. O reignier mon chier pere pour dieu que faictes vous sçavez vous ou je suis: pensez vous que je fais congnoissez vous mon dueil jamais ne me verrez. Cecy disant et aultres parolles de desolacion. Guerard de mondidier respondit. Sire olivier ne vous deconfortez plus car a tel chevalier que vous estes n'appartient de ce plaindre: resjouissons nous en dieu duquel fust maintenant le plaisir que nous qui sommes ceans fussions lassus tous armez avec chascun son espee car je prometz a dieu que tout avant que nul de nous fust avallé seans vaincu des sarrazins j'en y mettroye troys cens ou plus Les françoys dessusditz estans sur les pilliers de marbres devant ditz. Cecy disant et aultres choses Floripes fille. de l'admiral et seur de Fierabras les escoutoit et eut grant compassion des complaintes que Olivier faisoit Ceste fille qui estoit jeune non mariee estoit moult bien comprinse de corps par longueur moderee. blanche comme la rose du moy de may les cheveulx avoit reluysans comme le fin or. et dessoubz avoit sa face terminee en ung petit de longueur des yeulx qui estoyent rians et clers comme de faulcon mué. estincellans comme deux estoilles. Le visaige avoit devisé moult esgallement pour son nez qui estoit moult seant. les deux sourcilz qui estoyent dessus apparans faisoyent obumbracion sur les yeulx. joues rondes blanches comme la fleur du lys. ung petit tissues de rougeur. et dessoubz le nez estoit la bouche rondete eslevee en competant espace jusques au menton proporcionnee au demourant. la teste et petites espaules droictes et bien esgalles. et devant dessus la seinture estoit eslevee de la façon de deux pommes rondes droictes comme le bout d'une montaignette. Et elle estoit habillé d'une robe de pouppre merveilleusement riche trespainte d'estoilles de fin or. laquelle fut faicte d'une fee et estoit de telle vertu que personne qui l'auroit ne pourroit estre empoisonné de herbe ou venin. Et estoit floripes si belle a tous et ses habillemens que se une personne eust jeuné troys ou quatre jours sans menger et il la veoit il estoit remply et saoulé. Et plus oultre elle portoit ung manteau qui avoit esté fait en l'isle de corlcos la ou jason print la toison d'or comme on list en la destruction de troyes. lequel manteau estoit semblablement fait d'une fee et avoit si grant odeur que c'estoit merveilles pourquoy de la beaulté de celle damoiselle chascun s'esmerveilloit. et avoit comme j'ay dit devant bien ouy parler les françois en prison. et specialement de Olivier duquel elle eut grant pitié et va partir de sa chambre avec douze pucelles ses subjectes et entra premierement en la salle commune ou estoyent les payens moult desolez de Fierbras qui estoit prins et de pluseurs aultres grans seigneurs qui estoyent mors. Et quant la fille eut demandé des nouvelles. ilz luy vont dire que Fierbras son frere estoit prins et vaincu pourquoy tantost elle fist ung grant cry et souspira d'angoisse dont pour elle tout le dueil fut entre eulx renouvellé. Et quant elle eut cessé ung petit de plourer elle demanda tantost a Brutamont qui sont ceulx que j'ay ouy parler en la prison qui si fort se deulent. Ma dame respondit le portier ilz sont françoys hommes de Charles le roy de france. lesquelz ne cesserent jamais de destruire nostre loy et mettre a mort noz gens. vituperer nostre creance et anichiller noz dieux. et sont ceulx qui ont aidé a occir Fierabras vostre frere entre lesquelz il y en a ung de grant valeur qui est l'ung des bien faitz homme qui jamais fut congneu. et a esté si trespuissant qu'il a conquis en bataille loyalle Fierabras Tantost floripes eut envie de les ouyr parler. et dist a Brutamont je vueil parler a eulx vien moy ouvrir la prison: car je vueil sçavoir de leur fait. Brutamont va respondre et dist. Ma dame vous me pardonnerez. il ne se peut faire que vous y allez pour l'inhonnesteté du lieu. et il ne vous appartient pas: et d'aultre part vostre pere m'a deffendu que personne n'aproche de la prison. je me remembre que souvent par femmes plusieurs preudommes j'ay veu vergoignez et deceuz. Quant Floripes l'entendit elle cuida perdre le sens et luy dist. O maulvais glout despiteux me dois tu mettre ce langaige devant. je te prometz que je t'en feray payer briesment. et demanda son chamberlam lequel luy bailla ung baston. et fist semblant la fille de ouvrir la prison. et Brutamont la voulut contredire et subitement elle cecy voyant luy donna si grant coup au visaige que les deux yeulx luy fist voler hors de la teste: et puis après qu'il fut a terre elle le fist mourir et puis le getta sans ce qu'il fust sceu de nul des payens dedens la prison. dont les françoys qui estoyent dedens furent tous esperdus quant il vont ouyr cheoir et pensoient que ce fust le dyable qui les voulsist tempter et decepvoir. Puis tantost floripes fist alumer ung grande torche de cire et se fist ouvrir la prison. et mist devant elle la lumiere pour veoir les prisonniers. et près d'ung pillier leur va dire. O seigneurs respondés moy. qui estez vous et comment vous nommez vous. ne le me celés pas. Olivier respond et dist. Ma belle dame nous sommes de france et hommes de charlemaigne. et avons esté amenez a l'admiral qui nous a en ceste creuse prison ordonnez. et mieulx nous vauldroit qu'il nous fist desmembrer et mourir que de demourer en cestuy lieu. Floripes la courtoise nonobstant qu'elle ne fust pas crestienne si avoit elle grant noblesse. et leur va dire. Je vous prometz que je vous mettray dehors seulement que vous me promettez et jurez que vous m'ayderés a ce que vous diray Olivier respondit cecy. Ma dame je vous asseure que vous nous trouverés trestous telz par effaictz comme a la bouche. ne jamais ne fusmez aultres ne aussi ne serons encores. Et soyés seure que ne vous fauldrons tant que nous ayons vie au corps seulement que nous soyons fournis d'armes et puis estre lassus pour nous mesler avec les sarrazins j'en feray une grant desconfite. Vassal dist la fille vous vous pourriés bien trop vanter encores estes vous leans et bien loing d'estre dehors et vous menassez les aultres qui sont a leur liberté. Mieulx vault soy bien taire que follement parler. Richard de normandie dist a la dame. Madamoiselle je vous diray ung mot. celluy qui est detenu et empesché chante moult voulentiers pour oblier son mal et sa melancolie. Et floripes regarda Richard le gracieux qui excusa olivier de ce que il parloit trop hardiement. mais ce ne fut pas grant merveille. car de joye que olivier eut quant la fille luy dist qu'ilz seroient mys hors. il pensoit ja estre hors et armé en sa franche voulenté. mais ceste fille va dire a Richard. pour verité sire vous vous sçavez bien louer et vostre compaignon excuser prestement. et je croy fermement que vous sçauriés bien jouer avec pucelles en quelque chambre dessoubz courtines seulet a seullette. pour vous bien deporter en amours vous sçavez la maniere Guillaume l'estoc respondit et dist par mon ame ma dame vous dictes verité de luy et avez bien deviné. et d'icy a troys cens lieues on ne trouveroit le pareil.