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L'art de faire le vin avec les raisins secs

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CHAPITRE XIV
Du Sucrage

Nos plus grands œnologues et nos meilleurs chimistes ont reconnu et accepté la nécessité et le naturel emploi du sucre. Chaptal, son immortel innovateur, a même laissé son nom à ce procédé; on dit: Chaptaliser du vin.

Je puis donc, couvert par de pareilles célébrités, acceptées par tous, traiter cette question, dédaignant les attaques qu’elles ont motivé de la part de quelques personnalités bruyantes dont le talent en la matière serait bien facile à contester.

L’épithète ironique et impuissante d’eau de raisins dont quelques négociants en vins, ni viticulteurs, ni chimistes, ont voulu stigmatiser le vin de raisins secs, devait ce me semble trouver un meilleur placement appliquée à l’opération dite du sucrage.

Pourquoi ne s’est-on jamais élevé contre cette opération?

Cependant cette façon de faire le vin est non-seulement connue de nos négociants, mais même approuvée et conseillée, pour bien des cas, par nos Facultés et nos Académies scientifiques.

Avant de pénétrer davantage dans ce sujet, je vais donner à mes lecteurs quelques notions préliminaires sur cette question et rappeler brièvement sa théorie:

L’opération du sucrage consiste à ajouter au jus de raisins frais, le sucre qui lui fait défaut, à la suite de circonstances malheureuses provenant de la température et du climat qui ont empêché son développement sur la vigne, et à remplacer ce sucre par celui de raisins ou d’autres. La nécessité de cette addition s’impose d’elle-même.

Chacun sait que la formation de l’alcool, principe fondamental du vin, s’obtient par le changement de la partie sucrée en acide carbonique et en alcool.

Or, supposons une année froide et pluvieuse, les raisins, au moment où l’époque des vendanges est arrivée, non-seulement ne sont pas mûrs, mais ne peuvent plus mûrir; la partie sucrée, dont ils devaient être pourvus, ainsi que dans les temps ordinaires, fait complètement défaut. Que faire de ce moût, véritable verjus, qui contiendra peu d’alcool et partant ne pourra se conserver?

La chimie a depuis longtemps répondu à cette interrogation et s’est engagée bravement dans la voie, qui, du reste, se présentait à elle toute tracée: Quand le sucre naturel manque il faut le remplacer.

Les sources sont nombreuses. Chaptal préconisait l’emploi du sucre de canne brut et surtout celui extrait du raisin lui-même.

Cependant il faut bien se garder de confondre le sucre de raisin avec le glycose obtenu de la fécule de pomme de terre; son emploi procure au vin une altération funeste. Le sucre dont on peut se servir est celui de raisin ou de canne. On doit se garder de l’exagération, qui, en tout, est un défaut. Il ne faut pas dépasser, par excès de sucrage, le degré de liqueur qu’accuse le moût, quand les vendanges sont heureuses.

Le but de cette opération est donc, dans ce cas, celui d’empêcher la perte de la récolte à cause du manque de sucre.

Nos viticulteurs de la Champagne, et surtout nos fabricants de vins de ce nom, ont étendu, plus loin encore, le bénéfice qu’ils pouvaient recueillir de l’avantage du sucrage, afin d’avoir une récolte toujours uniforme, qui pût leur donner, toutes les années, un vin identique pour fournir à leur clientèle du monde entier.

Un certain nombre de fabricants, et des renommés de ce pays, retirent d’abord simplement le moût des raisins frais, et versent sur les grappes, avec de l’eau, la quantité de sucre30 qui est nécessaire pour remettre le liquide à un degré de liqueur suffisant et refaire une nouvelle cuvée. Quand la fermentation de ce nouveau moût est terminée, ils mélangent ce vin avec celui de la cuvée précédente, et obtiennent ainsi des produits qui ont fait rêver, pendant bien longtemps, des œnologues distingués qui cherchaient à deviner comment ils pouvaient obtenir ainsi, chaque année, malgré les différences de vendanges, des produits aussi similaires.

Il était nécessaire que j’expliquasse bien à mes nombreux lecteurs sur quoi reposait la théorie du sucrage.

Il importait aussi de rendre public ce procédé tout champenois, afin d’apprendre aux détracteurs de vins de raisins secs que l’appellation dont ils ont voulu gratifier ces vins: eau de raisins, pouvait assurément, et depuis longtemps, trouver justement sa place sur une foule de manipulations œnologiques, et que c’est faire réellement preuve d’ignorance de désigner ainsi le produit qui, seul peut-être, ne le méritait pas.

Peut-on nier que toutes les matières qui les constituent ne leur soit réellement propres?

Le sucre qu’ils contiennent est-il du sucre de raisin?

L’eau seule leur manque et on la leur rend; je dis: on la leur rend. Peut-on dire cela pour l’opération que j’ai rapportée plus haut, qui se pratique depuis si longtemps dans la Champagne, et n’est-ce pas à ce genre de vin, pourtant excellent qu’il eût fallu appliquer l’épithète d’eau de raisins?

Cette petite digression était nécessaire pour pouvoir m’étendre sur les divers emplois qu’on peut tirer du sucre dans la fabrication des vins de raisins secs. J’ai tenu à bien démontrer que, loin de créer une innovation, je ne visai, dans ce traité, qu’à faire l’application à notre genre de fabrication des méthodes bien anciennes, existant déjà dans la fabrication des vins de raisins frais, nullement répréhensibles, et approuvées par la science.

La fermentation des raisins, grappes, marcs, avec du sucre

Dans la description que j’ai faite de la fermentation du moût sans grappes, celles-ci demeurant dans la cuve après le soutirage du moût, j’ai promis d’indiquer le parti qu’on peut en tirer, vu leur état.

On doit se rappeler comment ce genre de fabrication se pratique; 24 ou 48 heures environ après le séjour de l’eau sur les raisins secs, on la soutire toute chargée de la partie sucrée qu’elle a dissoute dans cette sorte de lavage. Les raisins ou grappes conservent encore cependant une assez grande partie de ce sirop dont ils sont imprégnés.

Il est deux manières de les utiliser: La première, en y versant tout simplement de l’eau; la seconde, en refaisant une nouvelle cuvée, et en y ajoutant de l’eau et du sucre de canne pour remplacer celui qui a été entraîné après le soutirage du moût.

Si le produit que l’on veut obtenir ne doit avoir que 5 à 7 degrés, et si l’on vise à la quantité, on n’a qu’à verser environ 40 à 50 litres d’eau par 100 kilog. de grappes dans la cuve, sans ajouter de sucre. On remue bien cette nouvelle addition et on agit exactement comme pour une première fabrication de raisins secs.

Le premier moût qu’on a soutiré, quoique ayant enlevé une grande partie des matières que contenaient les raisins, leur en laisse encore assez pour faire fermenter et produire du vin qui peut très bien, une fois la fermentation terminée, servir pour le coupage de ceux dont le degré est trop élevé.

Si au contraire, pour des causes particulières, telles que: la cherté des raisins secs, leur prix excessif de transport, la proximité d’une raffinerie de sucre, le fabricant a intérêt à produire du vin de raisins secs en se servant du sucre, au lieu de vider l’eau purement sur les raisins, dont on a déjà sorti un premier moût, le producteur préparera ainsi sa nouvelle fabrication: Par 100 kilog. de raisins, il versera 100 litres d’eau et 10 kilog. de sucre. Afin que le mélange s’opère bien, je conseillerai de verser le sucre séparément dans l’eau que l’on veut employer, de manière à n’avoir plus qu’à mélanger l’eau ainsi préparée avec les raisins dans la cuve.

On peut de cette manière, comme je le disais plus haut, fabriquer, quel que soit le prix des raisins et surtout leur qualité, des vins à peu près toujours semblables.

La conduite de la fermentation de ce genre de fabrication est, bien entendu, toujours celle que j’ai indiquée dans le chapitre précédent; les soins à donner à la cuve à fermenter sont identiquement les mêmes pour toutes les façons de fabriquer.

Voulant prévenir les polémiques que l’application du sucrage, que j’ai faite à notre industrie, peut soulever, je prie mes lecteurs de vouloir se reporter à l’appendice qui termine ce volume. J’ai relaté tout au long, dans l’intérêt des agriculteurs, les magnifiques expériences faites par M. Petiot, sur une cuvée qui, en temps ordinaire, eut produit 60 hectolitres à peine, et dont il retira 285 hectolitres, soit près de cinq fois plus. Cette expérience, attestée par les célèbres chimistes et œnologues Thénard père et fils, par Maumené, et un grand nombre de savants, se dresse en vengeresse pour prouver une fois de plus aux détracteurs des vins de raisins secs, combien ceux-ci, incontestablement naturels, laissent loin derrière eux ces produits artificiels si admirés.31

CHAPITRE XV
Résumé de la Théorie de la Fermentation

Afin de présenter d’une manière plus saisissable les indications que j’ai données et les observations que j’ai faites dans les chapitres précédents ayant trait aux divers phénomènes de la fermentation, je vais les grouper ici sous forme de mémorandum.

 

Mes lecteurs pourront ainsi, suivant les cas qui les embarrasseraient, trouver l’explication immédiate de ce qui fera l’objet de leurs hésitations.

RÈGLES GÉNÉRALES

Pour obtenir une bonne fermentation, il faut:

1º Que l’opération du foulage des raisins secs ait été bien régulièrement et entièrement pratiquée;

2º Que la température du moût soit au moins à 25 degrés;

3º Que celle du cellier soit de 15 à 20 degrés environ et invariable, si on n’emploie pas l’appareil pour la fabrication mathématique;

4º Agiter fortement la cuvée au début, afin que le départ de la fermentation se fasse uniformément;

5º Entretenir avec soin la chaleur naturelle des cuves, développée par la fermentation;

6º Eviter l’acidification du chapeau et les développements de fermentations acides ou putrides;

7º Suivre bien exactement la marche de l’opération, afin de parer aux éventualités qui peuvent surgir pendant sa durée.

On peut, pour réaliser ces diverses conditions, employer les moyens que j’ai indiqués précédemment.

Quelques fabricants ne liront peut-être pas sans intérêt la description d’une fermentation faite dans une cuve ordinaire recouverte d’un couvercle en bois, adhérent avec de la farine de lin bouillie.

C’est le récit détaillé d’une fabrication de vins de raisins secs, jour par jour.

Les observations ont été notées avec le plus grand soin. Il se peut que quelques-unes soient utiles à certains propriétaires ou producteurs, c’est pourquoi je conseillerai à mes lecteurs de lire les détails de cette expérience incontestablement pratique.

Expérience faite avec 1.000 kil. de raisins secs, au mois d’avril 1877

La quantité employée a été celle dont généralement on se sert dans la pratique. La manipulation en est facile, les récipients commodes à trouver.

Le 1er avril 1877. – Je reçois dans ma fabrique 1,000 kilog. de raisins Thyra, dans des sacs de 105 à 110 kilog. en moyenne. Dès leur arrivée, je les dirige sur la salle de trempage, où ils commencent à recevoir les soins de propreté que leur état exige. Après avoir ouvert chaque sac, on étend, sur le plancher, les raisins, dont on brise les mottes et dont on sépare les corps étrangers. C’est ainsi que je trouve mélangés, aux grappes, des pierres, des figues, des dattes, des filaments, des herbes, etc. Les raisins sont bien épurés, afin d’éviter les ennuis que peuvent occasionner, dans la suite des diverses opérations, tous ces corps étrangers.

Le 2 avril. – Les 1,000 kilog. de raisins secs ayant été versés de 8 heures à 9 heures du matin, dans la cuve à tremper, avec 22 hectolitres 50 litres d’eau, je fais remuer fortement les raisins et l’eau, afin que le mélange soit bien homogène et qu’il ne reste plus de raisins amalgamés et formant des boules.

Le thermomètre indique une température de 13 degrés, pour l’eau servant au trempage. A 2 heures, à 5 heures et à 9 heures du soir, on agite encore fortement les raisins pendant quelques instants.

Le 3 avril. – Les raisins secs ont trempé environ 24 heures. Leur aspect rappelle complètement celui des raisins frais; ils se sont gonflés et ont repris une certaine apparence de vie. Une grappe entr’autres, à laquelle une douzaine de grains restent encore attachés, est bien faite pour compléter cette illusion. Quelques grains, que je presse entre mes doigts, m’indiquent par leur façon d’éclater en s’écrasant, que la durée du trempage est terminée.

Il est 9 heures du matin, je donne l’ordre de fouler à la machine.32

Voici comment j’ai pratiqué cette opération: La cuve, dans laquelle les raisins ont été mis à tremper, se trouve à la partie la plus élevée de la fabrique, dans l’appartement situé au-dessus des cuves à fermenter. Elle est relevée de telle sorte, que sa base se trouve de niveau avec le sommet de l’entonnoir en bois de la machine qui doit fouler les raisins. Cette précaution est prise dans le but d’éviter une main-d’œuvre de plus, et de permettre aux grains et aux grappes de glisser sans efforts, de la cuve à tremper dans la machine. Elle se trouve placée elle-même immédiatement au-dessus de la cuve à fermenter, qui est dans le cellier.

Les grappes et les raisins se précipitent ainsi, sans aucun travail, de la machine dans la cuve qui doit les recevoir pour fermenter.

Pour établir une plus grande affinité entre la partie liquide et les grappes, pendant qu’un ouvrier les rejette par-dessus le bord, dans la machine à fouler, je fais arriver le moût, dans cette même machine, au moyen d’un robinet placé au bas de la cuve. La partie liquide, dans de pareilles conditions, peut porter sans contestations le nom de jus de raisins.

L’opération du foulage et de la mise en cuve à fermenter, est terminée à trois heures du soir.

Je place immédiatement le couvercle sur la cuve et enduis toutes les jointures de farine de lin bouillie afin d’intercepter complétement le passage de l’air.

Me proposant de fabriquer du bi-carbonate de soude, j’établis au sommet de la cuve à fermenter, un tuyau de verre qui permettra au gaz acide carbonique, d’abord, de s’échapper de la cuve, qu’il ferait éclater sans cette précaution, ensuite, de transformer mon carbonate de soude en bi-carbonate.

Le 4 avril. – Ainsi que j’en avais donné l’ordre, la température est régulière. Le thermomètre du cellier indique 22 degrés de chaleur à 8 heures du matin. Je pèse le moût à l’aréomètre Beaumé en ayant soin d’en prendre du haut, du milieu et du bas de la cuve au moyen de petits robinets, afin d’éviter des erreurs provenant de la différence de degrés qui peut exister dans le moût avant le départ de la fermentation. Le pèse-sirop indique 22 degrés de liqueur.

Le thermomètre coudé, adapté à la cuve, dont le réservoir baigne dans le moût, n’accuse que 15 degrés seulement; la fermentation ne s’est point encore établie. Le soir à 8 heures, le thermomètre donne 16 degrés 5, soit une production naturelle d’un degré et demi de chaleur, de plus, depuis 12 heures.

Le 5 avril. – Je pèse le moût, je constate un sensible mouvement de fermentation; à 8 heures du matin, l’aréomètre indique une tendance à la baisse.

Le thermomètre de la cuve indique un peu plus de 17 degrés de chaleur; le soir, il atteint 18 degrés. Je remarque un petit dégagement d’acide carbonique.

Le 6 avril. – La fermentation existe en plein à 8 heures du matin; le thermomètre de la cuve marque 19 degrés; le moût a perdu un degré de liqueur; le dégagement de l’acide carbonique est vif.

A 3 heures du soir, le thermomètre est à 20 degrés; la fermentation s’accentue davantage; à 5 heures la fermentation développe une chaleur qui atteint près de 21 degrés et devient tumultueuse.

Le 7 avril. – Je pèse le moût à l’aréomètre Beaumé; à 8 heures du matin le degré indiqué est 10 degrés, soit: 2 degrés d’alcool formés. Le thermomètre indique 21 degrés 5; le soir il en marquait 23.

Le 8 avril. – Le thermomètre accuse à 8 heures du matin 23 degrés 5; je pèse le moût à l’aréomètre, son poids est de 9 degrés 5, soit: une perte de sucre de près de 3 degrés ayant servi à produire 3 degrés d’alcool; à 3 heures du soir, le thermomètre atteint 25 degrés.

La fermentation est excessivement vive et sa marche est excellente.

Devant la chaleur naturelle que développe la fermentation, je juge inutile de conserver dans le cellier, une température de 22 degrés et je la maintiens de 15 à 18 degrés environ, seulement.

Le 9 avril. – Le thermomètre, à 8 heures du matin, indique 25 degrés 5; l’opération suit un cours régulier; le pèse-sirop m’annonce, en flottant dans le moût, un poids spécifique de 8 degrés de liqueur, soit: une nouvelle perte d’un degré.

Le 10 avril. – Le thermomètre, à 8 heures du matin, atteint 26 degrés; je pèse le moût qui n’indique plus que 7 degrés.

La fermentation continue à être très-tumultueuse; le dégagement de l’acide carbonique se fait avec une telle force, qu’il éteint une bougie à 15 centimètres du tuyau d’où il s’échappe.

Le 11 avril. – La fermentation est à son apogée; à 8 heures du matin, le thermomètre se maintient à 26 degrés, l’aréomètre indique une perte de 1 degré 5 de sucre et par contre un bénéfice d’autant en alcool; le poids liquoreux est de 5 degrés 5.

Le 12 avril. – Je consulte le thermomètre de la cuve, à 8 heures du matin, et je remarque qu’il a des tendances à redescendre. La fermentation perd un peu de son impétuosité; la transformation alcoolique continue cependant toujours très régulièrement; la densité du moût est de 4 degrés.

Le dégagement de l’acide carbonique, quoique très-abondant, n’est point aussi vif que celui de la veille.

Le 13 avril. – Je remarque que la température intérieure de la cuve a décliné de un degré. Le thermomètre, à 8 heures du matin, est redescendu à 25 degrés; je me prépare à suivre l’opération bien exactement.

C’est la période de décroissance et le moment où le développement de chaleur naturelle qu’engendre la fermentation, à son début, s’arrête.

Afin d’éviter que les ferments ne s’engourdissent, je maintiens la température du cellier à 25 degrés, d’une manière bien régulière; je pèse le moût, et l’aréomètre donne 3 degrés de liqueur; le dégagement du gaz acide carbonique est bien moins fort que précédemment.

Le 14 avril. – Dès mon arrivée, dans le cellier, je remarque la chute du thermomètre à 24 degrés; le refroidissement des grappes continue, la fermentation s’affaiblit, l’aréomètre n’indique plus que 2 degrés de sucre.

L’acide carbonique ne se fait plus que légèrement sentir. Une bougie, que je présente à l’orifice de l’ouverture ménagée au sommet de la cuve pour le dégagement du gaz, ne s’éteint que quand elle est complètement rapprochée.

La production d’acide est presque arrêtée; la fermentation, du reste, touche à sa fin; elle est lente. Je fais une épreuve, avec l’alambic de Salleron, pour connaître la richesse alcoolique véritable du vin; le résultat de l’opération est: 9 degrés 5.

Le 15 avril. – Le thermomètre est descendu à 21 degrés, et la fermentation est insensible; l’aréomètre n’a qu’un demi-degré de différence avec celui qu’il donnait hier; le moût n’a donc plus que un degré de sucre.

Le 16 avril. – Le thermomètre descend toujours et indique 22 degrés à peine. L’aréomètre accuse la perte d’encore un demi-degré, soit la presque complète disparition du sucre.

Je fais une nouvelle épreuve à l’appareil Salleron et j’obtiens 11 degrés 5 d’alcool.

L’opération est de fait terminée.

Je soutirai mon vin, qui fut excellent, et qu’un grand nombre de négociants en vins prirent pour du picpoul, quand je l’eus collé et clarifié avec les précautions que j’indiquerai plus loin.

CHAPITRE XVI
Du Décuvage et du Pressurage

Quand le liquide n’accuse plus que 0 degré à l’aréomètre Beaumé, il faut décuver le vin de raisins secs. Voilà le principe fondamental. Cependant il convient d’attendre encore 24 heures pour obtenir le refroidissement du vin.

Après le soutirage, le liquide subit, durant quelques jours encore dans les tonneaux, une seconde fermentation qu’on a appelé la fermentation lente; la partie liquoreuse achève, par une fermentation insensible, de se transformer. Le vin, retiré de dessus les grappes, ne risque plus ainsi de s’acétifier.

Le moment favorable, à choisir, pour un bon soutirage, a donné lieu à bien des discussions. Malheureusement, ainsi qu’il arrive toujours pour les contestations, dont le point de départ est obscur, les opinions n’ont jamais pu tomber d’accord.

Pour être fixé exactement, sur le véritable moment du soutirage, il est incontestable qu’il est nécessaire de connaître si la transformation du sucre en alcool est terminée.

Pour le décuvage du vin de raisins frais il existe bien d’autres considérations.

Quant aux vins de raisins secs, en attendant que la science fasse revivre un jour, et la couleur et le bouquet, ce qui, je l’espère, arrivera bientôt, le fabricant reconnaît que le moment du soutirage est arrivé aux différents caractères suivants:

 

L’aréomètre Beaumé, dont les indications sont presque toujours certaines, lui offre déjà un moyen simple de reconnaissance. En suivant exactement les diverses variations du thermomètre adapté à la cuve, on peut en tirer aussi des déductions.

Mes lecteurs ont remarqué dans l’expérience que je viens de relater au chapitre précédent, combien le thermomètre m’avait été d’un grand secours pour suivre la marche de l’opération.

En général, on dit, pour soutirer, de ne pas dépasser le moment où la chaleur s’est dissipée tout entière. Ce qui est très vague.

En un mot, le moment le plus propice au décuvage est le terme du développement de l’alcool. J’appellerai donc l’attention des fabricants sur ce point.

Pour être certain du moment opportun, on peut faire chaque jour les expériences suivantes: D’un côté, peser le moût à l’aréomètre Beaumé et d’un autre, le distiller avec l’appareil de Salleron. Personne ne peut hésiter sur le moment où l’on doit regarder la fermentation comme terminée.

Afin de constater d’une manière aisée et simple la disparition totale du sucre dans le moût, il est encore un moyen indiqué par Maumené et à la portée de tout le monde.33

«On se procure du mérinos blanc, on le trempe pendant quelques minutes, dans une solution de une partie de bi-chlorure d’étain et deux parties d’eau. On le fait sécher au bain-marie, sur une bande de même étoffe, et on le découpe en bandelettes (de huit à dix centimètres de long sur trois de large.) Tous les pharmaciens prépareront ces bandes sans peine. Pour juger de l’absence du sucre dans le moût, on met une goutte de ce liquide, sur une bandelette et on la chauffe doucement, au-dessus d’un ou deux charbons. La goutte sèche promptement, et, tout à coup, elle devient noire, s’il reste du sucre; cette couleur noire se forme avant que le mérinos commence à jaunir par l’action du feu. Le sucre se change en caramélin

Il est nécessaire de prendre quelques précautions, pour éviter au vin fini, le contact de l’air. La meilleure précaution est de conduire le vin dans les tonneaux au moyen de tuyaux en cuir ou en caoutchouc.

Voici les conséquences qu’on peut tirer des principes que j’ai établis ci-dessus:

1º Le décuvage doit se faire dès que la partie sucrée s’est transformée en alcool;

2º Quand le vin, que l’on fait est destiné à la distillation et que le but qu’on se propose est la formation d’une grande quantité d’alcool, on peut laisser cuver, plus longtemps, pour permettre cette formation.

Les vins, dans ce cas, sont susceptibles de prendre de faux goûts. Le fabricant doit éviter cela quand le vin est destiné directement à la consommation.

Lorsqu’on a soutiré tout le vin, il faut s’occuper au plus vite, surtout l’été, de faire sortir, au moyen de la pression, celui qui reste absorbé, en assez grande quantité, par les parties solides, telles que les rafles, les pellicules, etc. On transporte donc les grappes au pressoir. Je crois qu’il n’est pas nécessaire de décrire ici la forme de cet instrument et les moyens de s’en servir. Tout le monde le connaît. La majeure partie de mes lecteurs déjà viticulteurs, ont probablement dans leur cellier cet appareil. Depuis quelques années surtout, il est permis aux agriculteurs, de passer une véritable revue de toutes les innovations que cet appareil a reçues, en visitant les concours régionaux. Il en est de plusieurs sortes: à levier, à vis ou à coins. Ces derniers, sont presque partout abandonnés et remplacés par les premiers, à cause de la différence de rendement que l’on obtient.34

La quantité, de liquide, contenue dans les marcs de raisins secs est relativement énorme. Avec un bon pressoir, on retire encore tout près d’un quart de la cuvée. Cette opération est, comme on le voit, essentielle.

Le parti qu’on peut tirer du marc de raisins secs, comme je l’indiquerai au chapitre suivant, étant assez avantageux, il convient de presser, le plus possible, les grappes et de les sécher. Sinon, leur tassement donne naissance par l’échauffement, aux fermentations acides, extérieurement, et putrides, intérieurement; dans cet état elles ne peuvent servir exclusivement que comme engrais pour la culture.

Quant le fabricant se propose d’obtenir des vins de première qualité, il ne doit pas mélanger le vin de presse avec le surmoût ou premier vin.

On doit se tenir en mesure l’été, pour que l’opération du pressurage soit rapidement faite. On évitera ainsi l’acétification des marcs.

Dès que l’on est certain que la fermentation va être terminée, on prépare un récipient large et bas pour recevoir les grappes. On presse de suite, soit directement, soit au moyen de scourtins en sparterie. Les grappes, qui ne sont pas altérées, donnent un vin susceptible, une fois bien clarifié et collé, d’être mélangé sans difficulté avec celui du premier jet.

30Les variétés de sucre étant nombreuses, je renseignerai mes lecteurs sur la qualité la meilleur marché et la plus favorable. (Note de l’auteur).
31Chaque année, à l’époque des vendanges, je donne, dans l’Echo Universel, journal agricole et vinicole que je dirige, tous les renseignements nécessaires pour tripler la récolte de vin. (Bureaux à Marseille).
32A l’époque où cette expérience fut faite, l’appareil pour la fermentation mathématique des vins n’existait pas. Aujourd’hui cette opération et toute cette main-d’œuvre deviennent inutiles dans un grand nombre de cas. (Note de l’auteur).
33Maumené, parag. 420, page 313. (Traité du travail des vins.)
34Plus loin les fabricants trouveront du reste la description, la gravure et le prix du pressoir, qui à mon avis est le meilleur, le plus commode et le meilleur marché des pressoirs. (Voir le prix-courant des Entrepôts Généraux à la fin du volume).