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Micah Clarke – Tome II. Le Capitaine Micah Clarke

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Ce sommeil dura probablement trois ou quatre heures.

J'en fus tout à coup tiré par un bruit pareil à des grincements de gonds.

Je me mis sur mon séant et regardai autour de moi.

La lampe avait fini par s'éteindre et la cellule était plongée dans une obscurité impénétrable.

Une lueur grisâtre à un bout indiquait seule et vaguement la place de l'ouverture.

Ailleurs tout était d'une noirceur dense.

Je tendis l'oreille, mais je ne perçus aucun son.

Et pourtant j'étais certain de ne m'être point trompé, certain que le bruit qui m'avait éveillé s'était produit dans l'intérieur même de ma chambre.

Je me levai et fis à tâtons le tour des murs, en marchant lentement et promenant ma main sur les murs et la porte.

Puis, je passai en tous sens sur le sol pour me rendre compte de l'état du plancher.

Autour de moi, comme sous mes pieds je ne reconnus aucun changement.

Dès lors d'où venait le bruit?

Je m'assois sur le bord du lit et attendis patiemment dans l'espoir de l'entendre une seconde fois.

Il se répéta bientôt.

C'était un gémissement sourd, un craquement pareil à celui qui se produit quand on remue avec lenteur et précaution une porte ou un volet restés longtemps immobiles.

En même temps, une lumière d'un jaune foncé parut en haut, sortant d'une mince fente dans le toit en voûte concave qui était au-dessus de moi.

Pendant que je l'épiais, cette fente s'élargit peu à peu et s'agrandit comme si l'on tirait un panneau à coulisses, et enfin je vis un trou assez grand, par lequel passait une tête qui me regardait, et dont le contour était dessiné par la lumière confuse qui se trouvait derrière elle.

Le bout noué d'une corde fut passé à travers cette ouverture et tomba presque sur le sol de la prison.

C'était une grosse et solide corde de chanvre, assez forte pour porter le poids d'un homme lourd, et en tirant dessus, je m'aperçus qu'elle était fortement assujettie en haut.

Évidemment mon bienfaiteur inconnu désirait que je m'en servisse pour monter.

Je le fis donc, en me servant d'une main après l'autre.

J'éprouvai quelque peine à passer mes épaules à travers le trou, et je réussis à atteindre la pièce qui se trouvait au-dessus.

Pendant que j'étais encore à me frotter les yeux après ce passage brusque de l'obscurité à la lumière, la corde fut rapidement remontée, et le panneau glissant refermé.

Pour ceux qui n'étaient point dans le secret, il ne restait rien qui pût expliquer ma disparition.

Je me trouvai en présence d'un homme replet, de petite taille, vêtu d'un justaucorps grossier et de culottes de basane, ce qui lui donnait jusqu'à un certain point l'air d'un valet d'écurie.

Il avait un large chapeau de feutre très enfoncé sur ses yeux et le bas de sa figure était entouré d'une épaisse cravate.

Il tenait une lanterne de corne, dont la lumière me permit de voir que la chambre, où nous nous trouvions, avait la même dimension que l'oubliette située au-dessous d'elle et n'en différait que par la présence d'une large fenêtre, qui donnait sur la parc.

Il n'y avait dans cette pièce aucun meuble, mais elle était traversée par une grande poutre, sur laquelle avait été assujettie la corde qui avait servi à mon ascension.

– Parlez bas, l'ami, dit l'inconnu. Les murs sont épais, et les portes ferment bien, mais je ne tiens pas à ce que vos gardiens sachent par quels moyens vous avez été volatilisé.

– À vrai dire, monsieur, répondis-je, je puis à peine croire que ce soit autre chose qu'un rêve. Il est extraordinaire qu'on puisse pénétrer aussi aisément dans ma prison, et plus extraordinaire encore pour moi de me trouver un ami qui veuille s'exposer ainsi pour moi.

– Regardez par ici, dit-il, en abaissant sa lanterne de façon à éclairer la partie du plancher où le panneau était encastrée, ne voyez-vous pas combien est vieille et moisie la maçonnerie qui l'entoure? Cette ouverture du toit est aussi ancienne que le donjon même, et bien plus ancienne que la porte par laquelle vous y avez été introduit. C'était, en effet, une de ces cellules en forme de bouteille ou oubliettes, que les rudes gens de jadis avaient inventées pour garder sûrement leurs prisonniers. Une fois descendu par ce trou dans le puits aux parois de pierre, l'homme n'avait plus qu'à se ronger le cœur, car son destin était scellé. Et pourtant, comme vous le voyez, le même procédé qui jadis empêchait son évasion, vous a rendu aujourd'hui la liberté.

– Grâce à votre clémence, Monseigneur, dis-je, en jetant un regard pénétrant sur mon interlocuteur.

– À présent, assez de déguisement comme cela! s'écria-t-il d'un ton boudeur, en rejetant en arrière le chapeau à larges bords et me montrant, ainsi que je m'y attendais, les traits du Duc. Même un jeune soldat sans expérience voit clair à travers mes efforts pour garder l'incognito. Je crains de ne faire qu'un piètre conspirateur, capitaine, car j'ai le caractère ouvert… Oui, après tout, comme le vôtre. Je ne saurais prendre un meilleur terme de comparaison.

– Quand on a entendu une fois la voix de Votre Grâce, on ne l'oublie pas aisément, dis-je.

– Surtout quand elle parle de chanvre et de prisons, répondit-il en souriant. Mais si je vous ai fourré en prison, vous devez avouer que je vous ai offert une compensation en vous en retirant au bout de ma ligne, comme on tire une épinoche d'une bouteille. Mais comment en êtes-vous arrivé à me remettre de tels papiers en présence de mon conseil?

– J'ai fait tout mon possible pour les remettre en particulier, dis-je, et je vous ai envoyé un message dans ce but.

– C'est vrai, répondit-il, mais il m'arrive des messages de cette sorte de tout soldat qui veut vendre son épée, de tout inventeur qui a la langue longue et la bourse plate. Comment deviner que l'affaire était réellement importante?

– J'ai craint de laisser échapper une chance qui pourrait ne jamais revenir, dis-je. On m'a appris que Votre Grâce n'a que peu de loisir dans l'époque présente.

– Je ne saurais vous blâmer, répondit-il, en arpentant la pièce, mais c'était malencontreux. J'aurais pu dissimuler les dépêches, mais cela eût excité les soupçons. Votre plan aurait été percé à jour. Il y a bien des gens qui portent envie à ma haute fortune, et qui sauteraient sur une occasion de me nuire auprès du Roi Jacques. Sunderland ou Somers, n'importe lequel d'entre eux, attiseraient la moindre rumeur en une flamme qu'il serait impossible d'éteindre. Il n'y avait donc d'autre parti à prendre que de montrer les papiers. La langue la plus venimeuse n'a pu rien trouver à blâmer dans ma conduite. Quelle attitude auriez-vous conseillée en pareilles circonstances?

– Celle qui aurait consisté à aller droit au but, répondis-je.

– Oui, oui, monsieur La Probité, mais les hommes publics sont tenus à marcher avec toute la précaution possible, car la ligne droite les conduirait trop souvent au bord du précipice. La Tour ne serait pas assez vaste pour loger tous ses hôtes, si tout le monde allait le cœur dans sa main. Mais à vous, dans ce tête-à-tête, je puis dire mes pensées véritables sans crainte d'être trahi ou mal compris. Je n'écrirai pas un mot sur du papier. Il faut que votre mémoire soit la feuille qui portera ma réponse à Monmouth. Et pour commencer, effacez-en tout ce que vous avez entendu dans la salle du Conseil. Que cela soit comme si l'on n'avait rien dit! Est-ce fait?

– Je comprends que cela ne représentait point les véritables pensées de Votre Grâce.

– Il s'en fallait de beaucoup, capitaine. Mais je vous en prie, dites-moi quelles raisons les rebelles ont-ils de compter sur le succès? Vous avez dû entendre votre colonel et d'autres discuter sur ce sujet, ou remarquer d'après leur attitude ce qu'ils en pensaient. A-t-on bon espoir de tenir tête aux troupes du Roi?

– Jusqu'à présent, répondis-je, on n'a eu que des succès.

– Contre les gens de la milice. Mais ils verront qu'il en est tout autrement quand ils auront affaire à des troupes exercées. Et pourtant!.. et pourtant… Il y a une chose que je sais, c'est que tout échec de l'armée de Feversham causerait un soulèvement général dans tout le pays. D'autre part, le parti du Roi est actif. Chaque courrier nous apporte la nouvelle de renforcements par des levées. Albemarle maintient encore la milice dans l'Ouest. Le comte de Pembroke est en armes dans le Comté de Wilts. Lord Lumley arrive de l'Est avec les troupes du Sussex. Le Comte d'Abingdon tient le Comté d'Oxford. À l'Université, les bonnets et les robes font partout place aux casques et aux cuirasses. Les régiments hollandais de Jacques se sont embarqués à Amsterdam. Et pourtant Monmouth a gagné deux batailles. Pourquoi n'en gagnerait-il pas une troisième. Les eaux sont troubles… bien troubles.

Le Duc allait et venait, les sourcils froncés, se disait tout cela à lui-même plutôt qu'à moi, hochait la tête de l'air d'un homme dans la plus embarrassante incertitude.

– Je voudrais que vous disiez à Monmouth, fit-il enfin, que je lui sais gré des papiers qu'il m'a envoyés, que je les lirai et les examinerai avec l'attention convenable, et que je l'aiderais si je n'étais entravé par des gens qui me serrent de près et qui me dénonceraient si je laissais voir mes véritables pensées. Dites-lui que s'il amène son armée dans ce pays-ci, je pourrai alors me déclarer ouvertement pour lui, mais que le faire en ce moment serait ruiner la fortune de ma maison sans lui être utile en quoi que ce soit. Pouvez-vous lui porter ce message?

– Je le ferai, Votre Grâce.

– Dites-moi, demanda-t-il, comment Monmouth se comporte-t-il en cette entreprise.

– En chef sage et vaillant, répondis-je.

– C'est étrange, murmura-t-il. À la cour, on ne cessait de dire, par manière de plaisanterie, qu'il avait à peine assez d'énergie ou de constance pour achever une partie à la balle et qu'il jetait toujours sa raquette avant d'avoir amener le coup gagnant. Ses projets étaient comme une girouette, tournant à tous les vents. Il n'avait de constant que son inconstance. Il est vrai qu'il a commandé les troupes du Roi en Écosse, mais tout le monde savait que Claverhouse et Dalzell ont été les véritables vainqueurs au Pont de Bothwell. À mon avis, il ressemble à ce Brutus de l'Histoire Romaine qui feignit d'être faible d'esprit pour masquer ses ambitions.

 

Le Duc avait repris ses propos qu'il adressait à lui-même plutôt qu'à moi.

Aussi ne fis-je aucune remarque, si ce n'est pour rappeler que Monmouth s'était gagné le cœur du petit peuple.

– C'est là qu'est sa force, dit Beaufort. Il a dans les veines le sang de sa mère. Il ne trouve pas indigne de serrer la patte sale de Jerry le rétameur, ou de disputer le prix de la course à un rustaud sur la pelouse du village. Ce sont ces mêmes rustauds qui l'ont soutenu, alors que des amis de la haute noblesse sont restés à l'écart. Je voudrais bien pouvoir lire dans l'avenir. Mais vous avez mon message, capitaine, et j'espère que si vous y changez quelque chose en le faisant connaître, ce sera pour y mettre plus de chaleur et de bienveillance. Maintenant il est temps que vous partiez, car les gardes seront relevés dans moins de trois heures et votre évasion sera découverte.

– Mais comment partir? demandai-je.

– Par ici, répondit-il, en ouvrant la fenêtre et faisant glisser la corde sur la poutre dans ce sens. La corde sera peut-être trop courte d'un ou deux pieds, mais vous avez de la taille de reste pour y suppléer. Lorsque vous aurez pris terre, suivez le chemin sablé qui tourne à droite jusqu'à ce qu'il vous amène sous les grands arbres du parc. Le septième de ces arbres a une grosse branche qui passa par-dessus le mur de clôture. Grimpez sur cette branche et laissez-vous tomber de l'autre côté. Vous y trouverez mon valet qui vous attend avec votre cheval. Et en selle, jouez de l'éperon, en toute hâte, avec la vitesse de la poste, dans la direction du Sud. Quand il fera jour, vous devrez vous trouver en dehors du terrain dangereux.

– Mon épée! demandai-je.

– Tout ce qui vous appartient est ici. Redites à Monmouth ce que je vous ai dit et faites lui savoir que je vous ai traité avec toute la bienveillance possible.

– Mais que dira le Conseil de Votre Grâce, en apprenant ma disparition?

– Peuh! mon garçon, ne vous mettez pas en peine de cela. Je partirai pour Bristol dès la pointe du jour et je donnerai à mon conseil assez de sujets de réflexions pour qu'il n'ait pas le loisir de songer à ce que vous êtes devenu. Les soldats ne verront là qu'un autre exemple de l'intervention du Père du Mal, qui depuis longtemps passe pour être épris de cette cellule au-dessous de nous. Sur ma foi, si tout ce qu'on raconte est vrai, il s'y est passé assez de choses horribles pour faire sortir tout ce qu'il y a de diables dans l'abîme. Mais le temps presse. Passez sans bruit par la fenêtre. C'est cela! Rappelez-vous le message.

– Adieu, Votre Grâce, répondis-je.

Et, saisissant la corde, je me laissai glisser à terre rapidement, sans bruit.

Alors il la remonta et ferma la fenêtre.

Lorsque je regardai autour de moi, mon regard tomba sur la fente étroite qui s'ouvrait sur ma cellule et à travers laquelle ce brave fermier Brown avait causé avec moi.

Une demi-heure auparavant, j'étais étendu sur la couchette de la prison, sans espoir, sans aucune idée d'évasion.

Et maintenant me voilà de nouveau au grand air.

Nulle main ne s'étend pour m'arrêter.

Je respire librement.

Prison et potence ont également disparu, comme de mauvais rêves qu'on chasse en se réveillant.

Le cœur, capable de se bien tremper, s'adoucit grâce à la certitude de la sécurité.

Aussi j'ai vu un honnête commerçant se comporter bravement tant qu'il fut convaincu que sa fortune avait été engloutie par l'Océan, mais perdre toute sa philosophie en apprenant que la nouvelle était fausse, et que ses biens avaient traversé le péril sains et saufs.

Pour ma part, assuré comme je le suis que le hasard n'a aucune part dans les affaires humaines, je sentais que j'avais été soumis à cette épreuve pour m'inspirer des pensées sérieuses, et que j'en avais été tiré afin de pouvoir traduire ces pensées en actes.

Comme gage des efforts que je ferais dans ce but, je me mis à genoux sur l'herbe à l'ombre de la tour des Botelers, et je priai, afin de devenir en ce monde un homme utile, d'obtenir le secours nécessaire pour m'élever au-dessus de mes besoins et de mes intérêts pour concourir à tout ce qui se ferait de bon ou de noble dans mon temps.

Il s'est bien passé cinquante ans, mes chers enfants, depuis le jour ou je courbai mon intelligence devant le grand Inconnu, dans le parc de Badminton éclairé par la lune, mais je puis dire sincèrement qu'à partir de ce jour-là jusqu'au jour présent, les objets, que je m'étais proposés, m'ont servi de boussole sur les flots sombres de la vie – boussole à laquelle il m'arrive parfois de ne point obéir – car la chair est faible et frêle, mais qui du moins a toujours été là, pour que je puisse la consulter dans les périodes de doute et de danger.

Le sentier de droite traversait des bosquets et longeait des pièces d'eau peuplées de carpes pendant un bon mille.

J'arrivai enfin à la rangée d'arbres qui suivait le mur de clôture.

Je ne vis pas un être vivant sur mon trajet, excepté une harde de daims qui s'enfuirent comme des ombres légères sous le clair de lune pâlissant.

Je me retournai.

Je vis les hautes tours et les pignons de l'aile des Botelers se dessiner en noir d'un air menaçant contre le ciel étoilé.

J'arrivai au septième arbre.

Je grimpai sur la grosse branche qui passait par-dessus la muraille du parc et je me laissai tomber de l'autre côté, où je trouvai mon bon vieux gris-pommelé m'attendant sous la surveillance d'un palefrenier.

Je m'élançai en selle, me ceignis une fois encore de mon épée et partie au galop, d'un train aussi rapide que le comportaient quatre jambes pleines de bonne volonté, pour retourner à mon point de départ.

Je chevauchai pendant toute cette nuit-là sans tirer les rênes, traversant des hameaux endormis, des fermes baignées de clair de lune, longeant des cours d'eau brillants, furtifs, franchissant des collines couvertes de bouleaux.

Quand le ciel d'Orient passa de la teinte rouge à la teinte écarlate, et que le grand soleil montra son bord par-dessus les hauteurs bleues du comté de Somerset, j'avais déjà accompli une bonne partie de mon trajet.

C'était au matin d'un jour de sabbat et de tous les villages arrivait le doux tintement d'appel des cloches.

Je ne portais alors sur moi plus de papiers compromettants.

Aussi pouvais-je voyager avec plus d'insouciance.

Quelque part, un gardien de route au regard pénétrant me demanda où j'allais, mais lorsque je lui eus répondu que je venais de chez Sa Grâce le Duc de Beaufort, cela suffit pour dissiper ses soupçons.

Plus loin, près d'Axbridge, je rencontrai un marchand de bestiaux qui se rendait à Wells au trot lourd de son cob luisant.

Je chevauchai quelque temps en sa compagnie et appris que toute la région nord du comté de Somerset était maintenant en pleine révolte, et que Wells, Shepton Mallet et Glastonbury étaient occupés par les volontaires en armes du Roi Monmouth.

Toutes les forces royales s'étaient repliées vers l'Ouest ou l'Est, jusqu'à ce qu'il leur vint des renforts.

En traversant les villages, je vis le drapeau bleu aux clochers des églises, les paysans s'exerçant sur la pelouse, et je n'aperçus nulle part de fantassins ou de dragons pour faire reconnaître l'autorité des Stuarts.

Mon trajet me fit passer par Shepton Diallet, l'auberge du joueur de flûte, Bridgewater, et North Petherton.

Enfin, quand arriva la fraîcheur du soir, j'arrêtai mon cheval fatigué à l'enseigne des Mains jointes et aperçus les clochers de Taunton dans la vallée au-dessous de moi.

Une cruche de bière pour le cavalier, un grand seau d'avoine pour le cheval rendirent leur ardeur à l'un et à l'autre, et nous nous étions remis en route, quand accoururent, descendant la pente avec toute la vitesse dont ils étaient capables, une quarantaine de cavaliers.

Ils allaient d'un tel train, que je m'arrêtai, ne sachant si c'étaient des amis ou des ennemis, mais quand ce tourbillon arriva près de moi, je reconnus dans les deux officiers qui les conduisaient, Ruben Lockarby et Sir Gervas Jérôme.

En me voyant, ils agitèrent les mains, et Ruben fit un bond qui le jeta sur la crinière de son cheval, où il resta un instant, jambe de çà, jambe de là, jusqu'au moment où l'animal le rejeta en selle.

– C'est Micah! criait-il d'une voix haletante.

Après quoi il resta la bouche béante, les larmes jaillissant sur sa bonne figure.

– Corbleu, l'ami! Comment êtes-vous venu ici? dit Sir Gervas en me lardant avec son index comme pour s'assurer que j'étais là en chair et en os. Nous partions en enfants perdus dans le pays de Beaufort, pour le rosser et lui brûler sous le nez sa belle maison, s'il vous était arrivé malheur. Un valet d'écurie est arrivé il n'y a qu'un instant, envoyé par un fermier de là-bas, pour nous informer que vous étiez sous le coup d'une condamnation à mort. Sur quoi je suis parti, avec ma perruque à moitié frisée, et j'ai appris que l'ami Lockarby avait obtenu de Lord Grey un congé pour se rendre dans la Nord avec ces hommes. Mais comment avez-vous été traité?

– Bien et mal, répondis-je en serrant les mains d'amis. La nuit dernière, je ne comptais pas voir un nouveau lever de soleil, et pourtant vous me revoyez ici bien portant, au complet. Mais il faudrait du temps pour raconter tout cela.

– Oui, et le Roi Monmouth sera sur les épines, en vous attendant. Volte-face, mes gars, et en route pour le camp. Jamais mission ne fut plus vite et plus heureusement terminée que la nôtre. Il aurait fait mauvais pour Badminton si vous aviez été endommagé.

Les troupiers firent demi-tour et revinrent au petit trot à Taunton, où je rentrai entre mes deux fidèles amis.

Ils m'apprirent tout ce qui s'était passé en mon absence, et de mon côté je leur contai mes aventures.

La nuit était venue avant que nous eussions franchi les portes.

J'y confiai Covenant aux soins du valet d'écurie du Maire et me rendis tout droit au château pour faire mon rapport sur ma mission.