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Robert Burns

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Naturellement; les poètes ont fait usage de leurs connaissances florales pour en tirer des images. Les femmes ont été, par eux, comparées aux fleurs, de mille manières ingénieuses. On comprend que, s'il est un point difficile à rajeunir, ce soit celui-là. Les poètes contemporains s'en tirent en reportant leurs similitudes sur des fleurs rares et tropicales. Burns n'avait pas cette ressource. Cependant, ses petites offrandes de fleurs familières resteront parmi tant d'autres. Elles n'ont ni la variété, ni les luxuriances de coloris de certaines gerbées, mais elles sont si simples et si fraîches! Ce ne sont pas des bouquets assortis aux beautés fières et fastueuses de grandes dames. Les siens sont cueillis «en un champ voisin», et faits pour des corsages de paysannes simples et fraîches comme eux.

 
Oh! l'amour s'aventurera
Là où il n'aimerait pas être vu;
Oh! l'amour s'aventurera
Où la prudence était naguère;
Mais j'irai par cette rivière,
Et parmi ces bois si verts,
Et j'y formerai un bouquet
Pour ma très chérie May.
 
 
Je cueillerai la primevère,
Première mignonne de l'année;
Et je cueillerai l'œillet,
L'emblème de ma chérie,
Car elle est un œillet parmi les femmes,
Elle est la fleur sans rivale;
Et j'en formerai un bouquet
Pour ma très chérie May.
 
 
Je cueillerai la rose entr'éclose,
Quand Phébus jette un premier regard,
Car elle est comme un baiser embaumé
De sa douce et jolie bouche;
L'hyacinthe est pour la constance,
Avec son bleu inaltérable;
Et j'en formerai un bouquet
Pour ma très chérie May.
 
 
Le lis est une fleur pure,
Et le lis est une belle fleur,
Et dans son sein délicat
Je placerai la fleur du lis;
La pâquerette est pour la simplicité
Et un air candide;
Et j'en formerai un bouquet
Pour ma très chérie May.
 
 
Je cueillerai l'aubépine,
Avec sa chevelure grise et argentée,
Là où comme un vieillard
Elle se tient dans l'aube;
Mais le nid du petit chanteur dans le buisson,
Je ne l'emporterai pas;
Et j'en formerai un bouquet
Pour ma très chérie May.
 
 
Je cueillerai le chèvrefeuille,
Quand l'étoile du soir est proche,
Et les gouttes diamantées de rosée
Seront ses yeux si clairs;
La violette est pour la modestie,
Il lui sied bien de la porter;
Et j'en formerai un bouquet
Pour ma très chérie May.
 
 
Je mettrai autour du bouquet
Le ruban de soie de l'amour,
Et je le placerai à sa poitrine,
Et je jurerai par les cieux
Que jusqu'à ma dernière goutte de vie
Ce ruban restera noué;
Et j'en formerai un bouquet
Pour ma très chérie May597.
 

Il a repris maints des sujets et des comparaisons ordinaires parmi les poètes, mais avec le coloris, l'éclat d'épithètes, une sorte de sensualité de couleur, qui frappent dans nos poètes de la Renaissance. Il a, comme eux, cette qualité que les mots tels que: rosée, rose, mai, qui pour nous sont un peu usés, ont l'air d'être neufs chez lui. Il semble comme eux les avoir employés avec joie, nouveauté et naïveté. Ils ont gardé tout leur lustre matinal. Les deux pièces qui suivent n'ont-elles pas la teinte riche et pourprée de certaines pièces de Ronsard? Elles ont été composées toutes deux pour Miss Cruikshank, la fille de son ami d'Édimbourg, presque une enfant, comme celle que Ronsard appelait «fleur angevine de quinze ans598». Ce sont ces pièces qu'un critique appelle: «the rosebud pieces to Miss Cruikshank». Elles ne sont que l'idée, exprimée avec des qualités semblables, dans ces vers des Amours:

 
Comme on voit sur la branche, au mois de mai, la rose
En sa belle jeunesse, en sa première fleur,
Rendre le ciel jaloux de sa vive couleur,
Quand l'aube, de ses pleurs, au poinct du jour l'arrose,
La Grâce dans sa feuille et l'Amour se repose,
Embaumant les jardins et les arbres d'odeur599.
 

Comme eux, elles valent surtout par le coloris des mots.

 
Beau bouton de rose, jeune et brillant,
Fleurissant dans ton prime Mai,
Puisses-tu ne jamais, douce fleur,
Frissonner dans la froide averse!
Que jamais le froid passage de Borée,
Que jamais le souffle empoisonné de l'Eurus,
Que jamais les funestes lumières stellaires
Ne te touchent d'une nielle précoce!
Que jamais, jamais le ver perfide
Ne se nourrisse de ta fleur virginale!
Que le soleil lui-même ne regarde pas trop ardemment,
Ton sein rougissant dans la rosée.
 
 
Puisses-tu longtemps, douce perle cramoisie,
Richement parer ta tige native;
Jusqu'à ce qu'un soir doux et calme,
Distillant la rosée, exhalant le baume,
Tandis que les bois d'alentour résonneront
Des oiseaux qui chanteront ton requiem,
Au son de leur chant funèbre,
Tu épandes autour de toi tes beautés mourantes,
Et rendes à la terre, ta mère,
La plus adorable forme qu'elle ait jamais produite600.
 

La seconde pièce ressemble beaucoup à celle-ci; elle est peut-être encore plus riche et plus fraîche de couleur.

 
Un bouton de rose, près de mon chemin matinal,
Dans un abri au bord des blés,
Courbait gracieusement sa tige épineuse,
Dans la rosée, un matin.
Avant que les ombres de l'aube deux fois aient fui,
Épanouie dans sa gloire cramoisie,
Et penchant richement sa tête emperlée,
Elle embaume le jeune matin.
 
 
Dans le buisson était un nid,
Un petit linot le couvait tendrement,
La rosée perlait froide sur sa poitrine,
Si tôt dans le jeune matin.
Il verra bientôt sa chère couvée,
L'orgueil et la joie du bois,
Parmi les fraîches feuilles vertes et humides
Éveiller le jeune matin.
 
 
Ainsi, cher oiseau, jeune et belle Jenny,
Sur les cordes tremblantes, ou de ta douce voix,
Tu chanteras pour repayer les tendres soins
Qui protègent ton jeune matin;
Ainsi, doux bouton de rose, jeune et brillant,
Tu brilleras somptueusement tout le jour,
Et tu pareras les rayons du soir de ce père
Qui a veillé sur ton jeune matin601.
 

Ce sont là les pièces extrêmes dans cette direction, celles où il y a le moins de sentiment et le plus d'habileté technique. Le plus souvent quand il reprend un de ces motifs, il y ajoute quelque chose de lui. Le fond de la petite pièce suivante est bien peu de chose. Elle est cependant si délicatement travaillée qu'elle peut prendre sa place parmi les pièces modèles de ce genre.

 
Tandis que les alouettes de leurs petites ailes,
Battaient l'air pur,
Pour goûter l'haleine du printemps
Je sortis et marchai:
Gaiement l'œil d'or du soleil
Regardait par-dessus les hauts monts;
«Tel est ton matin, m'écriai-je,
Phillis, la jolie!»
 
 
Aux chansons insouciantes des oiseaux,
Heureux, je prenais ma part;
Et parmi ces fleurs sauvages
Le hasard me conduisit.
Doucement, sous le jour qui s'ouvrait,
Les boutons de rose inclinaient la branche;
«Telle est ta fleur, dis-je,
Phillis, la jolie!»
 
 
Au fond d'une allée ombreuse
Des colombes s'aimaient;
J'aperçus le cruel faucon
Saisi dans un piège.
«Puisse la Fortune être aussi bonne,
Et réserver un destin semblable
À qui voudrait te faire injure,
Phillis, la jolie!602»
 

La plupart du temps, quand il prend un de ces canevas tout faits, il commence par y broder quelques jolis détails, curieux par la finesse du travail. Mais cette habileté d'ouvrier ne va pas jusqu'à la fin, et la pièce se termine par une touche de sentiment naturel, sincère, et qui contraste avec la simple dextérité du début.

 
 
Oh! joli était ce buisson de roses,
Qui fleurit si loin des demeures des hommes;
Et jolie était celle, et ah! combien chère
Qu'il abritait du soleil couchant.
 
 
Ces boutons de rose, dans la rosée matinale,
Comme ils sont purs parmi les feuilles si vertes!
Mais plus pur était le vœu de l'amant
Qu'ils entendaient hier dans leur ombre.
 
 
Sous son dais rude et piquant,
Combien douce et belle est cette rose cramoisie!
Mais l'amour est une bien plus douce fleur
Dans le sentier épineux et fatigant de la vie.
 
 
Que ce ruisseau écarté, sauvage et murmurant,
Avec ma Chloris dans mes bras soit à moi,
Je ne désirerai ni ne mépriserai le monde
Résignant à la fois ses joies et ses peines603.
 

Dans la pièce suivante, cette donnée, si commune, d'un amoureux s'adressant à un oiseau qui gémit, donnée analogue à celle du sonnet de Ronsard:

 
Que dis-tu? Que fais-tu, pensive tourterelle,
Dessus cet arbre sec? – Las! passant, je lamente. —
Pourquoi lamentes-tu? – Pour ma compagne absente!604
 

et qu'on retrouve dans des sonnets de Pétrarque605, finit par disparaître presque complètement. La sensibilité vraie envahit le morceau et ne laisse plus place à l'habileté de l'artiste. Cela devient simple et touchant.

 
Oh! reste, doucement gazouillante alouette des bois, reste,
Ne quitte pas à cause de moi le rameau tremblant;
Un amant malheureux recherche ta chanson,
Ta plainte calmante et aimante.
Redis, redis ce tendre passage,
Pour que je puisse apprendre ton art touchant;
Car sûrement il fondrait le cœur de celle
Qui me tue en me dédaignant,
 
 
Dis-moi, ta petite compagne fut-elle cruelle?
T'a-t-elle écouté comme le vent insouciant?
Oh! rien que l'amour et le chagrin unis
Ne peut éveiller de telles notes de douleur.
Tu parles de chagrin immortel,
De douleur silencieuse et de sombre désespoir;
Par pitié, doux oiseau, tais-toi,
Ou mon pauvre cœur se brisera606.
 

Il faut bien entendre que ce n'est là qu'un coin très secondaire et très artificiel de ses poésies amoureuses. Il suffit de noter que, même sur ce métier de travail purement littéraire qui n'était pas le sien, et pour ce fin ouvrage de ciselure de vers auxquels ses mains n'étaient pas faites, il a égalé ce qui a été fait de plus net et de plus brillant dans ce genre. Et il convient aussi de ne pas oublier que, sauf les quelques plus grands chantres de l'amour, les autres poètes, dont les pièces forment l'anthologie de cette passion, n'ont guère dépassé ce degré de goût exquis et de légère main-d'œuvre.

Il lui arrive quelquefois, comme pour ne laisser aucune corde qu'il n'ait touchée, d'être plus subtil, plus recherché, et en quelque sorte plus moderne. Ce n'est pas qu'il approche jamais des enveloppements presque indéchiffrables d'images, ou des finesses presque insaisissables de sentiment, qui charment certains artistes modernes, à la suite des gens de la Renaissance. Il n'a pas même l'idée de ces complexités, de ces quintessences. Il est loin de ceux qui saisissent les nuances d'un sentiment, en les isolant du sentiment lui-même; comme s'ils observaient les couleurs qui passent sur un visage, sans voir le visage. Il est à l'autre pôle des plus ténus et des plus sublimés des poètes, qui analysent des émotions si fines qu'elles sont impalpables, qui pèsent de l'impondérable dans de l'imperceptible, et ne semblent jamais avoir dans la main que de la poussière d'émotion. Il est bien loin aussi de ceux qui, placés aux limites de la passion, n'en étudient que les reflets lointains et les dernières colorations mourantes. Il reste toujours près du foyer ardent. Il pose fermement un sentiment plein, entier. S'il rend une phase plus fine d'émotion elle a encore pour cadre l'émotion générale dont elle dépend, qui la raffermit et la soutient. Il y a toujours sous ces teintes plus fugitives le ton franc et simple. La recherche ne l'écarte jamais beaucoup du sentier très clair et très droit qu'il suit d'ordinaire. Ainsi il imagine un compromis entre l'amour et l'amitié, mais ce sera quelque chose de bien peu compliqué, de très primitif, où ce qu'il y a d'un peu plus recherché dans le sentiment est à peine souligné par un peu plus de recherche dans les images.

 
Retourne-toi, encore, ô belle Eliza,
Un regard de bonté avant que nous ne nous quittions,
Prends pitié du désespéré qui t'aime!
Peux-tu briser son cœur fidèle?
Retourne-toi encore, ô belle Eliza;
Si ton cœur se refuse à aimer,
Par compassion cache la cruelle sentence,
Sous le bon déguisement de l'amitié.
 
 
T'ai-je donc offensée, ô bien-aimée?
Mon offense est de t'avoir aimée:
Peux-tu détruire pour jamais la paix
De celui qui mourrait joyeusement pour la tienne?
Tant que la vie battra dans ma poitrine,
Tu seras mêlée à chaque battement;
Retourne-toi encore, ô adorable fille,
Accorde-moi encore un doux sourire.
 
 
Ni l'abeille au cœur de la fleur,
Dans l'éclat d'un midi soleilleux;
Ni la petite fée qui se joue
Sous la pleine lune d'été;
Ni le poète, au moment
Où la fantaisie s'allume en son œil,
Ne connaît le plaisir, ne ressent l'extase
Que ta présence me donne607.
 

Ou bien; parlant d'une douleur d'amour, au lieu de se plaindre simplement comme il le fait d'ordinaire, il rendra une idée un peu plus complexe et analogue à celle que termine le beau vers:

 
Et vis de ta douleur, n'en pouvant pas guérir608.
 

mais il n'ira pas au-delà; c'est à peu près la borne de son raffinement.

 
Où sont les joies que jadis je rencontrais le matin,
Et qui dansaient à la chanson matinale de l'alouette?
Où est la paix qui attendait mes promenades,
Le soir, parmi les bois sauvages?
 
 
Je ne suis plus le cours sinueux de cette rivière,
Regardant les douces fleurettes si belles;
Je ne suis plus les pas légers du Plaisir,
Mais le Chagrin et les Soucis aux tristes soupirs.
 
 
Est-ce que l'Été a abandonné nos vallées,
Et le sombre et morose Hiver est-il proche?
Non! Non! les abeilles, bourdonnant autour des éclatantes roses,
Proclament que c'est maintenant l'orgueil de l'année.
 
 
Volontiers je voudrais cacher ce que je crains de découvrir,
Ce que depuis longtemps, trop longtemps, je sais trop bien;
Ce qui a causé ce désastre dans mon cœur
Est Jenny, la douce Jenny toute seule.
 
 
Le Temps ne peut me secourir, ma peine est immortelle,
L'Espoir n'ose pas m'apporter une consolation:
Allons, énamouré et épris de mon angoisse,
Je chercherai de la douceur dans ma souffrance609.
 

Parfois cette sensation de modernité, qu'on découvre çà et là chez lui, ressort d'un mélange plus curieux de paysage et de sentiment. La pièce suivante, par exemple, doit son charme à ce que le paysage, au lieu d'être égal et bien assis comme les effets habituels de soleil ou de nuit, est un effet intermédiaire beaucoup plus rare chez lui. Ce vaste et vague horizon, peint d'un trait, dépasse les descriptions ordinaires. Cette ville aperçue dans la lumière du soir, et qui revient à chaque instant, donne un pittoresque et une couleur qui étaient rares alors. Le morceau entier est comme traversé et empourpré par un rayon du couchant. C'est une impression distinguée, dans le genre de celles qui ont été atteintes plus tard par les poètes, lorsque trouvant les grands effets rendus ils ont été obligés d'en chercher de plus fins et de plus rares.

 
Oh! savez-vous, qui est dans cette ville,
Sur laquelle vous voyez le soleil couchant?
La plus belle dame est dans cette ville
Sur laquelle brille le soleil couchant.
 
 
Peut-être là-bas, dans ce bois vert et brillant,
Elle erre, près de cet arbre touffu.
Heureuses fleurs, qui fleurissez autour d'elle,
Vous obtenez les regards de ses yeux!
 
 
Heureux oiseaux qui chantez autour d'elle,
Souhaitant la bienvenue à l'année fleurie!
Et doublement bienvenu soit le printemps
La saison chère à ma Lucy.
 
 
Sur la ville là-bas, le soleil étincelle,
Parmi les coteaux couverts de genêts;
Mes délices sont dans cette ville là-bas
Et mon plus cher trésor est la belle Lucy!
 
 
Sans ma bien-aimée, tous les charmes
Du paradis ne me fourniraient pas de joie;
Mais donnez-moi Lucy dans mes bras,
Et bienvenu soit le morne ciel des Lapons!
 
 
Ma caverne serait une chambre d'amoureux,
Bien que l'hiver furieux déchirât l'air;
Et elle serait une jolie petite fleur
Que j'y soignerais, que j'y abriterais!
 
 
Oh! douce est celle qui est dans cette ville,
Sur laquelle est descendu le soleil baissant;
Sur une plus jolie que celle qui est dans cette ville
N'ont jamais brillé ses rayons couchants.
 
 
Si le destin courroucé jure qu'il est mon ennemi,
Si je suis condamné à porter la souffrance,
Je quitterai sans peine tout le reste ici-bas,
Mais laissez-moi, laissez-moi ma Lucy bien-aimée.
 
 
Car, tant que le sang le plus précieux de la vie sera chaud,
Pas une de mes pensées ne s'éloignera d'elle,
Et elle, comme elle a la plus belle forme,
Possède le cœur le plus fidèle et le plus aimant.
 
 
Oh! savez-vous qui est dans cette ville,
Sur laquelle vous voyez le soleil couchant?
La plus belle dame est dans cette ville
Sur laquelle brille le soleil couchant610.
 

Il y a, dans cette allée un peu écartée de son œuvre, des pièces qui font penser à Henri Heine, à certains côtés de Henri Heine. On suppose, en effet, qu'il est mutile de marquer les différences; il n'a ni la saisissante étrangeté d'images, ni l'affinement d'une souffrance toujours à vif, ni l'exquise douceur amère du poète allemand. Ses abeilles n'ont pas voltigé sur les noires absinthes; leur miel est plus simple. Cependant, il y a chez lui un sentiment assez troublant et raffiné qui se trouve à un haut degré dans Heine. Celui-ci, au-delà de tous les poètes, a éprouvé la sensation d'emporter en soi le regard de la bien-aimée, le malaise d'être hanté par des yeux chers et cruels, ce qu'il y a de douloureux dans leur insistance implacable et caressante. «Tes grands yeux de violette je les vois briller devant moi, jour et nuit; c'est là ce qui fait mon tourment; que signifient ces énigmes douces et bleues611»? Il les retrouve partout. Les étoiles sont les chers et doux yeux de sa bien-aimée qui veillent sur lui, qui brillent et clignotent du haut de la voûte azurée612. Il a écrit sur eux ses plus beaux canzones, ses plus magnifiques stances613 et des milliers de chansons qui ne périront pas614. Et, de fait, il n'y a guère de place où il n'en parle: «Ô les doux yeux de mon épousée, les yeux couleur de violette; c'est pour eux que je meurs615». – «Avec tes beaux yeux, tu m'as torturé, torturé, et tu me fais mourir616». Cette obsession et ce tourment du regard féminin, si caractéristique de Henri Heine, et que Pétrarque avait déjà connu quand il parlait de «ces beaux yeux qui tiennent toujours en mon cœur leurs étincelles allumées; c'est pourquoi je ne me lasse point de parler d'eux617» est bien le fait d'un raffiné. Cet appel de tout un être dans les yeux, cette faculté d'y attirer ce qu'il y a de plus précieux dans une âme et de résumer une personne en un regard, au point d'en souffrir, d'en mourir même, n'appartient qu'à des hommes qui vivent d'une pensée assez ardente pour fondre tout un être dans une expression intangible618. C'est l'indice d'un amour très spiritualisé et très intellectuel. Burns a éprouvé, presque à l'égal de Henri Heine, cette tyrannie du regard, et il y a certaines pièces de lui qu'on ne serait pas étonné de rencontrer dans le Retour ou le Nouveau Printemps. On peut citer une de ses premières pièces où déjà ce goût du regard se révèle. Elle est un peu longue, mais elle est aussi intéressante par une suite de comparaisons naturelles dont quelques-unes sont exquises et dont d'autres font penser à celles du Cantique des Cantiques.

 
 
Sur les rives du Cessnock vit une fillette;
Si je pouvais décrire sa fortune et son visage;
Elle surpasse de loin toutes nos fillettes,
Et elle a deux yeux étincelants et malicieux.
Elle est plus douce que l'aube du matin,
Quand Phœbus commence à se montrer,
Et que les gouttes de rosée brillent sur les gazons;
Et elle a deux yeux étincelants et malicieux.
Elle est droite comme ce jeune frêne
Qui se dresse entre deux pentes couvertes de primevères,
Et boit le ruisseau, dans sa fraîche vigueur;
Et elle a deux yeux étincelants et malicieux.
Elle est sans tache comme l'épine épanouie,
Avec des fleurs si blanches et des feuilles si vertes,
Quand elle est pure dans la rosée matinale;
Et elle a deux yeux étincelants et malicieux.
Son air est comme le mai vernal,
Quand Phœbus brille sereinement, le soir,
Quand les oiseaux se réjouissent sur toutes les branches;
Et elle a deux yeux étincelants et malicieux.
Sa chevelure est comme le brouillard floconneux
Qui gravit, le soir, le flanc des montagnes,
Quand les pluies qui ravivent les fleurs ont cessé;
Et elle a deux yeux étincelants et malicieux.
Son front est comme l'arc pluvieux,
Quand des rayons brillants s'interposent,
Et dorent le front de la montagne lointaine;
Et elle a deux yeux étincelants et malicieux.
Ses joues sont comme cette perle cramoisie,
L'orgueil du parterre de fleurs,
Qui commence à s'ouvrir sur sa tige épineuse;
Et elle a deux yeux étincelants et malicieux.
Sa gorge est comme la neige de la nuit,
Quand le matin se lève pâle et froid,
Tandis que les ruisseaux murmurants coulent cachés;
Et elle a deux yeux étincelants et malicieux.
Ses lèvres sont comme ces cerises mûres,
Que des murailles ensoleillées abritent de Borée,
Elles tentent le goût et charment la vue;
Et elle a deux yeux étincelants et malicieux.
Ses dents sont comme un troupeau de brebis
Aux toisons nouvellement lavées,
Qui montent lentement la colline rapide;
Et elle a deux yeux étincelants et malicieux.
Son haleine est comme la brise parfumée
Qui agite doucement les fèves en fleurs,
Quand Phœbus s'enfonce derrière les mers;
Et elle a deux yeux étincelants et malicieux.
Sa voix est comme la grive, le soir,
Qui chante sur les bords du Cessnock, cachée,
Tandis que sa compagne couve son nid dans le buisson;
Et elle a deux yeux étincelants et malicieux.
Mais ce n'est pas son air, sa forme, son visage,
Bien qu'ils égalent la reine fabuleuse de la beauté,
C'est l'esprit qui brille dans toutes ses grâces;
Et surtout dans ses yeux malicieux619.
Une autre pièce a un refrain presque semblable:
Je vois un corps, je vois un visage,
Qu'on peut mettre avec les plus beaux;
Mais pour moi, la grâce enchanteresse y manque,
Le doux amour qui est dans son œil.
Ceci n'est pas ma vraie fillette,
Toute jolie que soit cette fillette-ci;
Oh! je connais bien ma vraie fillette
À la tendresse qui est dans son œil.
Elle est belle, fleurissante, droite et grande,
Et depuis longtemps tient mon cœur captif,
Et toujours ce qui charme le plus mon âme,
C'est le doux amour qui est dans son œil620.
 

On trouve chez lui des images comme celles-ci:

 
Son joli visage était aussi calme
Qu'un agneau sur l'herbe;
Le soleil du soir ne fut jamais si doux
Que l'était le regard des yeux de Phémie621
 

Ou comme cette autre qui, sous sa forme étroite, fait penser aux images à la fois précieuses, forcenées et passionnées de la Renaissance, si fréquentes chez Shakspeare622:

 
Sa chevelure d'or, sans rivale,
Descendait, ruisselait sur son cou neigeux,
Et ses deux yeux, comme des étoiles dans les cieux,
Sauveraient du naufrage un navire sombrant623.
 

Celle-ci enfin n'est-elle pas tout à fait dans la manière de Henri Heine?

 
J'ai passé hier par un chemin malheureux,
Un chemin, j'en ai peur, dont je me repentirai;
J'ai reçu la mort de deux yeux doux,
Deux charmants yeux d'un joli bleu.
 
 
Ce ne fut pas ses brillantes boucles d'or,
Ses lèvres pareilles à des roses humides de rosée,
Son sein ému, blanc comme un lis;
Ce furent ses yeux si joliment bleus.
 
 
Elle parla, elle sourit, elle déroba mon cœur,
Elle charma mon âme; j'ignore comment;
Mais toujours le coup, la blessure mortelle
Venait de ses yeux si joliment bleus.
 
 
Si je peux lui parler, si je peux l'approcher,
Peut-être écoutera-t-elle mes vœux;
Si elle refuse, je devrai ma mort
À ses deux yeux si joliment bleus624.
 

Ne fait-elle pas penser à cette tendre évocation de regards azurés du Nouveau Printemps? «Avec tes yeux bleus, tu me regardes fixement, et moi je deviens si rêveur que je ne puis parler. C'est à tes yeux bleus que je pense toujours; un océan de pensées bleues inonde mon cœur625». Et cette image-ci, juste et étrange à la fois, ne se rapproche-t-elle pas encore davantage des fantaisies de Heine?

 
Faut-il que j'aime toujours,
Et supporte le mépris qui est dans son œil?
Car il est noir, noir de jais, et il est comme un faucon,
Il ne veut pas vous laisser en repos626.
 

C'est, avec une métaphore différente, la même impression que dans cet autre passage de Heine: «Dans son doux et pâle visage, grand et puissant, rayonne son œil semblable à un soleil noir; noir soleil, combien de fois tu m'as versé les flammes dévorantes de l'enthousiasme627». Mais encore un coup, ce ne sont là de Burns que des allées écartées de son jardin d'amour, où croissent quelques plantes plus rares. Celles qui foisonnent au cœur même du jardin, là où tombe franchement le soleil, sont plus simples.

Dans toutes les pièces amoureuses de Burns, il faut faire un groupe de celles où il a mélangé la poésie pastorale et la poésie amoureuse. Il y a là un coin absolument ravissant de fraîcheur, de naturel, et de réalité embellie. À vrai dire, les poètes ont de tout temps aimé à placer l'amour au milieu de riantes descriptions. Ils semblent percevoir confusément que cette passion est la même force par laquelle le monde palpite, et que, dans ses profondeurs, elle a des rapports avec la sève qui chaque année renouvelle la parure de la terre. Quand il a cessé d'exister ailleurs, le sentiment de la nature s'est encore conservé dans les poésies amoureuses. Nulle part, cette union n'a été plus constante que dans la littérature anglaise. Burns y a réussi autant qu'aucun autre. Tout naturellement, ses scènes d'amour se placent parmi les fleurs et les ombrages.

Ce n'était pas pour Burns un artifice de poète, un cadre factice. Ses jeunes amours avaient été des amours de paysan, tout faits de rendez-vous dans les champs, de travail côte à côte pendant les moissons, ou de rencontres sur les grands moors déserts où la solitude amène le bonjour et un bout de causerie. Ces intrigues campagnardes ont toujours un fond de paysage à peine indiqué.

 
La lune descendait à l'ouest,
Avec un visage pâle et effaré,
Quand mon beau gars, tisserand de l'ouest
Me reconduisit à travers le vallon628.
 

Un thème inépuisable, parce qu'il correspondait à la réalité, sont ces rencontres, soit dans les blés où l'on se croise en ces étroits sentiers qui passent par les champs, soit dans les bruyères. Les épis hauts sont favorables:

 
En revenant par les orges, pauvre quelqu'un,
En revenant par les orges,
Elle a sali tout son jupon,
En revenant par les orges.
 
 
Oh! Jenny est toute mouillée, pauvre quelqu'un,
Jenny est rarement à sec;
Elle a sali tout son jupon,
En revenant par les orges.
 
 
Si quelqu'un rencontre quelqu'un,
En revenant par les orges;
Si quelqu'un embrasse quelqu'un,
Faut-il que quelqu'un crie?
 
 
Si quelqu'un rencontre quelqu'un,
En revenant par le vallon,
Si quelqu'un embrasse quelqu'un,
Faut-il qu'on le sache?629
 

Les moors sont aussi bien dangereux. Leurs longues étendues abandonnées sont tristes à traverser seule. On chemine de compagnie, afin que la route semble plus courte; semble, seulement, car il arrive qu'elle dure plus longtemps. Il faut qu'un moor soit bien maussade pour n'avoir pas un coin riant: on s'y repose, on devise, et il en résulte une autre jolie chanson.

 
Il y avait une fillette; on l'appelait Meg,
Et elle traversait le moor pour aller filer;
Il y avait un gars qui la suivait,
Et on l'appelait Duncan Davison.
Le moor était long, et Meg était ombrageuse,
Duncan ne pouvait obtenir sa faveur,
Car elle le frappait avec la quenouille,
Et le menaçait avec la bobine.
 
 
Comme ils traversaient légèrement le moor,
Voici un ruisseau clair et un vallon vert,
Sur la rive, ils se reposèrent,
Et toujours elle mettait la roue entre eux deux.
Mais Duncan jura un serment sacré
Que Meg serait une fiancée le lendemain,
Alors Meg prit tous ses ustensiles,
Et les jeta par dessus le ruisseau.
 
 
Nous bâtirons une maison, une petite, petite maison,
Et nous vivrons comme roi et reine,
Si joyeux et si gais serons-nous,
Quand tu seras assise à ton rouet, le soir.
Un homme peut boire et ne pas être gris;
Un homme peut se battre et ne pas être tué;
Un homme peut embrasser une jolie fille,
Et être bienvenu à recommencer630.
 

Ces rencontres amènent des rendez-vous, tantôt parmi les hauteurs où les moutons sont répandus, tantôt au bord d'un ruisseau où les arbres sont épais, tantôt plus secrètement au bout du jardin. Quelques-unes de ces scènes ont une jolie saveur de poésie rustique, à moitié réelle et à moitié transformée, comme dans les meilleures pages de George Sand. Ce dialogue, entre un berger et son amoureuse, est bien dans cette note, et ce refrain, qui se répète comme le rappel des moutons vers le soir, évoque, mieux que ne le ferait une description, le paysage où le troupeau est épars:

 
Appelle les moutons sur la colline,
Appelle-les où croît la bruyère,
Appelle-les où court le ruisseau,
Ma jolie chérie.
 
 
Comme je passais au bord de l'eau,
J'y ai rencontré mon gars berger;
Il m'a doucement enroulée dans son plaid,
Et il m'a appelée sa chérie.
 
 
«Veux-tu venir par le bord de l'eau,
Et voir les flots doucement glisser,
Sous les noisetiers tout grands ouverts?
La lune brille très claire.
 
 
Tu auras des robes et de beaux rubans,
Et des souliers en cuir de veau à tes pieds,
Et dans mes bras, tu te reposeras et dormiras,
Et tu seras ma chérie».
 
 
«Si vous tenez ce que vous promettez,
J'irai avec vous, mon gars berger,
Et vous pourrez m'enrouler dans votre plaid,
Et je serai votre chérie».
 
 
Tant que les eaux courront à la mer,
Tant que le jour brillera dans ce haut ciel,
Jusqu'à ce que la mort froide comme l'argile ferme mes yeux,
Vous serez mon chéri.
 
 
Appelle les moutons sur la colline,
Appelle-les où croît la bruyère,
Appelle-les où court le ruisseau,
Ma jolie chérie631.
 

On voit, comme dans la pièce précédente, que les fillettes sont habituées à se défendre et savent poser leurs conditions. On s'étonnera moins de leur facilité à accepter ces promesses, si l'on se rappelle qu'il y avait toujours une sorte de sanction dans les décisions de la session ecclésiastique. On peut citer encore une autre chanson qui résume en quelque sorte tous ces rendez-vous rustiques; il y a une première strophe qui est belle, et, dans cette strophe, les deux vers sur ces bouleaux «lumineux de rosée» dans l'ombre suffiraient seuls à lui donner un rare prix.

 
Quand, au-dessus de la colline, l'étoile orientale
Annoncera l'instant de parquer les moutons, mon ami,
Et que les bœufs, du champ tracé de sillons,
S'en iront tristes et fatigués, Ô;
Là-bas, près du ruisseau, où les bouleaux parfumés
Pendent lumineux de rosée, mon ami,
Je te retrouverai sur la berge herbeuse,
Mon cher bien-aimé, Ô!
 
 
Dans la plus sombre glen, à l'heure de minuit,
Je marcherai, sans avoir peur, Ô;
Si à travers cette glen, je vais vers toi,
Mon cher bien-aimé, Ô!
Si farouche, si farouche que soit la nuit,
Si lasse, si lasse que je sois, Ô,
Je te retrouverai sur la berge herbeuse,
Mon cher bien-aimé, Ô!
 
 
Le chasseur aime le soleil matinal
Pour faire lever les daims des montagnes, mon ami;
À midi, le pêcheur cherche la gorge
Pour y suivre le ruisseau, mon ami;
Donnez-moi l'heure du crépuscule gris,
Cela fait mon cœur joyeux, Ô,
De te retrouver sur la berge herbeuse,
Mon cher bien-aimé, Ô!632
 

D'autres pièces du même genre sont peut-être plus fines, comme les deux suivantes, dont la seconde surtout est une perle.

597Oh, Luve will Venture in.
598Ronsard. Les Amours, Marie.
599Ronsard. Les Amours, Marie.
600To Miss Cruikshank, Written on the Blank Leaf of a Book, presented to her by the Author.
601A Rosebud by my Early Walk.
602Philis the Fair.
603O boine was yon rosy Brier.
604Ronsard. Les Amours, Marie.
605Sonnet XLIII. La plainte du rossignol lui rappelle celle qu'il croyait ne jamais perdre. Ce rossignol qui pleure, d'une façon si suave, peut-être ses petits ou sa chère compagne, remplit de douceur le ciel et les campagnes de tant de notes mélancoliques et tendres! Et toute la nuit, il semble m'accompagner et me rappeler ma cruelle destinée; car je n'ai pas à me plaindre d'un autre que moi; car je ne croyais pas que la mort eût pouvoir sur les divinités… Sonnet LXXXIX. Le chant triste d'un petit oiseau lui rappelle ses propres chagrins. Bel oiselet qui vas chantant ou pleurant tes jours passés, en voyant la nuit et l'hiver à tes côtés, et le jour ainsi que les mois joyeux derrière tes épaules! Si, comme tu connais tes maux pesants, tu connaissais mon état semblable au tien, tu viendrais dans le sein de cet inconsolé pour partager avec lui les douloureuses plaintes. Je ne sais si les parts seraient égales; car celle que tu pleures est peut-être en vie, tandis que la Mort et le Ciel sont tant avares pour moi. Mais la saison et l'heure moins propice, ainsi que le souvenir des douces années et des années amères, m'invitent à te parler avec pitié. (Sonnets et canzones après la mort de Madame Laure). Nous empruntons ces sonnets à la très belle traduction de M. Francisque Reynard, si poétique, si colorée, et qui rend si bien l'étonnant sentiment pittoresque et les qualités de peintre de primitives fresques italiennes, qu'il y a dans Pétrarque.
606Address to the Woodlark.
607Fair Eliza.
608Edmond Arnould. Sonnets et Poèmes, sonnet XXI.
609Fair Jenny.
610O wat ye wha's in yon Town.
611Henri Heine. Le Retour, XXX.
612Id. Mer du Nord. Dans la cabine. Pendant la nuit.
613Intermezzo, XIII.
614Le Retour, LVI.
615Nocturnes. Le Chevalier Olaf.
616Le Retour, LVI.
617Pétrarque. Sonnets et canzones pendant la vie de Madame Laure. Sonnet XLVII. (Traduction de Francisque Reynard).
618Cette souveraineté du regard dans les amours idéalistes, où l'élément intellectuel est prévalent, apparaît très clairement dans Pétrarque. On peut lire ses sonnets XXXII et XLVII, dans les Sonnets et Canzones pendant la vie de Madame Laure, et surtout les canzones VI, Il fait grand éloge des yeux de Laure et avoue la difficulté qu'il y a à les louer; VII, Les yeux de Laure s'élèvent à contempler les chemins du ciel; VIII, Il trouve tout son bonheur dans les yeux de Laure et proteste qu'il ne cessera jamais de les louer. On y rencontre des passages qui rappellent quelques-uns de ceux de Heine: «Beaux yeux, où Amour fait son nid, c'est à vous que je consacre mon faible style… Principe de mon doux martyre, je sais bien que personne autre que vous ne me comprend… Je ne me plains pas de vous, ô yeux plus doux qu'aucun regard mortel, ni d'amour qui me tient ainsi lié» (Canzone vi). – «Ma gente Dame, je vois, dans le mouvement de vos yeux, une douce lumière qui me montre la voie qui conduit au ciel; et par suite d'une longue habitude, je vois à travers eux, où j'habite seul avec Amour, reluire quasi-visiblement votre cœur… Depuis ce jour, j'ai été content de moi, emplissant d'une haute et suave pensée, ce cœur dont les beaux yeux de Laure ont la clef… Brillantes, angéliques, heureuses étincelles de ma vie, où s'allume le plaisir qui doucement me consume et me ronge, de même que disparaît et fuit toute autre lumière là où la vôtre vient à resplendir, ainsi, quand une si grande douceur y descend, toute autre chose, toute autre pensée sort de mon cœur, et seul Amour y reste avec vous… Aussi combien il me fait tort, le voile et la main qui se mettent si souvent entre mon suprême plaisir et les yeux d'où, jour et nuit, découle le grand désir apaisant mon cœur, dont l'état varie selon l'aspect de Laure.» (Canzone VII). – (Traduction Francisque Reynard).
619The Lass of Cessnock Banks.
620This is no my ain Lassie.
621Blithe was she.
622Pour des images de ce genre voir, par exemple, le passage où Roméo se dit, en voyant Juliette regarder le ciel. Ce n'est pas à moi qu'elle parle:Deux des plus belles étoiles dans tout le firmament,Ayant quelque chose qui les appelle, supplient ses yeuxDe briller à leur place jusqu'à ce qu'elles reviennent.Quoi! Si ses yeux étaient là-haut, et les étoiles dans sa tête,L'éclat de sa joue effacerait ces astres,Comme la lueur du jour efface une lampe; ses yeux dans le cielRépandraient une telle lumière dans les régions aériennesQue les oiseaux se mettraient à chanter, pensant que ce n'est plus la nuit. Roméo, Acte II, scène 2. Et pour l'image du navire sauvé, voir celle qui est dans Othello, quand Cassio raconte que le navire a été épargné parce qu'il portait Desdémona. Les tempêtes elles-mêmes, la mer enflée et les vents hurlants,Les rochers déchirés, les sables amoncelés,Tous traîtres cachés pour saisir la carène innocente,Comme s'ils avaient conscience de la beauté, oublientLeur nature destructive, et laissent passer en toute sûretéLa divine Desdémona. (Othello, Acte II, scène 1). L'image de Burns n'est d'ailleurs pas très éloignée de la métaphore de Pétrarque: «De même que le nocher fatigué est contraint, par la fureur des vents, à lever les yeux vers les deux lumières qui brillent sans cesse au pôle, ainsi, dans la tempête d'amour que j'essuie, les yeux brillants de Laure sont mon guide et mon seul confort.» (Sonnets et Canzones pendant la vie de Madame Laure). Canzone VIII (Traduction de Francisque Reynard).
623O Molly's meek.
624The Blue-eyed Lassie.
625Nouveau Printemps, XIX.
626Song, composed in Spring.
627Mer du Nord. Le Naufrage. Voir aussi Le Retour, VIII.
628My Heart was ance as blithe and free.
629Coming through the Rye.
630There was a Lass, they ca'd her Meg.
631Ca' the Ewes.
632My ain kind Dearie, O.