Ne Pas Défier Le Cœur

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Ce sentiment de panique le submergea de nouveau lorsqu'il sentit les regards de Suki et Kamui dans son dos. Shinbe était son frère... un gardien. Qu'avait-il fait ? Ne les regardant pas, Toya serra les poings et cria soudainement :

 Je n'ai rien fait !

Voulant s'échapper, il traversa la clairière en se dirigeant vers les bois.

Kaen et Kamui se regardaient mutuellement en partageant le même sentiment inquiétant.

*****

Kyoko était assise à son bureau, aiguille et fil en main. Elle avait décidé de coudre l'imperméable de Shinbe puisqu'il était déchiré à certains endroits. Elle devait s'occuper, car avec Toya parti et Shinbe évanoui... elle ne pouvait même pas demander à qui que ce soit ce qui s'était passé. Elle avait l'impression qu'ils se battaient à cause d'elle.

 C'était juste un stupide baiser, marmonna-t-elle d'un air coupable.

Après que grand-père avait retiré les vêtements de Shinbe, elle les avait pris pour nettoyer le sang tandis que Tama aidait grand-père à panser les blessures qui guérissaient déjà. Si Shinbe n'avait pas été un gardien pouvant se guérir rapidement, il se serait vidé de son sang en quelques minutes. Alors qu'elle regardait l'une des déchirures du tissu, elle imagina les griffes de Toya et frissonna.

Il était assez amoché, mais la bosse sur sa tête était la pire. Son grand-père lui avait dit qu'il resterait probablement inconscient un certain temps à cause de cela. Il lui avait également dit que lorsque deux gardiens se battaient, c'était un peu plus dangereux que pour des humains. Grand-père et ses légendes... elle n'avait pas besoin d'une légende pour comprendre que c'était mauvais. Elle espérait simplement que Shinbe n'avait pas de lésions cérébrales. Pour lui, être inconscient aussi longtemps n'était pas bon signe. Elle priait pour le voir se réveiller et lui dire que tout allait bien.

Kyoko était assise à ses côtés depuis que grand-père l'avait bandé et posé soigneusement sur le lit de Kyoko. Elle n'avait pas dormi depuis, par peur de ne pas être au courant de son réveil.

Shinbe ouvrit lentement les yeux face à la faible lumière de la chambre. Où était-il ? Il fixa le plafond blanc avec confusion. Sa tête, qu'est-ce qu'elle faisait mal. Il essayait de regarder autour de lui, mais cela faisait aussi mal. Il y avait du rose partout. Où était-il ?

 Aïe !

Kyoko se piqua avec l'aiguille et mit son doigt dans sa bouche, le suçant. Elle s'était légèrement tournée sur sa chaise et Shinbe la vit, la lumière de la lampe de bureau brillant sur son visage.

 Je dois être au paradis, chuchota Shinbe à travers ses lèvres sèches.

Il observait tandis que les yeux de Kyoko s'élargissaient, puis elle se tourna pour le regarder. Il essayait de sourire mais sa tête lui faisait trop mal, il ferma donc les yeux.

Kyoko renversa presque sa chaise en essayant d'aller vers lui si rapidement.

 Shinbe, non, ne te rendors pas déjà, supplia-t-elle d'une voix tremblante.

Elle était au bord des larmes. Shinbe ouvrit les yeux en sentant le sel dans les airs. Était-elle en train de pleurer ? Il essaya de s'asseoir, mais une douleur cuisante traversa sa tempe.

Kyoko posa sa main sur son épaule.

 N'essaye pas de t'asseoir. Tu as été profondément blessé.

Elle essuya sa joue mouillée avec le revers de sa main et sourit lorsqu'il ouvrit de nouveau les yeux.

 Tu crois ?

Il essayait de sourire, mais sa tête n'allait pas bien. Il mit sa main derrière sa tête pour la tenir dans sa paume.

 Hum, grosse bosse.

Il regarda Kyoko d'un air interrogateur.

Kyoko ne pouvait pas s'en empêcher :

 Espèce d'abruti, tu aurais pu te faire tuer.

Elle fondit en larmes, posant ses mains sur son visage, elle sanglotait.

Shinbe tendit la main et passa le dos de son doigt sur sa joue.

 Je suis désolé Kyoko, j'espère que Toya est aussi amoché que mes sentiments.

Kyoko découvrit son visage et le fixa.

 Je n'en sais rien.

Elle lui tourna le dos et se dirigea vers le bureau, prenant un pichet d'eau et en versant dans un verre. Tout d'un coup, elle était en colère contre eux deux. Ils étaient censés chercher le talisman ensemble, pas se battre.

 Tu ne sais pas ?

Shinbe essaya de hausser les sourcils, mais réalisa que tout son corps lui faisait mal. De là, il décida que la prochaine fois qu'il se battrait contre Toya, il ne se contenterait pas de se défendre... la prochaine fois, il riposterait.

Kyoko traversa la pièce et l'aida à boire de l'eau. Elle lui sourit avec une étincelle dans les yeux.

 Je n'ai pas vu Toya depuis que je lui ai lancé le sort de domptage près du temple.

Quelque part, elle savait que cela réconforterait Shinbe.

Il essaya de rire, mais se mit à tousser.

 Sort de domptage ?

Posant sa main sur son torse bandé, il grogna :

 Ne me fais pas rire. Ça fait mal.

Kyoko avait une expression peinée.

 Je suis vraiment désolée, Shinbe. On ne pouvait pas t'emmener voir un médecin humain sans... eh bien, tu sais. Grand-père a essayé de te soigner autant qu'il le pouvait, et la plupart des blessures visibles ont guéri.

Shinbe cligna des yeux, plutôt que hocher la tête.

 Je comprends. Merci de m'avoir soigné.

La curiosité l'envahissait.

 Mais tu n'es pas allé voir Toya ?

Kyoko se leva, lui tournant le dos.

 Non, je suis restée avec toi, attendant que tu te réveilles.

Elle marcha vers le bureau, prenant la bouteille d'aspirine mais la reposa, sachant que cela n'aiderait pas un gardien.

 Pourquoi étiez-vous en train de vous battre ? Chuchota-t-elle, ne voulant pas entendre la réponse.

Elle reprit la bouteille en se disant que cela ne pourrait pas faire de mal.

 Combien de temps suis-je resté inconscient ? Chuchota Shinbe, essayant de ne pas aggraver la douleur.

Il avait entendu sa question mais... il valait mieux garder cela entre entre lui et Toya.

Elle se tourna, revenant vers lui.

 Plusieurs heures.

Kyoko plaça l'aspirine sur ses lèvres et reprit le verre d'eau.

 Tiens, prends ça.

Il obéit, se disant :

 Elle est restée à mes côtés toute la nuit ?

Il ferma les yeux, méditant sur cette question. Puis, il sentit sa main fraîche sur son front et rouvrit les yeux.

Kyoko sourit.

 Je ne peux pas croire que tu sois là... de mon côté du cœur du temps.

Elle haussa les épaules comme si cela n'avait pas d'importance, mais cela en avait.

 Eh bien, maintenant que je sais que ça va aller pour toi, je pense que je devrais y retourner et dire aux autres qu'on ne reviendra pas avant longtemps. Tu te reposes et je serai là à ton réveil.

Shinbe la fixa, sidéré. Son regard parcourait la pièce en réalisant ce qu'il avait manqué. Il était dans son monde ! Il avait dû se cogner la tête très fort pour ne pas s'en être rendu compte.

Attendez. Il reposa ses yeux d'améthyste sur elle. De quoi est-ce qu'elle parlait, ne pas y retourner avec elle ? Et si Toya l'empêchait de revenir ? Et si quelque chose lui arrivait ? Il était censé chercher le talisman avec eux. Il était censé la protéger de Hyakuhei.

Shinbe essaya de s'asseoir pour le lui dire, mais la douleur saisit son cerveau et il retomba sur le lit en grognant.


Kyoko s'arrêta en plein chemin, se retournant pour le regarder d'un air implorant.

 Shinbe, s'il te plaît. N'essaye pas de te lever. On ne peut pas savoir si tes blessures intérieures ont guéri et je ne voudrais pas que tu te vides de ton sang en mon absence.

Elle avait presque dit cela sur le ton de la plaisanterie, mais il souffrait toujours et cela voulait dire qu'il pourrait aggraver les choses s'il bougeait.

 Kyoko, je ne peux pas rester ici. Je ne sais même pas où on est.

Il commençait à paniquer en se disant qu'elle allait le laisser tout seul. Elle devait sentir sa peur car elle le rassura en ouvrant la porte.

 

 Ne t'inquiète pas, Shinbe. Je vais demander à grand-père de te tenir compagnie.

Elle ferma la porte avant qu'il ait pu protester.

Chapitre 6 « Malentendus »

Après avoir trouvé grand-père et lui avoir dit que Shinbe était réveillé, Kyoko prit son sac à dos et le remplit de tout ce que ses amis aimaient. Elle prit du bœuf séché pour Toya, des barres de chocolat pour Kamui, et bien sûr, le chewing-gum préféré de tout le monde.

En y repensant, elle prit quelques bouteilles de soda et du chocolat recouvert d'amandes pour Suki et Sennin. Kyoko sourit, se sentant mieux maintenant qu'elle savait que Shinbe se rétablirait bientôt. Pourtant... elle devait parler à cœur ouvert à Toya concernant la bagarre et le fait qu'il aurait pu tuer son propre frère. Elle se demandait silencieusement comment Shinbe avait pu passer à travers le cœur du temps. L'autel ne l'aurait pas laissé passer sans raison.

 Probablement pour que je puisse m'interposer, marmonna Kyoko dans sa barbe.

Elle ajouta également les fournitures typiques qu'elle leur ramènerait, comme des bandages et de l'aspirine. Regardant dans la cuisine, elle se demandait si elle devait aller voir Shinbe une dernière fois, puis décida que non. C'était déjà assez dur de le quitter. Elle pouvait toujours voir le regard implorant dans ses yeux d'améthyste, comme s'il la suppliait de ne pas partir, mais elle ne partirait que quelques heures. Tout irait bien avec grand-père et Tama. Fermant son sac à dos, elle se dirigea vers le temple.

*****

Le petit groupe avait passé les dernières heures à essayer de trouver Shinbe. Ils ne pouvaient même pas trouver sa trace, ils ne savaient donc pas par où commencer. Ils ne pouvaient qu'imaginer le pire, même s'ils n'avaient pas de preuves. Cela les rendait fous d'inquiétude. Pour empirer les choses, Toya n'était jamais revenu à la cabane ce soir-là et cela leur faisait croire qu'il avait peut-être quelque chose à voir avec cette disparition.

En ne revenant pas après plusieurs heures, Suki était sûre d'avoir raison. Avec Kyoko partie, tout semblait encore pire.

 Je le jure, si Toya revient, je le tuerai moi-même.

Suki sanglotait dans ses mains tandis que Sennin la réconfortait.

Kamui était assis à côté d'elle en silence tandis qu'il imaginait Shinbe mort. Mais il le saurait si Shinbe était mort... n'est-ce pas ? Kaen et lui avaient su que quelque chose était caché dès l'instant où ils avaient pénétré dans la clairière... quelque chose concernant les ondes de la zone empestée de colère et de quelque chose d'autre qu'ils ne pouvaient pas nommer.

Une autre preuve était que certains rochers autour de la statue de la jeune fille avaient été déterrés. Et où était Kyoko ? Avec cette pensée, Kamui se demandait ce qui s'était passé... Kyoko était-elle aussi blessée ? Elle n'était toujours pas revenue, et il commençait à s'inquiéter. Il soupira, sachant que Kaen était toujours dehors.

 Coucou, il y a quelqu'un ? Dit Kyoko d'un ton enjoué tandis qu'elle ouvrait la porte de la cabane.

Elle remarqua immédiatement la détresse de Suki. Laissant son sac à dos à la porte, elle courut vers Suki.

 Qu'est-ce qui ne va pas ? Qu'est-ce qui s'est passé ?

Elle se laissa tomber à côté de son amie car Suki ne pleurait jamais... elle était trop coriace pour ces trucs de fille.

Suki renifla et essuya ses yeux avec le revers de sa main. Ses lèvres s'écartèrent et elle essaya de parler :

 Oh, Kyoko.

Elle se retourna et sanglota de nouveau, incapable de parler de ses peurs à son amie.

Sennin posa sa main sur l'épaule de Kyoko, regardant la fille, puis dit d'une voix calme :

 Kyoko, est-ce que je peux te parler dehors ?

Kyoko regarda Sennin puis Suki, et se leva lentement.

 Ã‡a doit être quelque chose de grave, songea Kyoko. Est-ce que quelque chose de grave est arrivé à Toya, ou ont-ils eu des nouvelles de la disparition du frère de Suki, Hikaru ?

Elle avait un très mauvais pressentiment qui se glissait dans son dos.

Elle suivit Sennin à l'extérieur.

 Qu'est-ce qu'il y a Sennin ? Qu'est-ce qui s'est passé ?

Kyoko ne s'était jamais dit qu'ils étaient inquiets pour Shinbe. Elle pensait que Toya leur avait dit où le trouver.

Sennin tourna le dos à Kyoko, sachant qu'il allait devoir gérer une autre scène déchirante. C'était trop pour lui. Cela allait briser le cœur de Kyoko, savoir que Toya avait peut-être tué Shinbe. Il décida de lui parler simplement de leur peur.

 Kyoko, nous pensons que Toya a blessé Shinbe... et on n'arrive pas à les trouver.

Sa voix semblait plus âgée que d'habitude, et empreinte de tristesse et d'une touche de défaite. Il attendait les cris de douleur que la jeune fille allait bientôt pousser. En ne les entendant pas, il se tourna, juste à temps pour voir Kyoko retourner dans la cabane.

Kyoko s'assit sur le sol près de Suki et prit son amie dans ses bras.

 Ã‡a va, Suki. Shinbe va bien.

Elle berça son amie.

 D'une manière ou d'une autre... il a traversé le cœur du temps avec Toya. Il est blessé, mais il va s'en remettre.

Suki cessa de respirer un instant, puis repoussa Kyoko en haletant et en la regardant furieusement tout en essuyant ses yeux avec sa main.

 Shinbe... n'est pas mort ?

Elle continuait à fixer Kyoko.

Kyoko fronça les sourcils.

 Non, il a beaucoup de blessures, mais il n'est pas mort. Je suis revenue pour vous faire savoir qu'il se remet.

Elle se demandait silencieusement pourquoi Toya ne leur avait rien dit.

Kamui écoutait les paroles de Kyoko et s'interrogeait dessus. Maintenant, il savait pourquoi il ne pouvait pas sentir Shinbe... il n'était même pas dans ce monde. Il quitta la cabane pour trouver Kaen afin de le prévenir et mettre un terme à la recherche. Il aurait voulu que ses grands frères, Kotaro et Kyou, apparaissent et l'aident d'une quelconque façon à régler cette situation. Il repensa à Kyoko.

 Du moment qu'ils se blessent entre eux mais pas elle, chuchota Kamui, mais l'oppression de sa poitrine ne faiblissait pas.

S'il le devait... il la protégerait tout seul.

Suki se leva.

 Il-il est resté avec toi toute la nuit, Kyoko ? On-on a vu Toya avec du sang sur les mains.

Elle bégaya puis marqua une pause, la colère envers Kyoko pour avoir gardé ce secret montait en elle.

Kyoko se leva.

 Où est Toya ? Quand je le trouverai, je vais...

Suki l'interrompit en pleine phrase.

 Il était avec toi tout ce temps ? Shinbe était avec toi dans ton temps ?

La voix de Suki avait un ton accusateur, et Kyoko était sidérée.

 Tu as attendu si longtemps pour venir nous prévenir. Ne pensais-tu pas qu'on serait inquiets pour lui ?

Kyoko secoua la tête.

 Je suis désolée, Suki. Je ne voulais pas le laisser avant d'être sûre qu'il était...

Elle vit le visage de Suki devenir rouge et recula.

 Toute la nuit ? On l'a cherché quasiment toute la matinée, on avait peur qu'il soit mort ou allongé quelque part, blessé ! Et là tu reviens toute heureuse, me disant qu'il est avec toi !

Elle pointa du doigt son amie d'un air accusateur.

 Tu aurais dû venir plus tôt. Tu aurais dû...

Elle craqua, un sanglot quittant son corps, soulagée de savoir que Shinbe allait bien.

Kyoko mit son bras autour de la fille pour la réconforter.

 Je suis désolée, Suki. Je n'ai pas réfléchi. Ses blessures étaient assez graves. J'avais peur de le laisser avant son réveil. J'avais tellement peur de le perdre.

Suki repoussa Kyoko, sa colère montant de nouveau en flèche face aux paroles de Kyoko.

 Tu... pensais que tu allais le perdre ?

Elle fixa Kyoko en retenant ses larmes.

 Pourquoi se battaient-ils, Kyoko ? Est-ce qu'ils se battaient à cause de toi ?

Kyoko était surprise par cette question. Elle ne savait pas quoi répondre. Elle ne pouvait pas lui dire qu'elle avait embrassé Shinbe, et que Toya les avait vus. C'était Suki, son amie qui aimait secrètement Shinbe. La culpabilité la rongeait. Trahissait-elle son amie ? Elle regarda le sol en bois, le trouvant soudainement très intéressant.

Elle n'était pas amoureuse de Shinbe mais elle...

 Bon sang, à quoi est-ce que je pense ?

Elle serra ses poings, s'exaspérant elle-même de penser à Shinbe de cette façon, alors que celle qui l'aimait vraiment se tenait devant elle. Elle devait savoir ce que Suki ressentait vraiment.

 Suki, es-tu amoureuse de Shinbe ? Demanda-elle rapidement, n'ayant pas l'intention d'éviter la raison pour laquelle les deux gardiens se battaient.

Suki lui tourna le dos, ses joues devenant rouges face à cette question. Était-elle amoureuse de lui ? Elle se le demandait. Oui, elle avait des sentiments pour lui. Mais amoureuse, de la manière dont Kyoko l'avait suggéré ? Elle secoua la tête. Elle n'aimerait jamais aucun homme. Surtout pas Shinbe. C'était hors de question. Peut-être qu'elle pourrait l'aimer s'ils réussissaient à tuer Hyakuhei, et se débarrasser de la malédiction de Shinbe. Mais... non, elle ne pouvait pas tomber amoureuse de lui. Elle ne pourrait pas supporter un autre chagrin.

Confuse par ses propres sentiments, elle se retourna vers Kyoko :

 Tu évites la question, Kyoko ! Je t'ai demandé s'ils se battaient à cause de toi ?

Maintenant, elle était celle qui évitait une question, mais c'était une question à laquelle elle ne voulait vraiment pas répondre, ou penser.

Kyoko soupira, haussant les épaules.

 Je ne sais pas. Toya ne vous a-t-il pas raconté ce qui s'est passé ?

Elle jeta un coup d’œil à la porte en se demandant où il était.

 Où est Toya ? Est-ce qu'il va bien ?

Soudain, Kyoko frissonna, réalisant que l'absence de Toya était ce qui les avait empêchés d'être au courant.

Suki explosa.

 Quoi ?! Toya est parti après qu'on l'a trouvé. Ses griffes étaient couvertes de sang, Kyoko ! Il était...

Suki fut interrompue par Sennin entrant dans la cabane.

 Peux-tu arrêter de brailler, Suki ?

Il s'assit sur le matelas et ramassa un bâton, tisonnant le feu devant lui.

 Kyoko, viens t'asseoir. Dis-nous ce que tu sais.

Kyoko regarda Suki. Elle n'aimait pas savoir que son amie était en colère contre elle. Pourquoi se battaient-ils tous les uns contre les autres, tout d'un coup ? Ils avaient toujours été soudés et prêts à se défendre... quelque chose n'allait pas. Elle s'assit et commença à leur raconter ce qui s'était passé, des sources chaudes à l'apparition de Shinbe dans son temps.

 

Bien sûr, elle ne mentionna pas le baiser, simplement que Toya était en colère car elle était en sous-vêtements.

 Voilà, c'est tout. Il s'est réveillé avant que je vienne ici. Il est en très mauvais état.

Elle secoua la tête, regardant ses mains.

 Grand-père dit que ça prendra quelques jours avant qu'il puisse se lever et bouger de nouveau.

Suki releva brusquement la tête.

 Quoi ? Il ne peut pas rester dans ton temps !

Elle baissa instantanément les yeux, se sentant bizarre. D'où venait cette jalousie, tout d'un coup ?

Sennin posa sa main sur le bras de Suki.

 Calme-toi, tu ne voudrais pas qu'il revienne en étant toujours blessé.

Suki soupira.

 Mais c'est trop long. On peut tout aussi bien s'occuper de lui ici.

Elle n'aimait pas le fait que le groupe ait été séparé.

Sennin gloussa.

 Oui, mais pour revenir, il faudrait qu'il voyage à travers le cœur du temps. Le stress lié à quelque chose d'interdit pourrait aggraver ses blessures.

Kyoko se leva.

 Je ne veux vraiment pas partir, mais je suis simplement revenue pour vous dire qu'il allait bien. Je ferais mieux d'y retourner avant que grand-père et Tama le rendent fou.

Elle prit son sac à dos et sourit nerveusement tandis que Kamui entrait dans la cabane, leurs yeux se croisant.

Kamui ne pouvait pas s'empêcher de prendre Kyoko dans ses bras et de la serrer fort. Il allait mieux maintenant qu'il savait que Toya n'avait pas sérieusement blessé Shinbe. En ne voyant pas Kyoko revenir, il avait pensé au pire.

 Je garderai un œil sur eux de ce côté. Ramène-nous notre Shinbe.

Il sourit, l'amour dansant dans ses yeux multicolores. Il avait voulu lui dire qu'il était tout aussi en colère contre elle que Suki.

Kyoko lui sourit en lui tendant une boîte de chocolats.

 Ne mange pas tout trop rapidement. Je ne veux pas que tu aies mal au ventre.

Elle passa sa main dans les reflets soyeux et violets de ses cheveux et lui rendit son câlin. Elle était heureuse, il y avait au moins une personne qui ne lui en voulait pas. Kamui avait toujours eu le cœur le plus doux.

Elle chuchota près de son oreille pour que Suki ne l'entendît pas :

 Si Toya revient, dis-lui que je dois le voir.

Kamui hocha la tête.

Suki était assise en tournant le dos à Kyoko.

 Dis à Shinbe qu'il ferait mieux de se remettre rapidement.

Elle renifla et Kyoko se sentit soudainement vraiment coupable. Lâchant Kamui, elle posa les choses qu'elle avait ramenées pour les autres près de la porte, ne voulant pas embêter Suki une nouvelle fois. Elle savait qu'elle trouverait les fournitures et les cadeaux plus tard. Elle dit au revoir, puis se dirigea seule vers l'autel, se demandant où Toya était.

*****

De l'autre côté du portail temporel, Shinbe était allongé sur le lit avec les yeux fermés, essayant de couvrir les bavardages insensés de grand-père avec ses propres pensées. Quand est-ce que Kyoko allait revenir pour le sauver ? Il rit intérieurement tel un homme fou. Ouais, c'était la seule à pouvoir le sauver à cet instant.

Même en étant blessé, il ne pouvait pas s'empêcher de penser à elle. Cela devait être l’œuvre de Dieu cherchant à le punir pour ses péchés. Il savait bien que si Toya apprenait toute la vérité, il ne serait pas vivant en ce moment.

Les autres, dont Toya, avaient toujours pensé qu'il voulait Suki uniquement parce que c'était ce qu'il voulait qu'ils pensent. Suki ne voulait pas d'histoire d'amour et cela faisait d'elle une bonne cible... jouant un rôle important dans son mensonge sans le savoir. Il commença à se rendormir tandis que des visions de Kyoko dans ses bras apparaissaient dans son esprit.

*****

Kyoko marchait lentement vers l'autel de la jeune fille avec des sentiments partagés. Pourquoi Toya s'était-il enfui ? Et maintenant, elle avait l'impression d'être égoïste car elle avait laissé les autres s'inquiéter aussi longtemps. Elle pensait juste que Toya leur aurait raconté les événements. Tout cela commençait à être hors de contrôle. Ils devaient toujours trouver le talisman dispersé et Hyakuhei était quelque part, probablement en train de planifier leurs morts. À cet instant, tout le groupe semblait se séparer.

Toya observait Kyoko alors qu'elle se dirigeait vers l'autel. Il avait senti son arrivée et l'avait cherchée, puis avait remarqué que Shinbe n'était pas avec elle. Le gardien d'améthyste était donc toujours dans le temps de Kyoko... et maintenant, elle semblait retourner vers lui.

Depuis son retour, Toya était resté dans une grotte pas très loin. Il ne regrettait pas la bagarre contre Shinbe, mais il n'avait pas voulu le blesser autant que cela. Est-ce que Kyoko le croirait ? Ses orbes dorés l'observaient du sommet sombre d'un arbre. Il savait qu'il devait lui parler avant de repartir aux côtés de Shinbe.

Kyoko leva les yeux, réalisant qu'elle était déjà au cœur du temps. Elle avait été tellement perdue dans ses pensées qu'elle n'avait même pas fait attention. Elle soupira, puis leva le menton pour rassembler son courage et décida qu'elle discuterait avec Shinbe à son retour.

Kyoko s'arrêta en plein chemin en voyant un mouvement rapide du coin de l’œil. Avant de pouvoir cligner des yeux, Toya se tenait entre elle et l'autel. Il la regardait d'un air envoûté à travers sa frange rebelle qui était tombée pour cacher ses yeux, ses cheveux et ses vêtements flottant toujours à cause de l'atterrissage rapide.

Il pouvait faire les choses les plus étranges que le corps entier de Kyoko s'illuminerait comme si une onde de choc électrique la traversait. La poignée de papillons voletant dans son estomac semblait être dans une frénésie d'accouplement. Elle ne savait ni quoi dire, ni quoi faire, alors elle resta immobile en essayant de lire son visage. Elle pouvait voir toutes sortes d'émotions, de la culpabilité à la colère... même une touche de dépression.

Retrouvant finalement sa voix, même si elle avait une touche de peur selon elle, elle prit la parole :

 Je... Toy...ya ?

Ses yeux s'élargirent lorsqu'il leva brusquement la tête et que son regard croisa le sien. Kyoko ne voulait pas faire un pas en arrière mais elle l'avait quand même fait. Lorsqu'elle remarqua qu'il plissait les yeux face à son geste, elle se figea pour lui faire face. Timidement, elle fit un pas en avant pour lui faire savoir qu'elle n'avait pas peur de lui.

Toya l'observait silencieusement, sentant de la peur en elle. Lorsqu'elle avait reculé, cela l'avait rendu furieux au point de sentir son sang chauffer. Il attendait de voir ce qu'elle allait faire et se calma en la voyant s'approcher de nouveau, réduisant la distance qu'elle avait créée. Il ne voulait pas qu'elle eût peur de lui.

 Kyoko, dit-il d'une voix ferme et sévère. Tu sais que je ne te ferais jamais de mal.

Il serra ses poings sur ses flancs.

 Je sais que tu le sais.

Sa voix était exigeante.

Kyoko mordit sa lèvre inférieure en entendant la tension dans sa voix. Ouais, elle savait qu'il ne lui ferait pas de mal volontairement... mais elle se souvenait également que Hyakuhei avait fait quelque chose à son sang qui l'avait rendu extrêmement dangereux lorsqu'il était furieux. Gardant une respiration régulière, elle commença à s'avancer lentement vers lui.

 Où étais-tu ?

Toya pouvait entendre l'inquiétude dans sa voix et ses yeux s'élargirent, s'interrogeant. S'était-elle inquiétée pour lui ? Il s'était dit qu'elle le détesterait simplement, après ce qu'il avait fait. Il s'était rendu malade en y pensant.

 Comment va... Shinbe ?

Il serra les dents en prononçant son nom.

Kyoko fronça les sourcils.

 Il va s'en remettre. Mais il faudra du temps avant qu'il puisse revenir. Je n'ai même pas pu lui demander ce qui s'était passé, donc dis-le-moi. Pourquoi as-tu... fait ça ?

Sa voix devint inaudible un instant, puis elle chuchota :

 Suki et les autres pensaient qu'il était mort.

Elle éleva la voix d'un cran en prenant un ton accusateur.

 Tu aurais pu au moins leur dire où il était.

Elle regarda la statue de la jeune fille derrière lui, évitant son regard. La crudité de ses yeux était trop insupportable pour elle.

Toya avait froid et chaud en même temps. Cette sensation était dérangeante. Tout ce qu'il avait en tête, c'était qu'elle le détesterait, et c'était la seule chose qu'il ne pouvait pas supporter. Il avait également du mal à digérer le fait de l'imaginer seule avec Shinbe dans son temps. Surtout après les choses que son frère avait dites. C'était comme s'il la menaçait.

Kyoko observait les émotions changeantes dans ses yeux dorés qui s'assombrissaient à présent avec réflexion. Il était incroyablement calme, ce qui commençait à lui faire peur. Elle s'avança de quelques pas, comme si elle allait le dépasser pour rejoindre l'autel, mais il se déplaça pour lui bloquer le passage, ce qui la secoua encore plus.

 Ã‰coute, si tu ne veux rien dire, je n'ai plus qu'à retourner auprès de ton frère Shinbe pour voir les dégâts que tu as causés, lui cria-t-elle.

Toya ne pouvait pas le supporter. En un clin d’œil, il la tenait, la piégeant dans ses bras, son instinct lui disant de ne pas la laisser retourner dans le cœur du temps... près du gardien indigne de confiance.

 Kyoko, attends.

Sa voix était toujours un peu rude et il essaya de l'adoucir en sentant Kyoko se raidir.

 Kyoko, tu ne connais pas la raison de notre bagarre. Tu ne sais pas ce qu'il a dit. Tu ne peux pas lui faire confiance. Je ne lui fais pas confiance. Il a changé, et je n'aime pas ça.

Kyoko sentit ses bras se resserrer autour d'elle, et elle savait qu'il était sérieux. Toya ne lui avait jamais menti... mais cela n'avait aucun sens. Elle essaya de se pencher en arrière dans ses bras pour le regarder dans les yeux.