Czytaj książkę: «Henri VI. 1»
NOTICE SUR LES PREMIÈRE, SECONDE ET TROISIÈME PARTIES DE HENRI VI
Les trois parties de Henri VI ont été, parmi les éditeurs et commentateurs de Shakspeare, un sujet de controverse qui n'est point encore éclairci, ni peut-être même épuisé; plusieurs d'entre eux ont pensé que la première de ces pièces ne lui appartenait en aucune façon; d'autres, en moindre nombre, lui ont aussi disputé l'invention originale des deux dernières, que, selon eux, il n'aurait fait que retoucher, et dont la conception primitive appartiendrait à un ou à deux autres auteurs. Aucune des trois pièces n'a été imprimée du vivant de Shakspeare, ce qui ne prouve rien, car il en est de même de plusieurs autres ouvrages dont personne ne conteste l'authenticité, mais ce qui laisse du moins toute latitude au doute et à la discussion.
La faiblesse générale de ces trois compositions, où l'on ne trouve qu'un petit nombre de scènes qui rappellent la touche du maître, ne serait pas non plus un motif suffisant pour les attribuer à une autre main que la sienne; car, dans le cas où elles lui appartiendraient, ce seraient ses premiers ouvrages: circonstance qui expliquerait assez leur infériorité, du moins en ce qui regarde la conduite du drame, la liaison des scènes, l'art de soutenir et d'augmenter progressivement l'intérêt, en ramenant toutes les diverses parties de la composition à une impression unique qui s'avance et s'accroît, comme le fleuve grossit à chaque pas des eaux que lui envoient les divers points de l'horizon. Tel est en effet le caractère de Shakspeare dans ses grandes compositions, et ce qui manque essentiellement aux trois parties de Henri VI, surtout à la première. Mais ce qui y manque également, ce sont les défauts de Shakspeare, cette recherche, cette emphase auxquelles il n'a pas toujours échappé dans ses plus beaux ouvrages, résultat presque nécessaire de la jeunesse des idées qui, étonnées pour ainsi dire d'elles-mêmes, ne savent comment épuiser le plaisir qu'elles trouvent à se produire; il serait étrange que les premiers essais de Shakspeare en eussent été exempts.
Il faut cependant distinguer ici, entre les trois parties de Henri VI, ce qui concerne la première à laquelle on croit que Shakspeare a été presque entièrement étranger, et ce qui a rapport aux deux autres dont on ne lui dispute que l'invention et la composition originale, en reconnaissant qu'il les a considérablement retouchées. Voici les faits.
En 1623, c'est-à-dire sept ans après la mort de Shakspeare, parut la première édition complète de ses oeuvres. Quatorze de ses pièces seulement avaient été imprimées de son vivant, et les trois parties de Henri VI n'étaient pas du nombre; elles parurent en 1623, dans l'état où on les donne aujourd'hui, et toutes trois attribuées à Shakspeare, quoique déjà, à ce qu'il paraît, une espèce de tradition lui disputât la première. D'un autre côté, dès l'an 1600, avaient été publiées, sans nom d'auteur, par Thomas Mellington, libraire, deux pièces intitulées, l'une The first part of the contention of the two famous houses of York and Lancaster, with the death of the good duke Humphrey, etc. 1; l'autre: The true tragedy of Richard duke of York and death of good king Henry the sixth 2. De ces deux pièces, l'une a servi de moule, si on peut s'exprimer ainsi, à la seconde partie de Henri VI, l'autre à la troisième. La marche et la coupe des scènes et du dialogue s'y retrouvent à quelques légères différences près; des passages entiers ont été transportés textuellement des pièces originales dans celles que nous a données Shakspeare sous le nom de Seconde et troisième partie de Henri VI. La plupart des vers ont été simplement retouchés, et quelques-uns seulement, en assez petit nombre, ont été entièrement ajoutés.
En 1619, c'est-à-dire trois ans après la mort de Shakspeare, ces deux pièces originales furent réimprimées par un libraire nommé Pavier, et cette fois avec le nom du poëte. Dès lors s'établit parmi les critiques l'opinion qu'elles appartenaient à Shakspeare, et devaient être regardées, soit comme une première composition qu'il avait lui-même revue et corrigée, soit comme une copie imparfaite prise à la représentation, et livrée en cet état à l'impression; ce qui arrivait assez souvent, dans ce temps-là, les auteurs étant peu dans l'usage de faire imprimer leurs pièces. Cette dernière opinion a été longtemps la plus générale; cependant elle ne peut guère soutenir l'examen, car, comme l'observe M. Malone, celui de tous les commentateurs qui a jeté le plus de jour sur la question, un copiste maladroit retranche et estropie, mais il n'ajoute pas; et les deux pièces originales contiennent des passages, même quelques scènes assez courtes, qui ne se retrouvent plus dans les autres. D'ailleurs, rien n'y porte l'empreinte d'une copie mal faite; la versification en est régulière, le style en est seulement beaucoup plus prosaïque que celui des passages qui appartiennent indubitablement à Shakspeare: d'où il résulterait que le copiste aurait précisément omis les traits les plus frappants, les plus propres à saisir l'imagination et la mémoire.
Resterait donc seulement la supposition d'une première ébauche, perfectionnée ensuite par son auteur. Entre les preuves de détail qu'amasse M. Malone contre cette opinion, et qui ne sont pas toutes également concluantes, il en est une cependant qui mérite d'être prise en considération, c'est que les pièces originales sont évidemment tirées de la chronique de Hall, tandis que c'est Hollinshed qu'a toujours suivi Shakspeare, ne prenant jamais de Hall que ce qu'en a copié Hollinshed. Il n'est pas vraisemblable que, s'il eût puisé dans Hall ses premiers ouvrages, il eût ensuite quitté l'original pour le copiste.
Ces deux opinions rejetées, il faut supposer que Shakspeare aurait emprunté sans scrupule, à l'ouvrage d'un autre, le fond et l'étoffe qu'il aurait ensuite enrichis de sa broderie; ses nombreux emprunts aux auteurs dramatiques de son temps rendent cette supposition très-facile à admettre, et voici un fait qui, dans cette occasion spéciale, équivaut presque à une preuve de sa légitimité. Et d'abord il faut savoir que les deux pièces originales imprimées en 1600 existaient dès 1593, car on les trouve à cette époque enregistrées sous le même titre, et avec le nom du même libraire, dans les registres du stationer, espèce de syndic de la corporation des libraires, imprimeurs, etc., patenté par le gouvernement, et chargé de l'annonce des ouvrages destinés à l'impression. Quelle cause retarda jusqu'en 1600 la publication de ces deux pièces, c'est ce qu'il est inutile en ce moment de discuter; mais cette preuve de l'ancienneté de leur existence acquiert, dans la question qui nous occupe, une importance assez grande par le passage suivant d'un pamphlet de Green 3, auteur très-fécond mort au mois de septembre 1592. Dans ce pamphlet, écrit peu de temps avant sa mort, et imprimé aussitôt après, comme il l'avait ordonné par son testament, Green adresse ses adieux et ses conseils à plusieurs de ses amis, littérateurs comme lui; l'objet de ses conseils est de les détourner de travailler pour le théâtre, s'ils veulent éviter les chagrins dont il se plaint. Un des motifs qu'il leur donne, c'est l'imprudence qu'il y aurait à eux de se fier aux acteurs; car, dit-il, «il y a là un parvenu, corbeau paré de nos plumes, qui, avec son coeur de tigre recouvert d'une peau d'acteur 4, se croit aussi habile à enfler (to bombaste) un vers blanc que le meilleur d'entre vous, et devenu absolument un Johannes factotum, est, dans sa propre opinion, le seul shake-scene 5 du pays.» Ce passage ne laisse aucun doute sur les emprunts faits à Green par Shakspeare dès 1592; et comme les Henri VI sont les seules pièces de notre poëte qu'on croie pouvoir placer avant cette époque, la question paraîtrait à peu près résolue; en même temps que la citation faite par Green, à cette occasion, d'un vers de la pièce originale, prouverait que c'était là ce qui lui tenait au coeur. Il est donc assez vraisemblable que Shakspeare, acteur alors et n'exerçant encore l'activité de son génie qu'au profit de sa troupe, aura essayé de remettre au théâtre, avec plus de succès, des pièces déjà connues, et dont le fond lui présentait quelques beautés à faire valoir. Les pièces appartenant alors, selon toute apparence, aux comédiens qui les avaient achetées, l'entreprise était naturelle, et le succès des Henri VI aura été probablement le premier indice sur la foi duquel un génie qui ignorait encore ses propres forces aura osé s'élancer dans la carrière.
Pour s'expliquer ensuite comment Shakspeare, reprenant ainsi en sous oeuvre les deux pièces dont il a fait la seconde et la troisième partie de Henri VI, n'aurait pas fait le même travail sur la première, il suffirait de penser que cette première partie était alors en possession du théâtre avec un succès assez grand pour que l'intérêt des acteurs n'y demandât aucun changement. Cette supposition est appuyée par un passage d'un pamphlet de Thomas Nashe 6 où parlant du brave Talbot: «Combien, dit-il, se serait-il réjoui de penser «qu'après avoir reposé deux cents ans dans la tombe, il triompherait de nouveau sur le théâtre, et que ses os seraient embaumés de nouveau (en différentes fois) des larmes de dix mille spectateurs au moins, qui le verraient tout fraîchement blessé dans la personne du tragédien qui le représente!» Nashe, intime ami de Green, n'aurait probablement pas parlé sur ce ton d'une pièce de Shakspeare, et peut-être est-ce le succès même de cette pièce qui aura engagé Shakspeare à rendre les deux autres dignes de le partager; mais, dans cette supposition même, il serait difficile de ne pas croire que, soit avant, soit plus tard, Shakspeare n'ait pas relevé, par quelques touches, le coloris d'un ouvrage qui n'avait pu plaire à ses contemporains que parce que Shakspeare ne s'était pas encore montré. Ainsi, les scènes entre Talbot et son fils doivent être de lui, ou bien il faudrait croire qu'avant lui existait, en Angleterre, un auteur dramatique capable d'atteindre à cette touchante et noble vérité dont bien peu, après lui, ont entrevu le secret. Rien n'est plus beau que cette peinture des deux héros, l'un mourant, l'autre à peine né à la vie des guerriers; le premier, rassasié de gloire, et, dans son anxiété paternelle, occupé de sauver plutôt la vie que l'honneur de son fils; l'autre, sévère, inflexible, et ne songeant à prouver son affection filiale que par la mort qu'il est déterminé à chercher auprès de son père, et par le soin qu'il aura de conserver ainsi l'honneur de sa race. Cette situation, variée par toutes les alternatives de crainte et d'espérance que peuvent offrir les chances d'une bataille où le père sauve son fils, où le fils est ensuite tué loin de son père, offre presqu'à elle seule l'intérêt d'un drame, et tout porte à croire que Shakspeare ajouta cet ornement à une pièce que son étroite connexion avec celles qu'il avait refaites associait pour ainsi dire à ses oeuvres. Il faut remarquer d'ailleurs que les scènes entre Talbot et son fils sont presque entièrement en vers rimés, ainsi qu'il s'en trouve un grand nombre dans les ouvrages de Shakspeare, tandis que, dans le reste de la pièce, et dans les deux pièces qui paraissent destinées à lui faire suite, il ne se trouve presque aucune rime. La scène qui, dans la première partie de Henri VI, en contient le plus est celle où l'on voit Mortimer mourant dans sa prison; aussi pourrait-on penser qu'elle a reçu au moins des additions de la main de Shakspeare: ces additions et quelques autres peut-être, bien qu'en petit nombre, auront pu fournir, aux éditeurs de 1623, une raison qui leur aura paru suffisante pour ranger, au nombre des ouvrages d'un poëte qui avait tué tous les autres, une pièce qui devait tout son mérite à ce qu'il y avait ajouté, et qui se joignait d'ailleurs nécessairement à deux autres ouvrages où il avait trop mis du sien pour qu'on pût les retrancher de ses oeuvres.
Quant à l'insertion du nom de Shakspeare dans l'édition, donnée par Pavier, des deux pièces originales, il est aisé de l'expliquer par une fraude de libraire, fraude extrêmement commune alors, et qui a été pratiquée à l'égard de plusieurs ouvrages dramatiques composés sur des sujets qu'avait traités Shakspeare, et qu'on espérait vendre à la faveur de son nom. Ce qui rend la chose encore plus vraisemblable, c'est que cette édition est sans date, bien qu'on sache qu'elle parut en 1619, ce qui pouvait être une petite habileté du libraire pour laisser croire qu'elle avait paru du vivant de l'auteur dont il empruntait le nom.
On ignore l'époque précise de la représentation de la première partie de Henri VI, qui, selon Malone, a d'abord porté le nom de Pièce historique du roi Henri VI 7. Le style de cette pièce, excepté ce qu'on peut attribuer à Shakspeare, porte le même caractère que celui de tous les ouvrages dramatiques de cette époque qui ont précédé ceux de notre poëte, une construction grammaticale fort irrégulière, le ton assez simple mais sans noblesse, et la versification assez prosaïque. L'intérêt, assez médiocre quoique la pièce offre un grand mouvement, est d'ailleurs fort diminué pour nous par la ridicule et grossière absurdité du rôle de Jeanne d'Arc, qui du reste peut nous donner l'idée la plus exacte du sentiment avec lequel les chroniqueurs anglais ont écrit l'histoire de cette fille héroïque, et des traits sous lesquels ils l'ont représentée: en ce sens, la pièce est historique.
La seconde partie de Henri VI, beaucoup plus intéressante que la première, n'est pas conduite avec beaucoup plus d'art; des monologues y sont continuellement employés à exposer les faits; les sentiments s'expriment dans des aparté. Les scènes, séparées par des intervalles considérables (la pièce entière renferme un espace de dix ans), ne présentent entre elles aucun lien; on n'y aperçoit aucun de ces efforts que Shakspeare a faits, dans la plupart de ses autres ouvrages, pour les unir, quelquefois même aux dépens de la vraisemblance; et comme en même temps rien n'avertit de ce qui les sépare, on est souvent étonné de se trouver, sans l'avoir remarqué, transporté à des années de distance de l'événement qu'on vient de voir finir. Les diverses parties de la pièce ne tiennent pas non plus essentiellement les unes aux autres, défaut très-rare dans les ouvrages incontestablement reconnus pour être de la main de Shakspeare. Ainsi l'aventure de Simpcox est absolument hors d'oeuvre; celle de l'armurier et de son apprenti ne se rattache que faiblement au sujet, et les pirates qui mettent Suffolk à mort ne se rattachent en rien au reste de l'intrigue. Quant à la partie des caractères, il s'en faut de beaucoup qu'elle réponde au talent ordinaire de Shakspeare; on ne peut nier qu'il n'y ait du mérite dans la peinture de Henri, ce prince dont les sentiments pieux et la constante bonté parviennent presque toujours à nous intéresser malgré le ridicule de cette faiblesse et de cette pauvreté d'esprit qui touchent à l'imbécillité: le rôle de Marguerite est assez bien soutenu; mais cet excès de fausseté envers son mari sort des bornes de la vraisemblance, et ce n'est pas Shakspeare, du moins dans son bon temps, qui eût donné, à deux criminels tels que Marguerite et Suffolk, des sentiments aussi tendres que ceux de leur dernière entrevue. Pour Warwick et Salisbury, ce sont deux caractères sans aucune espèce de liaison, et impossibles à expliquer.
Que Shakspeare soit ou non l'auteur de la pièce intitulée: The first contention, etc., la seconde partie de Henri VI est entièrement calquée sur cet ouvrage. Shakspeare n'en a cependant pris textuellement qu'une assez petite partie, et particulièrement les scènes coupées en dialogue rapide, comme celle de l'aventure de Simpcox, le combat des deux artisans, la dispute de Glocester et du cardinal à la chasse; il a fait peu de changements dans ces morceaux, ainsi que dans une partie de la révolte de Cade. Cependant cette scène d'un horrible effet, où l'on voit le lord Say entre les mains de la populace, est presque entièrement de Shakspeare. Quant aux discours un peu longs, il les a plus ou moins retouchés, et la plupart même lui appartiennent entièrement, comme ceux de Henri en faveur de Glocester, ceux de Marguerite à son mari, une grande partie de la défense de Glocester, des monologues d'York, et presque tout le rôle du jeune Clifford. Il n'est pas difficile d'y reconnaître la main de Shakspeare, à une poésie plus hardie, plus brillante d'images, moins exempte peut-être de cet abus d'esprit que Shakspeare ne paraît pas avoir emprunté aux poëtes dramatiques de l'époque. Du reste, sauf un certain nombre d'anachronismes communs à tous les ouvrages de Shakspeare, celui-ci est assez fidèle à l'histoire, et la lecture des chroniques a donné, en ce temps, aux auteurs de pièces historiques un caractère de vérité et des moyens d'intérêt que les hommes supérieurs peuvent seuls tirer des sujets d'invention.
La troisième partie de Henri VI comprend depuis le printemps de l'année 1455 jusqu'à la fin de l'année 1471, c'est-à-dire un espace d'environ seize ans, pendant lesquels ont été livrées quatorze batailles qui, selon un compte probablement très-exagéré, ont coûté la vie à plus de quatre-vingt mille combattants. Aussi le sang et les morts ne sont-ils pas épargnés dans cette pièce, bien que, de ces quatorze batailles, on n'en voie ici que quatre, auxquelles l'auteur a eu soin de rapporter les principaux faits des quatorze combats: ces faits sont, pour la plupart, des assassinats de sang-froid accompagnés de circonstances atroces, quelquefois empruntées à l'histoire, quelquefois ajoutées par l'auteur ou les auteurs. Ainsi la circonstance du mouchoir trempé dans le sang de Rutland, et donné à son père York pour essuyer ses larmes, est purement d'invention; le caractère de Richard est également d'invention dans cette pièce et dans la précédente. Richard était beaucoup plus jeune que son frère Rutland dont on l'a fait l'aîné, et il ne peut avoir eu aucune part aux événements sur lesquels se fondent les deux pièces; son caractère y est d'ailleurs bien annoncé et bien soutenu. Celui de Marguerite ne se dément point; et celui de Henri, à travers les progrès de sa faiblesse et de son imbécillité, laisse encore apercevoir de temps en temps ces sentiments doux et pieux qui ont jeté sur lui de l'intérêt dans la première partie. Ces portions de son rôle appartiennent entièrement à Shakspeare, ainsi que la plus grande partie des méditations de Henri pendant la bataille de Towton, son discours au lieutenant de la Tour, sa scène avec des gardes-chasse, etc.; ces morceaux ne se trouvent point ou sont à peine indiqués dans la pièce originale. Il est aisé de reconnaître les passages ajoutés, car ils se distinguent par un charme et une naïveté d'images que n'offre nulle part ailleurs le style de l'ouvrage original. Quelquefois aussi les endroits retouchés par Shakspeare, soit sur son ouvrage, soit sur celui d'un autre, se font remarquer par la recherche d'esprit qui lui est familière, et qui n'est pas ici compensée par cette conséquence et cette cohérence des images qui, dans ses bons ouvrages, accompagnent presque toujours ses subtilités. C'est ce qu'on peut remarquer, par exemple, dans les regrets de Richard sur la mort de son père; il serait difficile de les attribuer à d'autres qu'à Shakspeare, tant ils portent son empreinte; mais il serait également difficile de les attribuer à ses meilleurs temps, et leur imperfection pourrait servir encore à prouver que les trois parties de Henri VI, telles que nous les avons aujourd'hui, nous offrent, non pas Shakspeare corrigé par lui-même dans la maturité de son talent, mais Shakspeare employant le premier essai de ses forces à corriger les ouvrages des autres. Il a au reste beaucoup moins retouché cette pièce-ci que la précédente, qui probablement lui a paru plus digne de ses efforts; excepté le discours de Marguerite avant la bataille de Tewksbury, une partie de la scène d'Édouard avec lady Gray, et quelques autres passages peu importants, on n'en peut guère ajouter d'autres à ceux qui ont déjà été cités comme appartenant entièrement à l'ouvrage corrigé. La plus grande partie de la pièce originale y est textuellement reproduite; on y retrouve de même le décousu qui a pu frapper dans la première et la seconde partie. Les horreurs accumulées dans celle-ci ne laissent pas d'être peintes avec une certaine énergie, mais bien éloignée de cette vérité profonde que, dans ses beaux ouvrages, Shakspeare a su, pour ainsi dire, tirer des entrailles mêmes de la nature.
PERSONNAGES
LE ROI HENRI VI.
LE DUC DE GLOCESTER, oncle du roi, et protecteur.
LE DUC DE BEDFORD, oncle du roi, et régent de France.
THOMAS DE BEAUFORT, duc d'Exeter, grand-oncle du roi.
HENRI DE BEAUFORT, grand-oncle du roi, évêque de Winchester et ensuite cardinal.
JEAN DE BEAUFORT, duc de Somerset.
RICHARD PLANTAGENET, fils aîné de Richard, premièrement
comte de Cambridge, ensuite duc d'York.
LE COMTE DE WARWICK.
LE COMTE DE SALISBURY.
LE COMTE DE SUFFOLK.
LORD TALBOT, ensuite comte de Shrewsbury.
JEAN TALBOT, son fils.
EDMOND MORTIMER, comte des Marches.
LE GEOLIER DE MORTIMER.
UN HOMME DE LOI.
SIR JEAN FASTOLFFE.
SIR WILLIAM LUCY.
SIR WILLIAM GLANSDALE.
SIR THOMAS GARGRAVE.
WOODVILLE, lieutenant de la Tour de Londres.
LE LORD MAIRE de Londres.
VERNON, de la rose blanche, ou faction d'York.
BASSET, de la rose rouge, ou faction de Lancastre.
CHARLES, dauphin, depuis roi de France.
RENÉ, duc d'Anjou, et roi titulaire de Naples.
LE DUC DE BOURGOGNE.
LE DUC D'ALENÇON.
LE BATARD D'ORLÉANS.
LE GOUVERNEUR DE PARIS.
LE MAITRE CANONNIER de la ville d'Orléans, et son fils.
LE GÉNÉRAL des troupes françaises à Bordeaux.
UN SERGENT français.
UN PORTIER.
UN VIEUX BERGER, père de Jeanne d'Arc, la Pucelle.
MARGUERITE, fille de René, et ensuite femme de Henri VI,
et reine d'Angleterre.
JEANNE, la Pucelle, dite communément Jeanne d'Arc.
DÉMONS aux ordres de la Pucelle.
LA COMTESSE D'AUVERGNE.
Lords, gardiens de la tour, hérauts, capitaines, soldats,
courriers, et autres suivants, tant anglais que français.
La scène est tantôt en Angleterre, tantôt en France.
Allusion à un vers de l'ancienne pièce The first part of the contentions, etc.
O tyger's heart wrapt in a woman's hide
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